Listedes 2729 décès survenus sur la commune de Caen pour l'année 2014.Pour cette année, l'age moyen de décès sur Caen est de 74 ans. 318 caennais sont nés et morts sur la commune. Pour des décès antérieurs ou ultérieurs, vous pouvez consulter les acte de décès de 2022 , 2021 , 2020 , 2019 , 2018 , 2017 , 2016 , 2015 , 2013 , 2012 , 2011 , 2010 , 2009 , 2008 , 2007 , 2006 et 2005 .
Carnet et annonces mortuaires 61 - Orne Vous pouvez chercher un avis de décès dans l'une des villes suivantes Flers, Argentan, Sées, Saint-Germain-du-Corbéis, Domfront, Vimoutiers, Mortagne-au-Perche, La Ferté-Macé, Alençon Rechercher un avis Un ou plusieurs critères au choix Liste des journaux offrant un carnet dans le département Orne Régionaux Avis d'obsèques Le Journal de l'Orne Avis deces Le Perche Avis de décès Le Réveil Normand Deuil Le Publicateur Libre Carnet L'Orne Combattante Carnet L'Orne Hebdo Deuil Ouest France Convois funéraires parution web Nationaux Carnet Aujourd'hui en France Convois funéraires parution web Annonce décès La Croix Avis de décès Le Figaro Carnet du jour Libération Annonce décès Le Monde L'Orne est un département français de la région Basse-Normandie, il est essentiellement rural, le nombre d'habitants des 505 communes du département est de 292 964 personnes. C’est le département le moins peuplé de Basse-Normandie, avec une densité de 48,00 hab. /km², pour une surface de 6 103,4 km². Le taux de croissance démographique de l’Orne stagne, si la natalité se maintient avec un taux positif de plus ou moins 0,1 %, avec 3 105 naissances pour 3 123 décès en 2011. Le taux de migration est quant à lui négatif, de l’ordre de %, avec plus de personnes qui quittent le territoire que de ceux qui s’installent, ce qui démontre que le département n’est pas attractif, aussi à cause de l’attrait que suscite des villes comme Caen, le Mans, pour les jeunes actifs, ainsi que l’agglomération parisienne qui est à seulement de deux heures de voiture. L’Orne a 3 villes qui dépassent les 10 000 habitants, Alençon, Flers et Argentan. Parmi les journaux diffusés dans l'ensemble du département figure Ouest France ouest france décès, avis obseques et actualités Statistiques & Infos pratiques - Orne Naissances et décès domiciliés 20132014201520162017 Décès 3 316 3 298 3 285 3 359 3 309 Naissances 2 834 2 810 2 675 2 643 2 495 Toutes les données sont en géographie au 01/01/ Insee, statistiques de l'état civil. Statistiques du departement Population 1999 292 337 habitants Population 2006 292 879 habitants Superficie 6 km ² Densité de population habs/km² Variation de densité + %/an Administration du departement Numéro 61 Préfecture Alençon Sous-préfectures Argentan Montagnon-au-Perche Région Basse-Normandie 25 Subdivisions du departement Arrondissements 3 Cantons 40 Communes 505 Pour vos démarches administratives, voir les mairies de Mairie d’AlençonPlace FochAlençon02 33 32 40 Mairie d’ArgentanPlace du Docteur CouinaudArgentan02 33 36 40 Mairie de Mortagne-au-Perche22, place Général De GaulleMortagne-au-Perche02 33 85 11 11 Vous pouvez chercher un avis de décès dans l'une des villes suivantes 925 journaux ou éditions24H sur 24, 7 jours sur 7Paiement sécurisé en 1 ou 3 fois sans frais 848 Témoignages clients Satisfaction 4,2 sur 5 sur 848 témoignages Avis de décès Publication web est le 1er site de publication d'avis de décès dans la presse française. Egalement l'un des plus consulté en France pour les avis de décès.
Formatde téléchargement: : Texte Vues 1 à 69 sur 69. Nombre de pages: 69 Notice complète: Titre : Liste officielle des prisonniers de guerre français : d'après les renseignements fournis par l'autorité militaire allemande : nom, date et lieu de naissance, unité / Centre national d'information sur les prisonniers de guerre Auteur : Centre national d'information sur les prisonniers
Présentation de l'établissement Quelles sont les informations pratiques à connaître sur l’agence de pompes funèbres GAUQUELIN ? L’entreprise pompes funèbres GAUQUELIN est située dans la ville de Condé-sur-Noireau, dans le département du Calvados 14. Elle est située à l’adresse suivante 120 rue Saint Martin, 14110 Condé-sur-Noireau Les horaires d’ouverture sont les suivants lundi 0900–1215, 1400–1900 mardi 0900–1215, 1400–1900 mercredi 0900–1215, 1400–1900 jeudi 0900–1215, 1400–1900 vendredi 0900–1215, 1400–1900 samedi 0900–1900 Permanence décès 24/24h 7/7j Le gérant de l’agence est M. Sylvain GAUQUELIN Services de l'agence Quels services propose l’agence de pompes funèbres GAUQUELIN ? Dans le but de toujours mieux aider les personnes confrontées à un décès, l’agence de pompes funèbres GAUQUELIN propose un panel de services funéraires qui se veut le plus complet possible Diverses démarches administrativesMise en bièreToilette mortuaire et habillageSoins de conservation réalisés par un thanatopracteur diplôméConvoi funéraireTransport de corpsTransfert de corpsInhumation / crémationMaître de cérémonieCérémonies civiles et religieusesRapatriement depuis et vers l’étranger Quels produits propose l’agence de pompes funèbres GAUQUELIN ? L’agence pompes funèbres GAUQUELIN ne se contente pas de prendre en charge uniquement les services funéraires minimum. Pour accompagner toujours plus les familles endeuillées, elle s’occupe de leur fournir de nombreux produits indispensables avant, pendant et après les obsèques proprement dites Plaque funéraireCercueilCouronne de fleursCaveauPierre tombaleMonument funéraireUrne funéraire Qu’est-ce qui distingue l’agence de pompes funèbres GAUQUELIN des autres ? L’agence de pompes funèbres GAUQUELIN peut se vanter de proposer un large éventail de prestations liées à la marbrerie funéraire création de monuments, gravures, entretien des sépultures, terrassement, réfection, rafraîchissement, travaux de cimetière… Monuments cinéraires Soins de conservation Transport défunt Accessoires funéraires et urnes Organisation funéraire Prestations en marbre Avis de décès en ligne Demande de devis en ligne Jours de permanence Corbillards Fournitures funéraires cercueils, urnes Supply Personnel Items Services Transport de corps avant inhumation Prix moyen des obsèques dans le departement Tarifs moyens pour l'inhumation Voir le détail Fermer Frais avancés pour le compte de la famille Prestations courantes Voir le détail Démarches & formalités 238 € Ouverture / fermeture caveau porte 380 € Toilette mortuaire préparation et habillage du défunt 169 € Corbillard et chauffeur convoi funéraire 298 € Cercueil avec cuvette étanche et quatre poignées standard 691 € Personnel pour inhumation 116 € Prestations complémentaires optionnelles Voir le détail Maître de cérémonie 165 € Prestations courantes Prestations complémentaires optionnelles Frais avancés pour le compte de la famille Cérémonie funéraire Frais de culte 180 € Porteurs 370 € Maître de cérémonie 165 € Corbillard et chauffeur convoi funéraire 298 € Démarches & formalités Démarches & formalités 238 € Toilette mortuaire préparation et habillage du défunt 169 € Inhumation Ouverture / fermeture caveau porte 380 € Personnel pour inhumation 116 € Cercueil et Accessoires Capiton standard 85 € Cercueil avec cuvette étanche et quatre poignées standard 691 € Mise en bière Mise en bière 137 € Estimation moyenne 2829 € *sources Tarifs moyens pour la crémation Voir le détail Fermer Frais avancés pour le compte de la famille Prestations courantes Voir le détail Démarches & formalités 238 € Dispersion des cendres 44 € Toilette mortuaire préparation et habillage du défunt 169 € Corbillard et chauffeur convoi funéraire 298 € Cercueil avec cuvette étanche et quatre poignées standard 691 € Prestations complémentaires optionnelles Voir le détail Maître de cérémonie 165 € Prestations courantes Prestations complémentaires optionnelles Frais avancés pour le compte de la famille Crémation Crémation adulte 610 € Urne 66 € Dispersion des cendres 44 € Cérémonie funéraire Frais de culte 180 € Porteurs 370 € Maître de cérémonie 165 € Corbillard et chauffeur convoi funéraire 298 € Démarches & formalités Démarches & formalités 238 € Toilette mortuaire préparation et habillage du défunt 169 € Cercueil et Accessoires Capiton standard 85 € Cercueil avec cuvette étanche et quatre poignées standard 691 € Mise en bière Mise en bière 137 € Estimation moyenne 3053 € *sources *sources Quels sont les tarifs moyens des obsèques dans le département du Calvados ? À noter que les tarifs signalés dans les tableaux ci-dessus sont uniquement indicatifs. Le prix des obsèques peut en effet varier en fonction des prestations optionnelles choisies - ou non - par la famille, et en fonction de la politique suivie par l’agence les prix du funéraire n’étant pas fixés par l’État, chaque agence funéraire est donc libre d’appliquer les prix qui lui conviennent. Vous désirez connaître le prix exact des obsèques de votre proche ? N’hésitez pas à utiliser notre comparateur de devis en ligne, 100% gratuit et sans engagement. Quels sont les moyens de paiement acceptés par l’agence de pompes funèbres GAUQUELIN ? L’agence accepte les paiements en carte bleue, chèque et espèces. Accéder à l'établissement Photos de l'établissement Comparer les agences proches Avis des internautes 6 Les avis sont certifiés afin d'éviter le trucage. Ils proviennent de personnes qui ont utilisé nos services et sont passées par l'établissement. Tous les avis positifs et négatifs sont publiés. Si les notes sont bonnes, c'est que nous vous conseillons des prestataires de qualité. Si vous avez déjà utilisé nos services et êtes passé par un établissement, vous recevrez prochainement un email pour noter notre site ainsi que la prestation proposée par l’établissement. Attention, les détails des notes ne sont calculés qu'à partir des commentaires MPF Fermer Marie-pierre R. 30/04/2021 J'ai fait livrer des fleurs samedi matin pour unedéfunte dans votre établissement. J'apprends ce soir qu'aucune fleur n'a été déposée dans le salon, pas plus que celles commandées par son époux dans votre magasin funéraireNous ne les verrons peut-être qu'à l'égliseC'est de l'irrespect vis à vis de la défunte etde sa famille Fermer Nathalie M. 30/06/2018 Pour la fête des mères , j'ai fait livrer un bouquet de fleurs. 50 eurosLa vendeuse m'a assurée qu'il serait livré à 9 heures, heure à laquelle , l'aide à domicile peut s'occuper de la livraison. MAIS,La livraison n'a pas été faite chez ma mère mais dans la maison d'à côté ,inhabitée!!!On m'avait dit "oui, oui , pas de problèmes , ça sera fait, nous savons où habite votre mère!"Par le plus grand des hasards , une voisine a vu le bouquet qui prenait le soleil et a pensé qu 'il était destiné à la maison d 'à 9 heures du matin à 3 heures de l'après midi, les fleurs sont restées sur le sol devant une maison inoccupée! sous un soleil si personne ne s'était rendu dans cette maison ce jour là?Pas de fleurs pour la fête des mères?Quel manque de professionnalisme!Il ne s'agissait pas du bouquet pour personne inconnue que je Michot-Duval Derniers commentaires Marie-pierre R. 30/04/2021 J'ai fait livrer des fleurs samedi matin pour unedéfunte dans votre établissement. J'apprends ce soir qu'aucune fleu... Voir plus Nathalie M. 30/06/2018 Pour la fête des mères , j'ai fait livrer un bouquet de fleurs. 50 eurosLa vendeuse m'a assurée qu'il serait livré... Voir plus
\n\n avis de deces gauquelin condé sur noireau
OLIVIER Rosalie Fille majeure à Condé-sur-Noireau, 1812-06-03 , Lieu de résidence, renoncement au mariage, n°221- déclare à son père qu'elle ne peut renoncer à son mariage projeté avec Nicolas Le Landois. -> Voir (fleroux)
L'entreprise GAUQUELIN s'est consacrée à son travail et à l'amour de son métier depuis 1835, en commençant par l'activité de tailleur de pierre, graveur et marbrier funéraire à Condé sur Noireau. Se sont succédé de père en fils depuis 5 générations Paul GAUQUELIN, Philippe GAUQUELIN, André GAUQUELIN, Jean et Thérèse GAUQUELIN, Christian et Maryvonne GAUQUELIN, Sylvain GAUQUELIN, Maxime 1953, Thérèse GAUQUELIN crée son activité de fleuriste, puis en 1956, Jean GAUQUELIN, les pompes funèbres. En 1967, Christian GAUQUELIN intègre l'entreprise, puis crée la SARL GAUQUELIN en 1983, date à laquelle Maryvonne GAUQUELIN reprend l'activité de fleuriste ainsi que la gestion complète du magasin. En 1995, une Chambre Funéraire est créée à Condé sur Noireau, rue Motte de Lutre, avec 2 salons de présentation, s'agrandissant de 2 nouveaux salons en 2000. En 1995, Sylvain GAUQUELIN intègre l'entreprise notamment en devenant le plus jeune Thanatopracteur de France, diplômé national en 14 février 2003, la maison GAUQUELIN ouvre une succursale à Tinchebray au 118 Grande Rue, reprenant l'activité de l'entreprise BAZIN. C'est un retour au pays l'oncle de Jean GAUQUELIN était, au début des années 1900, granitier à 2005, Maxime GAUQUELIN intègre l'entreprise en tant que marbrier GAUQUELIN a reçu Le Challenge 2003 - Lauréat Conseiller Funéraire récompense attribuée par M. Philippe MARTINEAU, Président du Choix Funéraire le 08/11/ Challenge Performance 2003 Assurance-Prévoyance accordé à une entreprise développant les Contrats Obsèques récompense attribuée par M. Philippe MARTINEAU, Président du Choix Funéraire le 08/11/ Trophée Entreprise 2003 accordé à une entreprise dynamique et en évolution récompense attribuée par M. Marcel HOSTE, Président de la Chambre de Commerce et d'Industrie de CAEN le 16/01/ Prix d'Excellence 2008 - Conseiller Funéraire en Prévoyance récompense attribuée par M. Philippe MARTINEAU, Président du Choix Funéraire le 16/05/ Charte qualité Le Choix Funéraire attribuée par M. Philippe MARTINEAU, Président du Choix Funéraire le 22/04/ Trophée de l'Enseigne en 2009 attribuée par M. Philippe MARTINEAU, Président du Choix 2009 est créé un centre funéraire de 200 m² à la La Béhuetterie » à TINCHEBRAY comprenant un magasin et une chambre funéraire de 2 salons de 2009, l'activité est transférée à la SAS GAUQUELIN dont Maryvonne et Sylvain GAUQUELIN sont les compte aujourd'hui 24 salariés dont 10 porteurs vacataires.

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14110- Condé-en-Normandie (Conde Sur Noireau) Voir l'avis de décès RB. BALAIS Roger Date du décès: 04/09/2021 (83 ans) 14110 - Condé-en-Normandie (Conde Sur Noireau) Voir l'avis de décès OL. LAVALLEY Odette Née LEBOULEUX. 14110 - Condé-en-Normandie (Conde Sur Noireau) Voir l'avis de décès JO. ORIOT Jackie (80 ans) 14110 - Condé-en-Normandie (Conde Sur Après un été riche en manifestations, la commission "Foires et Marchés" de Condé-sur-Noireau, présidée par Christian... Il vous reste 90% de l'article à devez bénéficier d'un abonnement premium pour lire l'article. Abonnement sans engagement Je m'abonne Déjà abonné ? Connectez-vous Recevez l'essentiel de l'actualité chaque jour par email Condé-sur-Noireau tirage au sort Urville Réagir à cet article L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits. Connectez-vous ou créer un compte pour pouvoir commenter cet article. A lire aussi Actualités Conde-sur-Noireau. Des élèves impressionnés par la guerre 14-18 Actualités Condé-sur-Noireau. Un collège où il fait bon vivre Actualités Condé-sur-Noireau. Un cross pour la cohésion d'équipe GARCIA(GAUQUELIN) Sylviane : Sylviane GARCIA (GAUQUELIN), née en 1949 et habite MONTILLY SUR NOIREAU. Aux dernières nouvelles elle était à Masoneilan à CONDE SUR NOIREAU entre 1969 et 2009. Elle a étudié à Collège Sévigné à FLERS entre 1960 et 1966. Reminder of your requestDownloading format TextView 1 to 16 on 16Number of pages 16Full noticeTitle L'Ouest-Éclair journal quotidien d'informations, politique, littéraire, commercialPublisher [ RennesPublication date 1937-01-20Contributor Desgrées du Lou, Emmanuel 1867-1933. Directeur de publicationRelationship textType printed serialLanguage frenchFormat Nombre total de vues 135307Description 20 janvier 1937Description 1937/01/20 Numéro 14683.Description Collection numérique Fonds régional BretagneDescription Collection numérique Yroise, bibliothèque numérique de BrestRights Consultable en ligneRights Public domainIdentifier ark/12148/bpt6k6607788Source Bibliothèque nationale de FranceProvenance Bibliothèque nationale de FranceOnline date 18/01/2011The text displayed may contain some errors. The text of this document has been generated automatically by an optical character recognition OCR program. The estimated recognition rate for this document is 100%.On a pose hier à Paris la première pierre du pavillon de la Bretagne à l'Exposition de 1937 M. Gasnier-Duparc, ministre de la Marine, scelle la première pierre. Voir en c Informations régionales DRAME DE LA MER A CANCALE PARTIS EN PECHE DEPUIS TRENTE-SIX HEURES, PAR UN TEMPS EFFROYABLE. DEUX CANOTS A MOTEUR, MONTÉS CHACUN PAR TROIS HOMMES, NE SONT PAS RENTRÉS AU PORT Cascale, 19 janvier. De notre correapondant particulier. Lundi, vers 10 heures du matin, malgré le mauvais temps, cinq des canots à moteur de notre flottille cancalaite, pratiquant, la petite pèche, prenaient' le large. Vers 13* h. 30, le vent, jusqu'alors de la partie du Sud-surolt, montait ïubiteme* à l'Ouest et se mettait à •ouffler en cyclone. Un véritable coup de temps, comme il est rare d'en voir Au port de la Houle, sous Cancale, les familles des intrépides marins partis en mer se montraient justement inquiètes sur leur sort. Entre 15 h. 30 et 16 heures, trois des frêles embarcations avaient réussi. après une lutte titanesque contre les éléments déchaînés, à se réfugier a proximité du port. Malheureusement. on déplorait l'absence de deux autres barques. Il s'agissait de deux canots à moteur Le Fend-i'Onde, construit à Cancale en 1932, jaugeant 1 tonneau 89 brut. muni d'un moteur de 6 chevaux, était monté par le patron Maillard Eugene. né le 7 septembre 1897, et les matelots Leroux Francis, né le 11 septembre 1914 Devran Julien, né le 3 décem bre 1900. La France-Amélie, canot non ponté moteur de 6 chevaux. 1 tonneau 89 de jauge brute, était montée par le patron Couapel François, né le 8 no- vembre 1691 et ses matelots Verdier Jean-Marie, né le 26 juillet 1889. et Lebrun Louis, né le 12 novembre 1912. Depuis hier, malgré toutes les recherches entreprises pour', retrouver trace des canota disparus, d'abord par la grande Jjisquine La France, pui* par quatre canots à moteur de la Houle et le canot de sauvetage de SaintMalo-Saint-Servan, on reste sans aucune nouvelle à l'heure où nous transmettons ces lignes. Après une accalmie, la tempête fait rage à nouveau. Parmi les six vaillants marins disparus et déjà pleurés dans leurs familles, se trouvent quatre pères de femille, MM. Maillard, deux enfants Couapel, trois enfants Davran, un Verdier, un. Ce tragique événement de mer a causé une grosse et légitime émotion dans toute la région. Vaines recherches au large Saiht-Malo, 19 janvier de notre rédaction malouine Le Capitaine-de-Vaisseau-Recoloux et rentré ce soir à son mouillage vers 20 h. 30. Il avait accompli, sous la direction du capitaine Bourges, une vaste randonnée, allant jusqu'à Chausey et aux Minquiers, à la recherche des bateaux de Cancale. A son retour, l'équipage a déclaré n'avoir rien trouvé. M. VINCENT AURIOL PARLERA DEMAIN AU CLUB AMÉRICAIN Paris, 19 janvier. Le Journal des Débats annonce que M. Vincent Auriol, ministre des Finances, a accepté l'invitation qui lui a été faite par M. Théodore Rousseau, président du club. d'être l'hôte du Club Américain, à son déjeuner d'après demain jeudi. On se rappelle que c'est au Club Américain que M. Léon Blum prononça non premier discours politique comme chef du Gouvernement. Les déclarations du ministre des Fifiances sont attendues dans les circonstances actuelles avec un particulier intérêt. SIX DISPARUS RETROUVÉS VIVANTS DANS L'ANTARCTIQUE Lombres, 19 janvier. Un radiogramme émanant du croiseur britannique Ajax a été reçu au Foreign Office, disant que les membres de l'expédition du Discovery Il perdus dans l'Antarctique avaient été retrouvés et ramenés à bord du Discovery. Il s'agit, comme on le sait. de six officiers et marins qui avaient disparu après avoir débarqué à Esther Harbourg, dans l'Ile du Roi George, qui fait partie des Shetlands. L' Ajax avait été accompagné dans ses recherches par plusieurs baleinièfes. LES AFFAIRES D'ESPAGNE Le contre-torpilleur français ci Maillé-Brézé » qui fut bombardé par un avion au large da côte» d'Eipafne, ainsi que nous l'avons relaté hier. .jtVoir en deuxième page. Duplicité de Moscou • Paria; 19 janvier. La note jiar laquelle Moscou répond à Londres, en ce qui concerne les enrôlement» de volontaires pour l'Espagne, est vraiment fadéfendable. Elle déclare que le gouvernement soviétique ne se livre pas à l'envoi de volontaires alors que depuis des mois, le gouvernement de Valence et les autorités de Barcelone ne cessent de proclamer, avec de longues effusions de gratitude, l'aide que leur apporte la 3' Internationale On reconnaît bien, dans ces dénégations moscoutaires, le système du mensonge cynique système plus Imbécile encore que révoltant dont s'inspirent les communistes depuis l'avènement du Front populaire en France. La vérité, c'est que les nombreux soldats et techniciens russes qui se trouvent actuellement en Espagne y sont partis sur l'ordre du Komintern d'accord avec le gouvernement soviétique. Us sont la en service commandé , avec tout leur matériel. Il en est de même des Italiens et des Allemands qui combattent dans les armées Franco, direz-vous. Je le Mais que M. Litvinolf et ses compères ne viennent pas nous raconter qu'ils sont, eux. innocents de tout recrutement, de tout armement. de tout appui militaire aux marxistes espagnols 1' Le gouvernement soviétique est coupable en outre, si nous en croyons les rumeurs les plus autorisées. de la suggestion faite au gouvernement de Valence de naturaliser en massé les étrangers combattant dans les range communoanarchistes. Le procédé est simple autant que déloyal. Il prévient le rapatriement de ces étrangers pour le cas où, d'id un mois, France et Angleterre décideraient de les rappeler sous peine de condamnations sévères. Il permet de recruter sans cesse, au mépris des conventions internationales car il suffira au cabinet de Valence d'envoyer massivement en Russie, ou à Perpignan, des lisasses d'actes de naturalisation et de passeports en blanc. Les recruteurs y inscriront le nom des soi-disant volontaires, et ceux-d passeront les frontières comme de iraia Espagnols jsnfjant chss eux. ̃̃'̃'•̃ ̃ ••- '̃ Telle est l'attitude de grossière duplicité adoptée par un gouvernement que toute l'Europe se plait à considérer comme notre intime allié. C'est flattent. en vérité Hitler et Mussolini ont la partie belle et la propagande facile lorsque, lisant nos annales parlementaires et les votes de la Chambre depuis juin 1936, ils constatent que les communistes sont les soutiens fidèles de M. Blum et les animateurs d'une C. G. T. qui ést là maîtresse absolue des destins du gouvernement français Signalons enfin que Moscou se livre, depuis quelques jours, à un singulier chantage à notre égard et à l'égard de l'Angleterre. Staline fait savoir à une agence britannique qu'il considère que, depuis la remilitarisation de rhénane et la guerre espagnol. France et Grande-Bretagne sont stratégiquement beaucoup moins fortes qu'auparavant se solidariser avec elles devient, pour l'U. R. S. S., une affaire médiocre on ne pourrait conjurer l'affaiblissement commun qu'en agissant tous de concert en Espagne d'une façon Immédiate. Si Paris et Londres refusent, dit-on au Kremlin, l'U. R. S. S. se repliera sur elle-même et abandonnera à leur sort les démocraties occidentales. Le mensonge ou le bluff, la tromperie ou la menace, tels sont les procédés internes et internationaux du communisme. Son but, c'est la révolution violente au profit d'une dictature. Nous ne pouvons concevoir comment les radicaux ont pu admettre, même un Instant, l'alliance politique avec un parti qui n'a pour objet que la destruction intégrale du régime démocratique 1 DANS L'OISE UN AVION HOLLANDAIS S'ECRASE AU SOL. Ses quatre occupants sont tués Senus, 19 janvier. Cet après-midi, à 14 h. 5, un avion de tourisme hollandais immatriculé c P. H. M. A. J. » s'est écrasé sur le sol près de la commune de Pontarme. L3 chute s'était produite prts du bois de Mocreux, sur le territoire de la commune de Mont-L'Evêque. On ne trouva dans les débris de l'appareil, dont l'aile droite avait été arrachée, que deux des 'aviateurs. MM. Scenmer et Fissot. Les corps des deux autres, Adrianin Hœrtens et Jacob Maltha, furent retrouvés dans les chamns à environ 150 mètres du point de-chute. Des morceaux de l'aile de l'avion ont été découverts à 800 mètres de là. Les corps des quatre victimes ont été transportés ce soir à l'hôpital de Senlis. On attend l'arrivée du consul wénéral des Pays-Bas et du commandant Girardot, du Bourget. LES CONFLITS ÏE TRAVAIL DOIT REPRENDRE CE MATIN AUX AB A TTOIRS Le différend, aux termes de la loi, sera tranché' par arbitrage LE CONFLIT. DES ABATTOIRS PARISIENS Malgré la grève, l'activité régnait hier à l'intérieur des abattoirs. PARIS, 19 janvier. Les pourparlers engagés hier entre les patrons et employés des abattoirs ayant échoué, la grève commencée la veille continuait ce matin. Cependant, il est désormais établi que le travail reprendra demain matin. ,,Aux Halles Centrales, on déclarait, à la fin de la matinée, que la grève des abattoirs avait eu pour conséquence de faire baisser l'approvisionnement des pavillons de la boucherie. Néaninoins, grâce aux réserves, les bouchers détaillants étaient pourvus comme à l'ordinaire. Les représentants des ouvriers des abattoirs de la Seine ont été reçus à la présidence du Conseil par M. Marx Dorinoy, qui, après cette entrevue, a également reçu M. Robert Lévy, président de la Fédération des Boucheries en gros, et M. Joubin, président de la Fédération des sous-produits des abattoirs. Une réunion, commune a eu lieu ensuite souc la présidence du ministre de l'Intérieur entre les représentants patronaux et ouvriers. Au cours de cette réunion, il a été convenu ce qui suit 1° Conformément à l'article 2, paragraphe 2 de la loi du 31 décembre 1936, le travail reprendra immédiatement; 2° Les contestations qui existent actuellement entre les parties seront portées immédiatement devant un arbitre désigné par le .gouvernement. Cet arbitre rendra sa sentence le plus rapidement possible. Cette dernière, conformément à l'article 6 de la loi du 31 décembre 1936, sera publique, obligatoire et sans appel. Il n'y aura pas de renvois pour faits de grèves. L'intendant général Bernard, directeur général de l'Intendance au ministère de la Guerre, a été désigné par le Président du Conseil comme arbitre dans le conflit de la boucherie. Voir en DERNIERE HEURE n LES R1C0E0R8 DE HIVER TEMPETE DE NEIGE sur l'Allemagne Berlin, 19 janvier. Un ouragan de neige s'est abattu cette nuit sur toute l'Allemagne. De nombreux navires, surpris par la tempête, se sont réfugiés en hâte à Kiel et dans la plupart des ports allemands de la Mer du Nord et de la Baltique. A Sassanitz. de nombreux arbres ont été arrachés. La neige a considérablement gêne la circulation ferroviaire. INONDATIONS en Amérique New-York, 19 janvier. Les inondations de la rivière Ohio et de ses affluents qui touchent huit Etats sur un parcours de kilomètres ont causé la mort de six personnes et contraint trois mille familles à évacuer leurs domiciles. Les dommages matériels s'élèvent à plusieurs millions de dollars. Cinq mille employés de l'organisation du travail des chômeurs, sous la direction d'ingénieurs du génie militaire, combattent le fléau qui est dû aux pluies incessantes des deux dernières semaines. LE FROID SÉVIT en Europe Centrale Varsovie, 19 janvier. Un froid très, vif règne dans toute la Pologne. A Varsovie, par 170 au-dessous de zéro, la Vistule est gelée. Le fleuve charrie des glaçons jusqu'à son embouchure et les brise-glaces fonctionnent sans arrêt dans la baie de Dantzig. A Lwow, le froid atteint moins 20"; 87 personnes se sont présentées hier dans les hôpitaux avec les mains, les pieds ou les oreilles gelées. BUCAREST, 19 janvier. Le Danube est gelé entre Galatz et Tulcea. La couche de glace est très épaisse et l'on peut traverser le fleuve d'une rive a l'autre. A Constanza, la Mer Noire est gelée jusqu'à 100 mètres de la rive. Plusieurs personnes sont mortes de froid. Un paysan a été dévoré par les loups qui, en plusieurs endroits, cherchent à pénétrer dans les villages. A PROPOS DE LA TAXE UNIQUE DE 6 SUR LE CHIFFRE D'AFFAIRES Voir plns loin en Informations diverses L'OURAGAN SUR LA MANCHE Ou difue anflaite est battue par le* flot*. LES ENTREVUES CŒRING-MUSSOUNI Il faut régler d'abord l'affaire espagnole dit un article inspiré Roux, 19 janvier. Les première* précisions sur les conversations Goering-Mussolini et sur la réponse italoallemande à la note anglaise sont données par Virginio Gayda dans le Giornale d'Italia organe nettement inspiré par le Duce. D'après celui-ci, le voyage du général Goering a confirmé la solidité du front italo-allemand à l'égard de tous les problèmes européens. Entre Rome et Berlin, il n'y a plus rien à éclaircir ou à définir; il suffit de mettre à jou! la collaboration d'après les variations du moment. L'axer Rome-Berlin demeure la directive essentielle de la politique extérieure italienne. Les autres collaborations auxquelles participe l'Italie, par exemple le c Gentlemen's agreement », ne s'opposent pas à cette directive centrale, mais s'harmonisent avec elle. Le problème espagnol a été le principal de ceux qui furent examinés dans les conversations de Rome. Son importance découle non seulement des complications internationales qu'il peut entrainer, mais aussi de ce que rien ne pourra être tenté en Europe tant qu'il ne sera pas résolu. Qu'il s'agisse de Locarno ou du pacte à quatre, il faut d'abord régler l'affaire espagnole. Les trois principes de la politique italo-allemande à l'égard de l'Espagne sont 1° pas de régime communiste 2" nécessité de cantonner la guerre civile dans les limite de ses éléments nationaux authentiques; 3* LE DUCE ET LE GENERAL assistant à une parade au Forma Mussolini prompte collaboration à toute initiative de bonne foi en faveur de la neutralité. Le miniatre allemand admire les collines d'Anacapri CAPRI, 19 janvier. Le général Hermann Goering a passé la matinée dans son appartement, où il a travaillé. Il avait reçu ce matin un courrier particulier qui avait été amené spécialement à Naples par le contre-torpilleur Baleno. Cette nuit, le général, accompagné de olusieurs autorités italiennes, avait fait une' longue promenade jusqu à Anacapri, où il était resté jusqu'à 2 heures du matin. Le prince de Piémont, venu de Naples, a pris part à un déjeuner que le général Gœrinfc a offert en son honneur. Le général Goering a décidé de prolonger son séjour à Capri jusqu'à vendredi. POUR SECONDER SON FRÈRE LE DUC DE GLOUCESTER VA QUITTER L'ARMÉE Londres, 19 janvier. On annonce de source officielle que le duc de Gloucester a décidé de renoncer à poursuivre sa carrière dans l'armée afin de pouvoir aider le roi George VI dans l'exercice de ses fonctions. Le duc et la duchesse de Gloucester viendront donc résider à Londres et s'installeront à York-House vers la fin du mois de mars. LE RAID PARIS-TOKIO Paris, 19 janvier. L'équipage Doret-Micheletti compte s'envoler demain matin à 6 heures du terrain d Bourget pour Tokio. LA CHAMBRE A REPRIS LE DEBAT SUR L'AMNISTIE Aucin des correctifs détendus âV trouvé grâce Paiub, 19 janvier. La Chambre reprend cet après-midi le projet t!'amnistie, dont la discussion avait eté abandonnée le 31 décembre. L'article 2, auquel on en était resté, ..concerne entre autres les délits de certificats, de violences, voies de faits officiers ministériels ou agents de la force publique, menaces, M. Marin voudrait que l'on exceptât de ;'amnistie, comme le demandait le gouvernement, le port illégal d'uniformes et la vente de timbres-poste ayant déjà servi, mais il renonce bientôt sur les instances de M. Sérol, pré̃x aident de la Commission de législation. M. Parmentier. lui, souhaite que l'on ne montre pas d'indulgence pour les faux commis dans les passeports. Il n'obtient pas davantage gain de cause. *• Le délit de détournement V d'objets saisis •• M. Vallat est d'avis de refuser l'amnistie pour le détournement d'objets saisis. mais M. Sérol soutient que le petit fermier ruiné. qui emporte sa tortie de la ferme un peu de matériel qui était là à son entrée dans la ferme, et sur lequel le propriétaire a pratiqué une saisie, ne peut être taxé d'abus de confiance. Une fois de plus, la Commission l'emporte. M. Emile Perrein. député du Maineet-Loire, plaide la cause de ceux qui ont offert, donné ou reçu des paris pour les courses de chevaux. Ce texte est trop large au gré de la Commission, qui oppose une rédaction limitatlxe lixant des cas exceptionnels, et notamment ceux des petits cafetiers ayant accepté des paris clandestins. Après quelques mots de M. François Martin en faveur de l'amendement Perrein. celui-ci est repoussé par 528 voix contre 88. M. Parmentier réclame l'indulgence pour les contrevenants aux lois sur les lotissements. M. Brmehard l'appuie, mais M. Sérol combat. Une joute au sujet de l'affichage ^des Iocaux disponibles Finalement, M. Parmentier abandonne, mais c'est pour mieux rompre des lances en faveur des propriétaires 'qui ont omis d'afficher les locaux disponibles dans les formes prescrites par lq loi. Le rapporteur, M. Richard, s associe cette façon de voir. Après deux épreuves douteuses et un scrutin pu- bUe, le second amendement Parmen- -Aler est repoussé par 360 voix contre 3W. Enfin, l'article 2 est adopté. M, Quenette demande la suppression de l'article 3. qui décrète l'amnistie pour certains faits commis antérieurement au 12 novembre 1936 qui ont entrainé, pour les délinquants primaires, soit une peine d'emprisonnement inférieure ou égale à 15 jours, soit une peine d'emprisonnement avec sursis inférieure ou égale à 3 mois. soit une peine d'amende inférieure ou égale à 500 francs, soit une peine d'amende avec sursis. M. Quenette fait valoir que des petnea différentes peuvent, selon les divers tribunaux, frapper les mêmes délits. On aboutirait A l'application d'une Ipi d'amnistie par le pouvoir Judiciaire. ce qui est intolérable. Sans méconnaître que l'article en discussion pèche par certains côtés, M. Rùcart, garde des Sceaux, prie la Chambre de le voter dans un geste de générosité envers ceux qui ont fauté une seule fois. t En 1025. rappelle-t-il, l'amnistie personnelle avait été accordée de la même façon par M. Léon Bérard » .Tout en reconnaissant oue les moelles du gouvernement sont très res'pectables. M. Quenette répond que les arguments sentimentaux invoqués par M. Rucart ne détruisent pas les motifs juridiques sur lesquels il avait basé son raisonnement. Quoi qu'il en soit, le député de Meurthe-et-Moselle s'incline. La suppression de l'article 3 i est repoussée M. Richard réédite néanmoins le discours du garde des Sceaux et M. Drouot celui de M. Quenette La suppression de l'article 3. sollicitée par le député fie la Haute-Saône, est repoussée par S93 voix contre 200. après explications de vote de MM. Desbons et Parmentier. Le communiste Langumier réclame l'amnistie pour divers délinquants primaires condamnés avant le 1er janvier 1937 à des peines d'amende et de prison avec ou sans sursis. 1 VOUS ne pouvez tout de même amnistier tous les escrocs a, proteste le président de la Commission de législation, approuvé par le gouvernement. La Chambre dit de méme par 428 voix contre 75. en rejetant l'amendement Langumier. M. Parmentier voudrait qu'au moins il fut entendu que l'amnistie ne bénéficiera pas aux infractions non encore jugées car les magistrats ne peuvent tout de même pas condamner un individu eh le sachant par avance amnistie- L'Assemblée, qui n'en e3t pas à une contradiction près, décide que si i par 312 voix contre 216. Elle adopte, par contre, à mains levées, un amendement de M. Frot. visant une dernière catégorie de peines. Mais voici que s'ouvre le chapitre des restrictions Exceptés, suggère M. Marin. e vol, les coups et blessure3 ayant entraîné une incapacité de plus Par 378 voix cette sutgestion est repoussé;. t Am^lst'ei les chômeurs condamnés pour escroanerle et abus de confiance plaide M. Légumier qui se contente d'ailleurs, d'une manifestation électorale et se garde d'insister. Pu 'd'amnistie pour les fraudes en matière d'appellation d'origine,. souhalte M. Parmentier, bientôt battu par 398 voix contre 201. Les communistes n'oublient pas les leurs Le communiste Quinet voudrait que l'on réintègre dans la nationalité française ceux qui en ont été déclarés déchus en vertu de l'article 9 de la loi du 10 août 1927. Il s'agit du cas d'un Polonais naturalisé, militant syndicaliste, nommé Olzanski, et d'une femme française par son mariage. Mme Régnier, qui distribua des tracts antimilitaristes. Pour repousser l'amendement, le rapporteur fait valoir la gravité des faits. Le cas des commerçants faillis On vote. Il. y a lieu de procéder au pointage. Pendant qu'on s'y livre, la Chambre aborde l'article 4 qui réhabilite, à certaines exceptions près et les droits des créanciers étant réserves, les commerçants déclarés en état de faillite ou de liquidation judiciaire antérieurement à la promulgation de la loi. Sauf en cas de récidive, veut faire préciser M. Vallat. Un nouveau scrutin intervient. L'amendement Vallat est repoussé par 328 voix contre 218. L'article 4 voté, la suite du débat est renvoyée à jeudi après-midi. La séance est levée à 19 heures Quelques Instants plus tard, on apprenait dans les couloirs que l'amendement Quinet était adopté par 299 voix contre 245. M. P. LA CRISE DE LA NATALITÉ Une proposition de M. Le Poullen Paris, 19 janvier. Dans son rapjport sur l'aide à apporter aux familles nombreuses, M. Le Poullen, député d'Iile-et-Vllaine, rappelle la situation démographique de la France en 1935 décès de p!u3 que de naissances. t La France, ajoute-t-il, a le bilan naissances-décès le plus défavorable de toutes les nations de l'Europe et sans doute du monde entier. L'Italie, population sensiblement égale à la nôtre, compte un excédent annuel de naissances depuis trois ans. L'Allemagne volt cet excédent approcher de Nous devons, par tous les moyens. nous efforcer de favoriser le nombre des naissances, si -nous voulons conserver il. notre pays son rang de grande nation x Nous ne pouvons plus espérer, au-' jourd'hui. un relèvement de notre po- pulation en abaissant le pourcentage do" la mortalité infantile les lois d'hygiène sociale, de ce côté. ont donné leur plein résultat. Ne nous leurrons donc pas d'espoirs chimériques Ne comptons pas sur des naturalisations aouvent reerettables pour maintenir le chiffre de notre population. La crise de la natalité est due chez nous à l'affaiblissement du niveau mora des jeunes générations, du fait de 1n guerre et des années d'après-guerre et aux difficultés matérielles de toutes Fortes auxquelles se heurtent les jeunes nonr fonder un foyer. La crise agricole a éprouvé une population où nous trouvions le plus de berceaux. Si nous voulons éviter que les Jeunes ménages ne limitent pas le nombre de leurs enfants. 11 faut leur donnPr la possibilité de les élever en leur éVUant la gène et la misère. En conclusion, M. Le Poullen présente la proposition tendant à accorder aux chefs de famille de nationalité française non assujettis à l'impôt général sur le revenu, une allocation annuelle de 900 francs par enfant de moins de 14 ans à partir du troisième. interdisant les départs de volontaires pour l'Espagne Dans son discours de réélection, M. Jeanneney avait précédemment rappelé le rôle de la Haute Assemblée Paris, 19 janvier. La séance est ouverte a 15 h. 30, sous la présidence de M. Jeanneney qui, l'on s'en souvient. fut réélu président à la dernière séance. Après les remerciements et les congratulattons d'usage. M. Jeanneney fait le tour de l'activité sénatoriale au cours des huit premiers mois de la législature. Il commence par regretter que le Sénat ait été parfois dans l'obligation de discuter de manière hâtive des textes législatifs importants et plus particulièrement le projet de budget de 1937. Il observe, à ce propos, que la Haute Assemblée n'a jamais, à aucun moment de son histoire, songé à se drexser contre la Chambre issue du suffrage universel. Elle ne poursuit qu'un but légiférer avec méthode dans la clarté, et rien de plus. Le Sénat est tout entier acquis aux idées de progrès social, mais une difficulté subsiste assortir aux choses conçues les moyens de les réaliser. Le rôle modérateur de la Haute Assemblée C'est ici que le rôle modérateur du Sénat a l'occasion de s'exercer de façon utile. En fin de compte, nul n'oserait prétendre que le stage subi ici par maints projets de loi n'ait pas été grandement profitable à leur mise au point. nous Le pays, continue l'orateur, dont pensée, s'en aperçoit avec le temps. Ne s'en rend-il pas même, dès maintenant, un peu compte ? Les conditions de la reprise des affaires Le président du Sénat, après avoir dit les inquiétudes par lesquelles avait passé l'opinion publique, envisage les possibilités de reprise des affaires. Mais il précise Qu'on se le dise bien, toutefois, les capitaux né consentiront à s'employer que dans la stabilité, dans le respect des engagements, dans l'ordre légal. » Et. pour terminer, M. Jeanneney adresse un appel à la collaboration de tous les Français. Sa péroraison est saluée de bravos prolongés. La liste des interpellations Le président du Sénat donne ensuite lecture des Interpellations déposées depuis la dernière session, interpellations que nous avons données au fur et mesure de leur dépôt. D autre part, M. Jeanneney rappelle au Sénat que les interpellations suivantes avaient été préoédemment déposées 1" par M. Gautherot, sur les menées communistes en France et en Afrique du Nord; 2° par M. Gaston Rugé sur les licences d'importations; 3u par M. Le Bail sur les mesures relatives à l'importation de l'iode; 4° par M. Armbruster sur la politique extérieure 5° par MM. Jean Philipp et Bstoulle concernant les travaux et le personnel de la radiodiffusion; enfin, 6° par M. Roux-Freisslneng sur les menées antifrança'ies en Algérie. L Sénat fixe aux dates suivantes 1m Interpellations ci-après le 26 janvier, interpellation Ce MM. Philipp et Batoulle le 29 janvier, celle de MM. Oautherot et Roux-Freislneng situation en Algérie le 2 février, celle de M. aautherot menées communis- tes en France et après la prochaine seasion de la 8. D. N.. l'interpellation de M. Marcel Plaisant. La nomination des commissions Le Sénat décide ensuite, qu'il nommera ses Commissions annuelles, le mardi 2 février, et le jeudi 4 février. celle de la Commission d'instruction de la Cour de justice. Le président du Conseil dépose le projet de loi adopté par la Chambre concernant le départ de volontaires pour l'Espagne. Ce projet sera discuté, jeudi prochain. La Haute Assemblée valide encore l'élection de M. Ouilhem dans le dé- partement de l'Aude et s'ajourne au. 21 janvier, 15 heures. UN INCENDIE MONSTRE DANS LES DOCKS DE MELBOURNE Un paquebot est endommagé par les flammes qui causent cent millions de dégâts Melbourne, 19 janvier. Un violent incendie a eclaté dans les docks Victoria, où se trouvent entreposées de grandes quantités de vivres appartenant au gouvernement australien. Les flammes, activées par le vent, se sont rapidement communiquées au paquebot Port-de-Wellington, qui a dû être remorqué jusqu'au fleuve. Les dégâts sont évalués à près de cent millions de francs. C'est Berchtesgaden que siégerait déaormaia la chancellerie du Reich MUNICH, 19 janvier. Berchtesgaden parait devoir devenir, dans un avenir prochain, le siège de la chancellerie du Reich. L'érection, à Berchtesgaden, d'un édiflce destiné à abriter les services de la chancellerie semble indiquer que M. Adolphe Hitler veut établir sa résidence habituelle dans les Alpes bavaroises. On remaroue, à ce propos, que les séjours de M. Adolphe Hitler à Berlin se font de plus en plus rares et ne durent généralement que quel- ques jours. ÉCHOS PARLEMENTAIRES Une délégation radtcale-ioelaliite se rendra à Barcelone PARts'19 janvier. Le groupe rdlclsoclallate s'est réuni ce matin à la Chambre. Répondant à une Invitation de la généralité de Catalogne, il a désigné une délégation composée de MM. Bosaoutrot, Bezos. Fully. Galimand. Ouiebard, LauaUe, Manent et Naudin, qui aura pour mission de se rendre à But- celone, afin de recueillir dee informations au. situation. La question de la retraite des Inscrits maritimes a été ensuite exposée par M. Perrot et un ordre du jour a été voté pour signaler au Gouvernement l'urgente nécessité du relèvement de la pension des Inscrits maritimes Une dé- I légation se rendra. cet effet, auprès au mUçOsUe des Finanett, LA GUERRE D'ESPAGNE Valence et Salamanque ont répondu r!au plan due contrôle des voies d'accès en Espagne LEURS RÉPONSES SONT, ELLES AUSSI, TRÈS CONDITIONNELLES. SINON NÉGATIVES Une bombe tombée dans une des artères du centre de Madrid, a erevé la voûte du métro LONDRES. 19 janvier. Les réponses de Valence et de Salamanque au plan provisoire de contrôle des voies d'accès terrestres et maritimes à l'Espagne sont maintenant parvenues à Londres. On sait que ce projet, élaboré par le Comité de non-intervention, avait été soumis, au nom de ce comité et par les moins du Gouvernement britannique. aux autorités des deux partis espagnols, au début de janvier. réponse de Valence énumère certaines conditions dont la réalisation pourrait, aux yeux du Gouvernement espagnol, rendre ce plan acceptable. Elle fait notamment observer que le plan du Comité demande à être précisé en ce qui concerne le contrôle des ports aux mains des insurgés, et que ce projet doit être étendu aux arrivées de volontaires en Epsagne. Elle spécifie également que la violation du projet par l'une quelconque des parties contractantes devrait rendre leur liberté d'aotion aux autres signataires. Les objections des nationaux La réponse de Salamanque, dont le résumé télégraphique seulement a été reçu à Londres, n'accepte ni ne refuse .en termes spécifiques le plan de contrôle mais on a l'impression, dans les milieux bien informés. que les autorités de Salamanque répugnent à prendre ce plan en considération. Ces autorités. après avoir rendu hommage au strict respect de la neutralité par le Gouvernement britannique, expriment le regret que d'autres puissances ne se conforment pas aussi rigoureusement à leurs engagements en particulier en ce qui concerne les départs de volontaires. Vers l'élaboration d'un nouveau projet Relativement à ces deux réponses et au caractère négatif de celle de Salamanque, on fait observer, dans les milieux autorisés, que de nombreux aspects du plan de contrôle soumis aux Espagnols ont été modifiés au cours des travaux ultérieurs du Comité de non-intervention. Le projet initial est, en fait, actuellement en voie de remplacement par un nouveau plan de contrôle qui. espère-t-on, enrayera les départs de volontaires aussi bien que l'envoi de matériel de guerre. Ce projet, qui pourrait voir le jour prochainement, aurait, en outre, l'avantage de répondre à la- plupart-des points soulevés par les deux réponses espagnoles, et de ne pas' dépendre, autant1 que le précédent, de l'acceptation des deux partis en présence. Malgré la réticence des milieux ofnciels, au sujet de ce nouveau projet, on recueille l'impression qu'il combinerait le contrôle terrestre et maritime prévu dans le plan initial, avec un système de surveillance qui fonctionnerait en dehors du territoire et des eaux territoriales espagnoles. LE BOMBARDEMENT PAR UN AVION INCONNU DU CONTRE-TORPILLEUR FRANÇAIS MAILLÉ-BRÉZÉ » Toutou, 19 janvier. Un officier du Maillé-Brézé, arrivé cette nuit à Toulon, a fait la déclaration suivante, au sujet du bombardement de cette belle unité navale française, par un mystérieux avion, au large du Cap San Sebastian Le Maillé-Brézé, a-t-il dit, avait quitté hier matin, vers 8 heures, Barcelone. Une heure plus tard, un avion trimoteur, ne portant aucune marque extérieure, a survolé le contre-torpilleur à une hauteur d'environ mètres, et a lancé six bombes qui sont tombées à environ 200 mètres du bord. L'équipage, massé sur le pont, hurlait apres les aviateurs. Malgré la demande des matelots, les officiers du bord refusèrent de tirer sur l'avion et le navire a poursuivi sa route sur Toulon. En dépit de tous les efforts des observateurs de ce navire, il a été matériellement impossible d'établir la nationalité de l'avion. Le Maillé-Brézé. qui fut lancé en 1931 aux chantiers de Penhoët, à StNazaire, était parti de Palma le 16 à destination de Barcelone. Il est actuellement détaché sur les côtes d'Espagne, prêt à assurer éventuellement l'évacuation des ressortissants français des ports de la péninsule. Le ministère de la marine confirme l'agreeeion Paris, 19 janvier. Le miniatére de la Marine communique Le contre-torpilleur Maillé-Brezé, venant de Barcelone et ralliant Toulon, a été attaqué en mer et bombardé a deux reprises, le 18 janvier, a 9 h. 35. à 15 milles au large du Cap San Sébastian. Cinq bombes ont été lancées, dont aucune n'a atteint le Maillé-Brézi. Une enquête est ouverte pour identifier l'agresseur. Le ministre de la Marine, précis» nt les règles générales édictées par le décret sur le service à bord des bâtiments de la Flotte, a donné comme Instructions aux navires de guerre francais croisant sur les côtes d'Espagne, l'être en tout temps prêts à riposter à toute attaque nettement dirigée contre eux. Un bâtiment italien aurait été capturé par les gouvernementaux Midrid, 19 janvier Selon un rappor venant de Valence, un bateau marchand Italien transportant' une cargaison d bombes et de matériel de guerre destiné aux nationalistes aurait été capturé par un navire appartenant aux loyalistes. Un submersible tente de torpiller un vapeur VALENcp, 19 janvier. On mande de Tarragone qu'un sous-marin dont on ignore la nationalité, a lancé deux torpilles en direction du vapeur espagnol au large du lieu dit La Punta Del Faro. Les engins n'ont pas atteint le bateau et sont venus éclater contre les rochers, au pied du port. Le s'est mis à l'abri dans le port de Tarragone. Quel est le sort du Français Georges Hamel ? BAYONHE, 19 janvier. Des renseignements particuliers de bonne source contredisent l'information publiée ces jours derniers au sujet de la récente exécution, à Santander, du Français Georges Hamel, qui dirigeait les entrepôts de pétrole d'une maison française. Quand le gouvernement espagnol décréta le monopole du pétrole, M. Hamel abandonna cette direction et créa une distillerie à son compte. Dès le début de la guerre civile, il fut l'objet de menaces de moft de la part des extrémistes. C'est dans le courant de septembC qu'un matin, vers 10 h. 30, il fut apprts hendé à son domicile et jeté dans une automobile. Depuis on est resté sans nouvelles de lui Les consuls français de Santander et de Eilbao ont ouvert une enquête, mais toutes les recherches sont restées vaines. Georges Hamel était le doyen de la colonie française de Santander. Le cardinal-primat d'Espagne écrit au gouvernement basque PAR BAYowre, 19 janvier. Le cardinal primat d'Espagne a adressé une lettre à M. Aguirre, président du gouvernement basque de Bilbao, reprochant à celui-ci et ses collaborateurs de continuer leur collaboration au gouvernement de Valence. LA LOTERIE NATIONALE Aujourd'hui, émission de la première tranche 1937 PARIS, 19 janvier. Le Secrétariat de la Loterie Nationale procédera demain à rémission de la première tranche de la loterie 1937. Le tirage aurait 1'.u au début de la seconde quinzaine de février. COURTE FUGUE. Guxlph Ontario, 19 janvier. A l'exception de cinq d'entre eux, la totallté des prisonniers qui s'étaient évadés de la maison de réforme d'Ontario ont été capturés. LE PAPE SOUFFRE A NOUVEAU DE DOULEURS PLUS FREQUENTES Crrt du Vaticak, 19 janvier. Les douleurs que le pape ressentait & la jambe sont devenues plus fréquentes depuis deux jours, après l'apaisement qui s'était vérifié ces derniers temps. Cela ne l'empêche pas, cependant, de continuer à se consacrer à ses occupations habituelles. Une Confédération nationale des Syndicats professionnels On nous communique La Confédération Nationale des Syndicats Professionnels Français vient de se constituer. Son siège social, est fixé provisoirement 34, rue Godotde-Mauroy 9*, ses statuts ont été déposés sous le n, Elle a pour but De créer des syndicats professionnels dans chaque établissement commercial et industriel ou agricole, pour la défense des intérêts .de leurs »dhérents. De grouper lesdits syndicats en fé> dérations départementales et de réunir ces fédérations dans la Confédération Nationale. D'observer si les conditions de travail sonc conformes au code de travail, soit en raison de la législation établie, soit en raison de contrats individuels et collectifs, soit par suite de règlements existants entre les directions et les salariés. Faire connaître au patronat la doctrine économique et sociale de la Confédération nationale des syndicats professionnels français, travailler à établir dans l'intérêt général une coopération sur toutes les améliorations aux conditions de travail. Faire respecter la liberté du travail et des opinions, obtenir pour chaque travailleur un salaire lui permettant d'élever dignement sa famille et assurer la sécurité de ses vieux jours. Résolument placée en dehors de toute école politique et religieuse, la Confédération des syndicats professionnels français réunira les travailleurs conscients de la lutte à mener pour la reconstitution économique et sociale et pour la revalorisation de l'homme dans son métier. Pour tous renseignements. s'adresser au siège, 34, rue Godot-de-Mauroy. LE SHAH DE PERSE RAPPELLE SON mINISTRE A PARIS Une allusion littéraire serait à l'origine de cette mesure Paris, 19 janvier. Indisposé par une allusion d'un échotier parisien, jugée par lui blessante pour l'Iran, le Shah de Perse vient de rappeler son ministre à Paris. M. Abolghassen Frouhar. Le souverain iranais a décommandé du même coup la participation de la Perse A l'Exposition Universelle de Paris. SOURIMES II ne faut Jurer de rien. Surtout, vteux garçons fiers de votre liberté, n'affirmez pas devant témoins que vous n'êtes point eatpétrés dans les Ilens du marlage. On ne sait Jamais. Supposer que l'aventure dont ne rit pas, mals pas du tout, son héros, un habitant du douzième arrondissement parisien, vous soit arrivée f. L'homme se présente il la mairie Je viens chercher une pièce d'Iden. tlté. la meilleure de toutes, un extrait des reglstres de l'état civil. Voilà, monsieur. "Hein ? Mais vous faites erreur. Je suis célibataire Non, monsieur. Vous avea épousé, 11 y a vingt ans, au Creusot, une dame qui ee prénomme Augustlne. Mol f. Vous-même. C'est écrit. Bt sur papier timbré encore L'explication est simple pendant la guerre un soldat égare son livret mlHtaire, un quidam s'en empare et vit sous le nom du poilu dépossédé. C'est aiûil qu'un célibataire prend femme sans le savoir. a plusieurs enfant* qu'il ne connaîtra Jamais et endosse aux yeux de la toi une responsabilité à laquelle Il ne saurait se soustraire. Le voilà bien, le vrai dédoublement de la personnalité Avec cette méthode d'usurpation un honnête citoyen peut non seulement épouser à son Insu la plw Insupportable mettre du paye. mais passer aux Assise» sans se douter de sa culpabilité et finir sei Jour» au bagne, malgré lui, malgré se» bons antécédents. Célibataires, Je vous en prie, acceptez le conseil suivant.. Courez vite au bureau de l'état civil. Vérifiez donc si personne n'a eu l'Idée saugrenue de se marier pour vous. 81 oui, entamez le tour de Franee la recherche de l'autre vous-même. Si non, convolez en justes noces aa plus tôt afin de couper court a un vol d'Identité toujours possible et à un nuriage mystérieux dont vous ferte7. les trafs sans être présent a la cérémonie.. Ah qu'il est malaisé de rester réIU bataire > LE PETIT QBfOOUUS PARIS, 20 janvier, 5 heures du matin. LE CONSEIL DE LA SE REUNIRA DEMAIN A GENEVE Six ministres des Affaires Etrangères seront présents GErtvE, 19 janvier. On confirme l'arrivée imminente à Genève de MM. Anthony Eden, Litvinoff et Antonesco. Avec MM. Delbos. Rustu Aras et Sandler, la 96' session au Conseil qui s'ouvre jeudi, à 17 heures, réunira, a Genève, six ministres des Affaires Etrangères d'Europe. Il est impossible que l'occasion ne soit pas mise à profit par eux pour conférer, en marge du Conseil, des grands problèmes actuels de la politique extérieure. Abstention de l'Italie ROME. 19 janvier. L'Italie ne participera pas aux travaux du Conseil de la S. D. N. On fait, en effet, remarquer qu'aucun événement nouveau n'est venu modifier l'attitude de l'Italie à l'égard de Genève. Une conférence à l'Hôtel Matignon PARIS, 19 janvier. M. Blum prési- dent du Conseil, a présidé cet aprèsmidi, à l'hôtel Matignon, une conférence en vue d'examiner les diverses questions qui vont être posées au prochain conseil de la S. D. N., à Genève. A cette conférence assistaient notamment MM. Delbos, Vienot, Massigli, Daladler et Gasnier-Duparc et Pierre Cot. M. Yvon Delbos quitte Paris PARIS, 19 janvier. Ce soir, à 23 h. 20, M. Yvon Delbos a quitté Paris par la gare de Lyon pour Genève. Il était accompagné de MM. Viénot, soussecrétaire d'Etat Massigli, directeur politique, et Basdevent, jurisconsulte. LA LIBÉRATION DE LA CLASSE » AURA UEU LE 10 AVRIL Les opérations de libération des militaires appartenant aux catégories suivantes a engagés par devancement d'appel en avril 1935 et astreints à 2 ans de service b ajournés ou sursitaires appartenant à la troisième fraction de la classe 1933 et à la première fraction de la classe 1934, incorporés en octobre 1935 et astreints à 18 mois de service c ajournés ou sursitaires appartenant à la deuxième fraction de la classe 1933 incorporés en avril 1936 et astreints à un an de service par application des dispositions de l'article l" de la loi du 17 mars 1936 d tous autres jeunes gens dont les obligations légales d'activité expirent le 15 avril 1937, auront lieu par anticipa- tion le 10 avril 1937. Toutefois. les jeunes gens appartenant à la catégorie b ci-dessus et incorporés en septembre 1935 dans les unités de forteresses dent les obligations légales d'activité expirent 'e 1™ mars 1937. seront libérés par anticipation le 20 février 1937. LES RECOUVREMENTS DES IMPOTS SONT EN DIMINUTION Paris, 19 janvier. Le ministre des Finances vient de communiquer le tableau du rendement des impôts en décembre dernier et pour l'ensemble de 1936. Au titre des impôts indirects, il a été perçu 3 milliards 689 m'llions en décembre. Les recouvrements effectués au titre des impôts cédulaires de l'impôt général sur le revenu des Contributions directes et des taxes assimilées, au cours de décembre, s'élèvent à francs. Cette somme est inférieure de francs aux recouvrements constatés en décembre 1935. pendant la même période. Il a été recouvré au profit des départements et des communes, au titre des anciennes Contributions directes, une somme de francs. Le total des Contributions directes encaissées en décembre 1936 atteint ainsi la somme de francs. On arrête les agresseurs du notaire de Saint-Antonin Toulouse, 19 janvler. L'enquête menée de concert avec la Sûreté car la police mobile de Toulouse au sujet de l'agression commise sur la personne du notaire de Saint-Antonin Tarn-etGaronnei, vient d'aboutir à l'arrestation de deux mauvais sujets déjà connus de la police. Une troisième arrestation serait imminente dans la région parisienne. Paris, 19 janvier. Le Journal Officiel va publier demain matin le décret portant application de la semaine de 40 heures aux chemins de fer. Ce decret prévoit une période d'application oui lm Juaou'à. la fin du mois d» mai, LES CONFLITS DU TRAVAIL Le personnel des abattoirs de la Villette et de Vangirard accepte les décisions prises par les délégaés PARis, 19 janvier. Les ouvriers et employés des abattoirs de la Villette et de Vaugirard, ainsi que des boucheries et charcuteries en gros, à l'issue d'une réunion cet après-midi, ont décidé d'accepter le protocole et de reprendre le travail demain matin. Des ouvrières parisiennes occupent un magasin PARIS, 19 janvier. Les ouvrières d'un magasin de nouveautés, 36, faubourg Saint-Denis, se sont mises en grève et ont occupé les locaux. Grève du bâtiment dans le Limousin LIMOGES, 19 janvier. Les pourparlers entamés au sujet de l'augmentation des salaires et de l'application des lois sociales ne leur ayant pas donné satisfaction, les ouvriers du bâtiment et des scieries de la région de Sainte Amand. Magnazeix et de Fromental se sont mis en grève. .et à Vichy ViCHY, 19 janvier. Les ouvriers du bâtiment de Vichy se sont mis en grève. Ils estiment que l'accord mtervenu entre patrons et ouvriers concernant la semaine de 40 heures n'est pas respecté. Pas de grève générale dans les charbonnages belges BRUXELLES, 19 janvier. Un accord a été conclu entre patrons et ouvriers mineurs au sujet de l'application de la semaine de 45 heures. Tout danger d'une grève générale dans les charbonnages serait donc écarté. wvw> M. Bastid parle au dîner de YUnion des Industries exportatrices La dévaluation de-franc a été opérée, affirme-t-il, dans l'intérêt de notre commerce Paris, 19 janvier. M. Bastid, ministre du Commerce, a prononcé ce soir au diner de l'Union des Industries Exportatrices une importante allocution, dont voici les principaux passages Nous avons conscience de ne pouvoir demander aux producteurs français les sacrifices qui dépendent d'eux pour reprendre plus largement pied sur les marchés extérieurs que si de notre côté. nous Gouvernement, nous manifestons une activité renouvelée en matière de traités de commerce. Certaines négociations sont engagées. d'autres vont l'être. Nous offrons, ou nous offrirons, aux pays étrangers des avantages oui ne seront consentis que contre des avantages équivalents. » Le ministre a ensuite assuré les exportateurs de la sollicitude du Gouvernement et il s'est exprimé en ces termes au sujet du lien qui existe entre la politique monétaire et la politique commerciale nui la cracruèle. la gerce et favorise l'aioarltion de' rides. Le chaque soir avec une hu!!e véf*tiile- D"ns l'Rnthong'a'mo du départ Pt dons 'i hft»» de faire vo'r le .uir'à votre bel neuf, n» rw» ci soi"» qui ont »>'us prérleilx qu» iimut» pour conserver la beauté de votré teint. Claude Jakt. Deux parures de lingerie en deux patrons sealement X» 561, comprenant dans une même pochette COMBINAISON, CHEMISE et Cl'LOTTE. Cette parure est garnie de festons de même ton ou de teinte tranchante. La combinaison, cintrée à la taille, est composée d'un corselet monté à la Jupe par des Jours roulés. Au milieu du devant, un médaillon brodé avec vos Initiales. Chemise assortle culotte aux côtés légèrement arrondis du bas, montée sur empiècement. Métrages chemise et culotte réunies, 3 mètres en 100 combinaison, 2 m. 30 en 100. Prix des trois patrons réunions, 3 tr. étran1 ger, 4 fr.. No 562, comprenant une PABURi compiéte. Le haut de la chemise et de la combinaison forme un étroit empiècement qui peut être exécuté de même tissu que l'ensemble, mais brodé de pois au plumetis, ou d'un tissu uni e ou fantaisie de teinte tranchante dans le bas de Jupe, un feston. Culotte moulant bien les hanches, terminée par un volant rapporté. Métrages chemise et culotte réunies, 2 m. 95 en 100 combinaison, 2 m. 23 en 100. Prix des trois patrons réunis, 3 fr. étranger, 4 fr.. Adressez les commandes, accompagnées des nom et adresse écrits très lisiblement et de 3 francs par mandat ou timbres-poste étranger. 4 francs par mandat au service des patrons de la Page Féminine de L'Ouest Ecialr, 11. boulevard des Italiens, Paris. Les commandes ne sont reçues que pendant huit Jours. Délai de livraison. une semaine environ. Aucun envoi n'est fait contre remboursement. Nous rappelons nos lectrices que seules correspondent à un patron les figurines au-dessus desquelles une mënt'on l'indique expressément. oooaeaoaMoaaaaeoooooaaa L'origine du mot Moutarde On peut le donner en cent, on peut le donner en mille, nul ne devwera. ft quelque savant ne le lui souffle. d'où la moutarde et principalement celle de Dijon a tiré son nom pourtant si répandu. Cette mine la moutarde très connue des anciens qui l'employaient dans leur cuisine s'appelait alors c fa rive » ou sévené ». Une circonstance aussi curieuse qu'inattendue vint la dé- baptiser. Voici comment En l'an 1382. la ville de Dijon nyant fourni mille hommes d'armes à Philippe le Hardi, duc de Bourgoan». celui-ci reconnaissant, accorda entre autres prlvlèges celui de porter ses armes avec aa propre devise Moult me tarde 9 c'eat-à-dire 11 me tarde beaucoup i\. Heureux et fiers, les Dijonnais flrent graver cette devise sur leur porte principale. Mais un accident survInt qui détruisit le mot c me ». en sorte qu'on ne lisait plus que 1 Moult tarde P. Ces deux mots restants sonnaient bien aux oreilles. On en Rt bientôt qu'un mot qu'on appliqua au célèbre condiment au'on prépare en si grande quantité Dijon. Et Voilà pourquoi la devise de Philippe le Hardi figure aujourd'hui sur toutes les NAISSANCE Nous avons le plaisir d'apprendre l'heureuse naissance, chez notre directeur général, M. Pierre Artur, et Madame, d'un neuvième enfant qui a reçu le prénom de Philippe. L'Ouest-Eclair s'associe à la joie de son directeur et de Mme Pierre Artur il leur exprime ses respectueux compliments, en même temps qu'il forme pour le bébé tous les meilleurs vœux de bonheur. CALVADOS ARRESTATION D'UN ESCROC DE GRANDE ENVERGURE Il avait opéré notamment à Falaise, Domfront, Argentan, Saint-Malo et dana la Sarthe Bayeux, 19 janvier. De notre correspondant L'Ouest-Eclair a relaté, à diverses reprises, les méfaits de Victor Métairie, coiffeur, demeurant à Saint-Frambault-sur-Pisse, qui recherché par plusieurs parquets pour vols et escroque ries avait toujours réussi à s'éclipser. C'est ainsi que traqué par toutes les brigades des environs, il était encore parvenu à exercer ses tristes exploits dans la région de Vire et de Condésur-Noireau et à s'enfuir vers ThuryHarcourt. Or il était bientôt signalé à Bayeux où les gendarmes se mettant immédiatement à sa recherche purent l'appréhender chez un commerçant de la localité. Il était encore en possession de la bicyclette dérobée à Mme Jehan lors de son passage au Plessis-Grimmoult. Les gendarmes de Bayeux n'ont pas perdu leur temps car on se trouve en présence d'un malfaiteur d'une certaine envergure. En effet. Métairie a opéré dans presque toute la France, peut-être même en Belgique. Il est officiellement l'objet des recherches des Parquets de Domfront, Argentan, Saint-Malo, Saumur. Auxerre. Il doit être également signalé dans la Sarthe et l'on peut craindre encore des surprises à son sujet. Métairie faisait en outre l'objet d'une contrainte par corps de M. le Percepteur de Caen et enfin pour couronner sa carrière il était recherché par le bureau de recrutement d'Alençon pour insoumission. ̃ C t sur cette dernière ville que le Parquet de Bayeux a dirigé sa belle capture. ÎAKMKBÀftMJ E PARIS SUCCURSALE A NANTES 27 rue du Calvaire nnexe à St-NAZAtRE 2 rue Vlllèt-Mortlr Aujourd'hui, 20 janvier St Sébastien Le soleil se lève à 7 h. 37 et se couche & 16 h. 27. La lune se lève a 10 h. 47 et se couche à 1 h. 4. Pleine lune le 26 a 17 h 15. Temperature maxima du 18 20° Pau. 19° Ajaccio. 17"; Perpignan. Bordeaux, Cazaux, 14» Toulouse, Angoulème, Rochefort, ClermontFerrand. Nantes, Rennes. 13° Le Bourget. Orléans. Chartres, Le Havre. Cherbourg. Brehat. Belle-Ile, Tours Royan, Marseille, Amibes. 12° Avord, Brest, Reims. Paris. Abbeville. 11° Calais. Valenciennes, Lyon. Nlmes, 10° Nancy. Dtjon, Montélimar. 8° Upaix. 5° Strasbourg. 41 Lanslebourg, 2°. Temperhture minima du 19 févrierBiarritz, 10° Belle-Ile. Bordeaux, Cazaux, Aîaccio. 9° Marseille. Nimes, Lyon Royan. Angouléme, 8° Le Bourget. Bréhat. Brest. Rochefort. Montélimar, Antibes. 7°; Avord Nantes. Cherbourg. Le Havre. Pans, Chartres. Strasbourg 8° Orléans. Nancy. Dijon. Reims. Tours, Toulouse. Perpignan. 5° Calais, Abbeville. Besancon, 4°; Valenciennes, 3° Upalx, 2o Lanslebourg, 1°. Evolution probable. Les perturbations venant du large continuent a se succéder assez rapidement sur notre pays. Une zone de mauvais temps. qui couvrait à 7 heures la majeure partie de la France extrême nord et littoral méditerranéen exceptés se déplacers vers l'est-nord-est et ne laissera demain matin des résidus que dans les Pyrénées et le sud-est Elle sera suivie d'une zone de temps Instable, à éclaircles et à averses, qui débute déjà dans le nord-ouest et qui est accompagnée d'air plus frais. Probabilités pour la journée du 20 janvier Etat du ciel. Dans les régions Nord, Parisienne. Nord-Ouest. Bretagne, nuageux à très nuageux avec éclaircies et queliues averses. Vent». Secteur Ouest modéré et Irrégulier. Coup de vent d'Ouest & NordOuest. Température. Maximum en baisse de 2 à 4° par rapport à la veille. 1 M. H" S. H" dm dm Cherbourg 63 Oranvllle 112 Saint-Malo 102 Salnt-Brleuc . 95 915 Siimpol 86 84 Lorlent 42 Vannes 42 2352 Sables-d'Olonne. 43 La Rochelle •t-Mazalre 9-5 44 L'EXPOSITION DE 1937 La pose de la première pierre du Pavillon de la Bretagne a donné lieu à une cérémonie solennelle Trois orateurs M. Louis AUBERT, président du Comité Breton M. Edmond LABBÉ, commissaire général de l'Exposition M. GASNIER-DUPARC, ministre de la Marine, ont célébré à l'envi la gloire de notre province Paris, 19 janvier De notre rédaction parisienne. Le crachin qui, depuis quarante-huit heures, mouille le sol parisien et obscurcit le ciel de la capitale, a fait place ce matin vers 10 heures à une bise froide qui faisait claquer brutalement le drapeau tricolore flottant au bord de la Seine, audessus de l'emplacement même, sur lequel s'élèvera le pavillon breton à l'Exposition de 1937. C'était aujourd'hui la pose de la première pierre d'un pavillon dont nous avons donné toutes les caractéristiques. Comme toujours, depuis le début d2 l'Exposition, le Comité breton qui fut le premier constitué le premier dont les plans du pavillon furent présentés, le premier dont les plans furent acceptés, a été le premier des cômités régionaux à célébrer la pose de la première pierre de son pavillon. Cette cérémonie a été célébrée devant de nombreuses personnalités qui avaient tenu à assister à la première manifestation tangible de l'activité bretonne à l'Exposition de 1937. Nous avons remarqué notamment M. Gasnier-Duparc, ministre de la Marine, qui présidait le commandant Balat, son officier d'ordonnance M. Aubert, président du Comité breton MM. Le Trocquer, sénateur, ancien ministre Gautherot, sénateur Trémintin, Morane, Tristan, Peaet, Guernier, Desgranges, députés Petrhe, Charles Brun, Ancel et Rodel, du centre régional à l'Exposition Lesage, président de la Fédération des Sociétés Bretonnes de Paris et d* la région parisienne Beaufrère, directeur de La Bretagne à Paris Bahon-Rault et Roulaud, président de Chambre de Commerce en Bretagne Couarnon, architecte du pavillon breton Râteau, secrétaire général du Comité Breton, etc. Le premier, M. Aubert prit la parole et prononça à la gloire de la Bretagne le discours suivant LE DISCOURS DE M. AUBERT Monsieur le Ministre, Mesdames. Messieurs, Le Comité de participation de la Bretagne à l'Exposition des Arts et Techniques vous remercie très sincèrement du grand honneur que vous lui faites en venant aujourd'hui procéder solennellement à la pose de la première pierre de la Maison où doit, au cours des mois rayonnants que chacun attend, se manifester la vie intellectuelle et active d'un pays qui vous est, comme à nous particulièrement cher la Bretagne. Vous étiez plus que quiconque cher Monsieur le Ministre, désigné pour accomplir ce geste rituel. La Bretagne est, en effet, la noble terre féconde et rude qui fournit à la marine de guerre dont vous êtes. au Gouvernement, le chef très respecté, le plus fort contingent de ces vaillants marins, fierté de la France, et que le monde entier admire. c Mais, à nos yeux, à nos cœurs aussi, vous avez un autre titre. Vous êtes de chez nous, vous êtes au Sénat le représentant de l'un de nos plus beaux départements, et vous présidez tout à la fois à ses destinées et à celles de la ville si bretonne qui a mis en vous toute sa confiance SaintMalo. Et voyez combien s'accordent, s'harmonisent les hautes fonctions du ministre national et du magistrat municipal. Il suffit pour illustrer le rapprochement de rappeler que la vieille cité malouine, aux toits élevés qui jaillissent avec tant de pittoresque grandeur sous la pression de son corset de pierres grises, battu par des flots d'émeraude, est la patrie de Jacques Cartier, de Duguay-Trouin de Mahé, de La Bourdonnais et de bien d'autres grands découvreurs de terres nouvelles, qu'ils ont données à la France; la Patrie des légendaires corsaires de Robert Surcouf, la Patrie des Terreneuvas dont les ancêtres, bien avant les Conquistadors, connurent les rivages du nouveau monde, la Patrie, en un mot de tous ceux qui ont, depuis des siècles, manifesté sans arrêt leur intense amour pour la mer, leur passion jamais satisfaite pour l'aventure, et dont l'inlassable dévouement atteint, si souvent aux limites de l'héroïsme, et de cet esprit de sacrifice qu'il y a peu de temps vous exaltiez et magnifiiez en saluant, au nom du gouvernement et au nom de la France, les dépouilles des victimes glorieuses du Pourquoi-Pas ? ». La présence à vos côtés de M. le sous-secrétaire d'Etat nous aurait fait plaisir; si des engagements antérieurs ne lui ont pas permis d'être là, du moins s'est-il fait représenter par M. le Directeur de son Cabinet et nous l'en remercions vivement. M. GaanierDuparc d'une part, M. Blancho, d'autre LA MAQUETTE DU FUTUR PAVILLON DE BRETAGNE On reconnait le ministre de la Marine et M. Labbé, commissaire général de l'Exposition. M Pezet et M. le chanoine Des crantes, députés du Morbihan. part, évoquaient en notre esprit une image toute symbolique. Je les voyais tous deux entourant l'ensemble de la péninsule armoricaine d'un long ruban, qui épouserait les mille dentelures de nos côtes tourmentées de Saint-Malo à Saint-Nazaire, et dont ils auraient chacun une extrémité. C'était montrer ainsi bois au milieu, mer tout autour que la Bretagne que l'on dit individualiste et cloisonnée, forme au contraire un tout indissoluble dont les diverses parties s'associent toujours, quand, il s'agit d'exalter leua intégrale affection pour elle. Vous me permettrez maintenant de saluer M. le Commissaire général Labbé. Que de reconnaissance ne lui devons-nous pas de s'être un instant arraché à ses écrasants travaux, à ses formidables responsabilités pour venir nous apporter, à l'occasion de la pose d'une première pierre du centre régional, le précieux encouragement de son appui si bienveillant. Les Présidents de régions qui l'ont vu à l'œuvre et ont à cœur de suivre de leur mieux son laborieux exemple, savent ce que la France entière lui doit et lui devra pour l'œuvre titanesque qu'il a mission de réaliser et qu'il réalisera, soyons en surs, en heure et temps. Ces discours terminés, sous le feti des photographes, M. Gasnier-Duparc, prenant en main la truelle symbolique, scella la première dalle de granit, car nos architectes bretons ne s'étaient pas contentés d'une vulgaire meulière, mais avaient tenu à employer du roc breton. Cette traditionnelle cérémonie terminée, un déjeuner amical réunit, sous la présidence de M. Aubert, les personnalités qui avaient assisté à la pose de la première pierre du futur pavillon breton à l'Exposition internationale de 1937. Arts et Technique b. Si tous les participants à l'Exposition apportent à leur tâche le même cœur et la même ardeur que les membres du Comité de Bretagne, nous pouvons être sûrs que non seulement l'Exposition sera prête à temps, mais qu'elle connaltra un magnifique succès. Nous le lui souhaitons. P. Laureht. La Gadnase est plns économiqne Non seulement la Gaduase est plus agréable au goût. plus facile à digérer et tout aussi efficace que l'huile de foie de morue, mais encore elle est plus économique parce qu'elle se prend il. doses et que personne n'en laisse la moindre goutte dans le flacon La Gaduase, délicieux sirop framboisé, accroit l'appétit, favorise la croissance, purifie le sang, et fortifie petits et grands. Demandez de la Gaduase à votre pharmacien. MAYEKNE APRÈS LE DRAME DE L'ALCOOLISME D'ANDOUILLÉ Lever., 12 janvier de notre rédaation Ainsi que nous le disions hier, les constatations du médecin légiste ont permis à M. le Juge d'instruction de déclarer que la mort de la femme Carre était due à une cause naturelle. Il ne reste donc plus qu'à expliquer le désordre constaté dans la pièce où l'on trouva des débris de bouteilles et de verres brisés, des chaises renversées, le tapis de la table avait dû être tiré violemment et pendait jusqu'à terre. Le tout laissant croire à une lutte qui précéda la mort de la femme Carré. Personne, et nous moins que tout autre, ne peut avoir la prétention de discuter une décision qui repose sur les données de la science mais comment s'expliquer la posture dans laquelle fut trouvé le cadavre par MM. Hardy, Halouze, Marcadé et Lefaucheux ? Grâce au témoignage du propriétaire et du charpentier que les travaux de réparations l'immeuble avaient mis dans l'obligation de passer la nuit de jeudi à vendredi à la Gaufrière, dans le même appartement que les époux Carré, le mari put être mis hors de cause parce que rien ne fut relevé contre lui, malgré tout le zèle déployé par l'actif maréchal des logis chef Germain qui commande la brigade d'Andouillé et les gendarmes sous ses ordres. Pour expliquer le désordre de la pièce et celui des vêtements de la morte, il faudrait donc supposer que dans la journée de vendredi, alors que la victime se trouvait seule dans cette maison isolée, un homme resté inconnu se soit introduit à la Gaufrière comme s'introduisit, il y a quatre mois, dans une autre maison Isolée de Landivy, un misérable qui commit le crime abominable dont on se souvient encore et que l'on n'a pu découvrir. La suite de l'enquête jettera sans doute un peu de lumière sur les circonstances qui ont entouré la mort de Mme Carré. THEATRE MUNICIPAL DE RENNES Jeudi 21 Janvier, à 14 heures, unique Matinée populaire à prix réduits, places de 1 fr. à 9 fr. tout compris LA VEUVE JOYEUSE avec le concours de toute la troupe d'opérette. Samedi 23 soirée et Dimanche 24 matinée et soirée, 3 représentations de FRASQUITA, avec les danseurs Marilinda et José Kico. On peut retenir les places à l'avance par lettre, mandat ou téléphone 20-37 Rennes. LOIRE-INFEr L'ÉNIGME D'AVIGNON Le canonnier nantais serait en Tchécoslovaquie Avignon, 19 janvier. La Sûreté a reçu un télégramme venant de Tchécoslovaquie et adressé au canonnier Jean Journel à sa caserne de Fontainebleau, ainsi que deux lettres venant, de Prague et parvenues après son dé- part. Or, comme on sait que Journel avait, à Prague, une amie et qu'il est en possession d'un passeport général, il est vraisemblable qu'il a gagné en chemin de fer l'Italie par VintuniUsv puis la Tchécoslovaquie. CÔTES-SHORt Dans nne crise de folie, une jeune mère tue son enfant Powtritox, 19 janvier. De notre correspondant Cet après-midi, nous étions prévenus téléphoniquement, vers 14 h., qu'un crime venait d'être commis à Brelldy. Nous nous sommes immédiatement rendua sur les lieux, à quatre kilomètres environ du bourg de Brelidy, dans la direction de Saint-Laurent, nous quittons la route praticable et c'est A travers des chemins remplis d'ornières et de boue que nous arrivons à la ferme de Keravel. La maison sans étage est parfaite- ment tenue les meubles et le sol, tout est propre. Notre regard se fixe à l'arrivée sur un berceau d'enfant dans lequel git un bébé de cinq mois que la folie d'une mère vient de tuer. Quand nous arrivons à Brélidy, le pays est en émoi; c'est que depuis la veille, ces braves paysans viennent d'être bouleversés par un drame navrant. A notre arrivée à la ferme nous trouvons MM. Lautier, juge d'instruction à Guingamp; Geffroy, son gref-,fier Gauffenlc, lieutenant de gendar-' merie et les gendarmes de Pontrieux qui firent la première enquête et les gendarmes de Guingamp. La meurtrière. Mme Bellec. née Ma- ria Offret, 24 ans, est assise près de la table, calme en apparence, vêtue d'un sarrau gris et coiffée d'un béret de laine rouge. Les questions posées n'ont pas l'air de l'émouvoir et c'est par oui et non qu'elle répond aux questions du juge d'instruction. Voici d'abord, à peu de choses près, sa déclaration de samedi après-midi J'ai frappé mon enfant, ma petite Jeanne. âgée de cinq mois; à son arrivée, mon mari, ouvrier agricole, m'a demandé ce qui s'était passé; je lui ai répondu que l'enfant était tombée; lundi après-midi, vers 14 h. 30, j'ai pris l'enfant. je l'ai déshabillée. je me suis assise près du feu et je l'ai frappée 6 coups de poing. Voyant qu'elle ne mourait pas. je l'ai allongée sur la table et je l'ai étranglée. Puis je l'ai rhabillée et mise dans son berceau; ensuite je suis allée prévenir mon mari qui travaillait chez M. Le Peuch. à environ mètres de la ferme. s Sur les mobiles de son crime, la femme répond J'ai volé il y a quelques semaines un morceau de pain au bourg et l'idée d'être poursuivie m'a complètement affolée c'est la raison pour laquelle j'ai tué mon enfant. » L'autopsie qui aura lieu aujourd'hui déterminera exactement les causes de la mort du bébé qui. à notre avis, a succombé à une fracture du crâne. Mariés depuis quatorze mois, M. et Mme Bellec formaient un ménage très uni Mme Bellec est enceinte de trois mois et ce n'est que depuis le larcin qu'elle commit dans un geste probablement inconscient vers le 1" Janvier, que son caractère changea du tout au tout. Devant la gravité des faits, M. Lautier, juge d'instruction, a décerné con'tre elle un mandat d'arrêt et nous quittons la ferme devant un pauvre homme désolé, qui pleure sur le cada- vre de son enfant. La meurtrière a été conduite à la gendarmerie de Pontrieux en attendant son transfert à Saint-Brieuc. INQUIÉTANTE DISPARITION D'UN FACTEUR ET DE SES DEUX FILLETTES Auray, 19 janvier. M. Le Blé, facteur au bureau d'Auray, étant en .congé. la semaine dirnlère, devait re- prendre son service dimanche matin, et ne parut pas au bureau. M. Le Tréis, receveur, inquiet, entreprit immédiatement des démarches, notamment, près du frère du facteur, adjoint au maire de Saint-PierreQuiberon, chez qui on pensait qu'il avait pu se rendre. Or, personne ne l'avait vu dans cette région. Au cours des recherches, on apprit seulement, qu'il avait quitté son domicile, rue Georges-Clémenceau, dans la journées de vendredi, avec ses deux fillettes, Agées respectivement de 7 et 8 ans. Depuis cette date, on ignorait ce qu'il était devenu, et toutes les recherches furent vaines. Mardi matin, le receveur envoya quelqu'un au domicile de M. Le Blé, pour voir si, par hasard, sa mère, avec qui il hebitait, avait eu de ses nouvelles. La réponse fut négative, mais on apprit qu'il avait écrit sur un cahier toute la journée de jeudi. Le facteur envoyé par le receveur, trouva, en effet, sur la table un cahier, sur lequel il jeta un coup d'œil. La lecture des dernières lignes ne lui laissa aucun doute, il acquit la certitude que Le Blé avait mis fin à ses jours, entraînant avec lui dans la mort ses deux fillettes. Dans ce cahier, après avoir décrit sa vie et les souffrances qu'il endura durant son séjour à la poste de Guémené-sur-Scorff, c 13 mois, écrit-il, qui diminuèrent sa vie de 20 ans », l'infortuné facteur continue c Je vais disparaître a l'aurore due la vie, 47 ans arrivé à l'âge mûr, je n'ai pas de peine toute grande pour moi-même, c'est pour mes enfants. Adieu à ceux qui ont été bons pour moi et misère et maladie à ceux qui ont été méchante pour moi. J'ai écrit à M. le Keceveu en lui disant de donner tout mon bien à l'Orphelinat des P. T. T., & Vannes, livret de caisse d'épargne, pension, mobilier, etc. c J'aurais bien été faire mon testament chez un notaire, mais J'aurais été lui donner l'éveil de mon projet. Adieu. c Cependant, j'avais prie il. tâche d'élever mes enfants jusqu'à 20 ans, mais, inutile, peut-être qu'elles sont malades comme moi. M. Le Blé. mutilé de guerre, étal' fi -̃♦nme sérieux, très sobre, mais neufhstbérvque et d'un caractère sombre et très renfermé. Malade, il se croyait certainement plus atteint qu'il ne l'était a LA JOURNÉE A I/A4EOPOBT 9 heures 15 heures. Aéroport de Rennet-St-Jaccruer Baptêmes de Vair et votmoes aériens. CONFÉRENCES 17 heures. Salle du Beaux-Arts, rue Hoche Conférence dt 11. André Foulon de Vaulx, président de l'Association des Poètes Français sur l'Ame Bretonne dans l'œuvre d'Eugène Le Mouël. 18 h. 30. Boulevard de la Liberté, 26 Conférence de M. l'abbé Simonntau directeur des Œuvres Soclalu sur Les délègues du personnel. 20 h. 30. Salle des Fêtes de la Maison du Peuple Conférence de Af. Ouy Robert, professeur agrégé au Lycée de Saint-Brieue sur L'Histoire du Syndicalisme français de 1905 à 1921. FETES ET REUNIONS 17 heures. Maison du Peuple Réunton générale du Syndicat du Bâtiment. 18 h. 30. Assemblée générale annuelle de l'Association des Anciens Etudiants et des Amis de la Faculté de Droit, sous ta présidence de M. Georpea Phllippar, président du Conseil d'administration de la Compapnie des Messageries Maritimes, président du Comité Central des Armateurs de France, président de l'Académie de Marine, membre de l'Académie des Sciences Coloniales. BANQUETS le h. 30. Salons de l'Hôtel Duguesciens Etudiants et des Amie de La Facutté de Droit de Rennes. BALS 23 heures. Salona de la Faculté de Droit, tace St-Melaine Soirée dansante de l'Association des Anciens Etudiants et des Amis de la Faculté de Droit de Rennes. CINEMAS 14 h. 30. Au Royal Merluaae. 14 h. 48. Select La p'tite dame du wagon-lit. 14 h. 45 Sxcelsior Bach détective. 20 h. 30 A la Tour d'Auvergne Rose-Marie. 20 h. 41 Royal Merlu_. 20 h. 45. Setect La p'tlte dame du wagon-lit. 20 h. 45. Excclsior Bach détective. LA JOURNEE JUDICIAIRE 13 h. 30. Falaise de Justice Audience de la Cour d'Appel. HALL DE CI 'L'OUEST-ECLAIR » 16 h. 30 Informations. Expositions des plus récentes photographies de l'actualité mondiale. L'OFFICE DES VOYAGES DE cc L'OUEST- ECLAIR n Dans le hall du Journal Vous délivrera les billets de chemin de ter pour toute8 destinations, sans attente et aux mémes prix qu'aux guicheta des gares. Pour vos déplacements, consultez L'Office des voyages de i L'Ouest-Eclalr ». RIMA If AH créé pour votre acte, DlHlVlVnU contient de la figue pasteurisée pulvérisée Se digère Jtlenx JOURNÉES DENTAIRES DE RENNES Organisées par l'Ecole Dentaire de Rennes, ces journées scientifiques auront lieu les 5 et 6 février. M. Davy. recteur de l'Académie et M. le docteur Dufourmentel, professeur de chirurgie maxillo-faciale, ont accepté la présidence d'honneur de ce congrès. Les conférences et les démonstrations seront faites à l'Fcole de Médecine, au Centre anti-cancéreux et a l'Ecole Dentaire. L. CAILLER, Chirurgien Dentiste 5, rue de l'Horloge Tél. 43-42 LES CONFERENCES DE LA SOCIÉTÉ DESTRUCTION POPULAIRE DE RENNES Dimanche prochain 24 janvier, à 17 heures, salle des Beaux-Arts, 30, rue Hoche, sera donnée une conférence sur La crise économique, la crise du chômage et leur solution ». Le conférencier. M. Louis Grillet, examinant les crises de même nature du XIX- siècle 1810 et 1846 notamment montrera que toutes ces crises découlent d'une même cause générale. qu'elles se développent d'après les mêmes règles, et qu'elles se sont toutes résolues par le développement Intensif d'industries, travaillant jusqu'alors pour une minorité de consommateurs et qui de ce fait deviennent des industries de fabrication de produits d'une consommation plus générale. puis de produits de première nécessité. Jusqu'alors. toutes les crises ont abouti à une augmentation du standard de vie pour J'ensemble de la nation. Le développement de l'industrie de la construction pour l'habitation doit avoir la plus heureuse conséquence pour la résolut!on de la crise actuelle dans tous les pays. UNIVERSITÉ DE RENNES Conférences publiques de la Faculté des Lettres M. Collas, profeaseur, fera jeudi. 21 janvier, a 17 heurea, salle A. Le Bras, une conférence publique sur le sujet suivant La bataille des Satfrea. suadé qu'il avait communiqué sa maladie a ses enfants. M. Le Tréis s'est empressé de mettre la gendarmerie de notre ville au courant et des recherches sont actuellement en cours pour établir dans quelles circonstances le facteur Le Blé a Ole à écutiQtt w Iune»t proJM» LE KRACH DE LA SOCIÉTÉ DE PANIFICATION Deuxième audience Les débats, interrompus lundi soir ont repris hier. M. le bâtonnier de Goascaradec, représentant, avec Me Bourrut-Lacouture, les parties civiles, jointes, prend la parole. Il signale d'abord le diacredit que les prévenus tentèrent de jeter parmi les intéressés, sur leurs conseils. M. Marçais jurait qu'il' n'avait pas voulu cela et qu'il était prêt à réparer dana la mesure de sa fortune. Plusieurs se déclarèrent disposés à écouter ses propositions, mais il out se rendre insolvable en tnuvant acquéreur, à des prix suffisants, pour couvrir légalement le chiffre des hypothèques grevant ses immeubles. Du moins ces prix furent les prix officiels, ce qui ne veut pas dire qu'il ne tirât point de ces ventes un certain profit. Quelques jours avant l'audience du 21 novembre 1935, Il se débarrassa de cette façon de propriétés aux environs de Hédé, château, dépendances et bois. C'est pourquoi, aujourd'hui, les commettants du bâtonniers ont chargé ce dernier d'affirmer à la barre que, contre le sentiment du tribunal, cest M. Marçais qu'ils considèrent comme le plus coupable. S'ils n'avaient pas constaté sa présence aux conférences des démarcheurs, ils n'eussent point souscrit. M* de Goascaradec regrette que dans l'inculpation dirigée contre M. Marçais, s'il a été tenu compte du délit de mise en circulation d'actions non libérées du quart, il n'ait pas été retenu contre lui la souscription à l'aide de traites, délit pour lequel Thibault a été condamné. L'avocat croit pouvoir demander la requallflcation de ces manœuvre dolosives. La Cour peut condamner aussi bien l'un que l'autre pour délit de droit commun, d'escroouerie et tentative d'escroquerie, délits découlant des articles 13 et 15 de la loi du 24 juillet 1867. Car, à la base de toute cette affaire, il y a abus de confiance et escroquerie. La panification de Rennes n'a été tentée que pour voiler le déficit du Mans. Puis, dana la pensée du prévenu, l'affaire à créer à Nantes eût caché les pertes de Rennes et ainsi de suite Angers et Tours. C'était dépouiller Saint Pierre pour habiller Saint Paul. C'était encore faire la boule de neige. La panification du Mans est déjà malade quand, le 24 décembre 1931, est décidée la création de celle de Rennes, à qui on donne tout de suite une personnalité juridique autonome, avec des statuts tout preparés pour le notaire. Sans tarder, paraissent quelques articles de presse, puis des démarcheurs étrangers au pays, bien stylés, et en juin 1932 tout est prêt peur l'assemblée générale. Le capital sera de francs, comprenant de l'argent frais et les effets souscrits à présenter à l'escompte. D'octobre 1931 à juin 1932, l'argent afflue en billets de banque ou en bons de la Défense Nationale. Tous les fonds sont adressés au Mans et déposés, par la Société de PaniScation de cette ville, au Crédit Lyonnais. Malgré tout, le versement du premier quart n'a pu être réalisé. Ce n'est pas la faute des démarcheurs, de leurs réunions où les détenteurs de petits capitaux étaient conviés par cartes de convocation signées Marçais. M. Marçais payait ces agents a la journée. Il laissait dire qu'il avait souscrit francs, alors qu'il n'avait pas dépassé et versé seulement Les démarcheurs parlaient en public du patronage du ministre de l'Agriculture ou de celui de M. Guernier, ministre des de la garantie de l'Etat pour un capital pouvant aller jusqu'à 4 millions. On produisait des souscriptions fictives ou majorées, on promettait du 6 Interrogés devant le juge d'instruction, des démarcheurs comme Bazin et Chatelard ont déclaré, sous la foi du ferment, n'avoir rien fait que d'après les instructions de M. Marçais. Si l'une des dupes, enfin éclairée, demande des explications, M. Marçais l'envoie avec un billet à M. Thibault pour qu'on la rembourse. Sur l'application de l'article 15 de la loi du 24 juillet 1867, le Tribunal correctionnel de Rennes a trouvé qu'il s'agissait moins, dans cette propagande, de faits prétendument réalisés que de promesses. L'article 15 n'ayant pas défini le caractère de la publicité, il faut s'en tenir sur ce chapitre aux notions générales. Pourquoi la souscription s'est-elle faite par des effets de commerce acceptés par les cultivateurs ?. Pourquoi ne s'est-on pas borné à faire des appels de fonds ? C'est que, établis sur le papier de la Société de Panification du Mans portant la signature, non pas d un administrateur délégué de la société rennaise, comme M. Thibault. mais celle de l'administrateur manceau, feu M. Demeuré, ces eSets étalent destinés à être remis à l'escompte. au profit de la société du Mans. MO de Goascaradec rend justice aj Crédit Lyonnais qu'il a pu croire ur instant de connivence, mais dont la bonne foi lui a été démontrée. Au dernier moment, lorsque les cultiva- teurs alertés orirent une position me- nacante. M. Thibault essaya de récu- pérer une somme de fr. payée de cette façon aux établissement!» Lldon avec l'argent rennais, pour le compte de la Panification du Mans. Ce sont là les novations dont a parlé Mc Apnleson. La déclaration, sur le vereimnnt in- tégral du premier quart, était donc controuvée. Des cultivateurs s'étalent intéfrrelement libérés, d'autres valent versé moins d'un quart, et d'autres rien du tont. C'est alors que la So- ciété du M»ns prétendit, par une somme de francs, couvrir la différer^ un t'ers Tv>uvnnt. à la coti- dition d'aviser le débiteur, libérer luimême 1% créance d'autrui. Un tel ti- glement doit être réel et effectif. Or de cette opération, il n'est pas de trace pour ia sortie dans les registres du Mans, en faillite à la date indiquée par la lettre, où il n'est question de ce virement, non plus que dans les entrées de la Société de Rennes. Le 6 juin 1932, la Société du Mans auraitelle pu s'y prêter elle qui, en faillite, n'avait plus un sou ? Cette lettre a été fabriquée, dit le bâtonnier, pour les besoins de la cause, M. Marçais n'était-il pas le président de l'une et de l'autre ? n y a activité de correspondance et de versement. Et c'est cependant sur ce virement, que le tribunal a fondé sa clémence relative. M* de Goascaradec s'étonne que le tribunal ait pu débouter les parties civiles de leurs conclusions, sous prétexte qu'il n'y avait pas de relation entre les effets et la cause, entre le préjudice subi et la nullité de la Société. Le tribunal n'a voulu voir cette cause que dans l'emploi fautif des fonds. Et cependant, vu la non libération du quart de la souscription, la Société n'existe pas et ne peut avoir d'effets juridiques. M* de Goascaradec termine sa longue plaidoirie en déclarant n'avoir aucun doute sur la non passivité de M. Marçais en cette affaire. Il n'aurait jamais dû accepter ces présidences. Il est mal venu à feindre d'ignorer ce qui se passait, n doit supporter l'entière responsabilité. D'accord en cela, avec M* Appleton, M' de Goascaradec estime que le premier coupable est M. Marçais. Plaidoirie de Me BourrutrLaeoutnre M* Bourrut-Lacouture partage entièrement cette conviction. M. Marçaia a la responsabilité morale aussi bien que pénale. Il ne faut point lui attribuer un rôle effacé. C'est grâce à son influence que, fin 1931 et débuts 1932, se sont formées ces masses de souscriptions. Les campagnes étaient encore en pleine vigueur et cette prospérité factice de la veille. Elles s'émerveillaient de fortunes marchandes ou Industrielles si rapides à s'échafauder, près du dur travail de la terre. Comme elles avaient encore de l'argent, il était facile de leur faire rechercher dans une belle entreprise, un enrichissement plus rapide. n se trouva des gens qui leur parlèrent de la suppression de l'intermédiaire, dans la transformation de leur principal produit le blé, d'où idée d'une coopérative. Ce fut le moment psychologique, pour l'ancien député, homme très riche et influent. Celui-ci ne parla ni n'écrivit. Mais sa présence aux conférences, les mensonges et les manœuvres dont il laissa les démarcheurs éblouir les gens simples, les articles, les prospectus, l'exemple des souscripteurs et son propre exemple, les convocations signées de sa main, tout cela créa l'atmosphère favorable. Qui connait mieux que lui, les ressources de ces laborieux ? Il paie ses démarcheurs sur le pied de 15 En huit mois, deux d'entre eux se font chacun plus de francs. On draine ainsi une somme de Ir. M. Marçais aurait pu se ressaisir. Le 27 et le 28 novembre 1931, deux cultivateurs viennent le trouver. Ils t'étonnent de certains propos entendus et voici la réflexion àe M. Marçais. fiairant le danger c Est-ce que Thibault voudrait rembourser la Société du Mans ? Il y a abus de confiance chez ces deux hommes. L'argent recueilli, détourné de sa destination, a été remis au Mans. On trouve ici tous les éléments constitutifs d'un tel délit défini par l'article 408 du C. P. Les prévenus se sont mis dans l'impossibilité de représenter les fonds dissipés. Il n'est point nécessaire, pour que le délit existe, qu'ils en aient profité. Ils ont fait servir à autre usage ce qui était destiné à la Société de Rennes. Les premiers temps, on peut s'expliquer qu'ils considéraient l'argent confié comme les prodromes de la réalisation du projet primitif, Le MansRennes-Nantes-Angers qui nécessiterait un capital de francs. Le succès, lamentable au Mans, était moins médiocre t Rennes à cause de la notoriété de Marçais. Mais après 1931, les choses changent. Il ne s'agit plus que du sauvetage du Mans. C'est au Mans que se concentrent toutes les affaires. On a excusé cela en disant qu'au Mans existaient d'importants services de comptabilité. Il est plus croyable qu'on eut de suite l'idée de faire marcher Le Mans avec l'argent de Rennes et de solder ainsi les fournitures des établissements Lidon Car tout à Rennes semble abandonné de bonne heure. Le 16 janvier 1933, sur ordre de la police judiciaire, il est constaté avenue de Chardronnet, l'état lamentable des constructions. Vu l'heure tardive, M. le conseiller Poret, président de la 3' Chambre, renvoie à aujourd'hui la suite de la plaidoirie de M* Bourrut-Lacouture. Ce soir, à 17 heures, aux Beaux-Arts, conférence littéraire sur l'âme bretonne dans l'œuvre d'Eugène Le Mouël Aujourd'hui mercredi 20 janvier, salle des Beaux-Arts, rue Hoche, à 17 heures, M. André Foulon de Vaulx, président de la Société des Poètes Français donnera une grande conférence, avec interprétation de poèmes, sur L'dme bretonne dans l'œuvre d'Eugène Le Mouël. Avec son beau talent de conférencier, il saura faire revivre les plus belles pages d'Enfants bretons, de Fleur de blé reoir, de Bonnes gens de Bretagne et de tant d'oeuvres du poète qui a si bien compris sa province et chanté avec tant de force rame des gens et des choses de son pays. M. Davy, recteur de l'Académie présidera. Tous ceux qui aiment la Bretagne et la poésie se feront un devoir d'y assister. Entrée gratuite. Une quête sera faite après la conférence au profit du monument. RENSEIGNEMENTS JURIDIQUES Contentieux, procès attirée litigieuses, baux, loyers, uceesoiona, impôts, etc..Hurol ci renseignement4 cuure mandat de 8 t. 60 adressé à l'Uue-£cMir. L'A » PARAITRA DEMAIN ,j Le spirituel journal estudiantin fera. sa quatrième sortie demain; si voua l'apercevez, n'hésitez pas à mettre la main dessus, de peur qu'il ne vous échappe. l'auto qui s'est signalée à notre attention ces jours derniers, vous sera dévoilé dans l' A » demain, Vous lirez aussi dans l' Il A s un article sur d'éminentes personnalités rennaises Ces Messieurs en bordée, d'innombrables blagues, des poèmes, des études littéraires, les critiques de théâtre et de cinéma, des comptes rendus sportifs, etc. Achetez l' t A », surnommé par un de ses confrères Le papillon du Parnasse ». Ce numéro sera Illustré abondamment par des clichés inédits et sensationnels. IMMEUBLE DE RAPPORT à vendre a Rennes., 21 pièces, plein centre, avec fonds de meublé, très belle affaire enlever suite. Rapport net 8 GAUDIN, 41. rue Paul-Bert, RENNES. LA PLUS BELLE INDEFRISABLE Se fait au CENTRAL INDEFRISABLE. 28. rue PoullalnDuparc. RENNES. Tél. 49-09. !'• Maison spéciaffsée dans l'Indéfrisable de sécurité et. la recoloratlon lnnoHenslve. ON DEM. 1. F. DACTYLO aide-compta. ble. Ecr, HAVAS, RENNES, n* 600. ON DEMANDE VENDEUSE au courant pour la couture. Sér. référ. exigées. Ecrire HAVAS, RENNES, n* 601. GARCON BOUCHER SËïïSsâ; l'abattoir est demandé Boucherte Pivert Pontorson Téléph. 17. Référ. exigées.' L. OLLIVRY 3. rue de Brllhac. Haut place Mairie! RENNES Tél. SPECIALISTE DE "INDÉFRISABLE avec et sans B1 60, 8U fr. et 10U fr. Tête entière, tout compris. Dépositaire de Guerlain et PnéDei Vingt Salons pour Dames et Messieur». E. RIUOULUT, Place Mairie, RENNES. 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MAGASINS MODERNES RENNES JEUDI 21 JANVIER et Jours suivants QUINZAINE ANNUELLE DE o BLANC 0 DES ACHATS MASSIFS, FAITS EN TEMPS OPPORTUN, NOUS PERMETTENT DE VOUS OFFRIR UN STOCK IMPORTANT DE MARCHANDISES BIEN AU-DESSOUS DES COURS ACTUELS ACHETEZ. ACHETEZ du BLANC des MAGASINS MODERNES, à des prix que vous ne reverrez pas Le BLANC des MAGASINS MODERNES dont la qualité fait la réputation H INSTRUCTIONS CONTRE LA GRIPPE M. le Ministre de la Santé publique, en raison de l'épidémie de grippe qui sévit dans les pays voisins du nôtre, -charge M. le Préfet et MM. les Maires de recommander à la population de recourir à certaines précautions énumérées ci-après 1- Eviter les reunions. Il est avéré que les réunions importantes, dans des endroits confinés ou encombrés, offrent à la grippe des conditions extrêmement favorables à sa diffusion. On s'interdira, chaque fois que les nécessités de la vie le permettent, de s'enfermer dans les lieux fréquentés du public. Ces prescriptions sont particulièrement Impérieuses à l'égard des enfants en bas Age, des personnes Agées ou affaiblies. 2° Eviter le refroidissement, surtout après le travail; éviter le surmenace. 3° Antisepsie de la bouche et du nez brossage des dents deux fois par jour; lavages de bouche et gargarismes chauds à l'eau salée à 15 p. une cuillerée café pour un demi-litre d'eau, ou à l'eau oxygénée une cuillerée à café par verre d'eau; instillations nasales, deux fois par jour, d'huile goménolée à 10 p. 100. 4° Eviter les poussières, Le balayage à sec doit être proscrit en particulier dans tous les lieux de réunions. Lorsqu'en dépit de ces précautions, une personne ressent les signes avantcoureurs très connus frissons, courbature, fièvre, enchifrènement, sensation de chaleur à la gorge, elle doit, dans son intérêt, en raison des complications qu'une grippe même fruste peut occasionner, rester à son domicile et appeler un médecin. La déclaration de la maladie n'est pas obligatoire, mais les chefs de famille auront intérêt à la faire ou à la demander à leur médecin, car la désinfection des linges et des locaux est nécessaire. A l'Amicale des Bretons bretonnants de Rennes On nous communique Le comité de l'Amicale des Bretons Bretonnants de Rennes, réuni à l'Hôtel de Brest, son siège social, le vendredi 15 janvier, se joint énergiquement au grand mouvement de protestation qui se manifeste dans tous les milieux bretons vraiment conscients de leur dignité à l'égard de l'odieuse bande cinématographique Tout va tris bien, Madame la Marquise. Ce film fait suite à La Marpoton du Bataillon et à d'autres insanités issues d'un esprit de dénigrement systématique que nous ne pouvons admettre. Si Bécassine amuse les gens à nos dépens, les autorités responsables ne devront pas oublier le lourd tribut de la Bretagne pendant la guerre, qui doit lui donner droit au respect elémentaire. La Bretagne n'est pas ce pays rétrograde qu'on veut faire conn»!.tre au public. On a voulu matérialiser le mépris que l'on porte aux hacheurs de paille x, mais en les ridiculisant ainsi, on s'attaque à une industrie vitale pour eux le tourisme. Notre prestige moral veut qu'à la suite de cet acte, il y ait réparation. Les platitudes de Noël-Noël ne suffisent point, pas même des coups de ciseaux par ci, par là. Nous aurons l'occasion d'applaudir de tout cœur prochainement un geste sympathique de M. le Ministre détruisant par devoir cette ordure. Une attitude négligeante de sa part envers cette infamie donnerait au séparatisme le champ libre; aussi, soutenant moralement les bruyants protestataires de Paris, nous demandons d'urgence justice. 1 BACH DETECTIVE! âuiiiiiimiiiiiiiiiii Le ui des Policiers iiiiimiinmiimih' fait MOURIR de rire 1 1 Tél. L'ENCELSIOR Tél. ^llllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllN JEUDI 21 JANVIER, à 14 heures MATINEE A PRIX REDUIT PLACES DE 1 FRANC à 9 FRANCS tout compris LA VEUVE JOYEUSE Le triomphal succès de Mlle G. AVRIL-PARELLY et de M. Ed. DEMONTY, avec toute la Troupe Louez vos places. Téléphone 20-37. SAMEDI 23 Soirée, DIMANCHE 24 Matinée et Soirée, 3 représentations de FRASQUITA », avec les danseurs MARELINDA et RICO LOCATION VENDREDI. f£2i5 AU ROYAL f2=£5 g Avez-vous été voir 5 i MERLUS SE 1 g C'est un film de Marcel PAGNOL g cÏNÈ^AMIuÀrLA ^^tÔu^aÛvERGNeTl42^891 Exceptionnellement, Soirée aujourd'hui à 20 h. 45 Matinées Jeudi. à 14 h. 15 Dimanche, à 14 h. 30. Soirées Jeudi, Samedi, Dimanche, à 20 h. 30- x H n Location gratuite tous le» Jours, de 10 h. a 12 h. et de 16 h. à 18 h. Il EN VISITE CHEZ NOTHE CONFRÈRE L'A », LE PREMIER JOURNAL ou MONDE, JOURNAL DES ÉTUDIANTES ET ÉTUDIANTS RENNAIS Photo-cliché L'Ouest-Eclair ». La rédaction de l' cc A groupée dans cc son » bureau de la rue Saint- Yves. L'Ouest-Eclair en visite à l'A. Nous devions cette visite à nos éminents confrères du premier journal du Monde. par lettre alphabétique, c'est entendu, mais aussi par l'esprit et l'humour que ses collaborateurs dispensent deux fois par mois seulement, hélas! dans les douze pages de ce journal bi-mensuel, dont les Etudiants ne sont pas les seuls lecteurs à attendre impatiemment la parution. de toute la ville que l'A prête à L'Ouest-Eclair *ses ateliers, ses machines, pour lui permettre de paraître chaque jour. Comment dès lors manquer aux devoirs de politesse et de reconnaissance en oubliant d'aller, à l'occasion de la nouvelle année., présenter nos vœux à ceux qui assument la lourde responsabilité de présider à l'administration et à la rédaction du journal estudiantin. Avec une bonne grâce charmante et un esprit de confraternité dont nous les remercions ici, nos éminents confrères ont bien voulu nous recevoir chez eux, dans leurs bureaux de la rue Saint-Yves. Et je vous prie de croire que ce ne fut pas sans émotion que je pénétrais dans ce sanctuaire où le rédacteur en chef, un prénommé Maxime, dont le sourire découvrait des crocs bien faits pour mordre, avait réuni son état-major. Ainsi, je me trouvais en compagnie de l'élite journalistique du moment de cette phalange qui deux fois par mois met le feu à la ville c'est une image par ses potins et ses on-dit habilement présentés, par ses grands reportages toujours vécus, par ses critiques littéraires et artistiques toujours marquées au bon coin de. la satire correcte et amusante. Maxime, son éternel sourire narquois aux coins des lèvres fit les présentations. Et c'est ainsi que je connus les noms et que je serrai la main de Leroy, secrétaire général de la rédaction, du président Le Mazou, grand censeur de la maison, de Le Goff, préposé à la chronique scientifique ouand il n'est pas pris par l'organisation de service d'ordre et qu'il peut, sans danger pour la sécurité de la ville, troquer son bâton blanc pour le stylogranhe du chroniqueur, de Jean-Pierre Gasnier, un cumulard celui-là, puisque en dehors de ses fonctions administratives et de son rôle d'avocat stagiaire, il collabore aussi à la revue corporative des Etudiants en Droit L'Hermine. Devant d'aussi éminents confrères.. l'avais conscience de ma faiblesse. Heureusement, ils eurent la gentillesse de ne pas abuser de leur supériorité et c'est sans forfanterie aucune qu'ils me firent visiter leur installation. Sur 1 le bureau du patron j'apercevais mon rêve » une machine à écrire. Maxime qui avait traduit l'envie de mes regards me dit Eh oui. vous voyez, nous possédont même une machine à écrire que nous mettons à la disposition de nos rédacteurs. Quel luxe Oui. n'est-ce pas ? Il n'est du reste qu'un très léger ennui la machine à écrire ne fonctionne pas. Mais nous l'avons. Evidemment, c'est déjà quelque chose. Autre avantage l'A est rédigé par une équipe de collaborateurs si distingués que les titres n'y comptent pas. Le rédacteur en chef, les échotiers, les critiques, le gérant, sont tous placés sur le même plan. C'est pourquoi nous n'avons qu'un bureau, et dans ce bureau qu'un seul fauteuil. C'est le bureau, le fauteuil de tous. Entre nous, nos collaborateurs préfèrent travailler at home ». Pensez-donc, si l'un de nous réussissait à réparer la machine et à s'en servir, ça en ferait du bruit. » Quelques minutes plus tard, le prénommé Maxime et son fidèle second Leroy me font visiter ruche fiévreuse et bruyante les ateliers d'imprimerie de l'A. Oh bien sûr, je ne suis pas certain de ne pas avoir rencontré là des visages et des silhouettes connues, mais la présence des grands chefs du journal estudiantin mettait dans cette maison qui, dès l'entrée, m'avait semblé familière, un je ne sais quoi de nouveau et d'inattendu qui transformait les gens et les choses. Et je fus saisi de l'accent de sincérité avec lequel Maxime, qui prenait une épreuve à la brosse, cependant que Leroy, tel un typographe expérimenté, maniait des paquets de lignes et effectuait sur le plomb des corrections, me dit en me montrant tout l'atelier Voici notre marbre. nos linotypes. en bas, je vous ferai voir notre clichérie, nos rotatives. » Quelle magnifique organisation 1 Vous voyez, nous préparons le prochain numéro de l'A, celui qui paraîtra jeudi. » Un coup d'oeil rapide sur les épreuves me permet de me rendre compte qu'il contiendrait des échos fameux. Avec esprit, avec humour, quelquefois avec rosserie, mais jamais avec méchanceté, les collaborateurs de l'A font de la mise en boite ». Et je ne suis pas très sûr que certains de leurs prochains échos n'égratigneront pns nuelque peu le reporter qui se permit d'aller troubler leurs travaux. Comme tout le monde, jeudi matin, je m'empresserai d'acheter le premier journal du monde l'A. J. TH. Un neveu qui n'attend pas. vole une f orte somme d'argent à son oncle, la dépense et se f ait arrêter Le 9 janvier dernier, M. François Daniel, demeurant 154. rue de Brest, portait plainte, une forte somme d'argent environ francs lui ayant été dérobée chez lui. Une enquête fut ouverte et la Sûreté fit des recherches adroites. Les circonstances du vol permettraient d'affirmer que seul un habitué de la maison pouvait l'avoir commis. On limita le cercle des poursuites à l'entourage immédiat de M. Daniel. C'est ainsi que le Jeune Antoine Poussier, 24 ans, chauffeur-livreur, habitant cité Villebois-Mareuil, fut étroitement surveillé. Neveu du plaignant. il pouvait bien ne pas être étranger à l'affaire. Les agents Gautier et Tirel, du Service de la Sûreté, s'attachèrent à ses pas Ils ne tardèrent pas à reoiarquer les exagérations monétaires du chauffeur-livreur. Poussier menait grand train, trop grand train pour sa condition. Ce qui devait arriver, arriva. Poussier fut invité à venir expliquer l'emploi et la source de ses revenus anormaux. Hier donc il fut conduit à la Sûreté où après quelques hésitations, il avoua ce qu'on devinait fort bien. Effectivement il avait volé son oncle sans en attendre l'héritase. Il n'avait pas pris le gros magot d'un seul coup Pas si bête Par billets de francs et petit à petit il avait rassemolé le pactole qui lui permit d'améliorer son standard de vie. C'est ainsi qu'il s'était acheté des meubles, qu'il avait échangé en mettant la différence une vieille automobile contre une plus récente. Il s'était payé des voyages. Bref, il avait bien profité et quelquefois sagement d'une richesse malheureusement illégalement et malhonnêtement obtenue. Le chauffeur-livreur pourra grandement éditer sur les circonstances de la i ortun* LES GRANDS BALS DE L'HOTEL DE VILLE SAMEDI PROCHAIN BAL DE BIENFAISANCE DE L' A » EN FAVEUR DU SANATORIUM DES ETUDIANTS L' des Etudiants organise le 23 janvier, un grand bal dans les salons de l'Hôtel de Ville, au profit du Sanatorium des Etudiants. Le traditionnel entrain de la jeunesse universitaire, la verve des dix boys du Lily's Orchestra, la splendeur du cotillon doivent en faire une des plus joyeuses soirées de l'année. Le comité de l'A. a déjà reçu de nombreuses demandes de cartes d'entrée au bal. Il s'excuse de ne pouvoir y répondre, des circonstances exceptionnelles ne lui ayant pas permis d'organiser leur distribution comme par le passé, sous le patronage des principales personnalités rennaises. En conséquence, ces cartes ne pourront être mises en vente qu'à l'entrée du bal aux prix de 8 et 15 francs. Le 13 février bal des Sports Nous apprenons que le Bal des Sports 1937 aura lieu le samedi 13 février dans les Salons de l'Hôtel de Ville, sous la présidence d'honneur de M. Bodenan, préfet d'Ille-et-Vllaine, M. le général d'Arbonneau. commandant la place et M. Château. maire de Rennes. L'organisation de ce bal, dont les bénéfices, on le sait. doivent être repartis entre les différentes œuvres de bienfaisance pour l'enfance, a été confiée à un comité qui comprend tous les présidents des sociétés sportives rennaises. Nous pouvons dire, dès maintenant, que le c Lily's Orchestra », dans sa grande formation, divisée en deux orchestres qui joueront sans interruption, assurera au Bal des Sports 1937 un succès sans précédent. Nous donnerons prochainement tous détails sur l'organisation de ce bal. RENSEIGNEMENTS MILIIA1KE8~ ttecruiuoinnt oursin d'Incorporation, réloruie pensions. etc.. Sadreniier à Baoiu». Uun'»nts et la famille remercient bien slncèrament les personnes qui leur ont témnlsné de la sympathie l'occasion du décè? de Monsieur Alphonse GOURMAUX at en particulier celles qui ont offert der fleurs. Mm* et M. Beaup'.et. lnstl- ti'*»ur le fqmtll Ouprm^nd. B»flU"'•t. i,e Cm-»"nel. Frémy. DescMmns, r-MTcrrtpm hlMl s1nc*'P"nU toutp i** p*»non"» r^iTi leur ont témoigné un- si vive svm"n>Mi> k l'occasion du décès de leur cher petit ALAIN SAINT- Mme Paul Blllaz. M. et Mme Stéphane Noury. leurs enfants et leurs familles, remercient bien sincèrement toutes les personnes qui leur ont témoigné leur sysmpathie Il l'occasion du décès de Monsieur Paul BILLAZ COMZTi DfPARIEHEKTAI. Artisans maf/v aiavë si Altiste rva't rdue de Cl,udlençe, M* Carra, avoué, déclare se porter partie civile pour M. Hameiot, père de l'enfant. M* Naut, avoué, assure la défense de M. Momi. Jugement le 2 février. IL FAUT DES PREUVES A la requête de M. Delegge, proprié- taire au Pertre, M. Martin Louis, cul- j tivateur à la Nafterie, en 8t-M'Hervé, est prévenu d'avoir, le 29 novembre 1936, vers 14 heures, chassé dans un bois bordant la ferme de la Caillefer, en La Chanelle-Erbrée, bois appartenant au plaignant. A l'audience, les déclarations du garde sont en contradiction avec celles du prévenu et celles d'un témoin. Alors M' Carro, représentant la par- tie civile, déclare ne pas vouloir poursuivre l'affaire. Le tribunal, estimant que la preuve du délit n'est pas faite, acquitte Martin, et condamne la partie civile aux dépens, au bourg de Cornil'é; Perrier Maurice, charron au même l'eu. et Loury Jo seph, cultivateur à la Mai'larditre, en Cornillé, prévenus de chance sur autrui, le 15 novembre dernier, à la re- quête de M. Lemonnier, cultivateur au Pàtis, en CorniUé. ont été acquittés, la preuve du délit n'ayant pas été faite. M' Carro. avoué, plaidait pour la partie civile et M' Perdriel-Valssière. avocat à la Cour d'Appel de Rennes pour les prévenus. AU DISPENSAIRE ANTITUBER- CULEUX. n n'y aura pas de consultation demain jeudi 21 janvier, le doc- teur étant souffrant. CLASSE 1927. Les membres de la classe 1927 sont priés de se réunir ce soir, à 20 heures, au café LhermenierLetort, boulevard de Lavel. But de la réunion organisation du banquet. CLASSE 1918. Le banquet de la classe 1918 aura lieu le samedi 6 février prochain, à 20 heures, au café-restau- rant Gasnier, boulevard Pierre-Landais à Vitré, où les cotisations devront être versées au moins huit jours à l'avance. OUTRAGES A AGENTS. Dimanche soir, M. Louln, agent de ville à Vitré, étant de service au cinéme, fut prévenu que deux Individus en état d'ivresse causaient du scpndale dans un café. Se rendant en ce lieu, M. Louin invita les deux hommes à sortir. C'é- taient les nommés Gilbert Pierre, do- j micilié rue du Val, et Peltier Auguste, même lieu. Au lieu d'obtempérer à cet ordre, les deux Ivrognes insultèrent grossièrement le représentant ds l'ordre public, puis rentrèrent chez eux. Le lendemain lundi. 16 heures, rencontrant à nouveau l'pgcnt Louin, Gil- bert et Peltier l'insultèrent derechef. Gilbert, retrouvé le soir même en complet état d'ivresse, fut conduit au violon où il passa la nuit. Procès-verbal fut dressé aux deux hommes. LA OUERCHE-DE-BRETAGNE BAL DE LA MUSIQUE MUNICIPALE. Le deuxième bat de la Musie Municipale pour l'hiver 1936-1937 .2* lieu dimanche prochain, à 20 h. 30, dara les salons de l'hôtel Gandon. Ce bal. qui est ouvert à tous, aura un excellent orchestre sous la direc- tion de M. Laurent, chef de la musique. CONSEIL MUNICIPAL. Le Conseil municipal se réunira en séance publique vendredi prochain 22 Janvier, à Ordre du jour communication d'un mémoire préalable à l'ouverture d'une instance à engager contre la commune de La Guerche par M. Solnicka. LE PERTRE CONFÉRENCE SUR LES ASSURANCES SOCIALES, Jeudi prochain, à 19 heures, salle du Patronage, une causerie sur les assurances sociales sera faite. Un conférencier de Rennes donnera des renseignements pour les cas particuliers qui pourront être demandés. SAINT-M'HEKVB GRAVE ACCIDENT. Un pénible accident est survenu lundi à M. Ange Oranger, propriétaire cultivateur à i l'Orriere. M. Oranger se rendait au Moulin-Neuf. en La Croixille, avec sa voiture, conduire du blé et pour ramener de la farine. En route, considérant que la selle de sa jument était mal assujettie il descendit de voiture, pour la remettre, quand faisant un faux pas, il se brisa la jambe. M. le docteur Chevallier, de Vitré, lui a prodigué ses soins et lui a prescrit un long repos. Nous formons des vœux pour le prompt et complet rétablissement du MOUTIERS Un cultivateur est blessé par une ruade Lundi aoir, vers 17 h. 30, M. Lemarié Aman 35 ans, cultivateur au PetitChevroiais, allait chercher ses chevaux 1 dans une prairie afin de les faire rentrer à l'écurie. Il avait ouvert la barMère du champ et se tenait à l'entrée lorsque le dernier cheval en sortant lui décocha une ruade qui l'atteignit à la Jambe gauche à hauteur de la cuisse. Ayant beaucoup de peine à marcher, le blessé fut transporté à son domicile où M. le docteur Vallée, de La Guerche, fut appelé à lui donner ses soina; le praticien ne releva aucune fracture. M. Lemarié devra garder le lit quelques jours et un repos de 15 jours sera nécessaire à sa guérison si aucune complication ne survient. Espérons que cet accident n'aura pas d'autre suite et nous souhaitons prompt rétablissement à M. Lemarié, i 5, ni'A an-Jaurès. L'éclairage de la chaussée de Saint-Nicolas Nous avions annoncé que des travaux étaient en cours pour l'éclairage de la chaussée de Salnt-Nicoias. Ces travaux sont aujourd'hui termines; on a conservé deux lanternes surplombant le milieu de la chaussée à La Digue; les autres lampes centrales >..t été supprimées et remplacées par 13 lanternes placées sur le passe-pied de 1 la route. Cette idée excellente devrait permettre aux piétons de circuler sans danger sur l'emplacement qui leur a été réservé, une lueur suffisante éclairant la route elle-même, sans aucune gène pour les automobilistes. Mais. pour un motif que nous ignorons et qui pourrait être la surcharge de la ligne, l'éclairage est nettement insuffisant. Aussi devrons-nous attendre que l'Energie Electrique de la Basse-Loire ait remédié à ce manque de courant pour apprécier pleinement le travail réalisé à la demande de la municipalité de Saint-Nicolas. LES SEANCES DU PATRONAGE SAINT-CONWOION. La première des représentations des Deux OrpheUnes au patronage St-Conwoïon, a obtenu, dimanche dernier, un grand succès et nombre de personnes n'ont pu trouver de place. Rappelons que la deuxième séance aura lieu dimanche prochain, à 14 h. 30 Dores et déjà on peut retenir ses places chez M. Trochu, directeur de 1 Œuvre, rue de la Gare. EPAVE. Un vêtement caoutchouc d'enfant, a été recueilli sur la vole publique èt déposé au bureau de police où l'ayant droit pourra le récla- MESSAC LA FOIRE. La première foire de l'année, bien connue dans le pays, se t'endra au bourg de Messac, le qua- trième mardi de janvier, c'est-à-dire le 26. Cette foire, la plus importante de l'annee. est très suivie et attire dans la localité beaucoup de monde. Les agriculteurs et les marchands de bestiaux y viennent très nombreux et y trouvent de beaux animaux. SÉANCE THEATRALE DU TIM- BRE ANTITUBERCULEUX. Nous apprenons que la matinée théâtrale au profit du timbre antituberculeux qui devait avoir lieu le dimanche 31 janvier a été reportée courant février. Nous tiendrons ultérieurement nos lecteurs au courant de la date exacte de cette séance. MINIAC-SOUS-BECHEREL NECROLOGIE. Nous avons appris avec regret le décès, survenu Minac, dans sa 84' année, de Mlle Marie Gendrot. Dimanche dernier, au sortir de l'église, elle fut prise d'un malaise su- bit et décédait dans la soirée, vers j 20 heures, sens avoir repris connais- sance. A la famille de la vénérable défunte très sympathiquement connue à Mi-' n'ac, et en particulier à M. Constant Gendrot. son frère, maire de cette commune et conseiller général du canton de Bécherel, nous offrons nos bien vives condoléances. BREAL-SOUS -MONTFORT PAIEMENT DES ASSISTANCES DIVERSES. Le percepteur de Mordelles prévient les administrés que les assistances aux vie'llards. aux femmes en couches et l'encouragement national aux familles nombreuses devront être encaissés par les intéressés avant le 23 janvier 1837, dernier délai. CHIFFRE D'AFFAIRES. Il Mt rappelé que l'lmp0t sur le chiffre d'aSai- ras aéra perçu la mairie de Saint- Méen le Jeudi 21 courant toute la JourMONTAUBAN-DE-BRETAONE Un grave accident un passage à niveau UN JEUNE CYCLISTE A LE PIED ÉCRASÉ PAR UNE MICHELINE Un grave accident s'est produit hier matin, vers il heures, au passage i, niveau de la ligne Paris-Brest, situé sur le G. C. 28 bis allant de Montau- ban-de-Bretagne à Saint-Méen-le- Grand, à environ mètres de la gare de la Brohinière. Un jeune cultivateur, de Montauban, M. Henri Blanchet, 16 ans, roulait a bicyclette, sur le chemin de grande communication. Lorsqu'il fut il. hauteur du passage à niveau, il vit que les barrières étaient fermées. Au lieu d'attendre le passage des convois signalés, sans descendre de sa macnine, il poussa le portillon et s'élança sur les voies mais comme il s'était engagé, il entendit soudain le roulement rapide d'un train venant de Rennes. Le jeune homme crut être sauf en faisant un bond en avant. Par comble le malchance arrivait à cet instant sur la vole montante une Micheline dont le conducteur voyant soudain l'obstacle qui surgissait sur les rails, immo- bilisa son automotrice. Celle-ci avait cependant happé la roue arrière de la bicyclette tandis que le jeune imprudent tombait sous la Micheline donl une roue lui écrasa un pied. Un automobiliste de Saint-Méen-leGrand conduisit le blessé A Rennes, où Il fut hospitalisé la clinique SaintYves. Dans le courant de l'après-midi, l'amputation du pied dut être pratiquée. En fin de soirée, nous avons pris des nouvelles du blessé. Son état ne donne pas d'inquiétude. Nous souhaitons à la victime un rétablissement rapide. Les débris du théâtre et la tempête Nous avons dit hier comment on avait dû abattre une cheminée de l'ancien théâtre municipal que le vent menaçait de faire tomber. Un pan de mur donnant sur la place des Champs-Vauverts oscillait également de façon inquiétante. Hier matin, des barrières ont été dressées pour prévenir tout accident et la démolition de ce morceau va être entreprise, sitôt que la bourrasque sera calmée. SYNDICAT DES OUVRIERS DE LA METALLURGIE ET DES GARAGES. Il est rappelé aux adhérents du Syndicat que la réunion générale annuelle aura lieu jeudi prochain 21 courant, à 18 h. 30. Maison du Peuple. Ordre du jour Rapport moral et financier de 1936 désignation du bureau de 1937 l'application des 40 heures et divers. Communiqué. SERVICE DE NUIT DES TRAMWAYS BRETONS. A l'occasion de la soirée donnée le jeudi 21 janvier 1937, au Cinéma Celtie, à ParaméRochebonne par la Lyre Municipale, un service spécial de tramways desser- vira Saint-Servan et Saint-Malo. Départ de Saint-Servan à 20 h. 10 et de Saint-Malo-Saint-Vincent à 20 heures 30. Arrêts aux haltes habituelles des tramways. Retour assuré pour les deux villes à la fin du spectacle. FRANÇOIS LE CHAMPI. Dimanche dernier, la troupe Les Mouettes de Tourville » ont interprété avec succès la magnifique pièce de G. Sand. Le public, trop peu nombreux, a admiré le Jeu des artistes qui se sont surpassé. Félicitations à toute la troupe et à son régisseur, M. Hareng. Nous invitons le public à venir très nombreux dimanche prochain à la dernière représentation, qui aura lieu en soirée. Retenez vos places chez M. Jouanne, libraire, rue de Dinan. SYNDICAT DES EMPLOYAS. AGENTS, OUVRIERS MUNICIPAUX ET HOSPITALIERS DE SAINTMALO. Les membres du Syndicat sont priés de bien vouloir assister il. l'assemblée générale qui aura lieu il. la Maison du Peuple mercredi 20 jan- vier, il. 17 h. 15 très précises. La présence de tous est Indispensa- ble, vu l'ordre du jour très chargé. Communiqué. Convoi mortuaire 10 h. Mme Guihanat, avenue Moka; égllsl N,-D. Auxlllatrlce; cimetière Salnt-Malo. COMBOURG Une sérieuse collision entre une auto et un camion Une blessée Hier après-midi, vers 14 h. 30, un 1 sérieux accident de la route s'est pro- duit au lieu dit Les Landelles s sur la route de Dol, à 3 kilomètres de Combourg. M. Edouard Lognoné, plombier, pla- ce de la Mairie à Dol-de-Bretagne, se dirigeait en auto vers Rennes, via Combourg, il était accompagné de sa femme. Près de Combourg, aussitôt après avoir traversé le passage à niveau des Landelles, M. Lognoné fut soudainement aveuglé par le soleil et n'aperçut pas un lourd camion qui venait sa rencontre. Le chauffeur du camion, voyant le I danger, appuya sensiblement à droite, mais cependant une collision brutale se produisit. Dans une terrible embardée, la conduite intérieure de M. Lognoné fit un téte-à-queue et me coucha dans le fossé droit de la route, l'avant de la voi- ture vers Dol. Le camion s'arrêta sur le milieu de la chaussée, à 35 mètres du lieu de la rencontre. Les témoins de l'accident ne portèrent au secours des occupants de la conduite Intérieure, mais déjà ceux-ci s'en retiraient par leurs propres moyens. Mme Lognoné, fortement commotionnée, portait en outre de légères blessures à la face. La blessée fut reconduite à son domicile, alors Que M* Blouet, huissier arrivait sur les lieux pour procéder aux constatations La voiture de M. Lognoné est hors d'usage. Le camion, appartenant à M. Busnel, minotier à La ChapelleChaussée, a, lui aussi, subi de graves dégâts. SOCIETE DE SECOURS MUTUELS. Tous les membres de la société de Secours Mutuels de Combourg sont priés d'assister aux obsèques de leur camarade M. Louis Horvais. Rassemblement vendredi à 9 h. 45, place de l'Eqllse, autour du porte-bannière M. Peuvrel. DOL-DE-BRETAGNE SPECTACLES, Cette semaine, au Cinéma du Patronage Salnt-Samson Le comte de Monte Cristo, d'après l'œuvre d'Alexandre Dumas. Au Cinéma des Familles Pasteur et Bonne chance, avec Sacha Guitry. A LA PERCEPTION. Le personnel de la perception étant sensiblement réduit par nécessités de service, jeudi 21, vendredi 22 et samedi 23 janvier, les personnes qui ont des opérations à effectuer dans ce bureau sont priées de les reporter au lundi 25 janvier. TINTENIAC CONSULTATION DE NOURRISSONS. Aujourd'hui, troisième mercredi du mois, jour de la foire mensuelle, aura lieu la consultation habituelle des nourrissons. Cette consultation aura lieu à 14 heures, à la mairie de Tlnténiac. ASSISTANCES. Rappelons aussi l'urgence pour toutes les personnes touchant soit l'assistance aux vieil- lards, soit l'assistance aux femmes en couches, soit l'encouragement aux familles nombreuses, d'avoir à ee pré- senter aujourd'hui à la perception de Tinténlac pour toucher leurs mensualités, les états devant être retournés incessamment à la Recette principale. LE TRONCHET ASSEMBLÉE ANNUELLE. L'Assemblée annuelle du Tronchet aura lieu le dimanche 7 février. Les forains sont priés de bien vouloir faire retenir leur emplacement. Aucun droit de place ne sera perçu. NOZAY REPRESENTATION AU PATRONAGE. Nos artistes du patronage se sont remis au travail depuis quelques semaines déjà et doivent nous présenter dimanche 24 courant, en matinée à 3 heures, dans leur superbe salle de la rue de la Gare, une superbe représentation de La Femme aux yeux ouverts, drame en 9 tableaux, tiré par M. l'abbé Pineau du célèbre roman de Pierre L'Ermite. Les principaux rôles masculins de cette magnifique pièce seront tenus par MM. Théophile Renard. Prosoer Provost et Paul Bouteiller. Les rôles si Intéressants de tante Cécile, Rolande, Mme et Mlle Maud seront joués par les artistes habituellement chargés des rôles féminins. au patronage, et dont tous les habitués de nos séances récréatives ont pu depuis longtemps apprécier le fin talent. MM Pierre Friou. Alex Leguippe, Blouin. Ch. Gauthier, etc., etc. avec leur talent habituel, se chargeront d'amuser les spectateurs pendant les entr'actes. Le piano d'accompagnement sera tenu par Mlle Méraud. NORT-SUR-ERDRE DÉCOUVERTE D'UN CADAVRE Mardi matin, vers 7 heures, le cadavre de M. Leclaire Pierre, journalier, a été découvert sur le champ de foire de cette localité. Le docteur Clenet, de Nort-sur-Erdre, a constaté le décès dû à une congestion. INFORMATIONS DIVERSES A propos de la taxe unique de 6 °!o sur le chiffre a affaires • JlfJtf. F. Saudubrav et P. Ooussu, dé- putés de la Sarthe afin de répondre au vœu exprimé par de nombreux commerçants donnent ci-dessous les modalités que de 6 sur le chiffre d'affaires TAXE UNIQUE SUR LE CHIFFRE D'AFFAIRES LOI DU 1" JANVIER 1937 Cette loi stipule Art. 2. Il sera institué sur les affaires au sens des dispositions des articles 1" à 4 du décret de codification du 27 décembre 1934 11 En ce qui concerne les ventes, une taxe unique de 6 2 En ce qui concerne toutes autres opérations, une taxe de 2 Art. 3. i 1. La taxe unique globale de 6 sera perçue a Sur les ventes effectuées par un producteur ou fabricant soit à un commerçant, en vue de la revente en l'état, soit à un consommateur b Sur les importations faites destination, soit d un consommateur, soit d'un commerçant, en vue de la revente en l'état, à moins que ce commerçant prenne la qualité de producteur dans les conditions déterminées à l'article 12. 1 2. Sont assimilées des ventes à la consommation al Les ventes faites pour l'exercice de sa profession artisanale, à un artisan, remplissant les conditions prévues par l'article 23 du code général des Impôts directs b Les ventes faites a toua les assujettis à la taxe de 2 c Les livraisons, par un producteur, d'objets ou de produits de sa fabrication, a titre de primes, a l'occasion de ventes de produits non fabriqués par lui; d Les ventes aux coopératives de consommation et groupements d'achat. 1 6. Devront prendre la qualité de producteurs pour la totalité de leurs ventes les commerçants qui seraient imposables pour un montant annuel de ventes supérieur à franca. Pourront, dans des conditions définies à l'article 12, prendre la qualité de producteurs. ies commerçants qui achètent ou qui Importent des produits pour les revendre directement ou par l'intermédiaire d'autres commerçants ayant euxmêmes pris la qualité de producteurs, à des fabricants ou en vue de l'exportation. 17. La taxe unique globale de 8 devra faire l'objet sur facture, d'une mention ainsi libellée Taxe perçue pour le Trésor ». ART. 5. Seront soumis a la taxe de 2 2 Les ventes la consommation effectuées par les redevables définis au 4 4 de l'article 3 de la présente loi susceptibles de bénéficier du régime forfaitaire prévu en matière d'impôts sur les bénéfices Industriels et commerciaux et achetant la plus grande partie de leurs matières premières des commerçants qui les ont acquises libérées de la taxe de 8 ainsi que les ventes de produits fabriqués par des commerçants lorsque celles-ci ne douassent pas francs. ART. la. Pour la période transitoire, la taxe ancienne sur le chiffre d'affaires concernant les stocks existant au 31 Janvier 1937 et exigible lors de la vente des produits sera recouvrée comme suit .1* Chez les commerçants soumis au régime au paiement mensuel, au taux de 2 pour les détaillants, 4 pour les grossistes sur la valeur des stocks au 31 janvier 1937 la taxe sera payée au fur et mesure des ventes Jusqu'à ce que ces ventes atteignent la valeur du 2° Chez les commerçants soumis au forfait. par versement des trois douzièI mes du forfait annuel pour les détaillante, des six douzièmes pour les grossistes. Cette disposition résulte d'un amendement déposé par nous il la séance du 27/11/1936. Lee stocks existant chez les producteurs donneront droit au taux de 2 à une imputation sur les sommes dont ces producteurs seront ultérieurement redevables au titre de la taxe unique. A cet effet. les Intéressés, il l'exception des commerçants soumis Jusqu'Ici au régime forfaitaire, denoat rMMttr* dis» le délai d'un mois une déclaration de leurs stocks Suivant ces textes, la loi devra s'appliquer comme suit I. Grossistes Les grossistes pourront ou prendre la qualite de producteur, en vertu du paragraphe 6 de l'article 3 Dans ce cas ils devront demander, la Direction ne8 Contributions indirectes dont Ils dépendent, un certificat déclarant qu'ils rentrent dans la catégorie des producteurs, adresser ce certificat A tous leurs fournisseurs et recevoir leurs marchandises sans taxe. Par contre, pour leurs ventes, Ils devront Soit ajouter, sur leurs factures. la taxe de 6 sous la rubrique Taxe perçue pour le Trésor » pour toutes les ventes faites par eux à un commerçant en vue de la revente en l'état, ou à un consommateur soit facturer sans taxe, pour toutes marchandises à destination d'un producteur, sous la condition que ce producteur leur envole un certificat de la Direction des Contributions indirectes dont il dépend, attestant qu'il est producteur. Le grossiste qui aura ainsi pris la qualité de producteur devra faire, en conformité de l'article 12. à la date du 31 Janvier un inventaire de ses stocka établi à ses prix de vente et remettre celui-ci dans le délai d'un mois. à l'Administration des Contributions Indirectes dont il dépend Sur le montant de cet inventaire, Il aura droit à une ristourne de 2 Il retiendra le montant de cette ristourne par imputation sur la taxe de 6 qu'il aura Dayer mensuellement partir du 1 février Ou prendre la position de commerçant. Dans ce cas. ils devront recevoir de leurs fournisseurs toutes les marchandises, taxe acquittée c'est-a-dlre que sur les factures de leurs fournisseurs sera ajoutée la taxe de 6 sous la rubrique Taxe perçue pour le Trésor Ils n'auront, eux-m*mes. aucune taxe à ajouter à leurs ventes. Le grossiste qui aura ainsi pris la position de commercant devra faire, en conformité de l'article 12. à la date du 31 1anvler. un Inventaire de ses stocks établi ses prix de vente et remettre celui-ci, dans le délai d'un mois. a l'Administration des Contributions indirectes dont il dépend. Il sera redevable, sur le montant de cet mventafre, d'une taxe de 4 cette taxe devant être payée au fur et a mesure de ses ventes Jusqu'à ce que celles-ci atteignent la valeur de ses stocks II. MAGASINS DE détail rABRiouAinr TOUT OU PARTIE DES ARTICLES qu'ils vendent. La loi prévoit pour les magasins de détail fabriquant tout ou partie des articles qu'ils vendent deux catégories La première. Les magasins faisant un chiffre d'objets transformés par eux sunérleur à francs. Ils devront, dans ce cas. prendre obligatoirement la qualité de producteur. en conformité du paragraphe 6 de l'article 3. La deuxième. Les magasins faisant un chiffre d'objets transformés par eux inférieur & francs Dans ce cas ces magasins pourront Soit prendre la qualité de producteur, en vertu du paragraphe 6 de l'article 3 soit prendre la qualité A commerçant. en vertu du paragraphe 2 de l'article 5. Ci-dessous, les obligations auxquelles la loi astreint chacune de ces deux catégories ̃ Première catégorie. Magasins de détail faisant plus de francs de vente d'objets fabriqués par eux et devant prendre la qualité de producteur. Ces magasins devront recevoir de leurs fournisseurs toutes leurs marchandises exemptes de la taxe. Pour cela. ces magasina demanderont à l'Administration des Contributions Indirectes dont Ils dépendent des certificats attestant qu'ils rentrent dans la catég le des producteurs. Ces certificats seront envoyés par eux à tous leurs fournisseurs pour leur permettre de recevoir leur» nwgriinfliM» M* taxa. Par contre, ces magasin» paieront une [ taxe du 6 sur toutes leurs ventes. aous déduction cependant d'un abattement ce 25 sur toutes leurs ventes au détau. En vertu de l'article 12, ce* magasin» devront faire un inventaire au 31 Janvier. Cet inventaire, établi à leurs prix 1 de vente sera remis dans le délai d'un, mois a l'Administration des Contrlbutlone indirectes. Sur le montant de cet inventaire, Cas magasins auront droit une ristourne de 2 Cette ristourne leur sert réglés par imputation sur la taxe de 8 qu'ils auront à payer sur leurs ventes 6 partir du 1" février. Deuxième •catégorie. Magasins de détail faisant moins de franca de vente d'objets fabriqués par eux. Cea magasins peuvent prendre, en vertu de l'article 3, paragraphe 6, li qualité de producteurs. Dans ce cas. leurs obligations seront les mêmes que celles de la première catégorie examinée ci-dessus. Cth magasins peuvent prendre, au contraire, en vertu du paragraphe 2 de l'article 5 la Qualité de commerçants. Dan* co cas, Ils recevront de leurs fournisseurs toutes les marchandises nécessaires à leur commerce, taxe acquittée, c'est-à-dire que sur toutes les factures de leurs fournisseurs figurera en sus .du prix une taxe de 8 sous 18 libellé Taxe perçue pour le Trésor Les ventes faites par ces magasins leur clientèle e-ont, par contre. exemptes de la taae à l'exception dea ventes des objets qu'ils auront fabriques, qui seront soumises à la taxe de 2 en vertu du paragraphe 2 de l'article 9. Ces magasins devront faire, en con»formlté de l'article 12. un inventaire au 31 Janvier. Cet Inventaire. établi aux prix de vente, devra être remis, dana le délai d'un mois, à l'Administration des Con»tribut Ions indirectes. Si un magasin de détail, fabriquant moins de francs d'objets fabriqués par lui, a pris la qualité de producteur. 11 aura droit, sur cet lnventaire, une ristourne de 2 cette ristourne étant réglée par imputation sur la taxe de 6 qu'il aura à payer à partir du l– février. Si ce magasin de détail, faisant moins de francs de vente d'objets fabriqués par lui, a pris, au contraire, la qualité de commerçant. il devra, sur son inventaire, payer une taxe de 9 cette taxe devant être payée au fur et à mesure des ventes Jusqu'à ce que celles-ci atteignent la valeur du stock. III. MAGASINS DE détail acheta» TOUTES LEURS MARCHANDISES ET NE FAISANT AUCUNE TRANSFORMATION A partir du 1" février, ces magasin* recevront toutes leurs marchandises, avec, sur les factures de leurs fournisseurs. une majoration de 6 mention. née sous la rubrique Taxe perçus pour le Trésor », à moins que leurs fournisseurs, ayant eux-mêmes payé cette taxe, n'aient pas la facturer nouveau. Ils n'acquitteront eux-mêmes aucun* taxe sur leurs ventes. En vertu du paragraphe 1 classe ̃ M. Prln3ault. en remplace- ment de M. le commissaire en chef de 2' classe Borius. Au grade de commissaire princtpal lwtour. ancienneté M. Marty. en rempl. de M. le commissaire principal Pnngault. Au Drade de commissaire de 1" classe 1*r tour, ancienneté M. Berthemet, en rempl. de M. le commissaire de 1™ cl. Merty, promu. DIRECTIONS DE TRAVAUX Ont été promus et nommés dans le corps des Ingénieurs des directiona de travaux des constructions navales pour compter du 19 Janvier Au grade d'ingénieur de 1" classe il" tour, ancienneté M. Bougaran, .nu. de 2. clecse. Au grade d'ingénieur de 2e classe choix, A Indret. M. Averty. A. T. principal de 1'" classe, port matriculaire Brest. B. M. R. Lorient. Nouvelles diverses Les nouvelles promotions daus l'état-major générale Le vice-amiral Le Bigot Le contre-amiral Le Bigot qui vient d'être promu vice-amiral, né à SaintBrieuc en 1833, fut nommé aspirant le 1" avril 1901. Il lit campagne de guerre au Maroc en 1907. En 1915, Il fit partie de la brigade de fusiliers-marins commandée par l'amiral Ronarch. Il prit, en 1916. le commandement de la canonnière contre sous-marins Railleuse. Entré à l'Ecole Supérieure de Marine en 1920. diplômé le 2 Janvier 1921. il fut appelé à l'état-major de la Marine. Commandant du contre-torpilleur Léopard. en 1925 chef-adjoint du cabinet du ministre de la Marine, 11 fut en 1929 appelé au commandement du croiseur Colbert. Choisi par M. Paul Doumer. en mal 1931. pour faire partie de aa maison militaire, le contre-amiral Le Bigot a conservé les mêmes fonctions auprès de M. Albert Lebrun Jusqu'en '.936 où il s'est vu confier le commandement de la divtslon d'instruction en escadre de la Méditerranée. Le vlce-amirai Le Bigot, commandeur de la Légion d'honneur, croix de guerre. est titulaire de plusieurs citations. Il vient d'être nommé commandant en chef des forces navales d'ExtrêmeOrient. Le vice-amiral Uensoui Le vce-amlral Gensoul, né à Montpellier, en 1880, fut nommé aspirant le 1" août 1900. Pendant la nuerre il commanda le torpilleur Fanfare, dans la zone des armées du Nord. Chef Q'Etat-MaJor de division en 1922, Il fut appelé au commandement du torpilleur Lansquenet en 1924. puis du culrasré Brelagne^en 1927. capitaine de pavillon du vice-amiral Durand-Viel à bord du eu rasgé Provence en 1929. puis chef d'Etat-Major de la 3" région maritime en 1931. Il fut désigné pour remplir les fonctions de sous-chef d'EtatMajor de la marine en 1932, poste qu'il occupa dans le grade de contre-amiral Jusqu'en 1934. Il fut alors nommé au commandement de la 3' escadre légère et avait son pavillon sur le croiseur Foch. Le vice-amiral Qeneoul en commandeur de la Légion d'honneur. Le vice-amiral Uldive Le vlce^mlraJ Olllve est ne a Rezé Loirû-Infér^ur;, le 1" juin 1B82. Entré 4 l'Ecole Navale le 1" octobre 1899, 1l 4 fait campagne en Atlantique de 1901 à i 1902; puis en Extrême-Orient en 19041905 promus lieutenant de vaisseau en 1911. Il était versé au début de la guerre dans le régiment des canonniers marins de 1914 à 1917 puis de 1917 à 1918. 11 a commandé le torpilleur Fauconneau. Promu capitaine de corvette en 1919. il a commande le torpilleur Téméraire de 1919 à 1920. Promu capitaine de frégate en 1923. 11 a été nommé professeur à l'Ecole d'application de tirs la mer et conférencier à l'Ecole de Guerre Navale de 1922 à 1924. Ensuite Il a commandé dane ce grade la sixième escadrille de torpilleurs et l'Algérien, de 1924 à 1928 Promu capitaine de vaisseau en 1927, il a exercé les fonctions de chef d'étatmajor du vice-amiral commandant en chef la première escadre de 1927 929 dans le même grade Il a commandé de 1929 a 1931 le croiseur Gueydon et l'Ecole d'application de tirs à la mer. En 1932, Il a exercé les fonctions de chef d'état-major du vice-amiral Inspecteur général des forces maritimes du Nord. Il a été promu contre-amiral en 1933 et a commandé a 3' escadre légère de l'e» cadre de la Méditerranée. Il vient d'être nommé premier sous-chef de l'étatmajor général. Le vice-amiral Olllve est commandeur de la légion d'honneur. Le contre-amiral Bourragué Le capitaine de vaisseau Bourragué qui Vient d'être promu contre-amiral est né le 22 novembre 1886 à Brassac Tarn. Entré à l'Ecole Navale en 1902, il effectue comme aspirant et comme enseigne diverses campagnes dans l'Atlantique, en Extrême-Orient et au Maroc. Promu lieutenant de vaisseau en 1916. il devient officier d'ordonnance du viceamiral commandant les patrouilles de la Méditerranée; en 1917 Il commande une section Ge chalutiers Apres la guerre, Il vient à l'état-maJor général et dt 1919 a 1921 est officier d'ordonnance du ministre. Il commande ensuite le Matelot Leblanc. Comme capitaine de corvette. puis comme capitaine de frégate, de 1923 & 1927 Il est professeur a l'Ecole de guerre navale qu'il quitte pour commander le torpilleur Le Mars Japltaine de vaisseau en 1931, Il commande le croiseur Dupleix de 1933 1935 et prend ensuite les fonctions de chef d'état-major dans la 1" escadre. Depuis l'an dernier l'amiral Bourragué est secrétaire du Conseil supérieur de la marine et chef de la section d'études des armements navals. Il est officier de la Légion d'honneur. Le contre-amiral de Carpentier Le capitaine de vaisseau de Carpentier qui vient d'être promu contre-amiral, né le 31 décembre 1881 Eplnal. est entré & l'Ecole Navale le ln octobre 1899. Successivement promu aspirant de 2' et de 1" classe. puis enseigne Ge vaisseau 16 octobre 1904 et lieutenant de vaisseau 9 août 1912, Il fait de nombreuses campagnes lointaines à Madagascar, au Maroc et en Indochine. Pendant la guerre Il commande L'Engageant. Capitaine de corvette le 18 mal 1920, Il commande le Delage, puis comme capitaine de frégate 14 Juin 1923 la Tempête et une escadrille de torpilleurs. Dans le grade de capitaine ne vaisseau 2 Janvier 1930, Il commande successivement le Tourville et le cuirassé Paris. Depuis avril 1936. l'amiral de Carpentier est directeur du port de Toulon. Il vient d'être désigné pour y occuper les fonctions de major général. Il est officier de la Légion d'honneur. Le contre-amiral Derrien Le capitaine de vaisseau Derrien Edmond, qui vient d'être promu contreamiral, est né le 2 novembre 1882, à ChAteauneuf h Finistère Entré Il l'Ecole Navale en 1900, Il effectue diverses campagnes de 1902 a 1910 en Atlantique. en Orient et dans l'Océan Indien. Lieutenant de vaisseau en 1914. il commande en 1915 le Canada-il et en 1917 La Luronne. Dans le grade suivant il est aide de camp du préfet maritime de Lorient, puis commande le Régulus de 1921 à 1923. Capitaine de frégate en 1924. Il commande le torpilleur Ouragan capitaine de vaisseau en 1930. il exerce successivement les commandements de l'Adroit et de la 2' escadrille de torpilleurs, du Lion et de la 4' division légère, du MailléBrézé et enfin du cuirassé Provence. Depuis octobre 1936. l'amiral Derrien est chef d'état-malor de la 2H. Messon Kalougi Expert J'ai Comprts Margueti • Jean -de- la -Lune- IV M Gougeon ̃ Jéhu IL Souchoni Jatnac-VIl A. Lecomte Justice-11 'Alb Tambérii- Jalapine iL. Carré i Je suis Bille M. Lsrivlèrei Jap-Il iG. Chéron Prit DE Croise ville, Monté. 10000 fr.. 2625 m.. La Réponse iH. Picard Ltonie iAndré Thibaut La Vivandière ' 8'monarii- Lot Nationale ou Lanrousrin» ÉA Décroche Lolotte ,B. Man-*on> La r'-ueuterte iR. Boudeaui; La Ténébreuse U. Merlsse L'Amourette P QuH'.oui; La Haute-Folie iH Mariel. La Divex Bertog'.latl La Ntrerna*'e lE. Carré Lvneravximne rG Pentecôtet La Pailu iM. Dejean- Langrune 'E. Marie L'Abeille ̃Gamet LuCette 'A. Porcinal; Lune dt Miei Il iCh Frestel Prix DE MaR'.t ,attelé, 15 000 fr., mètres. Jamta E. Bulhion Pupiter XIV iA. Deheegherl- Jean Bart Il M James Jessika iH. Masson. PRIX CHARLES TIE CFLIN ¡attelé, fr.. 2600 mitres Lulu M M. Roussel; Lancrlot A. Morel Loupiac io. Bottonll Liban Il A Cholsselct Le Bienfaisant .C Vtrzè'.ei- lord Williams R. Geenen.» Labarte lA, SourrouVlle. PRIX DE Lectoupe monté. fr., mè'resi Julube A Lefèvrel Jack lA. Delarochei J'Arriverai IV Jin2 Port Gras.' Jour tf'E'oo'r Il[ tSustroneki Joué-rtu-Bois R C S'.mnnard" J l*ronotl 1™ courte Jean-de-la-Lvne, Ktnd-M 21 c. La-Rtponae. Langoustine 3' c. Joyeuse-Commère. Jacinthe-G 4' c. Jujube. Jurgues 5* c. Laut, Lotka 6* c.. Kenai Karinette Pronosttcs de la prease spéciale Paris SPORT. 1" course Justice-II 2' c • La-RépOtise; 3* c. Jessika; 4* c. Labnrd'-L ̃ 5* c. Jujube 6' c Lallcdone T c. Kenai Le Jockey. 1" course Tferlureffe 2* c La-Ripcnse 3* c. Jakcw f c. Le-Cid S* c. Jutube c. Paris, le 19 Janvier. De notre correspondant spécial BEURRES. Vente ordinaire. On a casé un peu plue que les arrivages modérés du Jour et la resserre n'était déjà guère Importante. C'est pourquoi les cours ont été bien tenus, sauf pour les centrifugeas ordinaires. On cote au ktlo cours extrêmes avec cours moyens entre parenthèses Beurres en mottes Centrifuges des Laiteries Coopératives et Industrielles Oharentea Poitou, Normandie 12 à Touralne, 15 Il autres provenani ces. 10 Il Malaxés Normandie, à Bretagne. 11 a 15 13 autres provenances, 10 à 14 12. Beurres en vrac Provenances diverses. a Beurres en ltvres Provenances diverses. 12 Arrivages du jour Beurre français kilos pour mottes. Ventes du jour mottes. Resserre du Jour mottes. ŒUFS. Devant l'importance de 1la resserre, les acheteurs ont fait preasion sur les cours. Les petits arrivages du Jour ont été casés, ainsi Que prés de 500 colis de la resserre, mais celleci est encore Importante. Cours par colis de mille oeufs cours extrêmes avec cours moyens entre Normandie, 550 6 700 660 Brie Beauce. 410 à 650 t6OO Bretagne, 370 a 560 5301 Poitou. Touraine, Cen- Itre. 520 à 700 660 Champagne, Bour- Bogne. Bourbonnais. 570 a 580 5i5i Auvergne. Midi. 510 a 580 550 conserve par le froid. 400 à 480 1440 Ma- roc. 350 & 450 380. Arrivages du jour 450 colla. Ventes du Joue 945 colla. Resserre du Jour colis. FROMAGES. PATES MOLLES. Vente facilitée par les petits arrivages. Hausse sur le Brie. Prix au cent Camemberts Normandie, 210-350 divers, 160-210; Pont-1'Evê- que. 200-340 chèvre. 65-350. Prix à la dizaine Brie grand moule. 190-210; moyen moule, 130-180 laitier, 60-120. Pâtes SÈCHES. Vente moyenne. Cours peu soutenus en gruyère. Aux 100 kilos Port-salut, gruyère, Comté, Arrivages Pâtes molles, kilos; pâtes sèches, kilos. VIANDES. A cause de la grève des tueurs à La Valette, Il fallait s'attendre une restriction sensible des offres et un accroissement de la deman- de aux Halles. Une forte hausse s'est donc produite. On cote au kilo cours extrêmes Bœuf. Hausse de Il 1. sauf sur les quartiers. Quart derrière non traité Première qualité a deuxième. 8 A troisième. quart devant, 2 à aloyau et milieu de train de côte. 8 à tram entier, 12; pale- VEAU. Entier ou demi Première qualité, à deuxième, & troisième, à pans, cuisseau, carré. 10 & 11; basse complète. 8 Mocton. Hausse de sur le mouton entier et l'agneau. Première qualité, a deuxième. à troisième, à gigot, 14 20; carré, 8 à 26 épaule. 6 a 11 agneau de lait, 13 à chèvre, 2 a 4 PoRc. Hausse de sauf sur la poitrine et le lard. Demi Première Qualité, a deuxième, 8 à longe ou filet. 9 à 13; reins. A poitrine, à .tambon, a lard Arrivages du jour kilos. VOLAILLES. La restriction des offres de viandes a fait que l'on s'est Intéressé a la volaille. Une hausse a été possible sur les canards morts, dindes. coqs, lapins vivants. oies en peau et lapins de garenne. Cependant, les canards sauvages poules mortes et agneaux de lait sont en régression. On cote au Kito 1 cours extrêmes Agneaux de lait. 9, agneaux gros. 10-14; canards rouennais. canards nantais. 14-16,50; canards de ferme 10-12 5G; dindes Gâtinais et Touraine poules, 13-14,50; coqs, 9-11 dindes du Midi poules, 13,50-15,50; foie gras d'oie, 35-45; lapins du GAtinala et Touraine, 10,50-11; lapins de provenances diverses, 10, poulets nantais. 13-15; poulets du Gâtlnals. 14-16 poulets de Touralne, 14-16 poulets de Bresse, 17-19; poules de Bretagne, On cote la piece cours extrêmes Pigeons gros et petits, 5-10,50; pintades. 14-22. On cote les volailles vivantes au kilo cours extrêmes Canards, 8-10 lapins ofes, dindes. 8-12; poulets Jeunes Gâtlnals. Charentes. 10-12 poulets vieux Gâtlnals, Bretagne. 9-10 Arrivapes kilos. Resserre de la veille kilos. GIBIER. On cote la pièce cours extrêmes Bécasses. 12-18 bécasstnes 6-7; canards sauvages. 14-23; lapins de garenne 5-9; sarcelles, 4-7. On cote au kilo cours extrêmes Lapins de garenne dépouillé. 5-7. Arrivages 850 kilos. LEGUMES. La demande manquait d'entrain. Quant à l'offre elle était abondante pour les produits de la région parisienne. plus modérée pour ceux des départements. Un? hausse a été posslble sur les choux-fleurs, épinards. scaroles. Par contre, les carottes de Meaux, choux de Bruxelles, pois mange-tout. artichauts d'Alger. choux verts et poireaux communs accusent un certain recul. Cours extrémes aux 100 Kilos Ail, 250 500- carottes de Meaux. 40 à 55; carottes de Créances, 60 80' carottes d'Algérie. 180 a À50; champignons couche extra. 550 & 700 champignons moyens 450 a 550; champignons de conserve, 00 a 450 chicorées du Midi. 80 & 163; chicorées améliorées. 100 a 250 choux de Bruxelles. 60 a 150 crosnes. 400 a 500 échalotes 150 a 250; echalotes-ognons. 140 a 180 endives belges. 160 a 190; épinards départements. 170 a 220- épinards région parisienne. 100 a 200 escaroles Nantes et Saumur, 160 a 180 escaroles région parisienne 140 à 160 escaroles du Midi. 100 200 fèves du Maroc. 500 a 600 fenouil du Midi, 100 a 180 haricots verts du Maroc. 750 A d'Algérie. 700 A 1200; haricots secs, 340 a 450- laitues du Midi, 100 350 lentilles 40. a 650 mâches départements. 200 a 320 mâches région parisienne. 350 a 450 navets de Fins et Vlarmev 20 a 40 navets d'Algérie nouveaux. 150 a 25U oignons en grains. 40 à 70 oseille. 250 350 patates. 150 220 persil. 140 a 160; poivrons, 380 & 420- pissenlits de Vendée. 200 à 250; pissenlits verts de Paris, 250 300 pissenlita blanc» de Paris, 420 à, 460;. pl8-,1 senlits blancs de Meaux. 360 â 400; pois verts du Midi. 500 à 600; pois verts d'Al- gérie, 450 550; pois cassés 230 270; potirons, 80 à 100; raifort, 450 & 550 topinambours. 40 à 60; salsifis de Hollande, 280 330; salsifis d'Orléans, 80 t 250. Cours extrêmes aux 100 kilos Pommes de terre Hollande commune 65 à 100 Rosa. 95 le Saucisse rouge 65 & 90; Jaune ronde. 50 & 60; Eerstelingen, 60 à 65; nouvelles d'Algérie. 140 & 180; nouvelles rouges, 160 à 250 nouvelles du Midi. 240 à 2ti0. Cous au cent Artlchauts d'Algérie, .130 A 200; chicorées du Midi, 50 A 100; choux verts de Paris. 15 45; choux rouges, 50 200 choux brocolis, 30 40; choux-fleurs du Midi, 150 326 choux-fleurs de RoscofI, 120 200; escaroles, 60 à 100; laitues du Midi. Sa k 100. Cours aux 100 bottes Barbe de Capucin. 80 & 90; carottes des Vertus. 100 & 150; ciboules, 20 à 60; estragon, 75 125; panais, 40 A 60; poireaux de Montesson. 175 225 poireaux ordinaires, 75 A 150 radis de Nantes et Orléans. 40 A 90; radis noirs. 100 140. Cours aux 218 bottes Cresson. 75 & 145. Cours à la botte Salsifis région parisienne. à 2 salsifis de la Manche, A 10; thym. Cours d la pièce Cardons, 3 & 7; céleri-rave. A FRUITS. Marché peu actif gérie. On cote aux 100 ktlos cours extrême Abricots secs, 800 A amandes sèches. 700 750 clémentines. 350 à 700 dattes. 350 790 figues sèchea 300 à 800 mandarines, 300 à 500 marrons français. 150 à 280 marrons d'Italie 220 300 nèfles. 150 à 250 noisettes sèches, 400 à 550 noix sèches de Grenoble, 500 600 noix sèches diverses. 320 A 500 oranges d'Algérie, 1932. 767 »! 762 NICKEL 1310 » 1305 » OITV OEEP 216 50 219 » BONS 4 I 133 » 10 ni 908 »! 910 » PENARROV* 361 » 361 » 0ONC0RO1A 90 » 88 50 BONS 5 1933 963 ni 965 » UGINS 11861 » 1855 » OROWN mines 1783 » 1781 BONS S 19!4 940 » 941 KUNLMANH 783 » 770 » DacgafOntein 264 50 264 » BONS 4 1/} , 1934 971 971 50 MAT. OOLOR. SI OENIS.. 1410 » 11383 » OE BeERl Ordinaire 1721 » 1714 4 BONS 4 1936 950 et[ 950 » PHOSPHATE DE OAFSA 885 ni 872 » prof 1850 ,Il 0 O-» UTON»" D MORT 796 793 » PEOHINEV 2090 i> 12052 » OURBAN ROODEPORT.. 387 11 376 » BANQUE OE FRANCE 8305 11,8075 il RHONE POULEU0 1357 » 1325 EA8TERN RUBBER . 247 il 243 BANQUE OE L ALGERIE 66J0 » 6510 » SAINT GOBAIN 2070 II 2040 » EAST OEOULD 1082 »11081 n BANQUE DE PARIS 1508 11483 PORT DU ROSARIO 5750 »15740 » EAST RAND 428 »l 428 » BANQUE UNION PARIS. 621 »l 621 CHARGEURS REUNIS 520 501 » FRANCO- W YOMINO 385 501 383 50 C" ALGÉRIENNE 1357 »H369 » AIR LIQUIDE 1491 »I1466 » GENERAL MINING 626 » 626 » OOMPT' O ESCOMPTE.. 811 > 840 » BRASSERIE OUILMEL. 4495 » 14495 il GOLOFIELOS 588 » 579 » OREDIT COM FRANCE. 679 675 » OAOUTCH INDOCHINE., 686 665 » HOTCHKIS8 1235 i 1206 » CRÉDIT FOND. FRANCE 2885 » 12840 CITROEN i 769 » 742 .1 JACER8FONTEIN 191 501 289 » CRÉDIT LYONNAIS 1753 11716 n COMPT' MAT US. • GAZ 900 876 » JOHANNESBURG 482 501 476 » SOCIÉTÉ GENERALE 748 » 745 » PEUGEOT 683 » 684 » KUALA LUMPUR 360 nI 344 » PENTE FONCIERE 555 » 620 » SAV Raltintrlt 782 » 751 » lanClaaote 122 501 122 50 SU GENERALE FONO 172 » 173 » TERRES ROUGIS 513 » 501 » MAIN REEF 500 496 • -JEZ Action* 26805 » 127020 » UNION EUROPtENNt.. 781 » 784 n MALAOCA ORDINAIRE.. 260 »I 251 50 Parts de Fondit.. 23750 » 23900 » PLAN VOUNO 428 n 420 » MEXIOAN EAOLa 165 SOI 166 50 -société Civil* /5 6?50 » 6*20 n ORED ARDENT 4 • 1934. 666 n 665 » MIOHELIN 1/6 ci$ arts 1775 » 1770 » EST 625 ni 624 tELOt ô 11 1934 1487 »11485 NEW STATU ARIAS. 354 » 352 50 LYON 769 »! 771 » EGYPTE UNIFIEE 1 2225 12225 » PAOANO 700 » 683 i> MIDI 650 625 » JAPON 6 t> 1907 i 1627 ». PERNOD 1910 n 1990 ̃> SANTA-FE 778 »I81O » TURO 7 i t 1913 1'* 328 322 » rand mines 983 » 985 METROPOLITAN 1200 i> 1 1 C3 » BANQ. NAT. MEXIQUE. 301 »l 299 » ROAN ANTELOPE 410 x 403 » PARISIENNE IND. CLEO.! 431 429 » BANQUE OTTOMANE 525 512 n ROBINSON OEEP B 330 501 331 » TRAM. OE SHANCHAI 1031 » 10*?4 CRÉDIT FOND EOVPT. 4610 14600 » SHELL TRANSPORT 729 nI 722 » LYONNAISE d EAUX 0-1. 1S85 » 1602 ̃> OANAOIAN PACIFIO .l 3S1 11 346 i> SIMMER AND JAOK. 90 501 90 i> J-. 1i40 n'mn » WAGONS-LITS JIW 501 103 » SPRINC8 226 »l 222 CAUX • EL. INDOCHINE 1875 ii'lIftO » PHILIPPS 2»*ÎO » 12780 tDS NICEL 1526 »I1518 n DI8TRIB. D'ELECTRIO liât ,1170 » CENTRAL MINING I 31X0 Il -11, ,> TANGANVIKA 101501 101 n ELEOTRIO OE PARIS, 795 »I7*8 » GEDULD IllOO nHft5 THARSIS' 337 501339 50 ÉLECTR DE LA SEINE., 442 ni 4M MONTECATINI JWS »l 1*8 51 TRAN8VAAL 349 501 350 •> ELEO. • OAZ 0" NORO 4R? »l 470 » RIO TINTO ?W- n'7340 » SOIE OE TUBIZI 187 183 i> ELlOTR Dit O* ].t0 1 AZOTE Rte WORViQn* 1309 ,i 13 UNION CORPORATION J081 »']0S7 n EN'' ELEO LIT. MEDIT. 714 nl 641 » PETROFINA S'fl »I SK7 » U'"MIN Ht » » T â N 0 • '47?8 U '° MIN H -K AT ANC 3 »l PAO » AMttTEBOAM UBBER.. JIMII » 3MI » VIEILLE MONTAGNE 24R7 , 23RS n T S. F Ç77 ni P'M n NESTLE 5115 »>545 » VINS SPIRITUEUX.. 377 'il 144 THOMSON HOUSTON 9*7 21S n PORTUON DES TABACS 400 11 397 » WEST RAND 212 ni 211 50 UNION D'ELECTRICITE. 535 il 525 SUCR O'ECYPTE Ord..1 715 702 i> WEST $PRIMO$ 312 313 50 VALEURS SE NÉGOCIANT AU COMPTANT Prècéd. loor Préeéd. Jour BANQUE INDOOHINB 4530 » 4520 4 1/J 19Î9 d. 500. 399 398 • BANQ. NAT. COM. e- ind. 540 » 538 » S 1934. d* 805 » 804 a SOO. marseillaise 524 525 i> 1 &% 1919 s lot*. 495 » 490 » EAUX 01* Oansr. Oap. 1440 » 1380 =z>6 Iflil 495 490 » VIOHY Aotion A .1 '» »l » » *j° 960 » haVraise D'EN'' ËLEO. 911 895 MAROO 4 1930 658 »l 647 » NANTAISE O-EOLAIR 410 » 391 OEp. AISNE 1 il 1918,. 491 493 • TELEPHONES 351 338 » I 1927.. 566 560 » GAZ LEBON Jouit. 1450 » 1430 OEP NORD t 1911 441 440 » ACIERIES lONOWV 494 n 465 » 8 1M3. 455 455 a atel. •̃ Oh BRETAONE 260 » 280 » IX ant. 1926 483 477 » OHANTIERSSI NAZAIRE 750 740 » J Mpl 1926 494 494 • FIVES-LILLÏ 890 850 PAS-OE-OALAIS 7 1928 489 » 487 » PONTOIBAUD 1870 »I177O » J 1927 486 » 484 » FRANC MATER. OH FER 720 i> 701 » IND. SIN. 4 t In 193t 722 754 a METAUX 01* 2720 "J2680 n PARIS S 1910 • Ion 219 217 » SENELLB MAUBEUGE. 865 815 n 4 l't 19t9 » >ol* 716 719 Il aniche 1230 »I115O n 4 1931 lot. 658 » 660 » ANZIN 636 i>l 600 » 4 ♦ '932 • lot* 720 » 720 » CHARBONN. du TONRiN 3690 113514 n 5 • 1934 • lot* 886 875 Il vokt» Ci HAOID 5526 "15340 OOMM» 3 i»" 'en 287 ni 286 » MINES OF BOR srdln B600 »!2595 FONO"» 3 1909 0 10» 147 501 146 Il ZINOdsi UEHOOUR Ao. 2050 u n » 00 M M» 3 1911 0 loto 147 n 145 » ETAINS d* TEKKA Ao. 1475 nl n » OOMMM* 4 1931 • >ott 670 ni 672 n ► âLI SAINTE THERESE 1760 ni 1650 0OMM 4 1/4 1131 a lois 682 ni 680 » SOIE ARTIF. GIVETi I “,» »l n OOMMI** 6 l'i 1934 s lot* 91g nI 908 » ENTREP nr QRENELlt 915 865 IONS EST 5 io 1931/41 871 871 » OLIDA 3995 »I395O » BONS TAT t 1931/41 865 » 858 » St-RAPHABl Quinquina., 6800 »I66SO BONS ETAT 1914/49 901 Il 900 » SUORERIES OOLON» 360 345 50 ETAT 5 1911 A 611 Il 608 » POLIET 0HAUSS0N.. 717 » 688 ETAT 5 1/1 1935 '785 » 788 a BON MARCHE 225 n 225 ETAT S 1936 873 n 871 GALERIES LA"AYETTB 59 ni 57 n BONS lVOm i 1934 '49 908 Il 895 a PARIS-FRANCE 895 »l 850 n LYON 6 1921 A 608 »l 606 » PRINTEMPS • n »1 » » LYON s 1933 700 »l 696 n AIR LIQUIDE Psrt 4000 »'385O n MIDI s frocanao 3X75 »!3!MM> Il ORLEANS 4, 1991 A 550 553 EST asiatiQ OANOIS 5975 .5910 n ORLEANS S 1933 M7 ni 96 Il ELEOTRO OIVES 4 11. J1K »l 515 n OUEST 3 J4fl ni 339 Il HUTCHINSON ]620 »ll50ft n ANGLAIS CONSOL. I . 9102 19080 Il MONACO ldfil Il'1420 BRESIL 4 1910 I • 400 ni 409 » HOTELS oeunis c 1/4- 750 nt 755 Il NORVIOE 1 11 1901.. a ni » Feuilleton de L'Ouesi-Eclatr du 20 Janvier 1937 32 O'NEVÊS d'après Charles QARVICE Une jeune fille aux enchères Crand roman d'amour et d'aventirn inédit Vous pensiez que je pourrais voua payer une seconde lois? Vous vous trompez. J'ai écouté patiemment vos divagations. Avec plus de patience que n'en auraient des juges et un ;ury. Personne ne croirait a votre Histoire d'un second testament, une h'stolre racontée plr un forçat évade. Ce second testament, n'a jnmsl* existé que dans votre imagination. L'invention est digne d'un homme condamné comme faussaire, d'un cr'm'npl bien connu qu'il est de mon devoir de Urrer à la polio*. Lavaric lui jeta un regard de côté. Ah je suis un imbécile, n'est-ce pas ? Peut-être bien, mais pas plus sot que vous, car vous oubliez que ce testament a été signé par deux temoms. La vieille mistress Parsons vit toujours et n'a pas du tout envie de quitter le monde. Elle a toute sa tête et sa memoire. Jordan tressaillit et son visage qui s'était empourpré reprit une pâleur de cadavre. Pourtant, il se força a rire. Très bien. dit-il. Admettons le second testament Mais votre interprétation de la scène est fausse. C'est mon père qui s'est repenti de l'avoir écrit et m'a demande de le détruire C'est par son ordre que je l'ai brtllé, quelquea minutes avant sa mort. Lavaric se frappa les genoux avec admiration. Sur mon âme. Sir Jordan, vous êtes très fort Votre coup est une parade habile Moi-même Je n aurais pas trouvé mieux. Fâcheusement pour vous. il se pencha en avant, ses yeux sur ceux de Jordan, malheureusement pour vous. vous ne l'avez pas brûlé. parce qu'il existe encore Sir Jordan se serra les mains. C'est un mensonge S il existe encore. ou est-il ? Qui le détient ? Lavaric pnt l'air solennel. autant que son laid visage pouvait prendre de dignité. Moi, Sir Jordan. XXXI Les lèvree palet de l'Honorable Sir Jordan. Membre du Cabinet, s'ouvrlrent et laissèrent tomber une exclamation de dépit. Et oui. Sir Jordan. il est en ma possession. Quand vous avez quitte la otatunbre pour parler a la nurse, il ne m'a pas fallu vingt secondes pour me glisser dans la pièce, prendre le document a terre et revenir dans mon abri. Je me suis toujours étonne qu'intelligent comme vous l'êtes vous ne l'aylez pas devine tout de suite. Sir Jordan essayait de bien saisir la situation. Ce bandit, ce faussaire dont l'audace égalait la ruse. le tenait en sa puissance; s'il exhibait ce testament, c'était la ruine, car quelque Importante que fût la fortune à partager, la part qui lui reviendrait ne comptait pas pour un homme dans sa position. Un membre du Cabinet qui veut devenir Premier Ministre a besoin de ressources considérables L'habileté sert peu sans l'appui de l'argent. Sir Jordan ne pouvait renoncer a un penny En plus. il y avait le scandale. Avec quelle joie ses ennemis il les savait nombreux s'empareraient de cette histoire. avec quelle ardeur ils le poursuivraient de leurs aboiements La pensée lui donnait tour à tour chaud et froid. A tout pnx 0 fallait acheter cet homme, sans pourtant lui céder tout de suite. pour sauver les apparences Il prit un air détache Voyons. dit-il si l'admettais, pour l'amour de la discussion, que vous avez dérobé ce testament. je ne vois pas quel parti vous pourriez en tirer. Lavanc eut un nre sinistre. Vous ne voyez pas, vrai. voua ne voyez pas ? Non D'abord. vous ne pouver pas le montrer. Vous ne pouvez expliouer comment il est tombé en votre possession sans vous accuser vous-même de cambriolage. sans parler du risque ou plutôt de la certitude d'être repris. C'est mon affaire. Laissez-moi vous rappeler qu'une lois déjà vous avez été condamne comme faussaire. Banks. Et vous auriez de la peine à prouver l'authentlcite d'un document que je déclarerais faux. Je ne doute pas que vous le ferlez. Mais vous oubliez les témoins Je n'oublie rien. Mais en admettant même que vous réussissiez a convaincre un jury, et n'oubliez pas que pour la lutte je dépenserais jusqu'a mon dernier penny. en admettant que vous réussissiez, je ne vois pas comment cela vous rapporterait ce que vous cherchez. de l'argent. Vous dues que mon demi-frere. Neville, bénéficierait; mais peut-être est-il mort; c'est même probable. C'est possible, admit froidement Lavanc. Et s'il était vivant pourquoi me dénonceriez-vous a son profit puisque vous ne le connaissez pas ? Je ne l'ai jamais vu. = La seule autre personne à considérer, c'est cette jeune tille de Je ne sais rien. ni vous non plus. Elle aussi peut être morte Elle l'était peut-être avant que le testament tût écrit. Lavanc se pencha en avant et posa sur la table ses deux larges mains C'était le moment de son triomphe. Il le savoura lentement Elle est vivante prononça-t-il avec emphase Un spasme contracta le visage de Jordan. Vous le dites n faudrait le prouver. Je peux le prouver. Je ne crois pas beaucoup à la Providence. Sir Jordan, pourtant quand je vois les événements, J'incline à penser qu'il y a pour gouverner le monde, quelque chose d'autre que le hasard. Regardez un peu je me suis trouvé sur le bord d'une fenêtre a point pour apprendre l'existence d'un testament, et quelques mois plus tard. je me suis trouve, a l'autre bout du monde, a proximité d'une pauvre cahute pour voir mourir le père de l'héritière désignée. Oh 1 Je le connaissais de longue date et il m'a suffi d'entendre sa voix pour n'avoir aucun doute. Oui. sa fille etait l'héritière de Sir Gréville et moi J'avais en ma possession le testament qui la ferait riche N'est-ce pas étonnant ? Sir Jordan écoutait, fasciné par l'étrange enchaînement. C'est l'exacte vérité. J'avais été tente de rester en Angleterre et de me mettre Il sa recherche e n'avais pas eu le courage de courir le risque.. heureusement. car si j'étals resté. je l'aurais peut-être manquée Jordan ncana. J'ai peine a croire que vous ayez découvert cette personne. à l'autre bout du monde. Comment prouverezvous son Identité ? Son pere lui a remis les papiers nécessaires, en lui recommandant de ne pas les ouvrir dans un délai qu'il lui a fixe. Il redoutait que la haine de Sir Gréville poursuivit l'enfant comme elle avait poursuivi les parents. J'ai vu la petite les cacher daa* sa poitrine. Sir Jordan releva la tête vivement. Vous les avez. ces papiers ? Pour la première fois. Lavaric parut déprimé et honteux. Je vous ai dit que je Jouerais franc-Jeu, et je le ferai. Non. je ne les ai pas J'ai risqué ma vie pour les prendre, pas seulement une fois. mais plusieurs, et j'ai toujours manqué. Il frappa la table de son poing. Je jure que je les surai. Jordan l'étudiait avec attention. De tant parler m'a sèche la gorge, dit brusquement Lavanc N'y aurait-il pas moyen de boire quelque chose ? Certainement dit Jordan. Il se leva et sortit de la pièce. Lavanc le suivit jusqu'à la porte et jeta un coup d'œil sur le corridor couvert d'un tapis épais, décoré de bellea tentures. Sir Jordan revint portant une bouteille de whiaky, une carafe d'eau et des verres qu'il poda sur la table. Servez-vous, dit-il bnevement. Lavarie but largement et reposa le verre sur la table. PinlMons-en. dit Sir Jordan. Ma patience est à bout. J'aimerais mieux tout abandonner que de respirer le même air que vous un quart d'heure de plus. Vous êtes venu me vendre le testament Dites votre prix Je l'achèterai tout de suite, ou jamais. Lavaric remplit une seconde fois son verre et le vida d'un trait. Nous verrons bien, ncana-t-il. remis de bonne humeur par l'alcool Me Jugez-vous assez mais pour être venu vous trouver avec la chose dans ma poche ? Je vous connais trop bien. Je me fierais plutôt à un tigre qu'à vous. Sir Jordan, malgré votre beau parler et vos grandes manières. Jordan, blême de colère, frappa du pied. N'allez pea trop loin. Banks, menaca-t-il. Je suis déjà bien tenté de vous laisser vous livrer à vos fantaisies. USNS21ONIIal£N TS JUKIDIWUCS Oowntieui procM »tT»iro* nurfieuMe, baux. loyers jucce*iion», impôt», des renueignemenu contra aaiH IMMEI/BLÉSutr. Ventes et locations AGENCE LAORANGE. fondée en 1878 34. rue Pasquier. PARIS B1 AlfClinDC Propriété 33 hect. seul iCnilnC tenant près Saintes, loué ou libre. Prix 145000 fr. Propriété 22 hect. s/rlvière à Pons. ^Ecr! Faveau, ROYAI. A LOUER p. Parthenay. B. FERME 15 à 18 na. pr gare et laiterie. BAtlm. part. état. Gaillard, Notaire. Parthenay D£. 4LI/HE/VTATIO/V an. MIELS NATURELS des ruchers de u Solesmes l'Abbaye n. Envoi franco en seaux plombés et caisses de pots. Gros et détail t. rue Haute St-Martln SABLE iSartnei Rucnes et ruchettes peuplées noires et Chypriotes. 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Les découvertes de l'Abbé Blanc M. l'abbé Blanc a toujours tu la passion de la botanique appliquée au soulagement des souffrances humaines. Vivant depuis bien longtemps en Algérie, joiqnant l'expérience à l'obaervation, guidé aussi par quelque mystérieuse intuition, il eut le bonheur de réaliser d'inestimables découvert»». C'est 1919 qu'il trouva dans les montagnes du Zaccar les plantes rares dont la médecine arabe fait un usage empirique pour décongestionner les volet respiratoires. Après plusieurs mois d'étude et de recherches, l'abbé Blanc mit au point un remède dont la première application fut La commande du carillon électrique unique ta Afrique du Nord installé à aux frais de M. l'Abbé Blanc. merveilleuse un flacon suffit à quérir la coqueluche qui étouffait une petite fille d'Ain-Sultan commune d'Affreville. La semaine suivante, un autre enfant le petit Trantour était guéri de même. De 1919 à 1928, l'abbé poursuivit ses travauz, perfectionna les dosages et la présentation de son remède, qui devint le ameux Coqueluchsirop Et les quirivu se multiplièrent Peu après, naissait le Bronchocure >, autre forme du même remède, spécialement dosé pour combattre la toux de rhume, de bronchite et même d'asthme. chez les adultes, les vieillards, comme chez les petits enfants. En 1928. l'abbé Blanc. débordé par les demandes de sirops, confia leur preparation aux Laboratoires Bourély, les plus importants spécialistes de l'Afrique du Nord. Libéré de cette charge, l'éminent botaniste put mettre sur pied un autre remède non moins précieux des gouttes antipaludiques, produit végétal dont les essais, maintenant achevés, ont été satisfaisants dans la remarquable proportion de 89 des cas. Le désintéressement de l'Abbé Blanc Menant une vie de labeur et de dévouement M. l'abbé Blanc ne tire aucun profit personnel de ses découvertes. De par sa volonté formelle, le prix de vente de ses produits a été fixé fort au-dessous de la valeur des spécialités pharmaceutiques correspondantes. C'est ainsi que le flacon de Bronchocure n'est pas vendu plus de 12 francs. En raison de sa contenance 400 gr., c'est le moins cher de tous les sirops contre la toux. Les redevances minimes perçues par l'abbé Blanc sont entièrement consacrées à ses œuvres paroissiales. En 1934, l'abbé Blanc a fait installer dans son église de Beni-Mered un superbe carillon électrique, le plus moderne de toute l'Algérie. L'année dernière, il dotait l'église des grandes orgues dont nous publions ci-contre la photo. Et, bien en- Le 15 mara 1935. J'ai pris du c Bronchocure d plusteurs reprises et chaque fois avec un réel soulagement. Je conseille tous votre excellent remède, car c'est rendre service. FONS, de Gendarmerie, Blida. Le 30 décembre 1936.. Quand mon mari, mes enfants, ou moi, nous nous enrhumons, le ne donne que le Bronchocure ». Ça suffit I Mme Douillet, Fort Lamothe, Duperre. Le 22 décembre 1936. Mes deux fillettes 7 et 9 on» étaient atteintes d'un rhume tenace. Ignorant le Bronchocure ». le leur donnai différents sirops Qui n'eurent aucun effet. Avec deux flacons de e Bronchocure », leur rhume disparut. M. LONGHI, 85, rue Alger, Le 22 novembre 1936. J'ai l'honneur de vous adresser mes remerciements et félicitations pour l'efficacité du e Coqueluchstrop » dana la guérison de notre enfant. M. RurroRT, 24, rue Alger. Le 4 janvier 1936. J'étais affligé d'une toux opiniâtre qui durait depuis plusieurs années a la suite d'une bronchite. Ayant essayé le Bronchocure », Je Jus surprise d'être calmée dès la première bouteille, et complètement déltvrée de cette mauvatse toux1 après une cure de quelques semaines. Mme Debakd, 28, rue Dr-Trolard, Alger. M. l'Abbé Blanc exerce une surveillance active sur toutes les opérations de la fabrication du Coqueluchsirop et du Bronchocure. Le voici, dans la réserve des plantes, contrôlant le hachage et vérifiant l'homogénéité du mélange. tendu, on ne compte pas les oeuvres d'assistance auxquelles il apporte sa collaboration généreuse et discrète. Les grandes joies d'un saint homme Ce bienfaiteur ne eonnait pas de joies plus vives que d'enregistrer les témolqnages de confiance et de reconnaissance qui lui parviennent chaque jour de l'Afrique du Nord et des région. de France où sa réputation s'est établie. Il a constitué un album de gratitude » qui s'enrichit rapidement. L'origine et l'aspect divers de toutes ces lettres font mieux ressortir l'unanimité des sentiments exprimés. En voici quelques-unes Le 21 octobre 1936. Je suis heureux de pouvoir vous remercier de votre excellent produtt le c Coqueluchsirop » qui a guéri en quelques jours ma fille âgée de 4 ans 1/2. atteinte d'une forte coqueluche. Je me fais un plaisir de le conseiller à chaque occasion, car il est vraiment efficace. M. Compaih, 4, rue Clos-Margot, Le Mans. Le 6 décembre 1936. La coqueluche ayant sévt dans notre localité, l'ai demandé en deux fois, 35 flacons de votrt merveilleux remède. Le 1- envoi a fait si bon effet auprès des fillettes que lorsque le mal s'est attaqué aux garçons, j'ai dû faire une nouvelle commande par avion. Je vous félicite de ce bon remède qui soulage tant les petits enfants. Sœur J. B. I. Supérieure de la Communauté de C6te*-du-Nord. Le père du Bronchocure » reçoit une visite inattendue Au Jour de l'An, parmi les visiteurs venus lui apporter leurs voeux, l'abbé Blanc distingue un couple jeune et vigoureux. L'homme te présente Femand Trastour. Le visage du prêtre s'Illumine de plalsir Femand Trostour. le petit qarçon d'Aïn-Sultan, le deuxième 0 guéri de la coqueluche par les plantes merveilleuses Et l'abbe prend plaisir à rappeler ces heures passionnantes des débuts du Maurjr; 18 h. 50. Météo. 7 h. Informations 8 h. Informations Presse répétition 9 h. 45 Concert de musique variée, organisé pur ie Conseil de Gérance de Rennes-Bretagne avec le concours d'un orchestre de ciambre sous la direction de Maurice Henderick Les Cadets, marche Ssusai Ouverture italienne Zercj Isoline, ballet Messagers Mignon sélection Thomas Valse poudrée Francis Popy La Gardetde nuit en Chint iL. S'.édel Gazouillement du printemps ISinding Pour une rose, suite de valses ,Wa'.dteurel. 10 h. 45. Limoges • Criari Linckel; Le Cvone lEalnt-Saën» Phi-Phi iChristlnéi La Marcna iChaxlnadei Hans. le joueur de flûte CKinne La Balerine Marie. .1 h 35. Tour Eiffel Cours commerciaux. 11 h. 45 Disques Lolita BuzziPecciat Mai d'amour Buzz'Peccla > Opéra de ctuaf sous We'l'.i a Chant de* cenous». b 1 Ballade 12 h. Lyon Marche italienne Rousseau* Doux sommeil G Marlel Le nouLrau setpneur du village Boleldieu E*pana lAlbeniz Eugène Onépuitte 'Tcnaïkov.'sky En vacances Rhené-Baton Danses norvégiennes Or'eg ̃ Passionnément Messager. '12 h. 50. Relais de Par' Informations du Radio Journal. 13 h. Suite du concert de Lyon. 13 h. 30 Tour Elffe Physionomie de Is Bourse Météo. 13 h 50. Musique enregtstrée. 14 h. 20 Tour Eiffel Cours. 14 h. 30. St-itlsn Radlo-Co'.onlnle Jeux d'enfants Blzetl Esquisses maritimes, harpe et orchstre MTlottei Scherzo iLa'.oi S-'ite pastorale ichabrter La petite chanson des hommes Clerguel. 16 h. 45. Tour Elflel Bourse. 16 h. Llle ̃ Mu?lerbrr>cnt. 22 h 30. Relui* de P* Dernière* Informations Météo. ECOLE SUPÉRIEURE DES P. T. T 4S1 m. 7. 120 kw. 6 h. 50. Météo. 7 h., 7 h. 30, 8 h.. 8 h. 30. Presse.. 8 h. 40. Météo. 8 h. 50. Revues, par Alex Surchamp. + 9 heures. Lecture par Renée Bourgeon. ♦ 10 heures. J'avais un Camarade, de Paul Vialar. 10 to. 45 Limoges. ♦ 11 h. 35. Cours. 11 h. 45. Tourisme.. 12 h. Disques 12 h. 50. Informations, 13 h. Disques ♦ 13 h. 30. Bourse. 13 h. 45. Météo. ♦ 13 h. 50. Mélodies par Mlle Wlthe. 14 h. Espéranto, par Rousseau. 14 h. 20. Ohroniaue astronomique par Hamon. + 14 n. 30 La radio aux aveugles Lea Présents Fauré Berceuse Boellmanni Causerie de M. Maheut Cette mélodie Plniault Chez mol iFéllne L'Hôtel au clair de lune Jacque-Simonot La Longue Route ¡Parés 1 Barcarolle Cho- pin Ronde des lutin; iFr Llazt Cabaret des noctambules Pièces pour piano Mirny, Interprétées par l'auteur Mireille dans ses oeuvres. 16 h. Cauerie a Le raisin et le jus de raisin au Contres de Tunl* ». par Daude-Ban- cel. 16 h. 10. Causerie scientlfioue. r>ar Paul Oetova ̃ c Cru^ticte envahis- Méphiftos » Faust svmnhovie. MêphlsiB»r!loz. ♦ 16 h. 30 Chansons, par Mlle Mnud O'psy. 16 h. 46. Lecture lHt^r1re Extraits de Dai'id Couperfield de Dlcken», rar Mme Rlvain. 17 h Dli"es Œuvres de Théodore Botrel QrèHnds et Goél'ttes. Ln F»nchette Crv'le berceuse. La Pafmvolai* Le Mouchoir ronge nrotfl?es de ©•we» t,!on 18 h. ro'.e Ce qu'a vu le vent d'Ouest iD»bTJf>sv> Le Vent IBol'erï Mon ami Ie vent Delertreï Ar'et'e de Cl"iutine iSrrtub°rt\ Cantique A l'épouse Chausson Je vux Sérénade Strn"»*i. ♦ 18 h 30. Radl ^Tournai de France 19 h. 30. Météo, 19 h. M Disques c Contes s Ma Mdre t'Ot'e Riveli Jolis de fées Marinier Conte bleu et or iRoeirsenCh»m-lonl • 20 h. Le tourisme, par Geor?»s Gévllle. ♦ 20 h. 15. Poli- tique "Ttériei're. pur Jacnues Knyser. 20 h. 23 L*s hommes et les livres. noir PhlUppp Soupault. 20 h. 30 L'Appel du clocher, scène berrichonne ït un acte en vers de Jacques Martel. ♦ 21 h. Minique de chambre par l'Association des Anciens Élèves du Conservatoire Commentaires sur Morart par Rpvnaldo Hahn Sonate en la mnleur Mozart par Benvenutl Mélodies par Arnoult Enlèvement au Sérail AIr de Don Juin Le Ruban égaré, trio Mlle Joncplm. O'rlat et Barbero Variations sur un thème de Mozart iR Hahm. flûte et piano. par Gaston Blsnquart et l'auteur Deux pièces pour violoncelle R. Hahn. par Mas accompairné par l'auteur MM"dles par Louis Amoult Brummel L'Atr, accompagné par l'auteur Oufntette pour piano et cores iHahn. par Bfvenutl et le quatuor Calvet 22 h. 80. Information* des *tt-Unl» d'A-né-ique. ♦ 22 h. 45. R*di"Tournal de Prence Informations météo. TOUR EIFTEL 86 m. 15 kw- 20 h. 30. Par la Comédie-FrançaUe Le Chandelier Musset. POSTE NATIONAL RADIO-PARIS L650 m. 75 kw. 6 h. 45. Gymnastique. ♦ 7 h. Disques ♦ 7 h. 15. Heure Presse. 0 7 h. 45. Gymnastique. 8 h. Disques. 11 h. Musique variée. 12 b. Bretlgnléres. 1. Les prix de revient agricoles ». ♦ 12 h. 15. Heure ̃ Caste-noisette Tchalkowaky Valse des Brunes IL. Ganne Scherzo Moussorgsky Les Maîtres chanteurs Wagner Mélodies par Germaine Geniayre Cantate lOarlsslml; Mon amour fleurit Brahms Le plus doux chemin iPauré Roses en bracelets igaubert Lu Papillons iChau.*son> Rhapsodie Ph. Gaubert Napoü Charpentier. ♦ 12 h. 45 Chronique, par Fernand Divolre. ♦ 14 h. Chronlaue musicale. 14 h. 15. Rossllon L'économie politique dans la littérature ». ♦ 14 h. 30 Poste Colonial. ♦ 16 h Pierre Lièvre Corneille et son oeuvre ». 16 h 15. Philippe Marx La justice a travers les temps et les n»uple » ♦ 16 h. 30. Revue de la Presse humoristique.. 16 h. 40. Muxln"» Mirée. 17 h. Causerie sclenflflmie. par Albert Ranc. 4 17 h. 15. Courrier des llv-es. ♦ 17 h. 30. Dlsriue» ♦ 17 h. 45. Mélodies car Lucie Rauh. ♦ 18 h. Informations pour les Jeunp*. nar Mme Conudo. 18 h. 30. e Histoire du Théâtre lyrlnue en France » par Guy de Pourta'ès P-emi*re de TannhnUser, de Wafner. 19 h. 30. Politique Inté-ieure. 19 h. 40. Fernand Gregh Le Théâtre po'tique Pn Franr» deouls Beaumarchais. • 20 h. RpMtal de nioTio. nar Wtïsb'^1! von M's»n p»*liirt. Sini^'ridP. Oi?ue. Rigaudon K-T.!inn Clair de lune De^iiR'v I p~j'ti*0 Le .rrmnlei/r 'T>n-tk'°wicz>. ♦ 20 *i. 30. Pre* ♦ 90 h. 45 Her»e. Nice. 22 'h. 45 inforviat'oT» Hei"e. ♦ 93 h. Must"'̃• de danse.. 23 h. 30. Musique légère. BC n" » tIX-L AP A VETTE 278 m 6 25 kw. 20 h 15 Informations. 4 20 h. 30. Radlo-Parls. 20 h. 45. Nice. ♦ 22 h. 45. Radio-Paris. RADIO-NORMANDIE Fécamp 269 m. 5 I kw. 7 h. 10. Presse régionale. ♦ 7 h. 30. Journal parlé. ♦ 7 h. 50. Orchestre. 9 h Disques. 10 h. 30. Concert, populaire 11 h Chansonnettes. ♦! 12 h. Musique léKére. ♦ 12 h. 40. Journa. parlé. ♦ 13 h. Heure des auditeurs. 14 h. 30. Variété., 16 h. 45. Émission enfantine.. 17 h. 30 Disques ♦ 19 h. Concert des auditeurs. 4 19 h. 40. Journal parlé. 21 n. Concert. Vieilles, chansons. Danses d'autrefois. 23 h. Musique de danse. POSTE PARISIEN 312 m. 8. 80 kw 20 h 34. La minute policière. 20 h. 40 Simone fait la tournée des grands-ducs ». présentation Louis Merlin. ♦ 21 h. 10. Le portrait en cinq sec. par Georges QucsMau. + 21 h. 12. causerie. 21 h. 25. Marguerite Msreno Pauline Carton. Claude Dauphin, Balder serjius. Vallauris et Jean Nohain comparaîtront c En Correctionnelle ». Diamant-Berger. 4 22 h. Orchestre du Lido. retransmission. ♦ 22 h. 30. Disques. RADIO-TOULOUSE 328 80 tw 19 h 50 Ray Ventura et ses collégiens. Retransmission depuis la Pleyel. ♦ 21 h 46, La demi-heure de Paris ♦ 22 h. 15. Concert sur Trots de la Marine. de Scotto. 22 h. 40. Orchestre de danse. ♦ 22 h. 55. Informations. ♦ 23 h. Extraits de films 23 h. 16. Ordhestre de salon. 23 h. 40. Concert sur Les Gangsters du Château d'If, opérette de Scotto. ♦ 23 h. 55 Informations. 4 0 h. 5. Caveau A la Viennoise ♦ 0 h. 30. Bul'etln météorologique régional. Calen- drier du jour. Pète souhaiter. NATIONAL DroltwlcW m 150 kw. 10 h. 15. Service du Jour. 10 h. 4*. H. 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Chants du soir de la Cathédrale Saint-Paul. ♦ 17 h. 45. Musique de danse. 18 h. Nouvelles. 18 h. 20. Causerie c L'Exposition Combe. 19 h. 10. Musique de Fauré, par F. Mannhelmer, pianiste. 19 h. 30. Van Phllipps et ses deux orchestres. • 20 h. 15. Concert symphonique Concerto grosso en sol, pour cordes Concerto pour orgue en et bémol Concerto grosto en fa, nour double orchestre. 21 h. 6. Nouvel 21 h 25. Ode le iow de Sn*nfeCéctle. par John Drvden. 4 22 h. 45. Cabaret 6 23 h. 15. J. Payne et ton orchestre, 33 h. 30. Disques. passer un bon hiver, demandez forces et résistance à la Quintonine. Ce délicieux fortifiant aura vite raison de votre dépression physique et nerveuse. Cette lettre vous en donne la preuve "Mon teint pâle et mon manque d'appétit alarmasent ma famille écrit »le LEGAY, à Niherne Indre. vohe fortifiant a vaincu Je me suss remise à manger de bon aipitit et je me suis sentie plus forte. 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BS Madame Blanche SEPULCHRE DE CONDÉ Née ANTERROCHES Date du décès 27 août 2016 Neuilly-sur-Seine 92200 Nous sommes au regret de vous faire part du décès de Madame Blanche Sepulchre De Condé Celui-ci est survenu le 27 août 2016 - Neuilly-sur-Seine 92200 Envoyer des fleurs de deuil Ouvrir une cagnotte obsèques Allumer une bougie de deuil Écrire un message de condoléances Voir plus de services Mur du souvenir Envoyer Allumer une bougie EA Equipe Avis-De-Décès a allumé une bougie Nous vous adressons nos sincères condoléances.
Condésur-Noireau. Un repas remis au goût du jour Publié le 03/04/2018 à 13h35 Valérie Desquesne et Christian Gauquelin aux côtés de Nelly et Chantal Delamare, Janine Caillebotte, Jacky
See other formats *l Aà / r r L ""V LA FIN DE L'ANCIEN REGIME DANS LA GÉNÉRALITÉ DE CAEN 1787-1790 Digitized by the Internet Archive in 2013 Société de L'Histoire de la Révolution Française LA FIN DE L'ANCIEN RÉGIME ET LES DÉBUTS DE LA RÉVOLUTION DANS LA GÉNÉRALITÉ DE GAEN 1787-1790 PAR FÉLIX MOURLOT Inspecteur d'Académie, Membre de la Société / 14- 1 °l fe °! r J*'lï PARIS, AU SIÈGE DE LA SOCIÉTÉ 3, RUE DE FÙRSTENBERG, 3 1913 611 BIBLIOGRAPHIE Il me paraît indispensable de donner comme préface au présent travail une notice bibliographique très détaillée, afin de détruire les préjugés qui ont eu cours pendant un temps assez long sur la pauvreté de la documentation relative à l'histoire de la fin de l'ancien Régime et des débuts de la Révolution en France. La Révolution radicale... qui nous sépare de l'Ancien Régime en a obscurci, écrivait Tocqueville, tout ce qu'elle n'en détruisait pas. » * Et, renchérissant sur Tocqueville, Doniol ajoutait La Révolution française a jeté dans une nuit profonde tout ce qu'elle a détruit... La France de 1788 est hors de notre intel- ligence, comme hors des faits. Le moyen-âge n'a pas de coin plus obscur. » * La lecture de cette bibliographie suggérera une conclusion toute différente. Le nombre et l'importance des dépôts consultés, l'abondante masse des documents mis en œuvre, prouveront que la matière est plus riche qu'on ne l'avait cru, et que les histo- riens disposent de moyens d'information assez étendus et assez précis sur cette période. L'on examinera successivement A, les documents contenus dans les divers dépôts d'archives; — B, les documents manuscrits conservés dans les bibliothèques publiques ou privées ; — C, les travaux imprimés. A. — DOCUMENTS D'ARCHIVES Mes recherches ont porté sur six catégories de dépôts d'archi- ves, dont deux à Paris et quatre en province, savoir 1° les 1 A. de Tocqueville, L'Ancien Régime et la Révolution, p. 89. 2 Doniol, La Révolution et la Féodalité, p. 1. VITI ARCHIVES NATIONALES Archives nationales ; 2° les Archives du Ministère des affaires étrangères ; 3° les Archives départementales de 1 départements de Normandie Calvados, Manche, Orne et Eure ; 4° les Archives communales de 11 villes et de 184 bourgs et villages de la Basse- Normandie ; 5° les Archives de deux greffes judiciaires du ressort de la Cour d'appel de Caen Caen et Coutances ; 6° des Archives privées. Les milliers de pièces que la consultation de ces divers dépôts m'a permis d'utiliser sont pour la plupart inédites 1]. I. ARCHIVES NATIONALES. Les Archives nationales sont riches en documents sur l'his- toire de la généralité de Caen de 1787 à 1790, surtout pour la seconde moitié de cette période &K J'y ai trouvé des renseignements utiles à la biographie du dernier intendant de Caen, Cordier de Launay, dans les séries suivantes E 999A n° 58. Collection formée par les secrétaires du Conseil, année 1725. — Ordonnance relative au paiement de l'office de receveur ancien et mi-triennal des tailles de l'élection de Paris, acquis par Jacques-René Cordier de Launay. grand- père de l'intendant de Caen, 7 avril 1725. E 1066B n° 95. Ibid., année 1731. - - Arrêt du Conseil des finances, du 20 février 1731, relatif à l'acquisition définitive de cet office. P 2462, fol. 119 v°. Mémorial de la Chambre des Comptes de Paris, année 1751. — Pièces relatives à la gestion des comptes de Jacques-René Cordier de Launay comme ci-devant trésorier de l'extraordinaire des guerres, 7 août 1751. 1 J'ai fait un unique emprunt aux archives de l'église Catherine, à Saint-Péters- bourg, qu'un ami bienveillant, feu M. Loutreuil, ancien industriel à Moscou, a compulsées à mon intention. Un des registres de décès de cette église m'a fourni la date de la mort du dernier intendant de Caen, Cordier de Launay, émigré en Russie 24 janvier 18?0. 2 J'ai été guidé, au cours de mes dernières recherches, par le précieux travail de M. Ch. Schmidt, Les Sources de l'Histoire de France depuis 17H9 aux Archives j\atio- nales, Paris, 1907, Champion. — Je dois aussi de vifs remercîments à MM. Le Grand, sous -chef de section, Viard. et Mi rot, présidents de la salle de travail des Archives, dont la grande obligeance a facilité ma tâche. ARCHIVES NATIONALES IX P 2470, fol. 345 v° Ibid., année 1755. - Pièces relatives à la gestion du même comme ancien receveur des tailles et octrois de l'élection de Paris pour l'année 1725. 9 novembre 1755. P 2479, fol. 398 Ibid., année 1760. — Lettre de décharge à Anne-Thérèse de Croezer, veuve de Jacques-René Cordier de Launay, trésorier général de l'extraordi- naire des guerres, des amendes et intérêts prononcés sur les comptes de ladite trésorerie, 7 juin 1760. X 8738, fol. 500 Patentes et ordonnances diplomatiques. — Lettre de maintenance de noblesse pour le sieur Jacques-René Cordier de Launay et sa postérité, 8 mars 1736. Y 60, fol. 379 Publications du Châtelet. — Testament et codi- cille de Mme de Launay, épouse de M. Cordier de Launay, de son vivant trésorier de l'extraordinaire des guerres, 30 mai 1772. T 1613 Séquestre. — Inventaire des papiers appartenant à Cordier de Launay, émigré, rue du Faubourg-Pois- sonnière, ci-devant maître des requêtes et intendant de Caen, 3 thermidor an III. V1 466. Provisions de maître des requêtes pour Louis-Guillaume- René Cordier de Launay, 9 juin 177,'. La première partie de mon étude les huit premiers chapitres, relative à la situation de la généralité de Caen en 1787 et au condominium de l'intendant et de l'Assemblée provinciale, a emprunté des documents aux séries suivantes C 9 Assemblée des notables de 1788 et 13 Assemblées provin- ciales. Divhis 44 Papiers du Comité de division. Dvi 64 Papiers du Comité des finances. W 1408, 1420, 1453, 1455, 1584, 1585, 1587, 1588, 1589, 1593, 1594. 1595, 1597 et 1603. Généralités, Mélanges. Cette contribution est fort modeste, en comparaison de l'abon- dante documentation que les Archives départementales du Cal- vados m'ont fournie sur le même sujet. Pour la seconde partie de ce travail, du chapitre IX au cha- pitre XVIII Convocation des Etats généraux, troubles intérieurs, division de la généralité de Caen en départements, organisation X ARCHIVES NATIONALES administrative de ceux-ci, etc., les Archives nationales ont été, au contraire, une source d'information très précieuse. J'en ai utilisé les séries suivantes 1° Pour l'histoire de la convocation des Etats généraux dans les bailliages de Caen et de Coutances chap. IX, X et XI Ba 27 et 35 Originaux et minutes. Bin 40, 53 et 54 Transcriptions de pièces, série des bailliages ; 166, 167 et 174 Ibid., série des villes. C 14, 17 et 18 Procès-verbaux des assemblées électorales et pièces annexes. 2° Pour l'étude des progrès de la Révolution dans l'opinion publique, des troubles intérieurs, des retards dans la levée de l'impôt et des manifestations locales de la vie politique en Basse- Normandie chap. XII, XIII, XIV, XVII C 88 à 120 Adresses des villes et communautés à l'Assemblée nationale, 14 mai 1789-31 juillet 1790. Dvi 24, 38 et 43 Papiers du Comité des finances. Dxi 2 Papiers du Comité de liquidation. Dxin 4 Papiers du Comité d'agriculture et du commerce. Dxiv 2, 5 et 8 Papiers du Comité des droits féodaux. Dxxix 3, 8, 18, 20, 29, 30, 31, 32, 34, 40, 58, 78, 81, 83, 84 et 91. Papiers du Comité des rapports. Dxxixbis 2, 3, 4, 6 et 7 Papiers du Comité des recherches. F4 1051 Comptabilité. F? 36611, 36823 Police générale. F11 211, 215 Subsistances. H1 1453, 1455 Mélanges. 3° Pour l'étude de la division de la généralité de Caen en départements chap. XV Divhis 1, 2, 5, 10, 12, 21, 27, 55, 60, 90. Papiers du Comité de division. NN* 10, 12, 13. Procès-verbaux du Comité de division. NN 78, 112, 123. Cartes originales. 4° Pour celle de l'organisation administrative des départe- ments du Calvados, de la Manche et de l'Orne Div 1, 2, 3, 5, 6, 7, 9, 11, 12, 21, 41. Papiers du Comité de consti- tution. ARCHIVES NATIONALES XI Flbn Calvados 1, Manche, 1, Orne 1. Personnel administratif. Flcm Série départementale. Calvados, 1 et 13 ; Manche, 1 et 12 ; Orne, 1. Esprit public et élections. 5° Pour le récit de la fête de la Fédération en 1790 C 189148, 15°, 152, 133. Procès-verbaux des Assemblées nationales et pièces annexes. Je crois utile de donner ici, pour l'intelligence des annotations de cet ouvrage, l'analyse détaillée des emprunts faits à ces diverses séries, en passant successivement en revue celles - ci dans l'ordre alphabétique. SÉRIE B Élections et votes. Ba 27, liasse 45, contient 181 pièces originaux et copies rela- tives à la convocation des Etats généraux dans le bailliage de Caen. Ces pièces sont réparties entre 18 dossiers. Ba 27, 1. 451. Extrait des délibérations de l'hôtel de ville de Caen du 30 septembre 1788 et du 11 octobre 1788. Mémoire adressé au garde des sceaux par les of- ficiers municipaux de Caen, le 22 octobre 1788, avec la lettre d'envoi. Lettre de Boismartin, député du bureau des finances au garde des sceaux et à Necker, 17 no- vembre 1788. — Extrait de la délibération du bureau des finances de Caen, du 10 septembre 1788. — Minutes de réponse du garde des sceaux aux officiers municipaux de Caen 27 octobre 1788 et à Boismartin 21 novembre 1788. Mémoire des six corps de la ville de Caen sur le doublement du Tiers état, décembre 1788. Ba 27, 1. 45-. Lettre de Duperré de Lisle, lieutenant général du bailliage de Caen au garde des sceaux, 19 février 1789. — Lettres de Tirard-Deslongchamps, recteur de l'Université de Caen au garde des sceaux et à Necker, 26 février 1789. \ll ARCHIVES NATIONALES Ba 27, 1. i'y]. Copie du rallier de la corporation des mar- chands merciers, drapiers et quincailliers de la en, avec lettre d'envoi de Lentaigne, leur député, 15 mars 1789. Délibération du bureau de la nouvelle commu- nauté des marchands merciers de Caen, 2 mars 1789. Lettre de Le Fauconnier, syndic des maîtres en pharmacie de Caen au garde des sceaux, 22 fé- vrier 1789. Lettre de du Belloys, avocat au bailliage de Caen, à Necker, 15 mars 1789. Observations particulières sur le commerce de Caen, principalement sur les manufactures à y élever; — observations sur différentes parties d'admi- nistration de la généralité de Caen, adressées à Necker par Girard Laforest l'aîné, avec lettre d'envoi du 12 avril 1789. Minutes des réponses du garde des sceaux à de Lisle 9 mars 1789, Tirard-Deslong- champs 4 mars 1789 et Le Fauconnier 17 mars 1789. Ba 27, 1. 45;{. Procès-verbal de l'assemblée du clergé du bailliage de Caen. Copie collationnée sur l'original. Cahier du clergé du même bailliage. Copie. Protestation de l'abbé de Troarn. Copie, 24 mars 1789. Ba27, 1. 45*. Réclamation du chapitre de Bayeux du 14 mars 1789 copie, avec lettre d'envoi des députés du chapitre à M. de Villedeuil, 20 mars 1789. Protestation des dignitaires et chanoines de Bayeux, 14 mars 1789. Copie. Protestation de l'évêque de Bayeux, 18 mars 1789 copie. Proposition faite par les députés du chapitre de Bayeux à l'assemblée particulière du clergé de Caen du 18 mars 1789 copie. Protestation s. d. des députés du chapitre de Bayeux copie contenant le récit détaillé de l'assemblée du clergé. Kxtrait du procès-verbal de l'assemblée générale du clergé de Caen copie. ARCHIVES NATIONALES XIII Ba 27, 1. 45*. Lettre de l'évêque et du grand-chantre de Bayeux au roi s. d. — Extrait d'une lettre écrite de Caen à M. B . . . le 21 mars 1789 [par Revel de Bretteville ? pro- cureur du roi au bailliage de CaenJ copie in- forme. Ba 27, 1. 45\ Lettre de l'évêque de Bayeux à M. de Villedeuil, 21 mars 1789. — Lettre de M. de Villedeuil à M. de Lessart, 25 mars 1789 avec sa minute. Lettre du duc de Coigny à M. de Villedeuil, pour lui rendre compte de la marche des assem- blées à Caen incident Soulavie, 27 mars 1789. Lettre de M. de Lessart à M. de Villedeuil, 1er avril 1789 exprime la surprise peinée du roi à propos de l'attitude de l'évêque de Bayeux. Lettre de M. de Villedeuil à M. de Lessart envoi d'un mémoire au roi de l'évêque de Bayeux, 28 juin 1789. Lettre de M. de Lessart à M. de Villedeuil, 30 juin 1789 renvoi du mémoire ci-dessus avec désap- probation. Ba 27, 1. 45°. Procès-verbal de l'assemblée de la noblesse du bail- liage de Caen copie collationnée à l'original. Extrait du procès-verbal de l'assemblée des trois ordres, 16 et 30 mars 1789 copie collationnée sur l'original. — Mémoire lu par le baron de Wimpfen à l'assemblée de la noblesse, avec ses additions, 26 mars 1789. Cahier des pouvoirs et instructions de la noblesse, 16 mars 1789 copie collationnée à l'original. Ba 27, 1. 457. Procès-verbal de l'assemblée préliminaire du bail- liage de Caen, 5-6 mars 1789 copie collationnée à l'original avec lettre d'envoi du 7 mars 1789. — Etat des députés des villes et des campagnes à l'assemblée du 5 mars 1789 imprimé — Liste des députés du Tiers état du bailliage de Caen, nommés les 12, 13 et 14 mars 1789 im- primé. Ba 27, 1. 458. Liste des députés du Tiers état nommés pour assis- ter à l'assemblée des trois ordres du 16 mars 1789 imprimé. XIV ARCHIVES NATIONALES Ba 27, 1. 45H. Procès-verbal de nomination et d'élection des six députés du Tiers état du bailliage de Caen, 17 mars 1789 copie collationnée. Lettre de Duperré de Lisle au garde des sceaux, 30 mars 1789. Ba 27, 1. 459. Lettre du marquis de Than, lieutenant général d'é- pée au bailliage de Caen, au garde des sceaux, 18 février 1789, et pièces annexes réclame la présidence de l'assemblée. — Minute de la réponse du garde des sceaux au marquis de Than s. d.. Ba 27, 1. 4510. Bulletins de l'abbé Soulavie ou Journal des élections du bailliage de Caen » suite de cinq bulletins manuscrits adressés à Necker du 6 au 24 mars 1789. Ba 27, 1. 4511. Correspondance de Duperré de Lisle avec le garde des sceaux et Necker, 14 lettres du 9 février au 13 avril 1789 relatives aux opérations électo- rales. Ba 27, 1. 4512. Correspondance du duc de Coigny avec Villedeuil et Necker mars et avril 1789. Correspondance de l'intendant Cordier de Launay avec Villedeuil et le garde des sceaux 5 lettres du 15 février au 20 avril 1789. Ba 27, 1. 4513. Onze pièces relatives à la convocation de la noblesse du bailliage de Caen pour le 25 juillet 1789 pour le retrait de son mandat impératif. Ba 27, 1. 4514. Délibération de l'hôtel de ville deBayeux du 14 dé- cembre 1788 adhésion à l'adresse de Rouen, avec la réquisition des communautés et corpora- tions de la ville sur le même objet, du 8 décembre 1788. Adresse imprimée des mêmes, 21 janvier 1789. — Lettre de Le Tuai, curé de Saint-Vigor-le-Grand, à Necker, 14 mars 1789. Lettre de Duhamel de Vailly, syndic de Tracy, au garde des sceaux, 16 février 1789 demande d'instructions sur la présidence des assemblées locales. Procès-verbal de l'assemblée du bailliage particu- lier de Bayeux 4 mars 1789 copie collationnée à l'original. ARCHIVES NATIONALES XV Ba 27, 1. 4515. 12 pièces relatives aux assemblées électorales du bailliage de Falaise U. Ba 27, 1. 4516. 14 pièces relatives au procès et à l'acquittement du procureur du roi à Falaise, Bertrand de l'Hodiesnière. Ba 27, 1. 4517. Deux lettres du lieutenant général du bailliage de Torigni au garde des sceaux, 12 et 14 février 1789. — Lettre des officiers municipaux de Vire au garde des sceaux, 7 décembre 1788, avec mémoire des gardes-jurés de la manufacture de draps, négociants, marchands et autres citoyens du Tiers état, du 30 novembre 1788. — Procès-verbal de l'assemblée du bailliage particu- lier de Vire et cahier de doléances du bail- liage^ mars 1789 copie collationnée à l'original. Ba 27, 1. 4518 *. Requête deBarfleur et de son arrondissement au roi, avec lettre d'envoi des officiers municipaux, 20 décembre 1788. — Explications de Bricquebec et environs à Necker s. d.. — Doléances du curé de Bretteville-la-Pavée aux commissaires du clergé du bailliage de Caen, 20 mars 1789, avec lettre d'envoi à Necker, 12 avril 1789. — Lettre des officiers municipaux de Cherbourg à Necker, 22 décembre 1789. — Requête de la municipalité de Cherbourg au roi, 3 janvier 1789, avec lettre d'envoi à Necker pour obtenir une députation directe. — Cahier du Bocage, ou doléances et objets d'utilité publique, par Aveline, notaire à Caumont, avec lettre d'envoi à Necker, 7 février 1789. — Cahier de doléances de la paroisse de Valcongrain bailliage de Caen. 1 Les paroisses de ce bailliage, an nombre de 240. étaient presque toutes en-de- hors de la généralité de Caen, et ne rentrent point, par conséquent, dans le cadre de cette étude. 2 Plusieurs des pièces contenues dans ce dossier y sont déplacées et devraient se trouver auB" 35, 1. 70. \\l ARCHIVES NATIONALES Ba35, liasse 70, contient 106 pièces originaux et copies, ré- parties en 13 dossiers et relatives au mouvement électoral du bailliage de Cotentin ' Ba35, 1. 70*. Lettres de Desmarets de Mpntchaton, lieutenant général du bailliage de Coutances, au garde des sceaux, 12 et 14 février, 19 mai et 9 juillet 1789. Lettres de Duhamel, lieutenant général de police de Coutances, au garde des sceaux, 17 février et 9 mars 1789. L>' .'ï5, 1. 70-. Procès-verbal de l'assemblée préliminaire du Tiers état du bailliage principal de Coutances, 2-14 mars 1789 copie collationnée à l'original. Ba35, 1. 703. Procès-verbal de l'assemblée générale des trois ordres, du bailliage de Coutances copie colla- tionnée à l'original, avec lettre d'envoi du lieutenant général du bailliage au garde des sceaux, 11 avril 1789. Ba35, 1. 70'*. Lettre de Mme Hébert-Lheure, châtelaine de Cam- bernon, au directeur général des finances, 17 fé- vrier 1789. Lettre de Desplanques de Ventigny, chapelain de la cathédrale de Coutances, à Necker, 25 fé- vrier 1789. Lettre d'Arnould, prieur de la Bloutière, au garde des sceaux s. d.. Cahier de la noblesse du bailliage de Cotentin imprimé, s. 1. n. d. Lettre de Frestel, curé de Saint-Floxel, au garde des sceaux, 5 mars 1789. Protestation de la minorité du clergé de Coutances imprimé s. 1. n. d., du 27 mars 1789, avec deux lettres successives d'envoi au garde des sceaux, l'une signée par Tristan-Brission, curé de Saint- Sauveur-Lendelin, du 27 mars 1789 ; l'autre, par Lejardinier des Landes, curé de la Feuillie, du 5 mai 1789. Lettre de Desmarets de Montchaton au garde des sceaux, 2 avril 1789. 1 M. E. Bridrey a su tirer mi excellent parti des principaux documents de la série If' •'!•"> dans son Recueil des Cahiers de doléances du bailliage de Cotentin. Voir son Introduction, au tome 1, p. 18-19. ARCHIVES NATIONALE- XVII Ba 35, 1. 70j. Procès-verbal de l'assemblée définitive du Tiers état du bailliage de Cotentin, 20-30 mars 1789 copie collationnée à l'original. Cahier de doléances du Tiers état du bailliage de Cotentin original signé par les commissaires le 30 mars 1789. Etat des paroisses et du nombre des feux du bailliage de Coutances et nombre des députés à l'assemblée préliminaire. Lettres de Desmarets de Montchaton au garde des sceaux, 16 mars et 1er avril 1789. Ba 35, 1. 70°. Mémoire au Roi des avocats du bailliage d'Avran- ches sur les prochains Etats généraux imprimé, avec lettre d'envoi, 31 décembre 1788, par Morin l'aîné, leur syndic en double expédition. — Lettre de Tesniére de Brémesnil, maire d' Avranches, au garde des sceaux, 7 janvier 1789 envoi de deux délibérations de la municipalité relatives aux Etats provinciaux et généraux. — Lettre des officiers municipaux d; Avranches au même, 24 février 1789 sur le partage des 8 dé- putations du Tiers entre les 10 bailliages du Cotentin. — Lettres du lieutenant général du bailliage de Carentan, Lavalley de la Hogue, au même, 12 et 15 février et 16 mars 1789. — Procès-verbal de l'assemblée du Tiers état de la ville de Carentan. — Procès-verbal de l'assemblée préliminaire du bail- liage de Carentan. — Liste des paroisses omises dans la liste générale. — Lettres des officiers municipaux de Granville au garde des sceaux, du 26 octobre et au Roi, du 7 décembre 1788. Ba 35, 1. 70". Réclamations de la Commission intermédiaire pro- vinciale de Caen, en faveur du bailliage de Mor- tain, 20 janvier et 7 février 1789. — Lettre du lieutenant général du bailliage de Mortain à Xecker, envoyant un Mémoire sur le comté de Mortain et sa députation en 1598 et 1614», 11 février 1789. — Lettre du même au garde des sceaux, 15 février 1789, xviil Aiuui\is NATIONALES Ba 35, 1. 70". Lettres du marquis de Géraldin, grand bailli d'é- pée de Mortain, à Necker et au garde des sceaux, 18 février 1789. Ba 35, 1. 70s. Procès-verbal de l'assemblée préliminaire du bail- liage de Mortain, 12 mars 1789 copie collation- née à l'original. — - Lettre du lieutenant général, Vaufleury de Saint- Cyr, au garde des sceaux, 13 mars 1789. Ba 35, 1. 70°. Extrait du procès-verbal de l'assemblée du dépar- tement de Saint-Lô, 20 octobre 1788. Mémoire des citoyens du Tiers état de Saint-Lô du 5 décembre 1788, suivi de la délibération du 7 décembre 1788, avec lettre d'envoi des offi- ciers municipaux au garde des sceaux, 7 dé- cembre 1788. Mémoire des avocats de Saint-Lô à Necker, avec lettre d'envoi de Le Menuet, syndic des avocats, 16 décembre 1788. Lettre des officiers municipaux de Saint-Lô au roi, 19 janvier 1789. Ba 35, 1. 70 10. Lettres de Robillard, lieutenant général du bailliage de Saint-Lô, au garde des sceaux, 12, 13, 18, 27 fé- vrier, 7, 19 mars et 8 avril 1789. — Cahier de doléances de Saint-Jean-d' Agneaux, avec lettre d'envoi au garde des sceaux par Gonfrey, 11 mars 1789. Ba 35, 1. 7011. Lettres de Lescaudey de Manneval, lieutenant général du bailliage de Saint-Sauveur-Lende- lin, au garde des sceaux, 13, 14 février et 10 mars 1789. — Procès-verbal de l'assemblée préliminaire du bail- liage de Saint-Sauveur-Lendelin, 9 mars 1789 copie collationnée à l'original. Lettres d'Ango , bailli de Saint-Sauveur-le- Vi- comte, au garde des sceaux, 17 février et 11 mars 1789. Lettre de Guillouet, lieutenant général du bailliage de Tinchebrai, au garde des sceaux, 4 mars 1789. Ba 35, Règlement du 21 juin 1777 pour l'administration municipale de Valognes copie collationnée. Arrêté de l'hôtel de ville de Valognes, 3 novembre 1788 copie collationnée. ARCHIVES NATIONALES XIX Ba 35, 1. 701"2. Lettre du bureau intermédiaire de Valognes au garde des sceaux, 5 novembre 1788. — Protestation des chirurgiens de Valognes, 14 no- vembre 1788. Protestation de la noblesse du bailliage de Valo- gnes, 15 décembre 1788 contre une délibération inconstitutionnelle des officiers du bailliage avec lettre d'envoi au garde des sceaux, du même jour. — Requête des paroissiens d'Alleaume à l'intendant, 8 novembre 1789. — Protestations de la noblesse 15 décembre, des marchands merciers 15 décembre, du clergé 18 décembre, des laboureurs 18 décembre, — copies collationnées, avec lettre d'envoi des officiers municipaux au garde des sceaux s. d.. — Requête des officiers du bailliage de Valognes à l'intendant, avec réponse des officiers munici- paux copies collationnées. — Lettre des officiers municipaux de Valognes au garde des sceaux, 20 janvier 1789 adhésion au Résultat du Conseil du 27 décembre 1783. Ba 35, 1. 7013. Lettres de Sivard de Beaulieu, lieutenant général du bailliage de Valognes, au garde des sceaux, 12, 17 février, 14 mars, 3 et 25 avril 1789. — Procès- verbal et pouvoirs des 81 députés du Tiers état du bailliage de Valognes, 9 mars 1789 co- pie collationnée* — Liste des députés des villes, bourgs et commu- nautés à l'assemblée préliminaire du bailliage de Valognes. Bin 40 registre. Transcription de nombreuses pièces relatives au mouvement électoral du bailliage de Caen et se- condaires Bayeux, Caen, Falaise, Torigni et Vire. Bin 53 registre. Transcription de documents du même ordre pour le bailliage principal de Coutances et les baillia- ges secondaires d'Avranches et Coutances. Bin 54 registre. Mêmes transcriptions pour les bailliages secondaires de Carentan, Cérences, Mortain, Saint- Lô, Saint-Sauveur-le-Vicomte, Saint-Sauveur-Len- delin, Tinchebrai et Valognes. XX ARCHIVES NATIONALES Il est inutile d'analyser en détail ces trois registres, dont la plupart des pièces ne sont que des copies, souvent erronées, d'ori- ginaux existant dans les séries Ba 27 et 35, C 17 et 18 des Archives nationales ou aux greffes de la Cour d'appel de Caen et du Tribu- nal de première instance de CoutancesW. Bin 164-177, série des villes. On y trouve plusieurs documents déjà vus dans la série desBa, par exemple Bm 166. Cahier du Bocage, par Aveline. Adresse de Barfleur sur le rétablissement des Etats généraux et doléances du curé de Bretteville-la-Pavée voir Ba 27, 1. 4518. Bm 167. Adresses de Caen, 22 octobre 1788 voir Ba 27, 1. 451, de Cherbourg, 22 décembre 1788 ; de Coutances, 8 février 1789, au garde des sceaux, avec réponses de celui-ci ; lettres du prieur de la Bloutière au garde des sceaux voir Ba 35, 1. 70*. Bm 168. Adresses de Granville, 7 décembre 1788 voir Ba 35, 1. 706 et 26 février 1789. Bm 174 . Cahier de doléances de Valcongrain voir Ba 27, 1. 4518. SERIE C W Procès-verbaux des Assemblées nationales et pièces annexes. C 9, 1. 21-22, contient la Liste des personnes convoquées pour l'Assemblée des Notables du 3 novembre, remise au 6 du même mois. Paris, imprimerie royale, 1788, 7 p. de Cagny, maire de Caen, y figure comme 23e député du Tiers état sur 25, et la liste des bureaux des Notables en l'année 1788 de Cagny, 24e et dernier membre du 4e bureau, présidé par le prince de Condé. C 13, I. 28. Lettres d'envoi des procès-verbaux des Assemblées provinciales des trois généralités de Normandie ne contient que les lettres d'envoi du procès-verbal de l'Assemblée provinciale de Caen. 1 Sur cette collection des Bm, voir A. Brette, Recueil des documents relatifs à la tonvocalion des Etats généraux, Paris, 1894, in-4°, Introduction, p. cxxi sqq. 2 L'inventaire de cette série a été publié par A. Tuetey, Les Papiers des Assem- blées de la Révolution aux Archives Nationales, Paris, 1908, in-8°. ARCHIVES NATIONALES XXI C 17,1. 1{8, contient 15 pièces relatives au bailliage de Caen copies conditionnées aux originaux, et directement versées par les députés du bailliage au bureau de l'Assemblée nationale, savoir Procès-verbal de l'assemblée particulière du Tiers état du bailliage de Caen, 17 mars 1789 et jours suivants. Procès-verbal de prestation de serment des députés au bailliage de Caen, nommés aux Etats généraux. Procès-verbal de l'assemblée de l'ordre de la noblesse, 17 mars 1789 et jours suivants. Protestation de MM. du chapitre deBay eux, 16 mars 1 789, Protestation de MM. les dignitaires et chanoines du chapitre deBayeux, 14 mars 1789. Procès-verbal de l'assemblée du clergé. Déclaration de l'ordre de la noblesse, 18 mars 1789. Réponse de l'ordre de la noblesse à la déclaration du clergé pour la réunion des cahiers. — Proposition faite par les députés du chapitre de l'é- glise cathédrale deBayeux, 18 mars 1789. — Protestation de M. l'évêque deBayeux, 18 mars 1789. — Protestation de MM. les députés du chapitre de Bayeux, 19 mars 1789. — Protestation du fondé de pouvoirs de l'abbé de Troarn. — Déclaration des commissaires du bailliage de Caen du 24 mars 1789 pour remercier le clergé de sa déclara- tion sur la participation aux impôts. — Cahier du clergé du bailliage principal de Caen et bail- liages secondaires. Procès-verbal de prestation de serment des députés du bailliage de Caen. C 18,1. I62, contient 7 pièces relatives au bailliage de Coutances originaux et copies, qui proviennent des secrétariats des trois ordres, savoir — Procès-verbal de l'assemblée du clergé, 20 mars 1789 et jours suivants. — - Procès-verbal de prestation du serment des députés élus aux Etats généraux, 1er avril 1789 en double expédition. — Procès-verbal de l'assemblée des communes, et de l'é- lection des députés du Tiers ordre, 20 mars 1789 et jours suivants. XMl ARCHIVES NATIONALES C 18, 1. 11-. Procès-verbal de l'assemblée de la noblesse. — Extrait du procès-verbal de l'assemblée générale des trois ordres. — Procès-verbal de l'assemblée du Tiers état du bailliage de Saint-Lô imprimé. C 88 à 121 contient, en une série de cartons, les adresses des villes et communautés de France à l'Assemblée nationale, de mai 1789 à août 1790. Cette série m'a fourni les documents sui- vants C 88',r\ Arrêté du bailliage de Cérences, 6 juillet 1789, avec lettre d'envoi du lieutenant général Brohon, 8 juillet 1789 sur l'heureuse réunion des trois ordres. C 8833. Adresse de la ville de Bayeux à l'Assemblée nationale, 23 juillet 1789 même objet. C 8854. Adresse de la ville de Coutances à l'Assemblée nationale, 27 juillet 1789 même objet. C 893î. Adresse des communes du bailliage de Mortain à l'As- semblée nationale s. d., reçue dans la séance du 10 juillet 1789 même objet. — Adresse des officiers municipaux de Granville, 28 juil- let 1789 même objet. — Très humble et très respectueuse adresse de la ville de Saint-Sauveur-le-Vicomte à l'Assemblée nationale s. d. présentée à la séance du 29 juillet 1789 sur le retour de Necker. C 89i7. Adresse de Quinette de Cloisel, de Granville, 16 juil- let 1789. Lettre de Philippe Delleville, de Bayeux, à l'Assemblée nationale, 27 juillet 1789 demande d'élargissement, C 89G2. Arrêté pris par l'ordre de la noblesse du bailliage de Vire, le 24 juillet 1789, avec lettre d'envoi d'un gentilhomme Virois, d'Anjou de Boisnantier, 2 août 1789. G 90™. Adresse des officiers du bailliage et présidial de Cou- tances, 28 juillet 1789 sur l'heureuse réunion des ordres. — - Adresse des officiers municipaux d'Avranches, 28 juil- let 1789 sur le retour de Necker. C 9038. Adresse des citoyens de la ville de Caen, 1er août 1789 notification d'existence du Comité permanent. ARCHIVES NATIONALES XXIlt C 917,. Adresse de l'Université de Caen, 8 août 1789. C 9171, Adresse du Comité permanent de Carentan, 8 août 1789 sur le retour de Necker et le décret du 4 août. C 917'2. Lettre d'envoi par les officiers municipaux de Granville, le 14 août 1789, du procès-verbal de formation du Comité permanent. — Lettre d'envoi par le Comité permanent de Granville, le 14 août 1789, du procès-verbal de son établisse- ment, et copie de sa première délibération admi- ration pour la nuit du 4 août. C 917;{. Adresse du Comité permanent de Torigni, 12 août 1789 adhésion aux décrets de l'Assemblée. C 9174. Adresse des habitants de la ville de Coutances, 20 août 1789 adhésion du Comité permanent au décret du 4 août. C 9178, Adresse du Comité général de la ville de Saint-Lô s. d. reçue le 8 août 1789 même^objet. C 9276. Adresse du Comité permanent du bailliage de Saint- Sauveur-Lendelin, à Paris, 25 août 1789 même objet. C 9278. Adresse des citoyens des trois ordres de la ville de Caen, 31 août 1789/ — Décret du Comité général national d'Avranches, relatif à la perception des droits et impôts de tout genre, 31 août 1789. C 9281, 11 pièces relatives à Bertrand Lhodiesnière, procureur du roi au bailliage de Falaise le dossier s'est trouvé scindé par la remise de 13 pièces au garde des sceaux le 6 juin C 9382. Adresse des citoyens de Coutances cà l'Assemblée natio- nale, 1er septembre 1789 adhésion nouvelle du Comité permanent à ses décrets. C 9388. Adresse de la municipalité de Granville, réunie en Comité national, 11 septembre 1789 demande l'or- ganisation prochaine d'Etats provinciaux et de mu- nicipalités. C 94. Adresse de la municipalité d'Avranches à l'Assemblée nationale, 9 octobre 1789, avec lettre d'envoi du 14 octobre sur le décret du 26 septembre 1789. C 96l,. Lettre du Comité municipal et national de Cherbourg, 26 octobre 1789 adhésion à la loi martiale. — Adresse de 10 particuliers de Saint-Lô à l'Assemblée nationale, 23 novembre 1789 objet imprécis. XXIV ARCHIVES NATIONALES C 96 m. Adresse du Comité général et permanent de Vire, 8 no- vembre 1789 adhésion aux décrets de l'Assemblée nationale. C 9MI. Adresse du Comité national de Coutances, 9 novembre 1789 demande d'assemblées administratives et mu- nicipales. Envoi par la municipalité de Cherbourg du procès- verbal de proclamation de la loi martiale du 4 no- vembre, 26 novembre 1789. C 971-1. Adresse de la milice nationale de Cherbourg, 22 novem- bre 1789 adhésion aux décrets de l'Assemblée natio- nale. C 97,2\ Adresse du Comité général et permanent de la ville de Caen, 3 novembre 1789 demande d'assemblées pro- vinciales et de municipalités. C 98429. Adresse de la ville de Carentan à l'Assemblée nationale s. d. demande d'une juridiction. C 9813i. Adresse et supplique de la commune deBricquebec s. d. même objet. C 99m. Lettre de Dubois -Dubais, ancien garde du corps, 9 fé- vrier 1790. C 99iil. Plainte des officiers du régiment d'Aunis, 20 décem- bre 1789 contre la motion de Dubois Crancé inju- rieuse pour l'armée. C 100100. Lettre du Comité municipal d'Isigny, 20 décembre 1789 demande d'une juridiction. C 101162. Adresse du Comité municipal du bailliage de Saint- Sauveur-Lendelin séant à Périers, 23 décembre 1789 demande le maintien du bailliage. Adresse de la municipalité de Tinchebrai, avec lettre d'envoi du 23 décembre 1789 adhésion aux décrets de l'Assemblée nationale. C 101 167. Adresse de la communauté de Sourdeval, 28 décembre 1789 demande d'un district et d'une juridiction. C101169. Adresse des officiers municipaux de Granville, 1er jan- vier 1790 vœux de nouvel an à l'Assemblée natio- nale. C102171. Adresse de la paroisse de Tourlaville, limitrophe de Cherbourg, 3 janvier 1790 remerciement pour l'obtention d'un district à Cherbourg. C102174. Adresse de la ville de Saint-Lô, 9 janvier 1790 vote d'une offrande patriotique. ARCHIVES NATIONALES XXV C 10217G. Adresse de la municipalité et des négociants de la ville de Cherbourg, 11 janvier 1790 contre le projet de suppression de l'esclavage aux colonies. C 102170. Adresse de la garde nationale du bourg de Bricquebec, 20 janvier 1790 fidélité à l'Assemblée nationale. C 102180. Adresse du Comité municipal et du corps composant la garde nationale de Bayeux, 22 janvier 1790, avec lettre d'envoi de Leboucher-Deslongsparcs, prési- dent du Comité, du 24 janvier 1790. Adresse de la garde nationale de la ville de Bayeux, 22 janvier 1790 adhésion à la constitution. C 10318l Adresse des soldats français en garnison à Valognes et à Cherbourg, janvier 1790 protestation contre la motion Dubois-Crancé. C 104188. Adresse des maire et officiers municipaux de Granville, 8 février 1790 notifie la formation de la municipalité. C 104193. Adresse des municipalités des paroisses de l'élection de Mortain, 17 février 1790 même objet. C 104194. Adresse des habitants du bourg de Creully et hameaux en dépendant, 19 février 1790 même objet. C 104196. Adresse de la municipalité de Cherbourg, 21 février 1790 même objet. — Adresse du Conseil général de la commune de Tourla- ville, 21 février 1790 même objet. C 10520G. Procès-verbal de l'élection des officiers municipaux de Saint-Lô et de la prestation du serment civique, 27 janvier, 15 février 1790. C 108222. Adresse des officiers municipaux de Caen, 28 février 1790 même objet. C 109223. Procès-verbal d'élection des officiers municipaux de Montebourg, 20-22 février 1790 même objet. C 110241. Adresse des citoyens de la commune de Gréville-à-la- Hague, Basse-Normandie, 1er mars 1790 même objet. C 110242. Adresse des membres de la municipalité d'Isigny, 2 mars 1790 même objet. C lll246. Adresse des officiers municipaux de Cherbourg, 6 mars 1790, envoi de proclamations des 2 septembre, 6 novembre 1789 et 28 février 1790, relatives à la perception des impôts indirects. C lll247. Adresse des officiers municipaux de Vire, 10 mars 1790 même objet. XXVI ARCHIVES NATIONALES C 111 -i'' . Discours prononcé par l'abbé d'Agneaux dans l'église de Villedieu pour la prestation de serment de la milice nationale des paroisses confédérées, Villedieu, Saultchevreuil et Saint-Pierre-du-Tronchet, 14 mars 1790. C 114-'S. Procès-verbal de la municipalité de Villedieu relatif à une saisie de faux tabac, 7 avril 1790. C 1 1 4iK> . Adresse de la garde nationale de Caen du 15 avril 1790 avec lettre d'envoi de Faudoas, commandant. Procès-verbal de la prestation de serment par la garde nationale de Caen, 11 avril 1790, avec lettre d'envoi des officiers municipaux du 16 avril 1790. Proclamation du Conseil général de Caen relative à l'abolition de la contrebande, 9 avril 1790. Adresse des membres de la Société patriotique et littéraire de Coutances, 17 avril 1790, pièce origi- nale annonce d'un don remis aux indigents. — La même, imprimerie Joubert, Coutances. 4 p. C 115u-. Adresse des maire et officiers municipaux d'Avranches, avec lettre d'envoi du 16 mai 1790 félicitations pour le décret du 13 avril 1790. Discours du maire d'Avranches, Tesnière de Brémes- nil, lors de la prestation du serment par les ci- toyens d'Avranches, 2 mai 1790. 2 exemplaires imprimés. C 1153i3, Adresse de la commune de Valognes, 17 mai 1790 contre le manifeste des catholiques Nîmois. Procès-verbal de prestation du serment par la garde nationale de Valognes, 6 juin 1790. Adresse des écoliers du collège de Valognes aux offi- ciers municipaux s. d. adhésion à la Constitu- tion. Discours de Ribet, étudiant de philosophie, pro- noncé le jour de la prestation du serment civique par les écoliers. Procès-verbal de prestation du serment civique sur le Roc de Granville, 13 mai 1790, avec lettre d'envoi des officiers municipaux, 17 mai 1790. C 116J1G. Adresse des officiers de la garde nationale et des volontaires de Cherbourg, 20 mai 1790, avec lettre d'envoi du 21 mai 1790 même objet. C 116318. Adresse des officiers de la sarde nationale d'Avran- ARCHIVES NATIONALES XXVII ches, 23 mai 1790, avec lettre d'envoi par Burdelot, lieutenant et secrétaire du Conseil de la garde natio- nale adhésion à tous les décrets de l'Assemblée. C 116318. Adresse de la garde nationale de Saint-Lô, avec lettre d'envoi à Vieillard, député à l'Assemblée natio- nale, 23 mai 1790 même objet. C 116323. Jugement de police prononcé le 29 mai 1790 par les officiers municipaux de Baveux contre une délibé- ration des commissaires du chapitre de la cathé- drale, imprimée, considérée comme attentatoire aux décrets de l'Assemblée nationale imprimerie veuve Nicolle, à Bayeux, 7 p., avec lettre d'envoi des officiers municipaux du 11 juin 1790. C 1173-3. Adresse de l'assemblée primaire de Mortain, signée de Duhamel, maire et président, et de 56 autres citoyens, 31 mai 1790 fidélité à l'Assemblée nationale. C 1 1 73-6 . Adresse de la section des Cordeliers, du canton de Valognes, 2 juin 1790 annonce la formation, avec les deux autres sections du canton, d'un Pacte fédéral pour la défense de la Constitution. Adresse de la 3e section du canton de Sourdeval com- munes du Fresne-Poret et de Vengeons, 2 juin 1790 même objet que Mortain. — Adresse de la lre section du canton de Villedieu, 2 juin 1790 réprobation de libelles incendiaires. C 117333, Adresse des électeurs des cantons de La Haye-du- Puits, Prétot et Lessay, 14 juin 1790 représen- tants à l'Assemblée nationale. — Adresse de la garde nationale de Valognes, 18 juin 1790 nouvelle prestation de serment. C 118340, Adresse des officiers, bas officiers et soldats de la garde nationale de Valognes, 21 juin 1790 an- nonce qu'elle portera 3 jours le deuil de Franklin. — Adresse du département de l'Orne à l'Assemblée nationale, par Le Veneur, président de l'assemblée électorale, au nom des 601 électeurs, 10 juillet 1790 adhésion à la Constitution. C 119353. Adresse des jeunes patriotes de l'Education natio- nale des sieurs Mougeot, prêtres à Saultchevreuil, près Villedieu, 4 juillet 1790 adhésion à la Consti- tution. XWIII ARCHIVES NATIONALES C 119353. Adresse de la garde nationale de Gavray aux Pères de la patrie, 4 juillet 1790 dévouement à l'Assem- blée. C 121!,,T. Lettre d'envoi par les officiers municipaux de Cher- bourg du procès-verbal de la fête du 14 juillet 1790, 25 juillet 1790. C 12137p. Proclamation du Conseil général de la commune de Saint-Lô, du 24 juillet 1790 imprimerie Jou- bert, 12 p., concernant le paiement des imposi- tions et droits, avec lettre d'envoi de la municipa- lité du 12 août 1790. C 1891**. Papiers trouvés aux Tuileries, dans l'appartement de Louis XVI, le 25 juin 1791. Liste des députés des départements et districts, envoyés à la Fédération et passés en revue par Louis XVI, les 13 et 19 juil- let 1790. C 189,1°. M. Etats, listes et procès-verbaux des députés à la Fédération de 1790, Calvados. C 189152. Id. Etats, listes, etc., de la Manche. C 189,r>{. Id. Etats, listes, etc., de l'Orne. SÉRIE D Comités des Assemblées Nationales Div Papiers du Comité de constitution, créé le 3 juillet 1789. Cette sous-série comprend la correspondance des commissaires du roi pour la formation des départements avec le comte de Saint-Priest, les réponses du Comité de constitution à des ques- tions posées par les départements ; des pièces sur la formation des corps administratifs et des procès-verbaux de formation et d'installation de ces corps. J'y ai consulté les documents suivants Div l57. Tableau général du département de la Manche divisé en districts, cantons, assemblées primaires et com- munes, avec lettre d'envoi des trois commissaires du roi pour la formation du département, 31 juil- let 1790. Div liH. Lettre de Frémin de Beaumont, commissaire du roi, au Comité de constitution, 1er juin 1790. ARCHIVES NATIONALES XXIX Div l39. Lettre du même au même Comité, 3 juin 1790. Div 212. Adresse de la ville de Granville à l'Assemblée natio- nale, 25 juillet 1790. Div 216. Lettre de Bernard, commissaire du roi, au Comité de constitution, 28 juin 1790. Div 317. Lettre des commissaires du roi, de la Manche, au Co- mité de constitution, 18 juin 1790. Lettre des commissaires du roi, du Calvados, à l'Assem- blée nationale, 16 juin 1790. Div 543. Adresse des officiers municipaux de Bayeux au Corps législatif de France s. d., entre mars et juin 1790. Div 678. Lettre de Crafton, commandant de la garde nationale de La Hougue au Comité militaire de l'Assemblée nationale, 29 août 1790. Div 711''. Procès-verbal de formation de la municipalité de Bretteville-sur-Odon copie, 24 janvier 1790. Div 9132. Protestation de la Haye du Puits auprès de l'Assem- blée nationale, 18 juillet 1790. Rapport des envoyés extraordinaires de la Haye du Puits sur l'insalubrité de Carentan, 25 juillet 1790. Div 11169. Procès-verbaux de formation de la municipalité de Cérence, 2, 7 et 21 février 1790. — Requête de la municipalité contre les entreprises illé- gales de Brohon, lieutenant général du bailliage de Cérences, 14 mars 1790. — Ma justification » imprimé, adressée par Brohon à l'Assemblée nationale. Div 11170. Lettre des commissaires du roi, du Calvados, au Comité de constitution, 3 avril 1790. Div 12173. Lettre de Cauvin, apothicaire et notable de Creully, au président de l'Assemblée nationale, 17 février 1790. Div Lettre des officiers municipaux de Tinchebrai au Comité de constitution, sur la garde nationale, 28 mars 1790. Div 21 422. Lettre d'Onfroy, procureur syndic de Tinchebrai, à l'Assemblée nationale, 14 avril 1790. — Lettre des commissaires du roi, du Calvados, à l'Assem- blée nationale, 29 mai 1790. Div 21431. Supplique des commis de l'administration provin- ciale de Basse-Normandie à l'Assemblée nationale, 24 juillet 1790. XXX ARCHIVES NATIONALES Div 21431. Lettre de Cailloué, procureur de la commune d'Ar- gences, au président de l'Assemblée nationale, 12 mars 1790. Div 21*38. Plaintes des habitants de Louvigny contre la muni- cipalité, 22 mars 1790. — Plaintes de Comin, maire de Magny, contre l'illégalité de l'assemblée primaire des Capucins, de Bayeux, 29 mai 1790. — * Mêmes plaintes des paroisses de Geffosse, Longues, Marigny, Saint-Germain-des-Entrées, Sommer- vieu, Saint-Germain-de-la-Lieue, avec délibération spéciale pour chaque paroisse. Plaintes de Brouard, avocat de Vire, contre les irrégu- larités de l'assemblée primaire des Capucins de Vire, 25 mai 1790. Plaintes de la municipalité de Tinchebrai contre l'état- major de la milice nationale, 31 mai 1790. Plaintes de Lacour, capitaine des canonniers garde- côtes, au sujet de la Fédération, 30 juin 1790. Div 21 m. Nouvelle protestation de Brouard, avocat de Vire, 9 juin 1790. Div 41I10!. Plaintes de Brohon, lieutenant général du bailliage de Cérences, à l'Assemblée nationale, 18 février 1790. Requête de Saint-Nicolas-de-Granville à l'Assem- blée nationale, 1er mars 1790, contre sa réunion à Granville. — Plaintes de Germain de Louvigny sur la formation irrégulière de la municipalité de Sainte-Marie-des- Bois, 26 mai 1790. Div 11110'1. Lettre d'un armateur de Tourlaville, 12 février 1790. Lettres de deux fermiers d'Anneville-l'Etre, mars 1790. Lettre d'Enguerran des Landes, officier municipal de Saultchevreuil s. d.. — Réclamation contre l'élection de Chantereyne comme procureur de la commune à Cherbourg, 22 juillet 1790. Div 4111!Vi. Adresse de Granville cà l'Assemblée nationale, 26 mai 1790. Div ll,l,r\ Lettre des officiers municipaux de Granville à l'As- semblée nationale, 15 février 1790. ARCHIVES NATIONALES XXXI Div 41im. Lettre des officiers municipaux de Saint-Nicolas-de- Granville à l'Assemblée nationale, 15 février 1790. — Adhésion des bas officiers et fusiliers de la garde nationale de Mortain aux décrets de l'Assemblée nationale, 23 juin 1790. Plaintes de la municipalité de Bricquebec contre l'insubordination de la garde nationale, 29 juillet 1790. Div 111117. Procès-verbal de formation de la municipalité de Coulouvray, accompagné d'une lettre de protesta- tions, 24 janvier 1790. — Lettre de la municipalité de Saint-Jean-de-Daye, janvier 1790. Lettre de la municipalité de Soulles, 31 janvier 1790. Divbis Papiers du Comité de division, 'institué, le 13 octobre 1791, par la Législative pour continuer le travail inachevé du Comité de constitution, dont il était un démembrement. Cette sous-série comprend 110 cartons, relatifs à la division adminis- trative et judiciaire de la France. J'y ai consulté Divbis l-;{. Procès-verbal de l'assemblée de la province de Nor- mandie, 17 décembre 1789. — Procès-verbal de l'assemblée des députés du Cotentin, 18 décembre 1789. Note du duc de Coigny sur la division du départe- ment de Caen en districts, 18 décembre 1789. — Limites des départements de Caen et d'Evreux, 21 décembre 1789. Limites des départements de Cotentin et d'Alençon, 22 décembre 1789. Procès-verbal de l'assemblée de la province de Nor- mandie, 23 décembre 1789. • — Procès-verbal de l'assemblée des députés du Cotentin, 24 décembre 1789. — Carte du département de Cotentin, divisé en 7 dis- tricts avec ratures, d'après la nouvelle division adoptée le 24 décembre 1789. — Limites du département de Beauvoisis et de la Nor- mandie, 1er janvier 1790. — Limites des départements d'Evreux et de Mantes et Chartres, 2 janvier 1790. ARCHIVES NATIONALES Div1,is 123. Limites des départements d'Evreux et de Chartres, 2 janvier 1790. Procès-verbal de l'assemblée des députés du Coten- tin, 3 janvier 1790. Limites des départements de Caen et de Cotentin, 7 janvier 1790. Procès-verbal de la division de la Normandie en dé- partements et en districts, dressé par Cherfils, Lindet, Goupil de Préfelne, Delauney et de Bon- vouloir, commissaires nommés par les députés de la province de Normandie, 7 janvier 1790. Mémoire sur la division du département de Cotentin, par Pouret-Roquerie, 8 janvier 1790. Rectification d'abornement entre les districts de Carentan et de Valognes, 15 janvier 1790. Etat des paroisses frontières entre les districts de Carentan et Valognes, de Carentan et Coutances, et des dix cantons à former dans le district de Carentan, 15 janvier 1790. — Division en cantons des sept districts du département de Cotentin, 22 janvier 1790. Division en cantons des six districts du département d'Alençon, 6 février 1790. Carte du département de Caen, divisée en districts, tracée sur la carte générale de Normandie traces de triangulation. Divbis 223. Constatation par les députés du département de Chartres des procès-verbaux de démarcation arrêtés précédemment avec les départements d'Evreux et d'Alençon, 20 janvier 1790. Pivbis 245. Fixation par les députés de la généralité de Tours des limites entre le département du Mans et la Nor- mandie, 12 novembre 1789. Division du Perche entre les départements d'Alençon et du Mans, 25 janvier 1790. Divbis517"2. Adresse de la municipalité de Condé-sur-Noireau à l'Assemblée nationale, 23 décembre 1789. Représentations de la ville et arrondissement du bailliage de Torigni sur la nouvelle division terri- toriale, 2 janvier 1790. — Précis pour la ville de Torigni imprimé, janvier 1790. ARCHIVES NATIONALES XXXIII Divbis5172. Suppliques des municipalités de Fresnes et Montsecret pour rester au district de Vire, 17 janvier 1790. Divbis 517;J. Réponse que fournit aux Etats généraux un habitant de Vire Michel le Besnerais, avocat, aux obser- vations de MM. de la commune de Caen sur la division territoriale de la Normandie et sur le département de Caen, 20 décembre 1789. — • Supplique du canton d'Hamars à l'Assemblée natio- nale, 11 juin 1790. — Rapport du Directoire du Calvados sur la situation de sept communes entre Dives et Orne, rattachées malgré elles au district de Pont-1'Evêque, 20 octo- bre 1790. Divbis10230. Adresses respectueuses de Saultchevreuil, Saint- Pierre-du-Tronchet, Sainte-Cécile, la Colombe, le Chefresne, Fleury, la Bloutière, Margray à l'Assemblée nationale pour avoir un district à Villedieu, novembre-décembre 1789. — Mémoire de Péiïers contre la division du département de Cotentin en six districts, 25 décembre 1789. — Réclamations de très nombreuses paroisses du Coten- tin à l'Assemblée nationale en faveur de Périers délibérations communales, du 6 décembre 1789 au 17 janvier 1790. — Protestation de Pouret-Roquerie contre la division du département de Cotentin en sept districts, 30 décembre 1789. — Adresse de Villedieu au Comité de constitution, 30 décembre 1789. — Requêtes de Percy et Montrabot pour être ratta- chées à Villedieu, 30 décembre 1789. — Réclamation de Pouret-Roquerie en faveur de Pé- riers, 21 janvier 1790. Divbis10231. Mémoire du Comité municipal et national de Cher- bourg à l'Assemblée nationale imprimé, 12 août 1789. — Copie de la délibération de l'hôtel de ville de Gran- ville, 23 novembre 1789. — Réfutation de l'imprimé ayant pour titre Obser- vations sur le chef -lieu du département de Cotentin », par Vieillard imprimé, 19 décembre 1789. \\\l\ ARCHIVES NATIONALES Div1,u10-,;il. Extrait du procès-verbal de l'assemblée des députés du Cotentin copie, 24 décembre 1789 formation d'un septième district. Cf. Div,,is l-;{. Réclamation de Perrée-Duhamel pour Granville, 2 janvier 1790 ; requête de Couraye-Duparc pour Granville, 3 janvier 1790. — .Mémoire de Valognes au Comité de constitution contre rétablissement d'un district à Cherbourg, 7 janvier 1790. — Addition à la réclamation de Perrée-Duhamel, 11 jan- vier 1790. — Lettre de Couraye-Duparc, 21 janvier 1790. Réclamation de Granville contre le projet de division de la Basse-Normandie, arrêté par les députés de cette province imprimé s. d.. Adresse de la garde nationale de Valognes à l'Assem- blée nationale, 11 mars 1790. Cahier de doléances de la Haye du Puits, 1er mars 1789, avec lettre d'envoi de Regnault de Bretel, en septembre 1789. Requête de la municipalité de Saint-Fraguaire au président de l'Assemblée nationale, 25 avril 1790. Lettre de Regnault de Bretel à l'Assemblée natio- nale, 18 juin 1790. — Requête de la municipalité de Vezins à l'Assemblée nationale, août 1790. Requête de la municipalité de Ducey contre forma- tion vicieuse de son canton s. d.. — Adresse de Saint-Sauveur-le-Vicomte et paroisses voisines à l'Assemblée nationale s. d.. Cf. Divbis27^. Divl,is12-Vl. Réclamation de la municipalité de Saint - Pierre - du-Regard au Comité de constitution, 19 novem- bre 1790 pour sa réunion au Calvados ; lettre du maire de Condé au Comité de constitution s. d., même objet. — Mémoire des propriétaires fonciers de Saint-Pierre-du- Regard au Comité de constitution, 16 janvier 1791. Div,,is21,-S. Requête de Condé-sur-Noireau à l'Assemblée natio- nale, 14 février 1790. Divbis21{{M. Requête d'ïsigny à l'Assemblée nationale, jan- vier 1790. ARCHIVES NATIONALES XXXV Div,,is213-8. Supplique du maire de Croissanville à Gossin, mem- bre du Comité de constitution, 6 juin 1790. Divbis21330. Observations soumises par la Commission inter- médiaire provinciale de Caen à l'Assemblée na- tionale, s. d. pour obtenir un tribunal supérieur à Caen. Divbisi27;nw. Requête de Carentan à l'Assemblée nationale, novembre 1789 pour être chef-lieu de départe- ment. — Requête des habitants de la Lande-d'Airou, 6 dé- cembre 1789. — Requête des habitants de Tribehou et Saint-Mar- tin-des-Champs, janvier 1790. Remercîments de Carentan à l'Assemblée nationale, 30 janvier 1790. — Lettres des revendeurs de sel blanc de la Haye du Puits et de Périers à Lesage, receveur principal de Carentan, 15 et 17 février 1790. — Remontrances de la commune de Périers à l'Assem- blée nationale, 19 juillet 1790. — Mémoire des députés de la Haye du Puits à l'Assem- blée nationale, 25 juillet 1790. Divbis 27394. Plan du Haut - Cotentin divisé par cantons de 36 lieues carrées, 26 décembre 1789 en faveur de la Haye du Puits. — Mémoire de Regnault de Rretel pour la Haye du Puits, 26 décembre 1789. — Lettre de Regnault de Rretel à l'Assemblée natio- nale, 7 juin 1790. — Mémoires de Granville à l'Assemblée nationale, 31 mars, 4 août 1790, accompagnés des délibé- rations d'une trentaine de paroisses, prises du 31 décembre 1789 au 3 janvier 1790. — Adresse de Saint-Sauveur-le-Vicomte à l'Assem- blée nationale s. d.. — Carte topographique des villes, bourgs et paroisses qui relèvent confusément des bailliages de Va- lognes et de Saint-Sauveur-le- Vicomte s. d.. — Carte de la presqu'île de Cotentin comprenant les • districts de Cherbourg, Valognes, Saint-Sauveur- le-Vicomte, portion des districts de Carentan et Périers s. d.. XXXVI ARCHIVÉS NATIONALES Divhis 44 . Tableaux de population de la généralité de Caen en 1787, dressés par bailliages et élections 13 ta- bleaux. Divbis 55. Liste des premiers noms donnés aux 83 départe- ments par le Comité de constitution. Div,is 60 . Instruction sur la formation de l'assemblée du dépar- tement du Calvados, par les quatre commissaires du roi imprimé, 31 mai 1790. Div1is 92A. Répertoire des décrets de l'Assemblée nationale constituante, concernant la division de la France en départements, districts, cantons et munici- palités leurs circonscriptions, la fixation des chefs-lieux et le placement des autorités admi- nistratives et judiciaires, la réunion des municipa- lités et paroisses, du 17 juin 1789 au 30 septem- bre 1791. Dvi Papiers du Comité des finances. Cette sous-série contient dans quatre cartons, 23 Calvados, 38 Manche, 43 et 44 Orne, les documents relatifs à l'assiette et à la perception des impôts dans ces trois départements. J'y emprunte les pièces suivantes Dvi 24314. Lettre des officiers municipaux de Sommervieu, élection de Bayeux, à l'Assemblée nationale, 31 mai 1790 réclamation relative aux impositions. — Mémoire de la paroisse de Rye relativement à plu- sieurs difficultés sur la répartition de l'imposition des ci-devant privilégiés, 21 juin 1790. Réclamation du chevalier de Vaudreuil contre la municipalité de Campandré, 26 mai 1790. Dvi 24345. Lettre des officiers municipaux de Rouffigny, élection d'Avranches, à l'Assemblée nationale, 23 février 1790 demande d'instructions sur la répartition des impositions. Lettre du curé de Chouains à l'Assemblée nationale, 4 août 1790 dénonciation contre la municipalité. — Lettre de l'abbé de Jumilly, ex-président du Comité national de Caen, à l'Assemblée nationale, 13 avril 1790 réclamation contre la lourdeur de là taxe représentative de la corvée imposée à la ville de Caen. ARCHIVES NATIONALES XXXVII Dvi 24315. Mémoire de la municipalité de Margray, élection de Vire, 23 février 1790 plainte contre la lourdeur des impositions. — Mémoire de la municipalité de Pontfarcy, élection de Vire, 16 février 1790 même objet. Mémoire de Cairon de la Varende, d'Amblie, 18 juil- let 1790 plainte contre l'imposition des ci-devant privilégiés. Dvi 24316. Mémoire de la municipalité de Condé-sur-Noireau, fin mars 1790 demande d'une réduction d'impôt. A l'appui de sa requête, elle a joint des lettres de Lamy, député du bailliage de Caen, et un exem- plaire imprimé du procès-verbal de la formation de la confédération de Condé du 26 août 1789, publié à Caen, Chalopin, 1789. — Mémoire des marchands aubergistes de la ville et faubourgs de Caen, 4 août 1790 plaintes contre la dureté de l'impôt. — Lettre d'Aveline, notaire et syndic de la municipalité de Caumont, élection de Bayeux, à l'Assemblée nationale, 6 février 1790 plainte de 5 paroisses rurales contre le despotisme des villes. — Plainte anonyme des habitants, laboureurs, fermiers et exploitants des communautés de campagne de la Basse-Normandie à NN. SS. de l'Assemblée nationale, 10 février 1790 plaintes contre l'ins- truction de la Commission intermédiaire de Caen du 19 janvier 1790. — Lettre de Mauduit, président du Comité national de Vire à l'Assemblée nationale, 9 décembre 1789 plaintes contre l'exécution frauduleuse du décret relatif à l'imposition des ci-devant privi- légiés. Dvi 24317. Requête des employés de l'intendance de Caen à l'Assemblée nationale, 31 décembre 1789 deman- dent à être placés dans les bureaux de l'adminis- tration nouvelle. — Lettre de Langelé-Duperrier, de Colleville près Bayeux, au Comité des finances, 8 août 1790 demande d'une manufacture pour la jeunesse. — Requête de Boutrais, marchand grainetier à Caen, au Comité des finances, 16 février 1791 demande WXYlii ARCHIVES NATIONALES d'indemnité pour le pillage de son magasin dans l'émeute du 24 avril 1789, dossier de 17 pièces. Dvi 24{8. Lettre des habitants les plus notables et les plus imposés de Bricqueville à l'Assemblée nationale, 19 février 1790 protestation contre les irrégula- rités de l'élection municipale. Dvi 24319, Lettre de Louvet, docteur-médecin à Isigny, à l'As- semblée nationale, 3 octobre 1789 demande de travaux pour le soulagement des malheureux. Dvi 24i-°. Requête de Boislandry et Bougon-Longrais, députés extraordinaires de la ville de Caen, à l'Assemblée nationale, 20 mai 1790 demande d'autorisation d'un emprunt de 50,000 livres. Dvi 38i45. Lettre des officiers municipaux de Baubigny à l'Assemblée nationale, 30 mars 1790 demande d'une réduction d'impôt. Lettre des officiers municipaux de Saint-Pierre- Eglise à l'Assemblée nationale, 12 mars 1790 plainte contre l'Instruction de la Commission in- termédiaire provinciale de Caen du 19 janvier 1790, avec exemplaire imprimé de cette Instruction. — Lettre de Chauvel, notaire à la Lande-d'Airou, à l'Assemblée nationale, 6 juin 1790 sur l'abus de la contrebande. — Lettre de Bernard, vice-président du Comité national de Saint-Lô, à l'Assemblée nationale, 25 novem- bre 1789, accompagnée d'une délibération de ce Comité du 23 novembre sur le changement appor- té à la régie des droits d'aides. — Lettre des officiers municipaux de Tinchebrai à l'Assemblée nationale, 12 mars 1790 plaintes contre la Commission intermédiaire provinciale de Caen, avec exemplaire imprimé de l'Instruction du 19 janvier 1790. — Lettre de Payen de Chavoy, membre du Bureau intermédiaire d'Avranches à l'Assemblée natio^ nale, 3 janvier 1790 sur l'assiette des impositions. Plainte de 16 paroisses de l'élection de Valognes contre l'Instruction de la Commission intermé- diaire provinciale de Caen du 19 janvier 1790, 30 mars 1790, avec un exemplaire imprimé de cette Instruction. ARCHIVES NATIONALES XXXIX Dvi 38ii0. Lettre des officiers municipaux de Cherbourg à l'Assemblée nationale, 12 juin 1790 demande d'autorisation d'un octroi sur les boissons. Dvi 38;/7. Lettre des officiers municipaux à Tourla ville à l'Assemblée nationale, 7 avril 1790 protestation contre les insinuations de Pomiès, commissaire de la Nation, accompagnée d'une proclamation de la municipalité contre la fraude, du 28 mars 1790 placard imprimé. Dvi 38r,/'8. Proclamation de la municipalité de Cherbourg rela- tive à la perception des droits, 28 février 1790 imprimé. — Mémoire pour les habitants de Cherbourg contre la régie générale des droits d'aides s. d.. Dvi 38549. Lettre de Leconte, maire de la Bonneville, à l'Assem- blée nationale, 10 avril 1790 signale l'état misé- rable du pays. — Extrait d'une délibération du Conseil général de Saint-Lô, du 25 février 1790 contre les exigences excessives du directeur des aides. Dvi 38350. Lettre de Bucaille, maire de Brevands, à l'Assemblée nationale, 12 mai 1790 sur la nouvelle élection de la municipalité. Liste des officiers municipaux de Gatteville à l'As- semblée nationale, 22 mars 1790 plaintes contre l'Instruction de la Commission intermédiaire provinciale du 19 janvier 1790. — Lettre des officiers municipaux de Tocqueville à l'Assemblée nationale, 14 mars 1790 même objet. Lettre des officiers municipaux de Canteloup à l'As- semblée nationale, 18 mars 1790 même objet. Dvi 38iy' . Lettre de Lefauqueux, greffier de la subdélégation de Saint-Lô, à l'Assemblée nationale, 2 juillet 1790 demande de secours. Dvi 3833i. Lettres écrites à l'Assemblée nationale au sujet de la contribution patriotique, par Desaunès, de Caen, 1er avril 1790 ; Lehardy, de Caen, 2 avril 1790 ; Delaville, médecin de l'hôpital des travaux de la rade de Cherbourg, 28 décembre 1789 ; de Morel, avocat à Carentan, 18 juin 1790. Dvi 43. Lettre de Guillouet, lieutenant général du bailliage de Jinchebrai, à l'Assemblée nationale, 17 février 1790 XL ARCHIVES NATIONALES sur les nouvelles exigences des curés pour les dîmes et les pailles. Dvi 64. Etals de situation des finances de la France, de l'éten- due, de la population et des contributions de chaque généralité du royaume en 1788. Dxi Papiers du Comité de liquidation. Cette sous-série ne m'a fourni de renseignements que sur un point Dxi 29. Lettres et mémoires relatifs à l'indemnité accordée à Bellissent, négociant à Caen, pour le pillage de son magasin de grains dans l'émeute du 23 avril 1789. Dxm Papiers du Comité d'Agriculture et de Commerce Dxm 4. Adresse des fermiers en général du Cotentin à l'Assem- blée nationale, s. d. 1790, 2 pièces. Dxiv Papiers du Comité des droits féodaux, comprend douze cartons, classés par ordre alphabétique de départements. Trois d'entre eux renferment d'importants documents relatifs à l'é- poque étudiée dans ce travail, à savoir Dxiv 213 pour le Calvados, 548 pour la Manche, 8 pour l'Orne. Dxiv2l* Cabourg. Détails importants et d'un intérêt marquant pour l'utilité publique, en ce qui touche et la vie la tranquillité de toutes les classes de citoyens dans les campagnes, 2 juin 1790 mémoire sur les dunes de Cabourg, par le comte de Persan, contre les habi- tants. — Landelles. Lettre de Mireaume-Deslandes au Comité des droits féodaux, 21 mars 1790. — Rots. Lettre des officiers municipaux de Rots au prési- dent de l'Assemblée nationale, 23 février 1790 contre les usurpations de l'abbaye Saint-Etienne de Caen. — Lettre de Cotelle, avocat au bailliage de Vire, 13 octo- bre sur les dîmes inféodées. Dxiv 5''8 Agon. Requête des habitants à l'Assemblée nationale, 16 janvier 1790 sur l'usurpation de biens commu- naux par le seigneur. — Avranches. Lettre de Gauquelin, prêtre, au président de l'Assemblée nationale, 18 août 1789 sur l'usur- pation des landes de Pontorson par le seigneur. ARCHIVES NATIONALES XLI Dxiv5''8 Brécey. Plaintes des habitants à l'Assemblée nationale, 28 mai 1790 sur l'abus et l'iniquité des redevances seigneuriales. — Bricquebec. Plaintes des habitants de Bricquebec, des Perques, de Quettetot et de Surtainville à l'Assem- blée nationale, 20 septembre 1789 contre l'inter- diction par les seigneurs des droits d'usage dans la forêt. — Carneville. Plaintes des habitants de Gonneville et Carneville, 30 mai 1790 contre les vexations du seigneur. — La Chapelle-Enjuger. Lettre de Dagobert, major des chevaliers royaux du Dauphiné, au président de l'Assemblée nationale, 26 février 1790 contre les vexations du seigneur. — Coutances. Lettre des officiers municipaux à l'Assem- blée nationale, 15 mars 1790 sur le droit de havage. — Gavray . Lettre d' Hervieu, avocat à Gavray , à l'Assemblée nationale, 14 février 1790 sur le droit de banalité. — Mesnil-Amant. Lettre de Cabaret, avocat à l'Assemblée nationale, 27 août 1790 sur le droit de pêche. Hautevilîe-sur-Mer. Réclamations des habitants à l'Assemblée nationale, 5 août 1790 contre l'usur- pation d'un marais par le seigneur. — La Haye-du-Puits. Lettre de Regnault de Bretel à l'Assemblée nationale, 2 mai 1790 sur le rachat des rentes seigneuriales. — Isigny, près Mortain. Lettre de Godard à l'Assemblée nationale, août 1790 sur un droit à la foire Saint- Mathieu. — Requête des habitants de Moyon, Tessy, Villebaudon, Mesnil-Opac, Beaucoudrai, Mesnil-Hermant, à l'As- semblée nationale, 17 février 1790 contre les vexa- tions des agents du prince de Monaco. — Neufmesnil. Mémoire rédigé par Lesens, mars 1790, débats avec paroisses voisines. — Torigni. Lettre de Dechevrière à l'Assemblée nationale, 4 décembre 1789 refus général du paiement des droits seigneuriaux. — Valognes. Lettre de Hubert, procureur de la maîtrise des eaux et forets, 21 novembre 1789 sur les droits de treizième. \ ARCHIVES NATIONALES Dxiv 8 Tinchebrai. Lettre de Mme Duchatel, veuve de Fierval, au président de l'Assemblée nationale, 28 août 1791 sur refus de paiement des rentes par ses vassaux. Dxxix Papiers du Comité des rapports. Cette sous-série com- prend 101 cartons, classés par ordre de départements 1 à 16 ; par ordre alphabétique des lieux 16 à 84, et des personnes 86 à 92. On y trouve d'assez nombreuses pièces relatives aux débuts de la Révolution dans la généralité de Caen Dxxix 8. Copie du registre destiné pour recevoir les plaintes et griefs des citoyens de Granville contre M. de Pré- fort, commandant du roi à Granville, ouvert le 19 juillet 1790. Mémoire à consulter pour le sieur de Préfort, comman- dant à Granville. — Lettre de la municipalité de Granville à l'Assemblée nationale, 4 octobre 1790 plaintes contre les mé- faits de Préfort. Dxxix 18. Lettre de la municipalité et du Comité réunis d' Avran- ches à l'Assemblée nationale, 26 décembre 1789 sur l'abaissement nécessaire du prix du sel blanc dans l'Avranchin. Extrait du registre des délibérations d'Avranches, 22 décembre 1789 relatif au même objet. Dxxix 29. Lettre du marquis d'Oilliamson au président de l'Assemblée nationale, 4 août 1789 sur l'incendie de son chartrier. — Lettre d'un bourgeois de Caen au président de l'As- semblée nationale, 7 octobre 1789 sur l'insubordi- nation des volontaires nationaux. Plaintes de tous les honnêtes citoyens de la ville de Caen » à l'Assemblée nationale, 18 décembre 1789 protestation contre le service de garde que le Comité veut leur imposer. . — Lettre de Boyer, directeur des aides et octrois de Caen à l'Assemblée nationale, 31 juillet 1789 sur l'é- meute du 20 juillet. Lettre du Directoire du Calvados à de Lessart, 24 juil- let 1789 avec pièces relatives à l'indemnisation de Bellissent, pour le pillage de ses grains dans l'émeute de Caen, des 23-24 avril 1789. ARCHIVES NATIONALES XLIII Dxxix 29. Lettre de Signard d'Ouffières et Bougon-Longrais, députés extraordinaires de Caen, à l'Assemblée nationale, 3 décembre 1789 protestation contre un article du Journal général de France », du 19 no- vembre, injurieux pour Caen. Lettre du comte de Vassy au président de l'Assemblée nationale, 27 juillet 1789 sur l'abandon forcé de ses droits féodaux. Lettre de la femme Sosson à l'Assemblée nationale, 21 octobre 1789 relative au meurtre de Belzunce. — Lettre de Guilbourt, ancien juge consul de Caen, à l'Assemblée nationale, 23 novembre 1789 contre la composition démocratique des assemblées pa- roissiales. — Etat, en deux tableaux, des signataires de l'assemblée de la paroisse Notre-Dame, du 18 novembre 1789, et des non signataires envoi de Guilbourt relatif au même objet. — Lettre du lieutenant général du bailliage de Caen, Duperré de Lisle, au président de l'Assemblée nationale, 16 octobre 1789 contre l'anarchie mu- nicipale. — Lettre du même, même date, sur l'impuissance du Comité national de Caen. — Lettre des principaux citoyens de Caen à l'Assemblée nationale, 27 octobre 1789 sur la situation trou- blée de cette ville. •— - Mémoire justificatif, par du Belloys, avocat, détenu au château de Caen, ms. autographe, 28 p. sur le meurtre de Belzunce, avec lettre d'envoi de du Belloys au président de l'Assemblée nationale, 1er novembre 1789. — Précis de ce qui s'est passé à Caen au Comité, les 11 et 12 août 1789, 8 p. ms., avec lettre d'envoi par le Comité deCaenàl'Assembléenationale, 19 août 1789, - — Avis important d'un citoyen de Caen à ses conci- toyens pour la réformation de leur Comité et la perfection de leur milice nationale, par Brion des Parcs fils, avec lettre d'envoi à l'Assemblée natio- nale, 7 novembre 1789. Pxxix 30. Extraits des délibérations du Conseil municipal de Carentan, des 25, 27 et 30 mai et du corps des NATIONALES volontaires nationaux, du 27 mai, avec lettre d'envoi de la municipalité, du 3 juin 1790 sur l'émeute de Carentan, du 17 mai 1790. Dxxix 32. Lettre de Garantot, ancien maire et subdélégué de Cherbourg, à l'Assemblée nationale, avec l'état des pièces qui ont pu être retrouvées chez M. de Garantot après le sac de sa maison et jointes à son adresse, 6 février 1790. Lettres nombreuses de l'intendant de Launay et de Garantot, relatives à l'approvisionnement de Cherbourg, de mars à juillet 1789. Précis de ce qui s'est passé à Cherbourg depuis le 21 juillet jusqu'au 2 août 1789, avec le procès et le jugement des brigands séditieux qui ont porté la désolation et la terreur dans cette ville. Cherbourg, imprimerie Clamorgan, 1789, 28 p. Jugement prévôtal du 31 juillet 1789 placard imprimé Compte de vente et produit net des divers envois de grains faits à Garantot par l'Assemblée nationale. Lettre des officiers municipaux de Cherbourg à l'As- semblée nationale, 25 décembre 1789 sur la contre- bande. Extrait du registre des délibérations de l'hôtel de ville de Cherbourg, du 21 juillet au 6 août 1789, avec lettre d'envoi des officiers municipaux à l'Assemblée nationale, 6 août 1789 sur les troubles de Cherbourg. Copie de l'adresse de la Société des amis de la Consti- tution de Cherbourg au corps municipal de cette ville, 19 juillet 1790 et procès- verbal de la presta- tion du serment fédéral du 14 juillet 1790 à Cher- bourg, avec lettre d'envoi des officiers municipaux à l'Assemblée nationale, 25 juillet 1790 sur les illuminations du 14 juillet. Dxxix 33. Lettre de Gourjon, pasteur de Monchamps, à l'abbé Goutte, vice-président de l'Assemblée nationale, 28 mai 1790 contre le fanatisme des prêtres catho- liques de sa région. Dxxix 34. Lettre des officiers de la milice nationale de Cou- tances à l'Assemblée nationale, 26 juin 1790, et réponses du Comité des rapports, 2 juillet et 2 août 1790 sur la destitution d'un garde national, notable de Coutances. ARCHIVES NATIONALES XLV Dxxix36. Adresse de Sauvé, maire de Ducey, à l'Assemblée nationale, 31 janvier 1790, accompagné d'un procès-verbal de délibération des citoyens actifs de Ducey contre une accusation de malversation dont il est l'objet. Dxxix39. Lettre de Gauché-Dumeslais, procureur du roi de la maîtrise des eaux et forêts de Caen, à l'Assemblée nationale, 11 décembre 1789 sur les dévastations des bois nationaux. Procès-verbal d'un sergent de la maîtrise des eaux et forêts, 3 décembre 1789 même objet. Procès-verbal du même, 4 décembre 1789 même objet. Dxxix40. Réclamation à l'Assemblée nationale par les arma- teurs, capitaines, officiers de navires, négociants, fabricants et marchands de Granville contre l'arrêté du 2 décembre 1789, pris contre eux par le soi- disant Comité national. Lettre de Couraye-Duparc, maire et ancien subdélégué de Granville, à l'Assemblée nationale, 7 septem- bre 1789 sur la formation du Comité de Granville. — Lettre des officiers municipaux de Granville à l'Assem- blée nationale, 19 juillet 1790 sur le mécontente- ment causé par le retour de Préfort, commandant du roi. — Lettre de Poulain de Boutancourt aux officiers muni- cipaux de Granville, 8 mai 1790 conflit entre Gran- ville et Saint-Nicolas. Dxxix 58. Lettre des officiers municipaux du Mont-Saint-Michel à l'Assemblée nationale, 30 juin 1790 sur la ré- pression de la contrebande. Dxxix 71. Adresse du Comité national de Saint-Lô à l'Assemblée nationale, 18 novembre 1789 sur un délit relatif aux subsistances. Pétition de Leduc, citoyen de Saint-Lô à l'Assemblée nationale, 6 janvier 1790 relative au service de la garde nationale. Dxxix78. Lettre de La Filanchère, contrôleur des vingtièmes de l'élection de Mortain, aux députés des Etats généraux, 1er août 1790 sur son exclusion de Tinchebrai. — Lettre du même au président de l'Assemblée nationale, 15 septembre 1789 même objet. \LM ARCHIVES NATIONALES Dxxix78. Lettre de la municipalité de Tinchebrai à l'Assemblée nationale, 23 décembre 1789 long exposé de griefs contre La Filanchère, contrôleur des vingtièmes. D XXIX 81. Adresse des officiers municipaux de Valognes à l'Assem- blée nationale, 22 j uillet 1789 adhésion à ses travaux. — Lettre de Pernet-Desbordes, contrôleur général des aides de Cherbourg à l'Assemblée nationale, 16 mars 1790 sur le manque d'autorité des employés. Lettre des officiers municipaux de Cherbourg à l'As- semblée nationale, 20 mars 1790 plaintes contre la délivrance de contrebandiers par les gardes nationaux de Valognes. — Procès-verbal du 7 décembre 1789 relatif à la saisie de 7 sacs de sel blanc et à la délivrance de neuf faux-sauniers par les habitants de Valognes. — Procès-verbal du 7 mars 1790 relatif à la délivrance de deux contrebandiers de tabac par la garde nationale de Valognes. — Lettre des officiers municipaux de Valognes à l'Assem- blée nationale, 16 avril 1790 protestation contre les accusations calomniatrices de Cherbourg. — Lettre des officiers municipaux de Valognes à l'Assem- blée nationale, s. d., envoi d'une délibération de l'hôtel de ville, du 9 mars 1790, sur l'insubordi- nation de la garde nationale et demande d'une réglementation générale. Dxxix 83. Adresse des municipalités de Saultchevreuil, Ville- dieu et Saint-Pierre-du-Tronchet à l'Assemblée nationale, 26 mai 1790 adhésion à ses décrets ; récit d'une saisie de tabac. Dxxix 84. Lettre de Duboscq, Brouard, Cailly et Mauduit, com- missaires de la garde nationale de Vire à l'Assem- blée nationale, 15 août 1790 récit d'un attentat dirigé contre le comte de Pontécoulant à l'assem- blée électorale de Vire, 7 juillet. Dxxix 91. Lettre de Rouhière de Fontenelle, de Cherbourg, à l'Assemblée nationale, 11 novembre 1789 au sujet de sa destitution comme aide-major de la milice nationale. Lettre de Viel, fabricant de bas au métier à Caen, à l'Assemblée nationale, 18 novembre 1789 plaintes contre la libre circulation des grains. ARCHIVES NATIONALES xLVif Dxxixbis Papiers du Comité des recherches, comprend les lettres, mémoires, procès-verbaux et délibérations des munici- palités, les dénonciations concernant les troubles dans les dépar- tements. J'y ai relevé les documents ci-après Dxxix1^ 2*4 Dxxix'^333, Dxxixbis 315 Dxxixhis 4',s, Dxxixbis 4i/., du département d'Alençon Orne, déposé le 24 mars 1790. SERIE W Tribunal révolutionnaire W 294-°. Dossier de la Roque, seigneur de Cahan, ancien subdé- légué de Mortain. W 296-47. Dossier de Gabriel de Cussy, ancien député du bail- liage de Caen aux Etats généraux, puis conven- tionnel. W 3406-1. Dossier de Lacour, comte de Balleroy, ancien procu- reur-syndic provincial de Caen. ARCHIVES DU MINISTERE DES AFFAIRES ETRANGERES SÉRIE AD Bibliothèque administrative J'y ai particulièrement utilisé les sous-séries suivantes ADi 60. Régime administratif et politique. ADxvi, 27, 49 et 56. Histoire des départements. Les pièces ou brochures consultées sont mentionnées dans la partie de cette notice consacrée à la bibliographie des imprimés. IL — ARCHIVES DU MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES L'administration de la province de Normandie relevant du secrétariat des affaires étrangères à la fin de l'Ancien régime jusqu'en 1788, les archives du ministère actuel des affaires étrangères contiennent quelques documents relatifs au début de la période qui fait l'objet de cette étude. Ils sont renfermés dans le fonds France, Affaires intérieures, et dans celui de Frange, Commerce lK J'y ai consulté France. Affaires intérieures, 1401. Registre, pièce 29. Liste des notables composant l'assemblée des notables de 1787, parta- gée en 7 bureaux. Versailles. Imprimerie D. Pierres, 1787. Le comte de Vendceuvre, maire de Caen, y figure comme 16e mem- bre sur 19 du 7e bureau, présidé par le duc de Penthièvre. Ici., 1403. Registre, pièce 53. Rapport du 7e bureau sur le Mémoire de Galonné relatif aux Assemblées provinciales. France. Commerce, 2006. Mémoires et documents, 1745- 1820, 46 pièces en un volume in-folio de 412 feuillets, pièce 35. Observations de la Chambre de commerce de Normandie sur le traité de commerce entre la France et l'Angleterre, fol0 292-323. IbicL, 2006, pièce 44. Mémoire d'Anquetil résumant 4 bro- chures de polémique relatives à ce traité de commerce, parues en 1788. 1 Inventaire sommaire des Archives du Département des Affaires Etrangères. Mémoi- res et Documents. France. Paris, Imprimerie Nationale, 1883. Inventaire supplémen- taire. — Dans cette collection, le fonds France. Affaires intérieures, occupe les articles 744 à 1415, et le fonds France, Commerce, les articles 1984 à 2020. — Le fonds intitulé Petits fonds provinces, articles 1416 à 1768, ne contient pour la généralité de Caen, aux articles 1662-1653 et 1762, que dos document-; antérieurs nu 26 août 1786. dont je n'ai pas eu à tirer parti, LVI ARCHIVES DEPARTEMENTALES France. Commerce, 2013. Mémoires et documents, 1786-1829, 49 pièces en un volume in-folio de 374 feuillets, pièce 19. Plaintes des officiers municipaux de Granville, adressée au Roi et à NN. SS. de son Conseil, contre le traité de commerce de 1786. IbicL, pièce 25. Lettre d'envoi des observations de la Chambre de commerce de Normandie au baron de Breteuil, par les syndics de cette Chambre, 15 octobre 1787 original. Ibid., pièce 26. Extrait des observations de la Chambre de com- merce, pour être placé sous les yeux du roi. Ibid., pièce 27. Lettre de remercîments de l'intendant de Rouen, de Maussion, à Breteuil, au nom de la Chambre de commerce de Normandie, 19 novembre 1787. TH. — ARCHIVES DÉPARTEMENTALES 1° Archives départementales du Calvados J'y ai utilisé de fort nombreux documents de la série C et accessoirement des séries B, E, F et L. La série C compte près de 13,000 articles-1. Elle se compose des fonds de l'ancienne intendance de Caen et de ses subdélé- gations, C 1-6957, C 9446-9565, et de la Commission intermé- diaire provinciale de Basse-Normandie, C 7610-8578. L'état de la généralité de Caen à la fin de l'ancien régime est exposé d'après C 267. Tableau nominatif des villes et communautés de la géné- ralité de Caen en 1787. C 269-292 ; 1056, 1070. Mémoires statistiques des intendants et des subdélégués au cours du XVIIIe siècle. C 6379. Tableau du sol, des productions, du commerce et des impositions de la généralité de Caen par l'intendant Fontette, 1770. 1 La série c du Calvados comprend exactement l,243arliclcs d'inventaire imprime'1 en 4 volumes et 5 feuilles ; 8,122 articles d'inventaire rédigé, pouvant donner la matière de 7 volumes à l'impression ; en outre, 1,525 registres et liasses fonds de l'enregistrement et des domaines, représentant environ 30 u/0 de la série à clas- ser. Rapport de M. Besnier, archiviste dé arlemental du Calvados, 1008, p. 274. — C'est à la complaisance inépuisable et aux savantes directions de M. Armand Bénet, ancien archiviste du Calvados, que je dois la connaissance de celle importante série C. A l'hommage de reconnaissance pie je lui rends ici, j'associe son aimable cl obligea ni successeur, M. Besnier. ARCHIVES DEPARTEMENTALES LVII C 151-190. Tableaux du mouvement de la population, 1773-1787. C 233. Tableau de l'administration de l'intendant Cordier de Launay, 1787-1790. C 6331. Tableau des départements de l'intendance de Caen, 1769. C 201-228. Documents relatifs à l'hôtel de l'Intendance 1682- 1790. C 229-234 ; 6331-6332. Documents relatifs au personnel des bu- reaux de l'intendance. C 6880-6957; 9446-9565. Fonds des subdélégations Caen et Bayeux. Sur l'organisation de l'assemblée provinciale et l'ébauche des assemblées d'élection chap. II, j'ai consulté C 110. Edit concernant la formation et convocation des Assem- blées provinciales dans la généralité de Caen im- primé, 1787. C 6341-6343. Règlements, instructions et correspondance rela- tifs à cet objet. La première session de l'Assemblée provinciale et celles des assemblées d'élection de 1787 chap. III et IV, sont retracées d'après les documents suivants C 7610-7618. Procès-verbaux des séances, rapports et mémoires de l'Assemblée provinciale, 1787. C 7643-7644. Procès-verbal de l'assemblée d'élection d'Avran- ches copies collationnées par le secrétaire Boudent. C 7654. Id. de l'assemblée d'élection de Bayeux registre original. C 7663. Id. de l'assemblée d'élection de Caen copies collationnées par le secré- taire Hainguerlot. C 7689. Id. de l'assemblée d'élection de Caren- tan copies collationnées par le secrétaire Duval. C 7698. Id. de l'assemblée d'élection de Coutan- ces copies collationnées par le secrétaire Caillard. C 7705. Id. de l'assemblée d'élection de Mortain copies collationnées par le secré- taire Monnier. LYII1 ARCHIVES DEPARTEMENTALES C7711. Procès-verbal de l'assemblée d'élection de Saint-Lô copies collationnées par le secrétaire Vieillard. C7719. Id. de l'assemblée d'élection de Valognes co- pies collationnées par le greffier Duval. C 7725. Id. de l'assemblée d'élection de Vire registre original. L'étude du régime municipal en 1787 et de la formation des municipalités rurales de 1787 chap. V, s'est éclairée des docu- ments suivants C 1049 . Edit concernant l'administration dans les villes et princi- paux bourgs delà province de Normandie, juillet 1766. C 1050, 1051. Correspondance générale de 1692 à 1785. C 1058; 1061-1064; 7649. Correspondance relative à l'adminis- tration municipale d'Avranches. C 1089-1095, 6478. Id. de Caen. C 1155-1157. Id. de Carentan. C 1168-1173. Id. de Coutances. C 1183-1186. Id. de Granville. C 1221, 6504, 7707. Id. de Mortain. C 1229, 1230. Id. de Saint-Lô. C 1241, 1242, 7724. Id. de Cherbourg. C 1253-1257, 6507. Id. de Valognes. C 1277. Id. de Vire. C 6344. Incidents relatifs à la formation des municipalités rurales, 1787-1789. C 7680-7685. Procès-verbaux des assemblées électorales des municipalités de l'élection de Caen, 1787. C 7648. Tableaux de formation des assemblées municipales de l'élection d'Avranches. G 7662. Id. de l'élection de Bayeux. C 7697. Id. de l'élection de Carentan. C 7704. Id. de l'élection de Coutances. C 7710. Etat des assemblées municipales de Mortain et mé- moire sur les assemblées municipales. C 7717. Tableau de formation des assemblées municipales de l'élection de Saint-Lô. C 7731 . Id. de l'élection de Vire. L'activité de la Commission intermédiaire provinciale, des bureaux intermédiaires de département et des procureurs-syndics chap. VI, a été étudiée d'après ARCHIVES DEPARTEMENTALES LIX C 7619-7621. Compte-rendu de la Commission intermédiaire provinciale de Basse-Normandie, 1790 3 exem- plaires imprimés. C 7622, 7623. Deux registres de correspondance de la Commis- sion intermédiaire provinciale 1° 10 février- 7 mai 1788 ; 2° 21 juin-7 octobre 1788. C 7624, 7625. Deux registres de correspondance des procureurs- syndics provinciaux 1° 29 août 1787-4 juillet 1788 ; 2o 20 décembre 1789-3 avril 1790. C 7626-7628. Lettres adressées à la Commission intermédiaire provinciale, 1787-1790. C 7729, 7730. Edits, déclarations et lettres patentes, 27 octobre 1789-25 juillet 1790. C 7778-8312. Documents relatifs aux impositions Impositions en général, 7778-7790 ; tailles, 7790-7816 ; états d'imposition de 1788 pour les élections de Caen et de Vire, 7816-9089 ; capitation, 8090-8155 ; contribution patriotique, 8156-8157 ; vingtièmes, 8158-8178 ; impôt territorial, 8179-8255 ; corvée, 8256-8312. C 8320-8517. Documents relatifs aux ponts et chaussées. C 3087-3088. Correspondance de Lefebvre, ingénieur en chef. C 7655. Registre des délibérations et arrêtés du bureau intermédiaire de Bayeux, 6 octobre 1787-7 août 1790. C 7726. Registre des délibérations du bureau intermé- diaire de Vire, 18 février 1788-30 juin 1790 avec lacune du 24 octobre 1788 au 21 novembre 1789. C 7657-7658. Deux registres de correspondance du bureau inter- médiaire de Bayeux, mars 1788-7 août 1790 *. C 7647-7649. Dossiers de correspondance du bureau intermé- diaire d'Avranches. C 7661. Id. du bureau intermédiaire de Bayeux. C 7666-7678. Id. du bureau intermédiaire de Caen. C 7693-7696. Id. du bureau intermédiaire de Carentan. C 7701-7703. Id. du bureau intermédiaire de Coutances. 1 Les archives départementales du Calvados viennent de rentrer en possession du registre des délibérations du bureau intermédiaire du département de Caen, 24 janvier 1788-6 août 1790, qu'un libraire de Tours a revendu à M. Besnier, archi- viste départemental. Cette précieuse restitution élève de 5 à 6 le nombre des dépar- tements de la généralité de Caen pour lesquels nous possédons la trace les délibé- rations des bureaux intermédiaires. Arch. dép., Calvados, C 7664 • LX ARCHIVES DÉPARTEMENTALES C 7707-7709. Dossiers de correspondance du bureau intermè- de Mortain. C 7712-7716. Id. du bureau intermédiaire de Saint-Lô. C 7722-7724. Id. du bureau intermédiaire de Valognes. C 7727-7730. Id. du bureau intermédiaire de Vire. Sur les assemblées de département de 1788 et la campagne en faveur des Etats provinciaux de Normandie, j'ai consulté C 7645. Procès-verbal des séances de l'assemblée d'Avranches 3 cahiers, copies collationnées par le secrétaire Boudent. C 7654. Id. de l'assemblée de Bayeux registre original. C 7664. Id. de l'assemblée de Caen 3 cahiers, copies collation- nées par le secrétaire Hainguerlot. G 7690. Id. de l'assemblée de Carentan registre, copies colla- tionnées par le secrétaire Duval. C 7700. Id. de l'assemblée de Coutances cahier, copie colla- tionnée par le secrétaire Caillard. C 7707 . Id. de l'assemblée de Mortain copie collationnée par le secrétaire Monnier. C 7112-7714. Id. de l'assemblée de Saint-Lô 3 cahiers, copies collationnées par le secrétaire Vieillard. G 7720, 7721. Id. de l'assemblée de Valognes 2 cahiers, copies collationnées par le secrétaire Duval. C 7725 . Id. de l'assemblée de Vire registre original. C 7631 . Etats de Normandie. Mémoires et notices, 1788-1790. C 7632-7634. Déclarations des paroisses de l'élection de Caen en faveur du rétablissement des Etats de Normandie septembre-novembre 1788. Les archives départementales du Calvados renferment d'assez nombreux documents sur le mouvement électoral, les élections et les cahiers des bailliages de Caen et de Coutances en 1789 chap. IX, X et XI. Ce sont, dans la série C C 6345. Arrêts, instructions, correspondance générale relatifs à la Convocation, 1788-1789. C 6346. Documents relatifs aux dépenses des assemblées de bailliages. C 6348-6359. Documents relatifs à la Convocation surtout rap- ports de subdélégués à l'intendant pour Avran- ches 6318 ; Bayeux 6349 ; Caen 6350 ; Caren- ARCHIVES DEPARTEMENTALES EXI tan 6351 ; Cherbourg 6352 ; Coutances 6353 Granville 6354 ; Mortain 6355 ; Saint-Lô 6356 Saint-Sauveur-le-Vicomte 6357 ; Valognes 6358 Vire 6359. La série B, non inventoriée, renferme le procès-verbal et le cahier du clergé du bailliage de Caen ; le cahier des pouvoirs et instructions de la noblesse ; le cahier d'observations et doléances de l'assemblée préliminaire du Tiers état de ce bailliage copies informes ; le cahier de l'assemblée préliminaire des bailliages de Bayeux copie collationnée, signée du lieutenant général, La Jumel- lière, de Torigni copie collationnée par le greffier Dufresne, de Vire original signé par tous les comparants avec le procès-verbal original de l'assemblée du 5 mars 1789 ; les réflexions de MM. Le Canu et Laurent ; les protestations de Letellier, avocat à Bayeux copies collationnées. Elle renferme aussi un certain nombre de cahiers paroissiaux ceux de 243 paroisses du bailliage de Fa- laise, 42 procès-verbaux et 36 cahiers de doléances du bailliage de Vire d. La série F fonds de Beaumont, contient, dans les papiers d'Eudes de la Jumellière, une série de documents relatifs à la convocation dans le bailliage de Bayeux, et notamment le cahier de doléances de Villiers-le-Sec F 782. La série E famille de Vassy, non inventoriée, renferme une lettre intéressante du comte de Vassy, sur les élections aux Etats généraux sans date $. Sur les troubles amenés par la disette des grains d'avril à juillet 1789 chap. XII, j'ai consulté C 2638-2641 ; 2663, 2665, 2670, 2674, 2675, 2679, 2684, 2685, 2688. Correspondance de l'intendant Cordier de Launay, relative à l'approvisionnement des diverses villes de la généralité. 1 J'ai consacré un article à ces procès-verbaux et cahiers, au lendemain de leur découverte dans les greniers de la mairie de Vire, par M. A. Bénet. Voir La Révôlu- lution française, tome XXXI, 1896, p. 300-346 et 414-426. 2 Ces archives contiennent aussi, dans un fonds tout récemment acquis, relatif à la famille de Savignac, une série de pièces très intéressantes sur les dernières années du régime féodal dans le Bessin. et notamment des lettres de Leprestre, régisseur du domaine de Meuvaines, au comte de Savignac, alors en résidence à Moissac, sur lea débuts de la Révolution dans la Basse-Normandie, 1786-1790. LXII ARCHIVES DÉPARTEMENTALES C 6370. Rapport de Cordier de Launay sur l'émeute de Cher- bourg, 28 mars 1790. F non inventorié. Registre de copies de lettres du directeur de la mine de Littry lettres relatives à la grande peur, juillet 1789. Sur les milices urbaines antérieures aux milices nationales C 2105-2116. Sur la formation des municipalités de 1790 chap. XIV C 1049. Lettres patentes et instructions de l'Assemblée nationale relatives à la loi municipale du 14 décembre 1789. C 7686-7688. Procès-verbaux des assemblées électorales de 1790 élection de Caen. L non inventorié. Tableau de la formation des municipalités du district de Bayeux et correspondance y relative. Sur la division de la généralité de Caen en départements, je n'ai trouvé aux Archives départementales du Calvados qu'un seul document, mais très important C 9. Carte originale de la division du département de Caen, signée par les députés de ce département, le 25 février 1790D. L'organisation administrative du département du Calvados et la liquidation des affaires relatives à la généralité de Caen font l'objet de nombreux documents de la série L, en très grande partie non inventoriée. En voici l'indication sommaire Registre des procès-verbaux de la Commission du roi pour le département du Calvados, 29 mars-13 juillet 1790. Registre des ordonnances de cette Commission, 10 avril-11 juil- let 1790. Lettres-circulaires et expéditions de cette Commission, 29 mars- 13 juillet 1790. Procès-verbaux des assemblées primaires électorales du Calvados et correspondance y relative. 1 C'est le double de la carie déposée au Comité de constitution et conservée aux Arch. nat., NN 78. Voir ci-dessus, p. u\. ARCHIVES DEPARTEMENTALES LXIII Procès-verbal de l'assemblée électorale du département du Cal- vados, 11-14 juin 1790. Procès-verbaux des assemblées électorales des trois districts de Caen, Bayeux et Vire. Procès-verbal des arrêtés de Messieurs les Commissaires des départements de la Manche, du Calvados et de l'Orne, 3 octobre 1790-6 juin 1791. Lettres d'Esmangart, ancien intendant de la généralité de Caen, à Bayeux, procureur général syndic du département du Calvados, 27 décembre 1790 et 24 février 1791. Lettre adressée au même par Feydeau de Brou, ancien intendant de la généralité de Caen, 12 janvier 1791. Tableau de partage entre les départements du Calvados, de la Manche et de l'Orne des diverses espèces de fonds confiés à l'administration de l'Assemblée provinciale de Basse-Nor- mandie ou de sa Commission intermédiaire, conformément au procès-verbal signé le 0 mars 1791. Procès-verbal définitif de liquidation adressé par les commissaires à Roland, ministre de l'intérieur, 10 janvier 1793. La série C renferme également deux liasses de documents rela- tifs au même objet, l'un dans le fonds de l'intendance, et l'autre dans celui de la Commission intermédiaire provinciale C 6334. Instructions relatives à la remise des papiers adminis- tratifs par l'intendant de Caen aux Directoires de la Manche, du Calvados et de l'Orne, 8 juin-5 no- vembre 1790. C 7727. Instructions relatives à la remise des papiers adminis- tratifs par la Commission intermédiaire provinciale de Basse-Normandie aux Directoires de la Manche, du Calvados et de l'Orne. 2° Archives départementales de la Manche *. J'ai eu recours à trois séries de ce dépôt les séries B, C et L. La série B inventaire manuscrit détaillé, contient des docu- ments relatifs à la convocation des Etats généraux de 1789 dans les bailliages de Carentan, Valognes et Torigni. 1 Passage en blanc dans le texte. 2 Je remercie vivement M. Dolbet, archiviste départemental de la Manche, de L'obligeant empressement qu'il a mis à me faciliter la consultation de ce dépôt. LXIV ARCHIVES DEPARTEMENTALES Pour le bailliage de Carentan, un seul procès-verbal d'assem- blée primaire, celui de Carentan, et le cahier de cette ville sur 48 cahiers rédigés dans le ressort; en outre, le cahier de l'assem- blée préliminaire du Tiers état du bailliage 0. Pour celui de Valognes, collection à peu près complète des procès-verbaux 120 et des cahiers 124 sur 129 rédigés *. Pour celui de Torigni, 40 procès-verbaux d'assemblées électo- rales, et 36 cahiers de doléances, sur 59 rédigés . La série C inventaire imprimé, 1347 articles °, relative à l'intendance d'Alençon, contient de rares documents sur les impositions de 24 paroisses de la généralité de Caen rattachées en 1790 au département de l'Orne. 1 Cf. Arch. Nat., NN* 12. Voir ci-dessus, p. liv. 2 J'exprime à M. L. Duval, ancien archiviste de l'Orne, mes sincères remerci- raents pour son obligeant concours. 3 Inventaire sommaire des Archives départemen aies antérieures à 1796 Orne, séries C et D, par Gravelle-Desulis. Paris, 1877, in-4*. LXVI ARCHIVES DÉPARTEMENTALES G 1298 1299. Rôles de la répartition faite, d'après les mandements des bureaux intermédiaires de Vire et de Mortain, de l'imposition du supplément des ci-devant pri- vilégiés pour les six derniers mois de 1789 dans ces 24 paroisses. La série L offre plus de ressources, la formation du départe- ment ayant intéressé les trois cantons d'Athis, Fiers et Tinche- bray, dont le territoire ressortissait presque entièrement, sous l'ancien régime, à la généralité de Caen. L 376. Commission royale donnée à Marescot, doyen du prési- dial d'Alençon, pour la formation du département de l'Orne, avec lettre d'envoi aux municipalités, 7 avril 1790. L 377. Inventaire des pièces que MM. les Commissaires nommés par le roi pour la formation du département de l'Orne... ont remises au secrétariat dudit départe- ment et dont ils demeurent déchargés P. L 383. Tableau de la formation et de la population active du département de l'Orne. Alençon, imprimerie veuve Malassis, 1790. L 388. Procès-verbaux des assemblées primaires des cantons d'Athis, Fiers et Tinchebray. L 391 . Procès-verbal de l'assemblée électorale du département de l'Orne, 30 juin-7 juillet 1790. L 392. Procès-verbal de la première session du Conseil du dépar- tement de l'Orne, 23 juillet 1790. L 396. Procès-verbal de l'assemblée électorale du district de Domfront, 16-19 juillet 1790. — Procès-verbal de la première séance du Conseil du district de Domfront. L 1022. Extrait du registre des actes et arrêtés des commissaires des départements du Calvados, de l'Orne et de 1 Parmi les pièces que mentionne cet inventaire, se trouvaient 1° un exemphrire imprimé de la Commission donnée par le roi aux sieurs vicomte de Chambra y de la Bellière, Ducoudray et Marescot, pour la formation du département de l'Orne ; — 2° une expédition du procès-verbal des limites de démarcation de' la composition du département de l'Orne, arrêté et signé le 24 mars 1790 par les députés à l'Assem- blée nationale intéressés audit département, et attesté par les commissaires-adjoints du Comité de constitution être un de ceux y déposés ». Ce précieux document, dont le double existe aux Archives nationales. NX* 13, ne ligure plus aux Archives de l'Orne. ARCHIVES DEPARTEMENTALES LXYIl la Manche, entre lesquels les paroisses de la géné- ralité sont partagées, 3-5 octobre et 13 novembre 1790. L 1023. Liquidation des affaires communes de l'ancienne géné- ralité de Caen compte de la Commission intermé- diaire provinciale, 13 février 1791. Id. compte des ci-devant intendants de la généralité, 1er mars 1791 . — Id. procès-verbal des commissaires vérificateurs, 1er juin 1791. L 1024. Tableaux des partages de dépenses et de recettes faits entre les trois départements de la généralité de Caen. Q Séquestre. Dossier relatif aux biens possédés dans l'Orne par l'intendant Cordier de Launay et son père Cordier de Montreuil seigneuries d'Echauffour, Lignières et Mesnil-Vicomte. B non classé. Cette série n'offre qu'un seul document un appel des députés, fragment du procès-verbal de l'assemblée préliminaire du bailliage de Tin- chebrai. 4° Archives départementales de l'Eure !. La série E supplément non inventoriée de ce dépôt contient le fonds important du Chartrier du Champ de bataille marquisat de Neubourg, provenant des archives de la famille d'Harcourt. J'y ai trouvé des documents relatifs au rôle joué par le duc de Beuvron, commandant en second, puis en chef, de la province de Normandie, pendant les troubles de l'année 1789. En voici l'é- numération succincte Dossier relatif aux troubles de Saint-Lô, mai 1789. — Lettre du comte deBalleroy à l'intendant Cordier de Launay, 3 mai 1789 ; de Bernard, avocat du roi au bailliage de Saint-Lô, au duc de Beuvron, 10 mai 1789 ; de Robillard, lieutenant-général du même bailliage, au premier président du Parlement de Normandie, 13 mai 1789 ; du Comité d'approvisionnement de Saint-Lô, à l'intendant de Caen, 18 juin 1789. 1 J'adresse mes sincères remerciements à M. Besnier qui, étant archiviste dépar- temental de l'Eure à l'époque de mes recherches, ma, par son extrême ohligeance, facilité celles-ci. LXVIII ARCHIVES COMMUNALES Dossier relatif aux troubles d'Isigny et d'Osmanville, juillet 1789. — Lettres du duc deBeuvron à Paysant, lieutenant général du bailliage de Bayeux, et au chevalier de Gualy, chef du déta- chement d'Isigny. Lettre de Vaufleury de Saint-Cyr, lieutenant général du bail- liage de Mortain, au duc deBeuvron, 5 juillet 1789. Lettre de Lentaigne de Logivièré, receveur général des finances, à Guyard, premier secrétaire de l'intendance de Caen, 1er juil- let 1789. Pièces relatives au désarmement de braconniers à Robehomme, 19 mai 1789 ; Mesnil-Patry, 21 juin 1789 ; Saint-Fromond, 1er juil- let 1789. Lettres de Necker au duc de Beuvron et à l'intendant Cordier de Launay, 23 juin 1789 sur la désobéissance du lieutenant géné- ral du bailliage de Bayeux aux édits concernant les grains. Etat général des armes et munitions de guerre qui ont été délivrées depuis le 1er juillet jusqu'au 1er octobre 1789 par Du- fresne, garde d'artillerie de Saint-Lô, 1er octobre 1789. Relation de ce qui s'est passé à Cherbourg les 21 et 22 juil- let 1789 » récit, malheureusement fragmentaire, d'un témoin oculaire. IV. ARCHIVES COMMUNALES 1° Archives communales de Caen. Les archives communales de Caen, qui sont situées dans les combles de l'hôtel de ville, sont assez riches en documents sur les débuts de la Révolution. Elles n'avaient jusqu'ici été l'objet que d'un classement tout à fait rudimentaire ; mais l'inventaire vient d'en être terminé pour la partie antérieure à 1790. Les précieuses indications que M. Sauvage, archiviste, chargé de ce travail, m'a fournies, me permettent de donner une cote ferme à un certain nombre des documents utilisés. La série AA contient les documents suivants AA 42. Adresse de la ville de Caen au roi, relative aux Etats provinciaux, 1788. A A 43. Mémoire au roi, par les 6 corps de la ville de Caen, 1788 imprimé. ARCHIVES COMMUNALES LXIX AA 44. Lettres et règlement relatifs à la convocation des Etats généraux, 1789 6 pièces. AA 47. Procès-verbaux des délibérations des assemblées de corps et corporations de Caen, 1789. AA 48. Réflexions relatives aux cahiers de doléances, arrêtées par MM. les Maires et Echevins de Caen, et lues à l'assemblée du 28 février 1789 imprimé. AA 49. Cahiers de doléances des corps et corporations, 1789. AA 50. Cahier d'observations et doléances du Tiers état de la ville de Caen original, 4 mars 1789 *. AA 51. Doléances du curé et des prêtres de la paroisse Saint- Sauveur-de-Caen, 1789 2 pièces. AA 52. Doléances et sentiments du curé d'Amayé-sur-Orne. AA 53. Cahier de doléances de la paroisse de Moult original, 1er mars 1789. AA 54. Projet de cahier en 22 articles ms, sans date et sans nom d'auteur. AA 55. Discours de Revel de Bretteville, procureur du roi et de Duperré-Delisle, lieutenant général du bailliage, 22 octobre 1788 imprimé. Lettre de Cagny, maire de Caen, à Saffrey, prieur juge consul, 20 février 1789. Discours de l'évêque de Bayeux à l'ouverture de l'assem- blée du clergé, 17 mars 1789 copie ms. — Lettre à la noblesse de Caen par l'un de ses membres, Néel de Tontuit, 23 mars 1789 copie ms. — Lettre de Necker aux officiers municipaux de Caen, 19 août 1789. — Lettres du duc d'Harcourt sur le même objet, 24 août, 3 septembre 1789. — Lettres de l'intendant Cordier de Launay aux officiers municipaux de Caen sur le même objet, 2 août, 30 septembre, 20 décembre 1789. — Arrêtés du Bureau des subsistances de Caen, 28 septem- bre, 10 novembre 1789. il Je donnerai, sur le contenu des articles AA 47, 49 et 50, des renseignement; plus détaillés dans la Notice bibliographique de ma thèse complémentaire, intitulée Le Cahier d'observations et doléances 1249. 40. Avis des bons Normands suite de /' dédié aux Assemblées de bailliages, sur la rédaction du cahier des pouvoirs et instructions [par le mêmej. Bibl. nat., Lb391250. 41. Circulaire adressée aux curés au nom du duc d'Orléans par M. de Limon, 7 mars 1789, s. 1., in-4°. Bibl. nat., Lb391378. 42. Considération du Tiers état de la province de Normandie sur la forme des futurs Etats généraux [par Chartier, avo- cat]. 1788, in-8°. Bibl. comm., Caen, Broch. norm., Généralités, carton 3. 43 . Instructions envoyées par S. A. Mgr le duc d' Orléans, s. 1. n. d. in-8°. Bibl. nat., Lb*4379. 44. Lettre d'un Bas-Normand au sujet de l'assemblée des Etats généraux, 12 mars 1789. Imp., 47 p. Bibl. nat., Lb»140û. 45. Lettre de M. Duperré de Lisle, lieutenant général au bailliage de Caen, à M.... député aux Etats généraux. Arch. nat., ADxvi 27. 46. Prenez-y garde, ou avis à toutes les Assemblées d'élection qui seront convoquées pour nommer les représentants des trois ordres aux Etats généraux, précédé d'une observation importante pour les Normands sans nom d'auteur. Rouen, 1788, in-8°. 47. Projet d'un cahier général destiné à l'instruction des députés aux Assemblées générales des bailliages et sièges provin- ciaux et des députés aux Etats généraux, fait par un gentilhomme de Normandie, ami de la Nation. Rouen, 1789, in-8. XCVIII IMPRIMÉS 48. Requête au roi, par un avocat de V ordre du Tiers, demeurant et exerçant son état dans l'enclave du grand bailliage de Cotenlin, 26 avril 1789. Imprimé chez un bon citoyen, in-12. Bibl. nat., Lb^lGl?. 49. Tiers état de Normandie éclairé Le, ou ses droits justifiés. 1789, in-8°. Bibl. nat., Lb>1106. 50. Tribut d'un gentilhomme Normand aux Notables de France assemblés le 4 novembre 1788 i par Achard de Bon- vouloir , publié par Hippeau, Le gouvernement de Normandie. Voir n° 52, t, VI., p. 167-171. VI Recueils des cahiers de doléances rédigés dans l'étendue du ressort des deux bailliages de Caen et de Coutances. 51 . Procès-verbal de rassemblée du Tiers état de la ville de Saint- Lô, s. 1., 1789, in-12. 52. Hippeau, Le gouvernement de Normandie aux XVIIe et X VIIIe siècles. Documents inédits tirés des archives du château d'Harcourt. Caen, 1863-1869, 9 vol. in-8°. Le t. VI, consacré aux élections de 1789 en Normandie ; les t. VII et VIII, aux cahiers de 1789 en Normandie. Cette publication a été l'objet d'une sévère, mais juste critique de M. Bridrey, Les cahiers du Cotentin, t. I. Introduction, p. 48-54. 53. Anquetil E., Etats généraux de 1789, cahier du Tiers état de Bayeux. Bayeux, 1883, in-8°. 54. Bridrey, Les cahiers de doléances du bailliage de Cotentin. Paris, Impr. Nationale, 2 vol. in-8° 1907-1909. Le 3e volume de cette excellente publication est sous presse. 55. Mourlot, Le Cahier d'Observations et Doléances de la ville de Caen. Paris, Cornély, 1911, in-8°. Société de l'his- toire de la Révolution fiançaise. VII Comités permanents et gardes nationales. 56. Adresse du Comité municipal de Bayeux à ses concitoyens, 25 novembre 1789. Bibl. comm., Caen, pièces sur Bayeux, I 26. IMPRIMES XCIX 57 . Adresse gratis aux citoyens de la ville de Caen. Caen, Le Roy, 1790. Bibl. comm., Caen. pièces sur Caen. 58. Arrêté pris par les notables de la ville de Caen, assemblés à Vhotel de M. le duc de Beuvron, concernant le soulage- ment des pauvres, 7 mars 1789. Caen, Le Roy, 1789. Arch. nat, ADxvi 27. 59. Arrêté du Comité général de Coutances, 7 septembre 1789. Coutances, Joubert, 1789. Arch. nat., ADxvi 49. 60. Arrêté de Vassembtée générale de la municipalité et milice nationale de la ville de Mortain, 10 septembre 1789. Avranches, Lecourt, 1789. Arch. nat., ADxvi49. 61. Compte-rendu à leurs commettants par les députés de la no- blesse du grand bailliage de Cotentin aux Etats généraux de France de 1789. Paris, de l'imprimerie Rain- ville, 1791, in-8o. Bibl. nat., Lb395455. 62. Décret du Comité général et national d' Avranches, 31 août 1789. Avranches, Lecourt. Arch. nat., ADxvi 49. 63. Décret du Comité général de Saint- Sauveur-le- Vicomte rela- tif au maintien des droits. Cherbourg, Clamorgan, 1789. Arch. nat., ADxvi 49. 64. Discours prononcé dans V église de V abbaye royale de Saint- Etienne de Caen, le 13 septembre 1789, lors de la béné- diction des étendards de MM. les Volontaires nationaux, par dom Mesnilgrand, prieur de la même abbaye. Bibl. comm., Caen. 65. Discours de Vévêque de Bayeux au sujet de la bénédiction des drapeaux de la garde nationale de cette ville, 22 novem- bre 1789. Bayeux, veuve Nicole, 1789. Bibl. comm., Caen, Bayeux, I, pièce 25. 66. Extrait du procès-verbal du comité général et national de la ville de Caen relatif à la mort de M. de Belzunce. Caen, Le Roy, 1789. Arch. nat., AD xvi 27, et Bibl. nat., Lb392278. 67. Lettre de l'honorable Jean Rablu, maître crocheteur et caporal major de la milice de Céna, à l'honorable Pierre Tubœuf, garçon boucher de Poissy, 1790. Bibl. comm., Caen, pièces sur la Révolution à Caen. 68. Police intérieure du Comité général national de Caen et des bureaux particuliers. 15 août 1789. Caen, Le Roy. Bibl. comm., Caen, Broch. norm., Caen sous la Révolu- tion, II, pièce 11. IMPItIMI S 69. Règlement pour la composition et l'organisation de la muni- cipalité de Cherbourg, ourle par les représentants de la commune à l'Hôtel de Ville, le 6 octobre 1789. Cherbourg, Clamorgan, 1789. Arch. nat., ADxvi 49. 70. Hemeicicmenl des comtes de Fondons et d'Osseville aux ci- toyens de Caen, 28 août 1789. Bibl. comm., Caen, Broch. norm., Caen sous la Révolution, II, pièce 12. 71 . Réponse du bureau militaire de la garde nationale de la ville de Bayeux à l'adresse du Comité municipal. Bibl. comm., Caen, Bayeux, pièces I, 27. 72. Révolutions de Caen, capitale de la Basse-Normandie, ou récit exact de ce qui s'est passe dans celle capitale et parti- culièrement de la prise de la forteresse, juillet 1789. Paris, 1789. Arch. nat., ADxvi 27. Cf. Bibl. nat., Lb392023. VIII Division de la Normandie en départements. 73. Aubry-Dubochet, Nouvelle division de la France en 110 dé- partements, chacun pouvant former une assemblée pro- vinciale, etc. Paris, Baudoin, 1789. Arch. nat., AD1 60. 74 . Bureaux de Pusy, Rapport sommaire sur la nouvelle division du royaume, 8 janvier 1790. Arch. nat., AD1 60. 75. Dupont de Nemours, Rapport sur le décret général relatif aux départements du royaume, fait au nom du Comité de constitution, 15 février 1790. Paris, Imp. Nat., 1790. Arch. nat, AD1 60. 76. Duquesnoy, Opinion sur la division du royaume, 5 octobre 1789. Paris, Baudoin, 1789. Arch. nat., AD*60. 77. mirabeau, Plan de division du royaume et règlement pour son organisation. Arch. nat., AD1 60, incomplet. 78. Môntier, Correspondance de Thomas Lindet pendant la Constituante et la Législative, 1789-1792. Paris, 1899, in-8°. Société de l'histoire de la Révolution française. 79. Observations sur le rapport du Comité de Constitution concer- nant la nouvelle organisation de la France, par un député à V Assemblée nationale, 2 octobre 1789. Versailles, Baudoin, 1789. Arch. nat., AD1 60. IMPRIMES CI 80. Rabaut de Saint-Etienne, Réflexions sur la division nouvelle du royaume et sur les privilèges et les assemblées des provinces d'Etals. Paris, Baudoin, 1789. Arch. nat., AD* 60. 81 . Rabaut de Saint-Etienne, Nouvelles réflexions sur la nouvelle division du royaume, adressées à ses commettants, Paris, Imp. Nat., 1790. Arch. nat., AD^O. 82. Target, Opinion sur la division du royaume, 10 novembre 1789. Paris, Baudoin, 1789. Arch. nat., AD»60. 83. Thouret, Discours à V Assemblée nationale sur la nouvelle division territoriale du royaume, les 3, 9 et 11 novem- bre 1789. Paris, imp. nat,, 1790. Arch. nat., ADl60. 84. Décrets de i Assemblée nationale concernant la division du royaume en 83 départements. Paris, Imp. Nat., 1790. Arch. nat., AD1 60. IX Adresses des villes à l'Assemblée nationale. 85. Lettre à mes commettants, par le chevalier de la Varignière, député extraordinaire de Torigni. s. d. Arch. nat., ADxvi 49. 86. Mémoire relatif à la division des deux départements de la Basse-Normandie, par trois députés extraordinaires de Carentan. Arch. nat., ADxvi 27. 87. Observations pour la ville de Cherbourg, par de Chanlereyne, avocat, député extraordinaire. Veuve Hérissant, 14 dé- cembre 1789. Arch. nat., ADxvi 49. 88 . Observations sur la division territoriale de la Normandie et sur le département de Caen en particulier, présentées par les députés extraordinaires de la commune de Caen et à NN. SS., de V Assemblée nationale et à MM. les Députés de la province de Normandie. Caen, Le Roy, 1789, in -8°. 89. Observations soumises à NN. SS. de V Assemblée nationale au nom de la commune de Caen par ses députés extraor- dinaires. Caen, 1790, imp. Le Roy. Arch. nat., ADxvi 27. 90. Observations pour la ville de Carentan. Carentan, veuve Delaguette, 1790. Arch. nat., ADxvi 49. 91 . Précis pour la ville de Carentan, par Y ver de la Bruchollerie. Imp. veuve Delaguette, 1790. Arch. nat., ADxvi 49. Cil IMPRIMES 92. Addition au Précis pour la ville de Carentan ou réponse aux observations pour la ville de Périers. Carentan, s. d., veuve Delaguette. Arch. nat., ADxvi 49. X Organisation administrative des départements. 93. Adresse de rassemblée électorale du Calvados à l'assemblée nationale, 19 juin 1790. Bibl. comm., Caen, Broch. norm., Caen sous la Révol., t. II, pièce 21. 94. Adresse du département du Calvados à V Assemblée nationale. Caen, imp. Le Roy, 1790. Arch. nat., ADxvi 27. 95. Discours de MM. les Commissaires du roi pour le départe- ment du Calvados à la municipalité de Caen, le 2 avril 1790. Caen, Le Roy, 1790. Arch. nat., ADxvi 27. 96. Extrait des procès-verbaux des assemblées primaires du dépar- tement de la Manche, contenant la liste de MM. les Elec- teurs du département. Coutances, Joubert, 1790. Arch. nat., ADxvi 49. 97. Lettre circulaire des commissaires du roi aux municipalités pour la formation du département du Calvados, 29 mars 1790. Arch. nat., ADxvi 27. 98. Procès-verbal de rassemblée électorale du département de la Manche. Coutances, imp. Joubert, 1790. Arch. nat., ADxvi 49. 99. Tableau du département du Calvados, contenant le nombre des citoyens éligibles et actifs de chaque paroisse. Caen, imp. Le Roy, 1790. Bibl. comm., Caen, Broch. norm., Caen sous la Révolution, I, pièce 20. XI Les Fêtes de la Fédération. 100. Faudoas de, Discours prononcé par Faudoas, comman- dant de la garde nationale de Caen, le 1er juillet 1790, jour de la Confédération du département du Calvados. Caen, Le Roy, 1790. Bibl. comm. de Caen, G* 15*. 101 . Précis sommaire de V ordre qui sera suivi lors de la fédération. Caen, Le Roy, 1790. Bibl. comm., Caen, Broch. norm., Caen sous la Révolution, II, pièce 23. IMPRIMES CIII 102. Procès-verbal de la confédération des gardes nationales et troupes de ligne du département du Calvados, du 1er juil- let 1790. Caen, Le Roy, 1790. Arch. nat., ADxvi 27. 103. Procès-verbal de la fédération des gardes nationales, troupes de ligne et maréchaussées du département de la Manche, du 5 août 1790. Coutances, imp. Joubert, 1790. Arch. nat., ADxvi 49. 104. Procès-verbal fait par la municipalité de Cherbourg à V occa- sion du serment prêté, le 14 juillet 1790, par les troupes de ligne et du serment fédératif prêté tant par la garde nationale que les troupes de garnison, de détachement et de tous les citoyens réunis. Cherbourg, imp. Clamorgan, 1790. Arch. nat., ADxvi 49. XIXe ET XXe SIÈCLES I Histoire générale et histoire des institutions. 105. Annuaire de Normandie Annuaire des 5 départements de l'ancienne Normandie, publié par l'Association nor- mande de 1833 à nos jours. Bibl. nat., Lc1922. 106 . Annuaire du Calvados de 1829 à nos jours. 107 . Annuaire du département de la Manche de 1829 à nos jours. 108. Ardascheff, Provintsialnaia Administralsia vo Franlsie ve posliedniouiou porou staravo poriadka. Tome I Provintsialnie intendants Petersbourg, Valacheff, 1900, in-8° en russe. Tome II Lioudi, Kiev, Tchokoloff, 1906, in-8°, traduit par Jousserandot, Paris. 199. Ardascheff, Les Intendants de province sous Louis XVI, tome III. Appendice, première partie, pièces justifi- catives. Youriev, 1904, in-8°. 110. Ardascheff, Razbore knigi A. Onou Bhibori 1789 goda vo Franlzii i nakazui tretriago solsloviia slotchki zriéniia ikhe sootvietstviia istinnomou nastroenniiou straniei. Analyse du livre d'A. Onou, intitulé Les élections de 1789 en France et les cahiers du Tiers état, au point de vue de leur corrélation avec la véritable opinion du pays. Saint-Pétersbourg, 1909 en russe. CI\ IMPRIMÉS 111. àulard, Histoire politique de la Révolution française. Paris, Colin, 1901, in-8*. Bibl. nai., La762. 112. Aulard, Etudes et leçons sur la Révolution française pre- mière série. Paris, Alcan, 1905, in-18. Le programme royal aux élections de 1789, p. 41-54. Bibl. nat., La32695. 113. Bayeux, Notice sur la vie et les ouvrages de feu M. avocat au Parlement de Normandie. Caen, 1803, 1 broch. in-8°. Bibl. nal., Ln-7226. 114. Bénet Armand, Rapports annuels de i archiviste départe- mentale du Calvados, de 1886 à 1906. 115. Bernier, Essai sur le Tiers état rural, ou les paysans de Basse-Normandie au XVIIIe siècle. Mayenne, 1891, lvol. in-8°. Bibl. nal., Ll112. 116. Besnier Georges, Rapports annuels de V archiviste départe- mental du Calvados de 1907 à 1911. 117. Bloch Camille, Une Enquête sur létal des paroisses en 1788. Révolution fr., t. XXXIII, p. 145-152. 118. Bloch Camille, Les Cahiers du bailliage d'Orléans au point de vue économique. Révolution fr., t. XXXIX, p. 427-454 et p. 481-500. 119. Bloch Camille, Eludes sur l'histoire économique de la France, 1760-1789. Paris, 1900, in-8°. 120. Brette, Allas des bailliages et juridictions assimilées ayant formé unité électorale en 1789. Paris, imp. nat.,, 1904, in-foR Bibl. nat.,. L45 30. 121. Brette, Les élections du clergé de Caen en 1789. Bulletins de Vabbé Soulavie, 6-25 mars 1789. Révol. fr., t. XXVII, p. 162-169. 122. Brette, La population de la France en 1789. Révol. fr., t. XLVI, p. 481-486. 123. Brette, Les limites et les divisions territoriales de la France en 1789. Paris, Cornély, 1907, in-8°. Bibl. nat., L727. 124. Brette, La Réforme des départements. Revue politique et parlementaire, 1909, t. LXII, p. 258-281. 125. Bridrey, La représentation des professions aux assemblées graduelles du Tiers état dans le bailliage du Colentin en 1789. Paris, 1905. Extrait des comptes-rendus de l'Association française pour l'Avancement des Sciences congrès de Cherbourg. 126. Bridrey, L'assemblée générale des trois ordres à Coutances en 1789. Revue de Cherbourg et de la Basse-Norman- die, t. I, p. 92-105, 121-136. IMPRIMES CV 127. Champion, La France d'après les cahiers de 1789. Paris, 1897 Armand Colin, 1 vol. in-8°. Bibl. nat., Lb3911593. 128. Chassin, Le Génie de la Révolution. Paris, 1863, 2 vol. in-8°. Bibl. nat., La428. 129. Chérest, La chute de l'Ancien régime, 1787-1789. Paris, Hachette, 1844-1886, 3 vol. in-8°. Bibl. nat,, Lb*>11359. 130. Dansin, Notice sur les libertés provinciales et V esprit public en Normandie en 1788. Paris, 1865, in-8°. Bibl. nat., in-8. Bibl. nat., Lk7744. 175. Carel P., Histoire de la ville de Caen. Paris, 1886-1888, in-8°. CVIII IMPRIMES 176. Delauney, député à l'Assemblée constituante, Bayeux et ses environs. Bayeux, 1804. Bibl. nat., Ye 19694. 177. Deschamps, Notice historique sur Saint-Lô, Dela- marre. 178. Dumaine abbé, Tinchebrai et sa région au Bocage nor- mand. Paris, Champion, 1882-1887, 3 vol. 179. Ferrière de la, Histoire de Fiers, ses seigneurs, son indus- trie. Paris, Dumoulin, 1855, in-8°. Bibl. nat., Lk72790. 180. Ferrière de la, Histoire du canton d' Alhis et de ses com- munes. Paris, Aubry, 1858, in-8° Bibl. nat., Lk62. 181. Huet, Histoire de Condé-sur-N oireau. Caen, 1883, in-8°. 182. Hunger, Histoire de Verson Calvados. Caen, Brunet, 1910, in-8°. 183. Jamont, Mortain, 1789-1791. Esquisses d'histoire munici- pale. Annuaire des cinq départements de Normandie, 1906. 184. Lecagheux abbé, Documents pour servir à V histoire de Montebourg, de 1789 à 1807. Valognes, Martin, 1874, in-8°. 185. Le Hardy, Notice historique sur Isigny. Annuaire de l'As- sociation normande, t. XXXVI, 1870. 186. Le Lorier, Monographie historique et statistique de la paroisse de Bréville. Bréville, 1898, in-8°. Bibl. nat., Lk731345. 187. Lepingard, Une page de V histoire de Saint-Lô, ou notes sur rétablissement de V Administration départementale à Saint-Lô. Annuaire de la Manche, 1866. 188. Pezet, Bayeux à la fin du XVIIIe siècle. Bayeux, Saint- Ange-Duvant, 1857, in-8°. Bibl. nat., Lk7804. 189. Sauvage, Notice sur Saint-Hilaire-du-Harcouët. Annuaire des cinq départements de Normandie, 1871. 190. Surville, Un coin du Bocage normand. L'ancienne paroisse Sainte- Suzanne, devenue la Chapelle- Biche. Le Mans, Harel, 1893, in-8°. INTRODUCTION Comme son titre V indique, ce livre a pour objet l'étude des deux phases successives de révolution qui s'est accomplie dans V organi- sation administrative de la France, à une des époques les plus décisives de son histoire. Le domaine chronologique de cette étude est la courte période des années 1787-1790; son domaine géogra- phique, une des circonscriptions administratives de l'ancienne monarchie la généralité de Caen. Dans ce double cadre, elle em- brasse et confond les derniers jours d'un régime d'autorité qui s'effondre et les premiers jours d'un régime de liberté qui s'édifie. La première partie chapitres I à IX est consacrée à la Fin de l'Ancien Régime. Si les intendants des pays d'élection avaient été, au cours du XVIIIe siècle, les agents tout puissants de la royauté, plus d'un s'était aliéné, par des actes arbitraires, la confiance de ses administrés. L'institution était déjà condamnée par l'opinion publique, lorsque la réforme décrétée par l'édit de juin 1787 vint entamer le pouvoir du dernier des intendants de Caen, Cordier de Launay, en créant dans le ressort de sa généralité une administra- tion provinciale de Basse-Normandie, et en substituant à son autorité, jusqu'alors sans partage, un condominium gros de futurs conflits. L' Assemblée provinciale de Caen, que son mode de recru- tement et sa composition aristocratique rendirent impopulaire avant sa tenue, n'eut pas le temps de poursuivre elle-même la solution des importants problèmes qu'on avait soumis à ses délibérations, et qui concernaient l'amélioration du régime des impositions, des travaux publics, et de l'état économique du pays. Elle se borna à en effleurer l'étude, dans son unique session. Les assemblées subordonnées qui, établies aux chefs-lieux des neuf élections ou départements et dans toutes les communautés du ressort provincial, devaient être ses collaboratrices, furent aussi impuissantes qu'elle. En effet, les assemblées de département, réunies deux fois seulement, ne purent qu'ébaucher l'examen du programme de réformes dont elles devaient CX INTRODUCTION étudier le mode d'application ; quant aux assemblées municipales rurales le régime municipal des ailles n'avait pas été modifié, elles virent leur formation retardée par des causes multiples et V inexpérience de leurs membres paralysa le plus souvent leur activité. La Commission intermédiaire provinciale, qui demeura chargée de l'administration jusqu'en août 1790, vit ses efforts annihilés par des obstacles de tout genre concours insuffisant des municipalités qui s'essayaient gauchement à leur noviciat adminis- tratif ; esprit d'indépendance et parfois d'insubordination des bureaux intermédiaires de département ; hostilité sourde ou déclarée des officiers d'élection et du corps des ponts et chaussées, qui oppo- saient la résistance ou la force d'inertie à l'exécution de ses ordres ; et surtout, ombrageuse susceptibilité de l'intendant et de ses subdé- légués, source de perpétuels dissentiments où se brisaient les ressorts d'un pouvoir exécutif imprudemment divisé. La Normandie, qui avait accepté sans enthousiasme le régime des Assemblées provin- ciales, ne tarda pas à se lasser de son application. Sa protestation prit la forme d'une active propagande en faveur de la restauration de ses anciens Etats provinciaux ; mais la convocation des Etats généraux vint interrompre cette campagne en provoquant une consultation nationale qui devait élargir les données du problème de la réorganisation administrative, conformément au vœu presque unanime des représentants du pays. La seconde partie chapitres IX à XVIII, est consacrée à l'étude des circonstances critiques au milieu desquelles s'accomplit cette réorganisation, des institutions révolutionnaires qui furent alors improvisées pour la défense de l'ordre public, et enfin des institu- tions légales par lesquelles les délégués de la Nation tentèrent d'asseoir un gouvernement stable, et d'en régler le jeu normal en conciliant les principes d'autorité et de liberté. Ce sont les Débuts de la Révolution. La plupart des députés que les deux bailliages de Caen et de Coutances envoyèrent à V Assemblée nationale étaient animés d'un sincère désir de réformes ; les cahiers de doléances de leurs commettants leur traçaient un vaste programme de revendi- cations en matière politique, administrative, judiciaire, sociale et économique. La Basse- Normandie suivit avec une attention fié- vreuse les péripéties de la lutte qu'ils livrèrent pour le triomphe de la cause chère au Tiers état. Des alternatives de joie enthousiaste et d'inquiétude affolante agitèrent des populations qui souffraient déjà d'un malaise économique profond. Emeutes urbaines excitées par la disette et le chômage, tentatives isolées de Jacquerie paysanne contre les derniers droits seigneuriaux, menaces de grève fiscale INTRODUCTION CXI apparurent comme des symptômes précurseurs de catastrophes prochaines. Toute la province frémit au souffle de la Grande Peur. Pour remédier à V inertie du pouvoir royal et de ses agents d'exé- cution, incapables de réprimer les excès d'une anarchie qu'ils n'avaient pas su prévenir, des pouvoirs nouveaux surgirent, d'un élan spontané, du sein de la Nation. Des Comités locaux, véritables Comités de salut public anticipés, issus des suffrages populaires, et s'appuyant sur l'ardent civisme des jeunes milices de volontaires enrôlés à leur voix, assumèrent, au milieu de continuelles alertes, le périlleux fardeau d'une double mission V approvisionnement des villes et des campagnes et la défense de l'ordre. Cette révolution municipale, de forme si originale, ne fut pas, comme d'aucuns l'ont prétendu, une tentative insurrectionnelle, explosion malfai- sante d'une anarchie spontanée » ; ce fut, au contraire, pendant les sept mois que dura l'interrègne de l'autorité administrative en France, de juillet 1789 à février 1790, un régime improvisé d' or- ganisation spontanée », qui précéda et prépara l'organisation décrétée et légale de la Révolution. U Assemblée constituante allait accomplir cette œuvre en votant deux lois capitales la première unifiait le régime municipal dans toutes les communes du royaume ; la seconde englobait ces com- munes dans des circonscriptions administratives nouvelles, moins étendues et mieux équilibrées que les anciennes. La loi municipale multiplia les prises de la Révolution sur le pays par la création de milliers de cellules vivantes et l'appel de nombreux citoyens à l'acti- vité politique; mais, en refusant celle-ci, par ses exigences censitaires, à la masse des prolétaires, dont elle faisait des citoyens passifs, elle endigua l'élan démocratique des débuts de la Révolution, et put être regardée comme une mesure d' ostracisme de la bourgeoisie à l'égard du peuple. La réforme administrative, qui divisait la France en départements, districts et communes, substitua aux trois généralités de Normandie cinq départements, dont trois, la Manche, le Calvados et l'Orne empruntèrent leur territoire, en tout ou en partie, à la généralité de Caen ; son exécution se poursuivit pendant plusieurs mois, au milieu d'une agitation populaire qui compromit, à maintes reprises, la sécurité des particuliers et la paix sociale. Elle amena au pouvoir une bourgeoisie riche et éclairée, fidèle reflet du régime censitaire décrété par V Assemblée nationale. Elle brisa le parti- cularisme régianal au profit de l'unité politique de la France. Le J 4 juillet 1789, lendemain du jour où le Conseil général du Calvados tenant à Caen sa première séance, avait élu son Directoire, et où Ventrée en scène des nouvelles autorités administratives précipitait CXII INTRODUCTION dans la même chute la vieille institution des intendants et la jeune et éphémère institution de la Commission intermédiaire provinciale, la fête de la Fédération groupait à Paris, sur le Champ-de-Mars, des délégués venus de tous les points du royaume. Les bannières des milices nationales du Calvados, de la Manche et de V Orne flottèrent autour de V autel de la Patrie, avec celles des 80 autres départements. Le chef de la délégation caennaise, Bonnet de Meautry, en retra- çant, dans une lettre à ses concitoyens, les détails de cette fête qu*il proclamait devoir être, sa/75 contredit, une époque mémorable dans les fastes de notre histoire », traduisit les impressions optimistes de tous ses compagnons d'armes, penchés sur /' avenir avec un regard d'espérance attendrie, au souvenir de cette belle journée qui venait de cimenter limité morale de la France par l'adhésion solennelle des Français de toutes les provinces à la cause de la Révolution. F. M. SITUATION ET LIMITES DE LA GENERALITE DE CAEN CHAPITRE PREMIER L'ADMINISTRATION DE LA GÉNÉRALITÉ DE CAEN EN 1787 Situation et limites de la généralité de Caen. — Ses ressources, sa popu- lation, ses charges fiscales. — Généralité et intendance élections et subdélégations. — Le dernier intendant de Caen, Cordier de Launay ses origines. — L'hôtel de l'Intendance et ses bureaux. — Les subdé- légués leur situation sociale et leurs attributions. — Municipalités urbaines et communautés rurales double caractère des syndics paroissiaux. L'Intendance ou généralité de Caen, c'est-à-dire le ressort administratif dont Caen se trouvait le chef-lieu à la fin de l'Ancien régime, était la plus occidentale des trois généralités de la Nor- mandie !. Elle avait pour limites au nord et à l'ouest, la Manche ; au sud, la Bretagne généralité de Rennes et le Maine généralité de Tours ; à l'est, les généralités d'Alençon et de Rouen. Sa frontière maritime était de beaucoup la plus déve- loppée, par suite de la protubérance de la presqu'île du Cotentin. Sa frontière terrestre était une ligne irrégulièrement tracée de l'embouchure du Couesnon à celle de la Dives. Depuis Pontorson, situé sur la rive normande du Couesnon, jusqu'à Saint-Cyr du Bailleul, vers la source de la Sélune, la limite qui sépare actuelle- ment le département de la Manche de ses voisins bretons ou manceaux était déjà celle de l'ancienne généralité de Caen. De ce point jusqu'à l'embouchure delà Dives, la ligne de démarcation 1 Un historien russe, M. Ardaschefï, dans son ouvrage sur l'Administration pro- vinciale de la France à la fin de l'ancien régime édition russe, tome I, p. 167, propose de désigner exclusivement par le terme d'intendance, la circonscription administrative confiée à un intendant, la généralité étant, au sens strict du mot, le ressort fiscal de l'ancien Bureau des finances, et ces deux ressorts ayant parfois une étendue et des limites différentes. Comme intendance et généralité de Caen coïncidaient exacte- ment, j'ai cru pouvoir conserver l'expression de généralité, communément adoptée jusqu'ici, et d'ailleurs couramment employée dans la langue officielle du xvni" siècle. Sur ce sujet, voir A. Brette, Les limites et /es divisions territoriales de la France en 1789, p. 109-U4. 1 I LES PAYS DE LA BASSE-NORMANDIE pénétrait en Normandie, avec une direction générale nord-est ; coupant l'Egrenne et la Halouze, petits sous-affluents de la Mayenne, elle venait aboutir à l'Orne à Mesnil-Hubert, englo- bant dans la généralité de Caen une trentaine de localités dépen- dant aujourd'hui du département de l'Orne, et dont les plus importantes sont Fiers, Athis et Tinchebrai. L'Orne servait de frontière de Mesnil-Hubert à Thury-Harcourt ; de là, contournant la lisière méridionale de la forêt de Cinglais, coupant la Laize, la Muance et le Laison, la ligne conventionnelle de séparation atteignait la Dives à l'est de Croissanville et se confondait avec cette rivière, laissant le pays d'Auge, situé sur la rive droite de celle-ci, à la généralité de Rouen. Ainsi délimitée, la généralité de Caen comprenait tout le dépar- tement actuel de la Manche, la moitié occidentale de celui du Calvados'1, et un petit coin du département de l'Orne 2. La même administration réunissait des régions naturelles ou pays » de constitution géologique, d'aspects et de ressources variés, dont les noms ont survécu aux remaniements successifs des circonscriptions qu'on y a taillées. Ce sont la Campagne de Caen, le Bessin, le Cinglais, le Bocage, l'Avranchin, le Penesme, le Cotentin. La Campagne de Caen, étendue sur les deux rives de l'Orne, de la Dives à la Seulles, vaste plaine, presque dépourvue d'arbres, produisait déjà, grâce à la fertilité de son sol, des céréales en abondance. A l'ouest, le Bessin, plaine légèrement ondulée, étalait autour de Bayeux ses cultures, ses prairies où paissaient de nombreuses vaches, et fournissait le beurre déjà renommé d'Isigny. Au sud, le Cinglais, pays de forêts et de chasses médiocrement fertile, accidenté, se prolongeait, sur la rive gauche de l'Orne, par une région granitique plus tourmentée et plus pauvre, le Bocage normand. Le Bocage devait son nom aux bouquets d'arbres qui couvrent encore les pentes de ses collines, aux chênes et aux ormes plantés dans les haies vives qui en séparent les héritages pays de petite propriété et de maigres cultures, alors presque dépourvu de routes, et dont les habitants vivaient de pain noir et de bouillie de sarrasin. Les régions voi- 1 Les arrondissements de Bayeux et de Vire, l'arrondissement de Caen moins trois communes Airan, Cesny aux-Vignes, Onézy, la partie occidentale de l'arron- dissement de Falaise et trois communes de celui de Lisieux Méry-Corbcn, Crois- sanville et Bissières. 2 Trois cantons de l'arrondissement de Domfront ceux d'Athis, Fiers et Tin- chebrai, à peu près en totalité. POPULATION DE LA GENERALITE DE CAEN 6 sines, le Mortainais et l'Avranchin, véritable Suisse normande, abondaient en sites pittoresques, mais n'offraient que trop de bruyères, de rocs, de landes infertiles. C'était la partie vraiment ingrate de la généralité de Caen. Vers le centre et le nord de la presqu'île, les herbages du Penesme, situés clans l'élection de Carentan, l'élection grasse », les vallons verdoyants du Coten- t'n, le val de Saire et la Hague, aux portes de Cherbourg, se prêtaient à un élevage intensif et produisaient de belles moissons ; sur tous ces points, des plantations de pommiers faisaient ressem- bler la contrée à un immense verger. Véritable grenier d'abon- dance, région dont la richesse se serait développée, si le manque presque absolu de communications et de débouchés ne l'avait trop longtemps confinée dans un isolement funeste t1. La superficie totale de la généralité de Caen était, d'après l'état statistique qui en fut dressé au contrôle général en 1788 t2, de 583 lieues carrées et demie ; c'était plus du tiers de la Nor- mandie 3, et à peu près la quarantième partie de la France. Sa population ne peut être qu'imparfaitement évaluée ; les recen- sements ne se faisaient point alors avec la même précision qu'à notre époque 4. Ce fut surtout depuis l'abbé Terray et dans un but fiscal qu'on prescrivit aux intendants des recherches périodiques sur le mouvement de la population dans les paroisses. On envoyait des tableaux imprimés que remplissaient habi- tuellement les greffiers des bailliages, moyennant gratification 5. Les subdélégués étaient chargés de recueillir les états des pa- roisses de leur circonscription, quel que fût le ressort judiciaire de celles-ci ; les bureaux de l'intendance centralisaient les recher- ches. En 1784, Calonne ordonna aux curés de relever le nombre des baptêmes, mariages et sépultures sur leurs registres parois- lj Cet aperçu très sommaire repose sur les rapports officiels des intendants et des subdélégués de la généralité de Caen, rédigés au cours du xvmc siècle à la demande des contrôleurs généraux enquêtes de 1727, 1731, 1764, 1770, 1787, et con- servés aux arch. dép., Calvados, C 269 à 292, 1070 et 6379. Sur l'état actuel des pays formant la Basse-Normandie, considérée comme région géographique, voir R. de Felice, La Basse- Normandie. 2 Etat de situation des finances de la France, de l'étendue, de la population et des contributions de chaque généralité du royaume en 1788. » Arch. nat., D vi 64, 1. 107. 3 D'après ce même Etal, la généralité de Rouen comptait 587 lieues et demie et celle d'Alençon 464 lieues ; au total, 1,635 lieues carrées pour la Normandie. 4 Voir A. Brette, La population de la France en 1789, dans Révol. fr., tome XLVI, p. 481 sqq. 5 Une somme de 1,336 livres leur est allouée en 1782. Arch. dép., Calvados, C 151. 4 ACCROISSEMENT DE CETTE POPULATION AU XVIIIe SIECLE siaux. L'intendant de Caen, Feydeau de Brou, se heurta, dans l'exécution de cette mesure, aux protestations des greffiers de bailliages, menacés de perdre leurs gratifications, et à l'inertie des curés. Quatre ans plus tard, son successeur Cordier de Launay écrivait Les curés font mal, quand ils veulent le faire, ce travail désintéressé », et il priait les évêques de Bayeux, de Coutances et d'Avranches de stimuler sur ce point le zèle de leurs subor- donnés W. L'état statistique mentionné ci-dessus évalue la population de la généralité de Caen, pour l'année 1788, à 644,000 habi- tants 2. Des états généraux du mouvement de population des paroisses, dressés par élections, et conservés pour la période 1783-1787 3, font osciller le chiffre des naissances, pour chaque année, entre 24,000 et 25,000 unités, celui des mariages entre 5,900 et 6,500, celui des décès entre 20 et 25,000 *>. Il semble que la population de la Basse Normandie s'est accrue au cours du xvme siècle. Plusieurs indices révèlent cet accroissement. Si l'on compare les rôles des tailles de 91 paroisses de l'élection d'Avranches pour la période des années 1700 à 1785 5, on trouve que le nombre total des feux s'y est élevé, pendant cette période, de 8,999 à 10,416 feux, soit une augmentation de 1,417 feux, un sixième environ. En 1786, l'intendant Feydeau de Brou, plaidant auprès du Conseil d'Etat la cause des sauniers de l'Avran- chin et réclamant en leur faveur l'augmentation du nombre annuel des jours de fabrication du sel, attribuait la pénurie de cette denrée dans les pays de quart-bouillon au développement de la population, qui, d'après son évaluation, avait cru dans la proportion d'un cinquième au moins 6. Deux ans plus tard, ce sont les sauniers du Cotentin qui, s'appuyant sur les mêmes raisons, demandent le même privilège 7. 1 Arch. dép., Calvados, C 151. Des états de naissances et décès, dressés par les curés de l'élection de Carentan en 1785, sont toutefois accompagnés d'observations très intéressantes sur la situation de leurs paroisses. Ibid., C 169. 2 Cet état attribue 528,300 habitants à la généralité d'Alençon, et 740,700 habi- tants à celle de Rouen, au total 1,913,000 habitants à la Normandie, et 24,800,000 habi- tants à tout le royaume. Etat de situation des finances, etc. Arch. nat., D vi, 64, 1. 107. 3 Arch. dép., Calvados, C 153 à 157. 1 Un relevé officiel de la population de la généralité de Caen en 1787 13 tableaux dressés par bailliages et élections, accuse 22,830 naissances et 19,268 décès. Arch. nat., D îv bis 44. 5 Arch. dép., Manche, C 1 à 193. 6 Arch. dép., Calvados, C 5998. 7 Ibid., C 6006. LA GENERALITE, DIVISION FINANCIERE, ET LES ELECTIONS 5 Malgré l'exiguïté relative de son territoire, la généralité de Caen n'était pas une des moins importantes du royaume. A une époque où les ressources agricoles constituaient un des éléments essentiels de la richesse d'un pays, elle devait passer pour un des plus aisés, et attirer particulièrement l'attention du fisc. Le total des impositions qu'elle supportait en 1785 s'élevait, d'après l'état des finances de cette année, à 13,680,000 livres. C'était environ la trente-quatrième partie du chiffre global des impositions de la France, évalué dans le même état à 473 millions de livres *. Ce chiffre, proportionnellement assez lourd, devait exciter, aux débuts de la Révolution, les protestations des premiers représen- tants de la Basse-Normandie à l'Assemblée nationale 2. Le ressort territorial de l'intendance de Caen, tel qu'il s'est maintenu clans le cours du xvme siècle, correspondait rigou- reusement à celui de la généralité, c'est-à-dire de l'ancienne circonscription fiscale soumise à la juridiction du bureau des finances de Caen 3l La généralité de Caen datait du xvie siècle elle fut une des seize que créa François Ier par l'édit de décem- bre 1542. On avait groupé, pour la former, sept des seize anciennes élections alors comprises en Normandie les élections de Caen, Bayeux, Vire, Avranches, Coutances, Carentan et Valognes 4. Le nombre de ces élections s'était accru par la formation de deux ressorts nouveaux, ceux de Mortain et de Saint-Lô 5 ; en 1787, la généralité de Caen comptait neuf élections, avec 1,214 pa- roisses 6. L'intendance avait environ un siècle d'existence en moins. 1 Exactement à 472,415,549 livres. Arch. nat., D vi, 64, 1. 107. — D'après cet Etat, la Normandie payait 51,320,000 livres d'impôts 21,800,000 livres pour la généralité de Rouen, 12,840,000 livres pour celle d'Alençon. 2 Compte-rendu à leurs commettants par les députés de la noblesse du grand bailliage de Cotentin aux Etats-Généraux de 1789. Paris, 1791. Ils se plaignent de l'ancienne surcharge d'impôts qui écrasait la généralité de Caen avant la Révolu- tion, et dont continuent à souffrir les nouveaux départements. 3 C'est cette coïncidence qui a amené la confusion fréquente, même dans le lan- gage officiel, de ces deux termes généralité et intendance. Voir Ardascheff, Pro- vinlsialnaia administratsia, tome I, p. 170 sqq. 4 Recherche de la noblesse par Raymon Montfaoucq en 1463. Arch. dép., Calva- dos, C 6424. 5 L'élection de Mortain existait en 1597 ; celle de Saint-Lô, créée en 1639, suppri- mée en 1663, fut rétablie définitivement en 1691, surtout aux dépens de celles de Rayeux et de Carentan. Arch. dép. Calvados, C 274 et 279. 6 Etat général et nominatif des villes et communautés villageoises composant la généralité de Caen en 1787, par Hommais, ancien commis de l'intendance. Ibid., C 267. 6 l'intendance et les subdélégations Sa constitution remontait au second quart du xvir3 siècle. Les premiers commissaires départis pour l'exécution des ordres du roi que l'on trouve à Caen sont des maîtres des requêtes, investis de missions spéciales et temporaires, comme Morant du Mesnil-Garnier en 1617, Paris en 1624, Turgot de Saint-Clair en 1632 ll Les pouvoirs de ces intendants de justice et de police » 2 étaient surtout d'ordre judiciaire et n'étaient pas contenus dans' les bornes d'une généralité financière. Mais, à partir de Richelieu, les intendants de Normandie, aux attribu- tions desquels s'ajouta une compétence étendue en matière de finances, furent établis à poste fixe et d'une manière permanente au siège de chacune des trois généralités normandes, à Rouen, Caen, Alençon. Au lendemain des troubles de la Fronde, l'institu- tion, un instant suspendue, fut définitivement rétablie et l'inten- dance de Caen garda jusqu'à la Révolution les limites de la cir- conscription financière qui lui avait servi de cadre administratif. Les subdivisions administratives de l'intendance de Caen, ou subdélégations, correspondaient, à deux exceptions près, aux élections de la généralité. Les deux élections de Coutances et de Valognes présentaient un territoire très étendu et une ligne de côtes très développée. Elles contenaient des villes qui avaient dépassé en importance leurs chefs-lieux eux-mêmes telle Cher- bourg, dans l'élection de Valognes ; Granville, dans celle de Coutances. Les réclamations de ces villes, l'accroissement continu de la besogne administrative avaient déterminé l'intendant Feydeau de Brou à créer deux subdélégations nouvelles, à Gran- ville en 1783 3, à Cherbourg en 1785 4;. Partout ailleurs les élections avaient formé le cadre des subdélégations, ce qui portait le nombre de celles-ci à onze pour la généralité de Caen 5. Les 1,214 paroisses de cette généralité se répartissaient très inégale- ment selon l'étendue des divers ressorts et le mode d'habitat des diverses régions. Tandis que la subdélégation de Mortain n'en comptait que 84, celle de Bayeux en avait plus du double 172 1 Floquet, Histoire du Parlement de Normandie, tome IV, p. 484 sqq. 2 C'est le titre que prend Turgot de Saint-Clair en 1632. Floquet, Histoire du Par- lement de Normandie, tome IV, p. 492. 3 Arch. dép., Calvados, C 152. Cf. Arch. nat., D xxix 40. Leltre de Couraye Duparc, subdélégué de Granville, à l'Assemblée nationale, 7 septembre 1789. Sa commission date du 27 avril 1783. 4 Ibid., C 1185. 5 Il y avait, en outre, un subdélégué spécial, établi par l'intendant Fontette, et mis à la tète de la maison de force de Bcaulieu près Caen. Ibid., C 675 et 6332. LE DERNIER INTENDANT DE CAEN / et celle de Caen près du triple 234. La plus petite de toutes, la subdélégation de Cherbourg, taillée tardivement, dans celle de Valognes, ne comptait que 34 paroisses &\ L'intendance de Caen devait être assez enviée par suite de sa proximité de Versailles et de Paris. On y débutait rarement. Esmangart y vint de Bordeaux en 1775 ; Feydeau de Brou, avant d'être nommé intendant de Caen en 1783, l'avait été à Bourges et à Dijon. Certains administrateurs y avaient fait d'assez longs séjours. Foucault y passa 17 ans 1689-1706 ; Aubry de Vastan 13 ans 1727-1740 ; Arnaud de la Briffe 12 ans 1740-1752. Fontette resta à la tête de cette généralité pendant 23 ans 1752-1775 ; il y fût resté plus longtemps, sans les scan- dales de son administration 2. En 1787, l'intendant de Caen était Louis-Guillaume-Bené Cordier de Launay. Il venait d'y succéder à Feydeau de Brou, nommé surintendant général des économats. Il était étranger à la Normandie par ses origines ; mais sa famille avait récemment fixé sa résidence dans cette province. En 1607, Etienne Cordier, sieur de Launay, avocat au Parle- ment de Dijon, obtenait la charge de conseiller secrétaire du roi en la chancellerie de Bourgogne. Il devint ensuite contrôleur ordinaire des guerres et de la compagnie des chevau-légers de Louis XIII 3. En 1634, il épousa à l'église Saint-Paul, à Paris, sa cousine, Marie Cordier, fille de Jacques Cordier, conseiller du roi, trésorier des aumônes, offrandes et dévotions de Sa Majesté. Son fils René, écuyer, contrôleur ordinaire des guerres et alter- natif de la compagnie des chevau-légers et mousquetaires de la garde depuis 1672, épousa en 1680 Marie-Madeleine Renouard, fille d'un secrétaire du roi. De ce mariage naquit Jacques -René, le grand-père de l'intendant de Caen. En 1712, Jacques-René, alors trésorier des troupes en garnison dans les villes de Bergues et Furnes, épouse Anne-Thérèse de Croeser, petite-fille du bourgmestre de Bergues i]. Il suit les armées de Louis XIV, pendant la guerre de la succession d'Es- pagne, aux Pays-Bas et sur le Rhin. Trésorier de l'extraordinaire des guerres à Arras en 1716, il achète en 1725 la charge de rece- 1 Ktat général et nominatif de 1787, par Hommais, déjà cité. 2 F. Mourlot, Un Intendant de province sous Louis XV l'intendant Fontette, a Bibl. nat., Nouveau d'Hozier, vol. 201. 4 Ibid., collection Chérin, vol 59, ms. fr. 31621. Aux Arch. nat., Y 60, f° 37i>, se trouve le testament d'Anne-Thérèse de Croëser, en date du 30 mai 1772. 8 LA FAMILLE DE CORDIER DE LAUNAY veur ancien et mi-triennal des tailles de l'élection de Paris *. Son expérience et son honnêteté dans l'exercice de cette charge » lui permettent d'obtenir l'un des deux offices de conseillers trésoriers généraux de l'extraordinaire des guerres créés en 1728 2 Le 1er février 1736, Jacques-René obtint des lettres-patentes du roi sur arrêt du Conseil du 31 décembre 1735, le maintenant lui et sa postérité dans le titre et privilège de noblesse acquise par l'exercice de la charge de conseiller secrétaire du roi autrefois octroyée à son aïeul Etienne » 3. Quelques années plus tard, en 1740, il acquit les terres et baronnies d'Echauffour et de Montreuil l'Argillé *. Son fils, Claude-René, appelé d'ordinaire Cordier de Montreuil, épousait cette année même Madeleine Masson de Plissey, fille d'un secrétaire du roi. Il fut président à la cour des Aides de Paris et mourut dans cette ville le 26 nivôse an III, dans un âge fort avancé. Sa vie s'était écoulée entre les occupations de sa charge et les loisirs de sa campagne d'Echauf- four 5. Cordier de Montreuil eut cinq enfants trois filles et deux fils. L'aînée des filles, Renée-Pélagie, épousa en 1763 le trop fameux marquis de Sade, dont elle fut séparée de corps et de biens par arrêt du Châtelet de Paris, le 9 juin 1790 °. Des deux Arch. nat., E 999A, n° 58. Ordonnance du 7 avril 1725. 2 Bibl. nat, Nouveau d'Horier, vol. 201. — Arch. nat., E 999\ n° 58 ; E 1066, n°95 P 2462, f° 119 v° ; P 2470, f° 315 v° ; P 2479, f» 398. - A cette époque vivait une jeune femme qui jouit d'une certaine célébrité dans le monde des lettres sous la Régence et qui, par une coïncidence singulière, s'appelait Marguerite-Jeanne Cordier de Launay. Malgré cette homonymie rigoureuse, on ne peut établir avec certitude que cette jeune fï lie, qui eut pour père un artiste peintre, et qui, après avoir servi la duchesse du Maine au château de Sceaux, raconta les divertissements de celte cour dans de captivants Mémoires, écrits sous son nouveau nom de baronne de Staal, ait été unie par des liens de parenté à la famille du trésorier des galères, grand-père du dernier intendant de Caen. 3 Bibl. nat., collection Chéri n 59, ras. fr. 31621. — Etienne n'avait exercé cette charge que du 16 septembre 1607 au mois d'avril 1624. II lui manquait trois ans et sept mois pour avoir droit à la noblesse, d'où la nécessité de cet arrêt du Conseil sollicité par son petit-fils. Lors de la recherche de la noblesse de 1666, Marie Cordier, veuve d'Etienne, au nom et comme tutrice de ses enfants mineurs, et René Cordier, son fils, s'étaient désistés de la qualité d écuyers. Bibl, nat., Cabinet des Titres, ms, fr. 27338. — Cf. aux Arch. nat. XJA 8738, f° 500 copie de la lettre de maintenance de noblesse pour Jacques-René Cordier de Launay, en 1736. 4 Echauffour, commune du canton de Gacé Orne; Montreuil-l'Argillé, commune du canton de Broglie Eure. 5 Arch. dép., Orne, série Q, émigrés. Dossier Cordier de Montreuil.— J'ai pu voir, au château d'Echauffour, une bibliothèque très fournie en ouvrages des xvne et xvme siècles, avec reliure du temps et aux armes de la famille d'azur, au chevron d'or, accompagné de trois croissants d'argent, deux en chef et un en pointe ». 6 Bibliothèque nationale, Cabinet des Titres, ms fr. 27338 billet de faire-part de ce mariage. Pélagie de Montreuil mourut en 1810 à Echaufiour et y fut enterrée. Une chapelle latérale de l'église d'Echauffour conserve son inscription funéraire. LA CARRIERE DE CORDIER DE LAUNAY \ fils, l'un Charles-Michel Cordier de Valéry devint colonel de cavalerie, puis maréchal de camp ; l'autre, Louis-Guillaume- René Cordier de Launay, né à Paris au mois de novembre 1746, fut destiné à la magistrature. Conseiller au Parlement de Paris en 1769, puis maître des requêtes au Conseil d'Etat en 1773 il\ il obtint l'intendance de Caen en 1787. Ce fut son premier et son unique poste dans l'administration provinciale. Il arrivait en Normandie rempli d'intentions généreuses, résolu à gérer avec zèle et équité les intérêts de sa généralité, témoin une de ses premières lettres à son secrétaire Guyard. En tout il faut aller au but sans s'affecter des passions et contradictions qu'on ren- contre sur son chemin ; dans toute espèce d'opération politique, il faut se monter sur deux sentiments qui paraissent contradic- toires, mais qui ne sont pas impossibles à concilier il faut réunir l'amour du bien public, inséparable de l'homme vertueux et l'indifférence du méchant en appliquant le premier à tout ce qui peut conduire au bien et l'autre à tout ce qui tend à nous en écarter, on surmonte tout obstacle, et on fait tôt ou tard triom- pher la vérité » 2. Sous ce style un peu guindé percent de loua- bles intentions, que Cordier de Launay n'eut guère le temps de réaliser. Il avait été nommé intendant le 14 janvier 1787 3 ; après l'édit de juin sur les Assemblées provinciales, celle de Basse-Normandie allait s'organiser au mois d'août, se réunir en novembre, et léguer ses pouvoirs à une Commission intermé- diaire provinciale permanente, destinée à contrôler l'intendant et à le supplanter dans la plupart de ses attributions. Cordier de Launay ne posséda ainsi réellement qu'une dizaine de mois l'intégralité des fonctions ci-devant attachées à son titre 4 » Il devait rester ensuite près de trois ans dans cette situation de magistrat désarmé et sans pouvoir, jusqu'au mois d'août 1790, époque où la mise en mouvement des administrations départe- 1 Provisions de maître des requêtes, pour Cordier de Launay, du 9 juin 1773, mentionnant un extrait baptistaire du 12 novembre 1746. Il avait été nommé conseil- ler au Parlement de Paris par provisions du 18 janvier 1769. Arch. nat., V1 466. — Voir A. Brette, Recueil de documents relatifs à la convocation, tome III, p. 739. 2 Arch. dép., Calvados, C 4156. 3 Je n'ai pu retrouver sa commission d'intendant dans les Lettres scellées de la maison du Roi, aux Archives nationales. La mention de sa nomination à la date du 14 janvier 1787 est consignée dans un mémoire rédigé vers cette époque et conservé aux Arch. dép., Calvados, C 2211. 4 Tableau de l'administration de Cordier de Launay, dernier intendant de la géné- ralité de Caen, ibid., C 233. 10 PROJET D'UN HÔTEL DE ^INTENDANCE A CAEN mentales nouvelles entraîna dans le même abîme la vieille insti- tution des intendants et l'institution naissante des Commissions intermédiaires. Marié depuis trois ans, Cordier de Launay avait acheté, le 26 octobre 1787, avec une partie de la dot de sa femme, la terre de Lignères et dépendances, située dans le voisinage du domaine paternel V. Il possédait aussi un hôtel à Paris, rue du faubourg Poissonnière 2. A Caen, il habitait l'hôtel de l'Intendance, situé rue des Carmes, et qui servait depuis une vingtaine d'années de résidence à ses prédécesseurs. A la fin du xvne et pendant toute la première moitié du xvme siècle, les intendants de Caen étaient logés dans une maison particulière de la rue Saint-Jean, que la ville avait louée en 1682 à un sieur de Goupillière, directeur de la Monnaie. Le quartier, marécageux, était des plus malsains ; le bâtiment, vieux de près de deux siècles, nécessitait de continuelles répa- rations qu'on avait peine à obtenir. En 1759, après avoir habité sept ans la maison de Goupillière avec la crainte constante de la voir s'écrouler, l'intendant Fontette demanda l'annulation du bail. Un arrêt du Conseil l'autorisa à se loger à sa guise moyennant une indemnité de logement de 1,500 livres que la ville de Caen devait lui fournir. C'était une mesure provisoire, en attendant le retour de la paix et la création des ressources nécessaires pour la construction d'un hôtel de l'Intendance a. Délogeant ses bu- reaux qu'il établit rue de l'Oratoire, Fontette transféra sa rési- dence au château de Tilly qu'il venait d'acquérir et où il séjourna pour épargner des dépenses de construction à Caen et à la généralité » 4. Plusieurs projets étaient mis en avant au sujet de l'emplacement du futur hôtel. Les uns proposaient le quartier Saint-Jean, plus central, plus peuplé, mais formant une sorte d'île marécageuse. D'autres avaient en vue le quartier Saint- Sauveur, plus excentrique, mais où l'air était plus pur et le terrain 1 Arch. dép., Orne, série ç», émigrés. Dossier Cordier de Launay. — Lignères, commune du canton du Merlerault Orne. Cette acquisition lui avait coûté 239,360 liv. Par son contrat de mariage, du 24 février 3781, et par des actes postérieurs, sa femme, Pétronille de la Lande, lui avait apporté une fortune de 370,000 livres. 2 Almanach royal de 1787. Cf. Inventaire des papiers trouvés dans la maison de Cordier de Launay, émigré, rue du faubourg Poissonnière, par trois commissaires de la section Poissonnière, 3 thermidor an III. Arch. nat., T 1013. Etat des gages et traitements des gens de la maison dudit émigré. Ibid., P 1G86. 3 Arch. dép., Calvados, C 201. 4 Ibid., C 204. AMÉNAGEMENT DE CET HÔTEL 11 plus solide. Le corps municipal de Caen ne manifestait pas ses préférences, et, pour éviter de nouvelles dépenses, était partisan du statu quo. Fontette se plaignit au contrôleur général de la mutinerie du corps municipal » et menaça d'établir le siège de l'Intendance soit dans sa terre de Tilly, soit à Bayeux comme l'avait fait Chamillart un siècle auparavant &>. Les douze paroisses de Caen, dans leurs assemblées particu- lières, approuvèrent en principe la construction d'un hôtel de l'Intendance, en priant Fontette d'attendre la conclusion de la paix et de faire contribuer toute la généralité à la dépense » 2. Après avoir pesé les avantages et les inconvénients des deux quartiers proposés, Fontette obtint en 1765 un arrêt du Conseil autorisant l'achat de terrains situés au bout de la place Saint- Sauveur, sur une place récemment créée, à laquelle on avait donné son nom. L'obstination de la municipalité, qui refusa de déplacer les glaciers publics » 3 établis en cet endroit et dont la ville était propriétaire, fit abandonner ce projet. Fontette demeura dans une maison qu'il avait achetée rue des Carmes et où, en 1769, il fit transférer ses bureaux. La même année, il ven- dait cet immeuble au roi ; les propriétaires de deux immeubles voisins l'imitèrent *. Le tout coûta 96,550 livres. Dès 1769 commencèrent les travaux d'appropriation qui devaient aména- ger en un seul hôtel les trois maisons réunies ; ils furent longs et onéreux. Des agrandissements furent nécessaires quand arriva le successeur de Fontette, Esmangart. Celui-ci, qui n'avait pas de château à sa portée, avait besoin d'une installation plus confor- table. Il fallut construire un pavillon sur le jardin, et une aile en retour du corps de logis principal ; une chapelle y fut élevée 5. Les dépenses s'accrurent bien au-delà des prévisions, sans appor- ter d'amélioration sérieuse. On n'avait réussi qu'à étayer un logis croulant » 6. A peine arrivé à Caen, Cordier de Launay 1 Arcli. dép., Calvados, C 205. 2 Ibid., C 206 et série G non inventoriée. Registre des délibérations des paroisses Saint-Martin, Saint-Nicolas, Saint-Sauveur, Saint-Michel, etc. 3 Ibid., C 209, 210. Les fonds qui avaient été destinés à cette dépense furent employés aux travaux de canalisation de l'Orne. 4 Ibid., C 211, 217. Ces deux propriétaires étaient Mmc de Chazot et Cairon de la Mothe. 5 Ibid., C 222, 3085, 3091. De 1776 à 1783, Esmangart obtint, à force de demandes réitérées, et tn se heurtant à une vive résistance des contrôleurs généraux des finances, des sommes qui lui furent successivement accordées sur les fonds libres de la capilation, et dont le total monta à 68,928 livres. Arch. nat., H1 1408. 6 Letlrc d'Esmangart au contrôleur général, 8 décembre 1782. Arch. nat., H1 1408. 12 LES BUREAUX DE L'INTENDANT dut faire exécuter pour plus de 13,000 livres de travaux afin de rendre habitable le taudis appelé hôtel de l'Intendance » 1. C'est dans cet hôtel de la rue des Carmes que l'intendant avait établi ses bureaux, depuis 1769. Ils ressemblaient à ceux de nos préfectures. A leur tête se trouvait un premier secrétaire de l'in- tendance, prédécesseur du secrétaire général des préfets d'au- jourd'hui. Sous Fontette, il y eut à Caen un subdélégué général, le néfaste Malafait, dont l'administration fut détestée et qui contribua à la disgrâce de son chef 2. Depuis 1775, le premier secrétaire était Guyard, avocat qu'Esmangart avait amené de son intendance de Bordeaux, et que ses successeurs avaient conservé 3. Il devait exercer ses fonctions jusqu'aux premiers jours de la Révolution, avec des appointements d'environ 5,000 livres '4. Au-dessous de lui, les bureaux, dont le personnel avait augmenté depuis quelques années, par suite des exigences crois- santes du service, comprenaient en 1787 douze secrétaires et commis, jouissant de traitements échelonnés entre 600 et 4,000 li- vres. Les employés trop âgés ou infirmes recevaient une pension annuelle de 600 livres prises sur les fonds libres de la capitation 5. Ces bureaux étaient chargés de la correspondance administra- tive que l'intendant entretenait, d'une part, avec le contrôleur général, le ministre de la province et les divers ministres 6>, et 1 Lettre de Cordier de Launay à M. de Villedeuil, mai 1787. Je suis, écrivait-il, dans une humeur inconcevable de n'être pas logé, et, tranchons le mot, de ne pou- voir jamais l'être dans la maison que M. de Fontette a si mal à propos vendue au roi et affectée à l'intendance... J'aime beaucoup M. et Mme de Fontette, mais, comme je suis forcé de le dire et comme tout le monde ici le crie, il n'est pas permis à un administrateur, pour le petit intérêt personnel, de se défaire d'une maison, d'affecter à un homme public une habitation non seulement archimalsaine, mais encore si petite, si mal tournée, qu'il est de toute impossibilité d'y demeurer les deux tiers de Tannée et d'y tenir en aucun temps l'état ni la représentation convenable. » Arch. nat., H1 1408. 2 F. Mourlot, L'Intendant Fontette, op. cité, p. 14. 3 Arch. dép., Calvados, C 231. 4 Ibid., C 229. Guyard devint, en 1789, receveur des tailles de l'élection de Valognes. Ibid., C 2805. Lamy Desvallées, qui le remplaça pendant les derniers jours de l'intendance, était le frère cadet de Michel-Louis Lamy, député du Tiers état du bailliage de Caen aux Etats généraux de 1789. 5 Arch. dép., Calvados, C 229. bj L'administration de la Normandie bureau de Pétigny de Saint-Romain ressor- tissait en 1787 au département des affaires étrangères ; voir Inventaire du ministère des affaires étrangères France, affaires intérieures, n° 1401-1403. — L'année sui- vante, on la rattacha au secrétariat d'Etat de la maison du roi qui eut pour titulaires successifs le baron de Breteuil, Laurent de Villedeuil et le comte de Saint-Priest. Voir Almanachs royaux de 1787 à 1790. TABLEAU DES DEPARTEMENTS DE LTNTENDANCE 13 d'autre part avec ses subdélégués, les officiers municipaux des villes, et les chefs des différents services de son ressort. Adminis- trateur suprême de la généralité, l'intendant y exerçait encore, au commencement de 1787, en sa qualité de commissaire départi, une autorité absolue sur toutes les parties de l'administration, et sous la triple rubrique de justice, police et finances » étaient confondus une foule d'objets dont aucun n'échappait à son contrôle. Un Tableau des départements des secrétaires de l'intendance de Caen », dressé à l'époque de Fontette, montre la diversité des affaires soumises à l'administration d'un intendant avant l'institution des Assemblées provinciales, et le mode de répartition du travail entre les départements », analogues aux divisions » de nos préfectures 0; Premier département. — M. Malafait Lettres de cachet et ordres du roi ; administration municipale de toutes les villes y compris les ouvrages publics à leur charge particulière ; mendicité ; administration des hôpitaux de charité ; affaires de l'Université et du clergé ; affaires extraordinaires ; ouvrages des ports de commerce ; fortifications de terre et de mer ; artillerie, poudres et salpêtres ; étapes, extraordinaire des guerres ; milice de terre, milice garde-côte, régiment de recrues ; maréchaussée et généralement tout ce qui a rapport au militaire. Deuxième département. — M. Marescot Capitation ; impositions extraordinaires y compris les rejets ; vingtièmes ; ponts et chaussées ; bacs et péages ; toutes les fermes du roi ; domaines, ventes et reventes ; affaires de la reli- gion prétendue réformée ; postes et messageries ; églises et pres- bytères ; huissiers priseurs et tabellionnages ; lettres de grâce et de rémission ; érections de fiefs, garde-noble, etc.; hôtel des Monnaies ; états des crimes et délits ; imprimerie et librairie ; régie des cartes. Troisième département. — M. Darras Taille ; affaires de dessèchement ; société d'agriculture ; con- cessions de terrains incultes ; manufactures ; arts et métiers et tout ce qui a rapport au commerce ; réunions des juridictions ; parties casuelles et offices ; école royale militaire ; haras ; maladies et remèdes de la Cour. 1 Arch. dép., Calvados, C 6331. 14 LE CONSEIL DE L'INTENDANCE Quatrième département. — M. Boisard Lettres de compliments et tous les détails qui lui seront confiés par les autres départements. En dehors de ces départements », l'intendant Cordier de Launay avait attaché à son cabinet, en 1787, un secrétaire parti- culier, Grandjean de Fouchy. Celui-ci était plus particulièrement chargé de la correspondance journalière sur les questions urgentes, que l'intendant croyait devoir traiter sans le concours de ses bureaux. A la même époque, l'intendance de Caen se trouvait dotée, depuis peu d'années, d'une institution qui devait laisser des traces profondes dans notre droit administratif public le Conseil de l'Intendance, véritable prototype du Conseil de préfecture actuel. Le point de départ de cette institution avait été la néces- sité d'organiser une tutelle des communautés d'habitants. Dès son arrivée à Caen, en 1775, l'intendant Esmangart avait remar- qué les mauvaises habitudes de ces communautés rurales, prêtes à intenter des procès pour les causes les plus futiles. En présence d'un esprit de chicane aussi développé, son prédécesseur Fontette avait exigé, pendant les dernières années de son intendance, la production par les communautés d'un avis, signé de deux avocats, certifiant la validité de leurs moyens juridiques. Ce fut un palliatif insuffisant. Des consultations trop souvent mendiées ne ser- vaient guère à éclairer l'administration ; le contrôle établi n'était souvent qu'une vaine vaine formalité. Pour réduire le nombre de ces procès ruineux, Esmangart résolut d'installer au siège même de l'intendance un conseil de trois avocats, chargés d'exa- miner les délibérations des communautés et toutes les pièces y ayant trait » avant qu'elles fussent soumises à son visa. Cette institution fonctionnait avantageusement à Bordeaux, d'où il arrivait ; il l'établit à Caen dès le mois de février 1776 *. Ce ne fut pas sans obstacle. Les procureurs de l'élection de Caen pro- testèrent contre l'obligation du visa du Conseil des avocats pour l Arch. dép., Calvados, C 232 et 234. Dans son ouvrage déjà cité sur l'administra- tion provinciale en France, Prou intsialnaia Admin'stratsia, etc. tome I, p. 298, note 2, M. Ardascheff, en montrant la nouveauté de cette institution, cite la date de 1778 comme la date la plus reculée où elle apparaisse, et l'intendant d'Amiens, Bruno d'Agay, comme un des initiateurs de la réforme, et il pose la question Y en eut-il d'autres avant lui ? » La date de 1776 doit être adoptée pour l'intendance de Caen, et, d'après le témoignage d'Esmangart, il faut remonter plus haut encore pour celle de Bordeaux. LES SUIÎDÉLÉGUÉS DE 1/lNTENDANT 15 les délibérations des communautés relatives au fait des tailles ». La Chambre des comptes de Rouen leur enjoignit même de pous- ser les communautés à la résistance. Mais Esmangart tint bon,' et le conseil de l'intendance était encore en activité en 1787 !. Les trois avocats-conseils » étaient alors Le Paulmier, profes- seur à la faculté des droits et subdélégué de l'intendant ; Descotils- Desjardins, aussi professeur à la faculté des droits, et Mares- cotW. Chacune des onze subdivisions administratives de la généralité de Caen, ou subdélégations, avait à sa tête un subdélégué. Tem- poraires au début, ces agents, nés des besoins, de la pratique administrative des intendants, étaient vite devenus permanents ; une résidence fixe leur avait été assignée. Ils étaient à peu près par rapport à l'intendant ce que sont aujourd'hui les sous-préfets par rapport aux préfets. Toutefois ils n'étaient pas, comme les sous-préfets, nommés par le pouvoir central c'est l'intendant qui, en vertu de sa commission, avait le droit de les nommer ; ils étaient révocables à sa guise. Ajoutons que cette autorité arbi- traire de l'intendant était toute théorique, et que celui-ci n'avait guère l'occasion de l'exercer. En fait, les subdélégués jouissaient, vis-à-vis de leur chef, d'une assez complète indépendance 3. Leur charge administrative n'était la plupart du temps qu'une fonction accessoire ajoutée à une fonction publique antérieure- ment acquise. Par l'exercice de cette première fonction, par leur degré de culture, leur état social, leur situation de fortune, ils étaient au rang des notabilités locales avec lesquelles l'intendant devait compter. Ainsi, sur les onze subdélégués de l'intendance de Caen, trois étaient lieutenants généraux de bailliages Robil- lard à Saint-Lô, Sivard de Beaulieu à Valognes, Lavalley de la Hogue à Carentan. Ferey de Montitier, subdélégué cl'Avranches, qui venait de succéder à Meslé, décédé en 1787, était lieutenant particulier au bailliage de cette ville, et lieutenant en l'élection 4. 1 On trouve des traces de l'activité de ce Conseil aux arch. dép. du Calvados pour les élections d'Avranches, C 1055 ; de Caen, C 1088; de Carentan, C 1248; de Mortain, C 1219; de Saint-Lû, C 1227-1228. 2 Chacun d'eux recevait une gi'atificalion annuelle de 400 livres, prise sur les fonds libres de la capitation. Arch. dép., Calvados, C 231. Après la mort de le Paul- mier, janvier 1788, Lepage, puis Desbordeaux, avocats, furent conseillers de l'inten- dance. 3 ArdaschefT montre très bien cette indépendance de fait des subdélégués, dans son ouvrage déjà cité Provintsialnaia Adminislratsia, etc., chap. V, Intendant v'svoei oblasli i ièuo podtchinennié. Subdelegati, p. 332 sqq. 4 Arch. dép., Calvados, C 3378. 16 CONDITION SOCIALE DES SUBDÉLÉGUÉS Le Harivel de Gonneville, subdélégué de Caen après la mort de Le Paulmier, était lieutenant général criminel au siège de police de cette ville *. Le subdélégué de Granville, Couraye Duparc, y exerçait avant sa nomination l'office de vicomte avec intelli- gence et à la satisfaction du public » et en avril 1787 il fut choisi, par le roi comme maire de cette ville 2. Démons de Garantot, subdélégué de Cherbourg, y était lieutenant général de police depuis 1761 3, et maire depuis 1781 W ; c'est en cette qualité qu'il avait reçu Louis XVI, quand celui-ci vint visiter en 1786 les travaux du port. Sivard de Beaulieu figurait en 1788 parmi les notables de l'hôtel de ville de Valognes 5, Robillard, avant d'occuper le siège de lieutenant-général du bailliage à Saint-Lô et d'y recevoir une commission de subdélégué, avait été docteur agrégé aux droits » à Caen 6. Gênas, subdélégué de Bayeux depuis 1772, conseiller au bailliage, était fils d'un ancien conseiller à l'éphémère Conseil supérieur de cette ville C. S'ils tenaient au titre de subdélégué, c'était surtout en raison du surcroît de considération et d'influence locale qu'il leur donnait. La charge, en effet, était plus honorifique que lucrative. Elle ne comportait aucune rétribution fixe. A peine les subdélégués recevaient-ils quelques gratifications, comparables aux frais de bureau ou de tournées de certains fonctionnaires actuels ; 9,000 livres leur étaient annuellement allouées en bloc dans l'intendance de Caen, ce qui réduisait à peu la part de chacun *. Aussi plus d'un la rece- vait-il avec hauteur 5. La situation matérielle et sociale de ces subdélégués explique les ménagements que les intendants étaient obligés de garder vis-à-vis d'eux 6> ; elle nous expliquera plus tard la défiance qu'inspireront à Cordier de Launay, au début de la crise révo- lutionnaire, la plupart de ces subordonnés, lorsqu'il les verra, assoiffés de repos ou avides de popularité, abdiquer leurs fonc- tions occasionnelles de subdélégués, déchues dans l'opinion pu- blique, pour se confiner dans l'exercice de leurs charges anté- rieures et fondamentales, ou pour briguer les suffrages populaires. Pour se rendre compte de la multiplicité et de la variété des attributions des subdélégués à la fin de l'Ancien Régime, il n'y a qu'à feuilleter les archives des subdélégations. Si le défaut de mesures d'ensemble prises pour la conservation et le classement 1 Meslé a tract' un portrait exact et très vivant des habitants de l'Avranchin. Arch. dép., Calvados, C 1070. 2 Sivard de Beaulieu fut subdélégué à Valognes pendant douze ans ; de Cheux de Saint-Clair, à Vire pendant dix-neuf ans 1758-1777 ; Meslé, à Avranches, pendant vingt-quatre ans 1763-1787 ; de la Roque, à Mortain, pendant vingt-huit ans 1762- 1790 ; de Mombrière, à Coutances, pendant plus de quarante ans. 3 Deux Gênas, l'oncle et le neveu, furent successivement subdélégués à Bayeux de 1736 à 1789. 4 Arch. dép., Calvados, C 231. Encore prélevait-on sur cette somme des gratifi- cations pour les secrétaires de l'intendance. 5 De la Roque, subdélégué à Mortain, se croit au-dessus de toute gratification, ne veut pas convenir en avoir reçu, n'en a pas besoin ; Gênas, de Bayeux, a 12,000 liv. de rente et est fort économe ; de Saint-Clair, à Vire, a 8,000 livres de rente ; de Varoc, à Saint-Lù, fait de la dépense pour l'éducation de sa famille et reçoit l'intendant lors de sa tournée. » Notes de l'intendant Esmangart. Ibid., C 231. 6 Ibid., C 4156. Ni Feydeau de Brou, ni Cordier de Launay n'osent transmettre à Robillard, subdélégué de Saint-Lô, une lettre de blâme de Castries, secrétaire d'Etat de la marine. Ils la trouvent trop mortifiante » à l'égard d'un homme qui sacrifie son temps et sa fortune au service public et qui offrirait immédiatement sa démis- sion ». 18 SUBDÉLÉGUÉS, AGENTS D'INFORMATION de ces archives a eu de fâcheux résultats, si les fonds des subdélé- gations sont plutôt rares W, les Archives] départementales du Calvados ont eu la bonne fortune d'acquérir les papiers des deux plus importantes subdélégations de l'intendance de Caen celles de Caen et de Bayeux *2. Représentants de l'intendant dans leur circonscription, comme celui-ci était le représentant du roi dans la sienne, les subdélégués de l'intendance de Caen nous apparaissent sous le double aspect d'agents d'information et d'agents d'exécution. Agents d'information, ils étaient les correspondants, les conseil- lers de l'intendant. Ils étaient ses yeux et ses oreilles ». On les consultait à tout propos et sur tous les objets. Les statistiques qu'ils étaient chargés de dresser à intervalles périodiques étaient déjà effrayantes par leur nombre états annuels, par paroisses, des naissances, mariages et sépultures, avec leurs observations sur les maladies épidémiques W ; états du mouvement de la population dans les maisons religieuses et hôpitaux 4 ; états annuels de la situation des récoltes avec des indications précises sur les causes qui en favorisaient ou en contrariaient l'abon- dance 5 ; états mensuels, puis bimensuels du prix des grains et des diverses denrées qui se vendaient sur les marchés de leur subdélégation 6 ; tableaux des dessèchements et des défriche- ments 7. Il ne se passait guère de semaine sans que le contrôleur général ne demandât à l'intendant, et celui-ci à ses subdélégués, un rapport sur les questions les plus diverses, surtout d'ordre économique. Quels sont les endroits où se tiennent des foires et quelle est l'importance de celles-ci ? 8 Existe-t-il dans la géné- ralité des mines de charbon ou de fer ? 9. Quels sont les princi- paux objets du commerce de la région ? 10. Quelles industries y prospéreraient ? i11. Autant de demandes auxquelles devaient répondre les subdélégués. Une société d'agriculture va-t-elle se 1 Voir Ardascheff, ouv. cité, p. 378. 2 Arch. dép., Calvados, C 6884 à 6917 subdélêgation de Caen ; C 9446 à 9565 sub- délégation de Bayeux. 3 Ibid., C 9450. 4 Ibid., C 9451. 5 Ibid., C 2689 à 2711. 6 Ibid., C 9455. 7 Ibid., C 6885, 9457. 8 Ibid., C 6886. 9 Ibid., C 6887. 10 Ibid., C 9458, 9462, 9463 et suivants. 11 Ibid., C 6887. SUBDÉLÉGUÉS, AGENTS D'EXÉCUTION 19 fonder, vite l'intendant les prie de dresser la liste des personnes capables d'en faire partie *. Supprime-t-on des communautés d'arts et métiers, voilà les subdélégués occupés à apurer leurs comptes, à dresser l'inventaire de leurs titres W. Leur avis est réclamé sur les demandes de sauf-conduits ou d'arrêts de sur- séance 3, sur les érections de fiefs W et jusque sur les moindres dé- tails des réjouissances publiques et les illuminations des villes P. Agents d'exécution, les subdélégués étaient comme les com- missaires départis » de l'intendant. Ils servaient d'intermé- diaires entre celui-ci d'une part, les corps municipaux des villes et les syndics des communautés rurales d'autre part. Ils leur transmettaient les ordres reçus et veillaient à l'accomplissement de ceux-ci. Ces ordres étaient, le plus souvent, leurs avis mêmes qui, après avoir suivi la voie hiérarchique, leur faisaient retour, à la sortie des bureaux de l'intendance ou de l'administration cen- trale, transformés, soit en ordonnances de l'intendant, soit en dé- cisions ministérielles, soit même en solennels arrêts du Conseil 6. Dans l'intendance de Caen comme dans les autres pays d'élection », l'activité des subdélégués se portait sur de multiples objets. On les voit collaborer avec les élus et les receveurs des tailles à la préparation des mandements 7 ; répartir l'imposition territoriale et celle des bâtiments de justice, spéciales à la géné- ralité de Caen 8 ; dresser les rôles des paroisses qui supportaient la taxe représentative de la corvée y ; présider aux adjudications de travaux publics 10 ; veiller à la sécurité et au bon ordre u ; organiser l'assistance et propager l'hygiène ]2l L'administration militaire leur occasionnait une surcharge accablante. Dans beaucoup d'élections où il n'y avait pas de commissaires des guerres, comme à Bayeux, Vire, Saint-Lô, etc., les subdélégués I Arch. dép., Calvados, C 2501. * Ibid., C 6889. 3 Ibid., C 6882. 4 Ibid., C 6917. 5 Ibid., C 6916. 6 Ibid., C passim. Les cartons de l'intendance de Caen renferment en abondance les preuves de la transcription littérale des rapports des subdélégués par les bureaux de 1 intendant, sous forme de projets d'arrêts du Conseil. Ardascheff a insisté sur ce point, ouv. cité, p. 366. 7 Arch. dép., Calvados, C 94 1 a 9477 8 Ibid., C 9503 à 9519. 9 Ibid., C 9490 à 9502. 10 Ibid., C 9550. II Ibid, C 9452. 12 Ibid., C 9563, 9454 '20 MUNICIPALITÉS URBAINES ET COMMUNAUTÉS RURALES en faisaient fonction. Les fournitures nécessaires -pour le transport des troupes, pour leur casernement voitures, bêtes de somme, lits militaires ; le dénombrement des garde-côtes, la levée de la milice, la police des déserteurs et des hôpitaux militaires, le ser- vice de la maréchaussée; en un mot, les mille détails d'une admi- nistration très compliquée absorbaient tous leurs instants *. L'extension progressive des attributions des subdélégués avait fait de ceux-ci les chevilles ouvrières de l'administration provin- ciale à la fin de l'Ancien Régime. Leur tâche avait quadruplé, si l'on en croit l'un d'eux, le subdélégué de Vire 2. Aussi, en plus d'un endroit, se faisaient-ils aider par des secrétaires. A Saint- Lô, le secrétaire de Robillard exerçait ces fonctions depuis 1741, .et il avait succédé à son père qui occupait cet emploi depuis 1721 3. A Avranches, Boudent était à la fois greffier de l'élection et de la subdélégation 4. Ces commis, choisis par les subdélégués, étaient, en général, exempts de capitation, des corvées, des droits d'aides et du logement des gens de guerre 5\ Entre les onze subdélégations de la généralité se répartissaient 1,214 paroisses, d'inégale importance villes, bourgs et villages. Une douzaine de villes à forme municipale, dont les constitutions respectives, unifiées par l'édit de juillet 1766, avaient été diver- sifiées par des règlements particuliers ultérieurs, et 1,200 com- munautés rurales, pourvues d'organismes encore rudimentaires et enfermées dans les étroites bornes d'une vie exclusivement locale, telles étaient au début de 1787, les dernières molécules administratives de la généralité ». Il n'y avait aucune circons- cription intermédiaire entre la subdélégation d'une part, les municipalités urbaines et les communautés rurales d'autre part. Les subdélégués correspondaient directement avec les officiers municipaux et avec les syndics paroissiaux. Les maires, chefs des municipalités, étaient nommés par le roi sur une liste de trois membres proposés par les hôtels de ville ; il est probable que 1 Voir les lettres de Demortreux, subdélégué de Vire, du 28 mai 1780, et de Robillard, subdélégué de Saint-Lù, du 18 mars 1781. Arch. dép., Calvados, C 231. .• 2 Je ne crois pas dire trop en disant que j'ai la subdélégation la plus surchar- gée et la plus attachante, et que je n'ai pas un seul jour tranquille ; mon travail, par l'extraordinaire, est quadruple du précédent. » lbid., ibid. 3 Lefauqueux de la Besnardière, greffier de la subdélégation de Saint-Lô, demanda, en raison des soixante-neuf ans de services accomplis par son père et lui, une gratification à l'Assemblée nationale, le 2 juillet 1790. Arch. nat, Dvi 38, 1. 554. Cf. Arch. dép. Calvados, C 6289. 4 Arch. dép., Calvados, C 7647. Yvert était greffier de la subdélégation de Caen, et Basley de celle de Baveux. Ibid., C 6916 et 9446. C> Ibid., C 7647. LES SYNDICS DES PAROISSES RURALES 21 l'avis de l'intendant influait sur ces choix, et que ce dernier s'en rapportait aux renseignements fournis par ses subdélégués 1>. Les syndics ruraux de la généralité de Caen étaient élus par l'assemblée générale de leurs paroissiens ; depuis 1769, ils étaient préposés d'office à la collecte des vingtièmes 2, et l'on avait joint à cette fonction de nature fiscale la levée d'autres impo- sitions récemment établies en Basse-Normandie et spéciales à cette région, comme l'imposition territoriale et celle des bâti- ments de justice 3. Comme l'intendant et comme les subdélégués, ces officiers publics des communautés urbaines et rurales étaient revêtus, mais dans un ressort de moindre étendue, d'attributions admi- nistratives, par délégation indirecte de l'Etat. C'étaient les organes administratifs du degré inférieur, les agents d'informa- tion et d'exécution placés au dernier rang de l'échelle adminis- trative, et l'on a pu dire avec raison, notamment des syndics ruraux, qu'ils étaient des vice-subdélégués » 4, et qu'ils représentaient les subdélégués dans toutes les opérations ayant trait à l'ordre public et au gouvernement » 5. Toutefois, en dehors des attributions qui leur étaient com- munes avec les intendants et les subdélégués 6, les maires et syndics en avaient d'autres qui leur étaient propres, et qu'ils n'exerçaient pas au nom de l'Etat. Ils étaient les représentants et les chefs de l'association communale ; les syndics en étaient même partout les chefs élus. Le principe de l'élection, bien qu'il fût parfois violé par l'action arbitraire des intendants, n'en subsistait pas moins comme un dernier vestige de l'indépendance locale, et il pouvait devenir le point de départ de libertés nou- velles. Il allait bientôt franchir le cercle étroit où l'absolutisme monarchique l'avait enfermé, pour régénérer, à tous les degrés de la hiérarchie, le régime administratif du pays. 1 Arch. dép., Calvados, G 1068, 1092, 1095, 1173, 1184, 1221, 1230 et 1257. 2 Ordonnance de l'intendant Fontelte concernant la nomination des syndics et préposés au recouvrement des vingtièmes. Ibid., C 5295. 3 Ces deux impositions, spéciales à la généralité de Caen, avaient été établies, la première par des arrêts successifs du Conseil, de 1769 à 1785 ; la seconde, par un arrêt du Conseil du 18 janvier 1786. Ibid., C 4398, 8172, 8174 et 8181. 4 Ardascheff, oiw. cité éd. russe, p. 524. 11 les appelle aussi des subdélégués en miniature ». 5 A. de Tocqueville, L'Ancien Régime et la Révolution, p. 75. 6 Je rappelle que plusieurs subdélégués étaient en même temps maires de la ville chef-lieu de leur résidence tel Garantot à Cherbourg, Meslé à Avranches et Couraye-Duparc à Granville. Mais aucun subdélégué de la généralité de Caen ne fut syndic rural. 22 l'édit de juin 1787 CHAPITRE II LA FORMATION DE l' ASSEMBLÉE PROVINCIALE DE BASSE-NORMANDIE. AOUT 1787 La réforme administrative de 1787 en Normandie son objet. — Critiques formulées contre les intendants ce qu'elles ont de fondé dans la généralité de Caen. — Désirs et projets de réformes administratives en Normandie avant l'établissement des Assemblées provinciales. Ledit de juin 1787. — L'assemblée préliminaire d'août 1787; sa composi- tion. — Formation complémentaire de l'Assemblée provinciale de Basse-Normandie ; répartition géographique et sociale de ses mem- bres assemblée de privilégiés. — Ses organes d'exécution Commis- sion intermédiaire provinciale et procureurs syndics provinciaux. — La première moitié des assemblées d'élection condition sociale de leurs membres. — Atteinte portée au pouvoir de l'intendant par la création de l'institution nouvelle. L'année 1787 vit s'opérer en Normandie, comme dans les autres pays d'élection » du royaume, une véritable révolution administrative *. Conformément à l'avis émis par l'Assemblée des notables réunie au mois de février, Louis XVI publia en juin un édit créant des Assemblées provinciales dans toutes les gêné- ralités du royaume qui n'avaient pas d'Etats provinciaux i2. La Normandie, dont les Etats, périodiquement réunis depuis le Moyen âge, avaient été suspendus par Mazarin, devait avoir en vertu de cet édit trois Assemblées provinciales, correspondant à ses trois généralités de Rouen, d'Alençon et de Caen. L'édit de juin fut suivi de deux Règlements royaux, l'un du 15 juillet 3, sur la formation et la composition des assemblées », 1 Voir le chapitre XIX de Tocqueville, L'Ancien Régime el la Révolution, intitulé Comment une grande révolution administrative avait précédé la révolution poli- tique, etc. y> 2 Arch. dép., Calvados, C 110. Cet édit fut enregistré au Parlement de Rouen le 10 avril 1787, et publié au bailliage et présidial de Caen le 5 septembre. 3 Ibid., C 6341. LE RÈGLEMENT DU 15 JUILLET 1787 23 l'autre du 5 août l\ sur leurs fonctions et leurs relations avec l'intendant ». Le Règlement du 15 juillet établissait trois sortes d'assemblées hiérarchiquement superposées municipales, d'élection et pro- vinciales. Des assemblées municipales, composées du seigneur et du curé, membres de droit, et de trois, six ou neuf membres, plus un syndic, choisis par les habitants de la paroisse, en raison du nombre des feux, devaient être formées dans toutes les com- munautés où il n'en existait pas encore. Neuf assemblées d'élec- tion » étaient créées dans la généralité » de Caen. Chaque élec- tion » était divisée en un certain nombre de circonscriptions électorales, ou arrondissements ; chaque arrondissement devait envoyer à l'assemblée d'élection quatre députés un du clergé, un de la noblesse et deux du Tiers état. L'élection de Caen, formée de 6 arrondissements, devait fournir 24 membres ; les huit autres élections, ne comprenant que 5 arrondissements, l'effectif de leurs assemblées respectives ne pouvait dépasser 20 membres. L'Assemblée provinciale, séant à Caen, chef-lieu de la géné- ralité, devait être composée de 40 membres, dont 20 ecclésias- tiques, seigneurs laïques ou gentilshommes les représentant, et 20 membres pris dans les députés des villes et des paroisses. Les neuf élections devaient collaborer à la composition de cette assemblée dans la proportion suivante 8 députés pour l'élection de Caen, 4 pour chacune des huit autres élections. Dans l'avenir, c'est le système électif qu'on devait employer au recrutement de ces trois espèces d'assemblées ; selon l'expres- sion de l'époque, elles seraient élémentaires » les unes des autres en d'autres termes, les membres de l'Assemblée provinciale devaient être choisis parmi ceux des assemblées d'élection, et ceux-ci parmi les membres des assemblées municipales. Toute- fois, pour mettre en mouvement la nouvelle institution, le roi s'était réservé le choix de la première moitié de l'Assemblée provinciale, lui laissant le soin de se compléter elle-même. Les premières assemblées d'élection devaient être formées d'après les mêmes principes la moitié des membres, à la nomination des députés provinciaux désignés par le roi, s'adjoindrait l'autre moitié par cooptation. Pour les assemblées municipales seules, 1 Arch. dép., Calvados, C 7610, reproduit dans le Procès-verbal de Basse-Nor- mandie, pages 46 à 91. 24 LE RÈGLEMENT DU 15 JUILLET 1787 le système électoral absolu était immédiatement mis en vigueur HY. On attendait du temps et de l'expérience le perfectionnement de l'institution. Ces diverses assemblées devaient avoir des réunions pério- diques. L'Assemblée provinciale, annuelle, aurait une session de trente jours au plus ; les sessions, également annuelles, des assemblées d'élection ne dépasseraient pas quinze jours. Dans l'intervalle de ces sessions des bureaux permanents, élus parmi les membres de ces diverses assemblées, et appelés Commissions intermédiaires » étaient chargés de la suite des affaires ils de- vaient rendre compte de leur mandat aux assemblées suivantes par l'organe des deux procureurs-syndics, agents d'exécution placés auprès de chacun d'eux. Les assemblées municipales, dont les réunions devaient être beaucoup plus fréquentes, n'a- vaient pas de commission intermédiaire et comme, seigneur et curé exceptés, elles étaient exclusivement issues du Tiers état, elles n'avaient qu'un seul syndic. Dans les assemblées munici- pales la majorité était partout acquise au Tiers état. Quant aux assemblées supérieures, on s'était préoccupé d'établir une pro- portion rigoureuse dans la répartition de leurs membres une moitié appartenait aux deux ordres privilégiés, clergé et noblesse ; l'autre moitié au Tiers état. Le maintien de deux procureurs- syndics rendait cette dualité plus sensible. Dans le préambule du Règlement, Louis XVI avait expressé- ment indiqué que les dispositions en étaient conformes à l'esprit qui avait dirigé les délibérations des Notables ». Le projet de Galonné, en effet, avait été modifié selon les vues des Notables, c'est-à-dire dans un sens rétrograde. La distinction des trois ordres, supprimée par ce ministre, avait été rétablie. C'était, sur un point capital, une concession faite aux ordres privilégiés. Les Notables avaient encore obtenu gain de cause sur un autre point la présidence des assemblées provinciales ou d'élection ne pou- vait être déférée qu'à un membre du clergé ou de la noblesse. Très explicite sur le mode de recrutement et la composition des assemblées, le Règlement du 15 juillet n'indiquait ni leurs fonc- tions ni les relations qu'elles devaient entretenir soit entre elles, soit avec l'intendant. Un règlement nouveau était rendu néces- saire par la juxtaposition de deux autorités sur un champ d'action où jusque-là il ne s'en était exercé qu'une seule. 1 Encore un clément non électif entrait-il dans leur composition avec les deux membres de droit représentant les deux premiers ordres, le seigneur et le curé. LE RÈGLEMENT DU 5 AOUT 1787 25 Avant l'institution de l'Assemblée provinciale, l'intendant de Caen était, on l'a vu, l'agent absolu du pouvoir central dans sa circonscription. Organe du Conseil d'Etat, dont il provoquait et préparait souvent les arrêts avant de les faire exécuter, il avait l'initiative dans la décision, l'indépendance dans l'action, l'administration sans contrôle et sans partage. Le jour où l'on plaçait près de lui, près de ses subordonnés les subdélégués et les syndics, toute une série d'assemblées pourvues d'attributions administratives, son autorité se trouvait singulièrement amoin- drie. Il fallait au moins déterminer avec précision les attributions de l'intendant et celles de l'administration nouvelle, essayer d'établir entre elles une démarcation assez nette, une barrière contre des empiétements possibles de part et d'autre, en un mot régler les relations réciproques des deux pouvoirs, de manière que la liberté qu'il convenait de laisser à l'action de chaque partie ne pût jamais altérer le concours et la surveillance mutuels qu'exigeait l'intérêt général de la province '-1 ». » Ce fut l'objet du Règlement du 5 août 1787. Son rédacteur devait avoir sous les yeux les lignes suivantes écrites en 1778 par Necker Il est sans doute des parties d'administration qui, tenant uniquement à la police, à l'ordre public, à l'exécution des ordres de Votre Majesté, ne peuvent jamais être partagées et doivent, par conséquent, reposer sur l'intendant seul ; mais il en est aussi, telles que la répartition et la levée des impositions, l'entretien et la construction des chemins, le choix des encourage- ments favorables au commerce, au travail en général et aux débouchés de la province en particulier qui, soumises à une marche plus lente et plus constante, peuvent être confiées préfé- rablement à une commission composée de propriétaires, en réser- vant à l'intendant l'importante fonction d'éclairer le gouverne- ment sur les différents règlements qui seraient proposés 2. » Telle fut précisément la division des attributions adoptée par le Règlement du 5 août. La répartition des divers impôts, la surveillance et la direction des travaux publics, les œuvres d'assis- tance, les encouragements à l'agriculture, à l'industrie et au commerce furent du ressort de l'Assemblée provinciale et de sa Commission intermédiaire. L'intendant, par rapport à l'Assem- blée, n'était plus que le commissaire du roi », c'est-à-dire un 1 Préambule du règlement du 5 août 1787. Procès-verbal de Basse-Normandie, p. 46. 2 Necker, Mémoire au Roi, p. 7 et 8. 26 DESIRS DE REFORME ADMINISTRATIVE haut fonctionnaire chargé de la police et de l'ordre public. Il est vrai qu'il avait toujours le contrôle sur les opérations de l'assem- blée, qu'il transmettait au pouvoir central les délibérations de celle-ci en les accompagnant de son avis, et qu'enfin il était seul, par l'apposition de son visa, à les rendre exécutoires après leur ratification. Cette réforme administrative qui ne devait être réalisée dans la plus grande partie de la France qu'en 1787, au seuil même de la Révolution, s'accomplissait bien tardivement. Il y avait trois quarts de siècle qu'on la désirait. Depuis le jour où Fénelon avait résumé ses griefs contre l'administration de Louis XIV par ce seul cri Plus d'intendants ! » et où Boulainvilliers, dans son Etat de la France» avait accusé ceux-ci d'être les instruments de la misère du peuple », les plaintes n'avaient pas cessé. Non seulement des publicistes et des économistes comme Saint- Simon m, le marquis de Mirabeau , mais les cours souveraines, les Parlements et les Cours des aides 4l, mais les hommes d'Etat, les ministres eux-mêmes, d' Argenson 5, Tur- got 6, Necker P, avaient courageusement dévoilé les abus de la 1 Saint-Simon, Ecrits inédits publiés par Faugère. Paris, 1880-1883, tome IV, p. 36. 2 Marquis de Mirabeau, L'Ami des hommes s. 1. 1755-1760, IVe partie Mémoire sur les Etals provinciaux. Etats provinciaux calqués sur ceux du Languedoc clergé, noblesse, députés des villes ; délibérations en commun et vote par tête. Ils ren- dront compte de leurs diverses opérations au roi par 1 intermédiaire des intendants, ses commissaires, et recevront par le même canal des ordres pour le bien-être géné- ral de l'Etat. » Une Commission intermédiaire provinciale formée des syndics géné- raux, dont un à la suite de la Cour. 3 Le Trosne, De l'Administration provinciale el de la réforme de l'Impôt. Paris, 1779. Projet d'administration provinciale lié à l'établissement d'un seul impôt, la taille. Communauté d'arrondissement canton. District. Généralité. Assemblées, conseils administratifs, dont membres à vie désignés par l'élection. Plus d'intendants; des députés du Conseil national font chaque année une inspection des généralités. 4 Voir notamment les Remontrances de la Cour des aides de Paris de 1775 Les Assemblées provinciales sont le vœu unanime de la nation. » 5 Marquis d'Argenson, Considérations sur le Gouvernement ancien et présent de la France. Amsterdam, 1781, in 8°. Le chapitre VII de cet ouvrage, intitulé Plan du gouvernement proposé pour la France, comprend 52 articles ; les articles 27 à 36 concernent les intendances et subdélégations, dont l'auteur réclamait l'augmentation lune intendance par 200 paroisses, une subdélégation par 20 paroisses. 6 Turgot, Mémoire sur les municipalités à établir en France rédigé en 1775. OEuvres posthumes de Turgot. Lausanne, 1787. Ancien intendant, Turgot dit que les intendants et leurs subdélégués ne peuvent guère connaître en détail les res- sources et besoins des peuples, d'où décisions arbitraires et abus. Projet de réforme radical. Non plus des Etats avec les trois ordres, mais des asssemblées de proprié- taires fonciers municipales, de ville et village, d'élection, provinciales, générale avec simple voix consultative, agents d'enquête éclairant le pouvoir central. Ce projet ne supprime pas les intendants et n'entame pas leur autorité. 7 Necker, Mémoire au Roi sur l'établissement des Assemblées provinciales, p. 170-184, et De l'Administration des Finances de la France, t. III, p. 379-385. CRITIQUES CONTRE LES INTENDANTS 27 centralisation excessive. Longtemps avant leur disparition, les intendants étaient condamnés. De tous leurs adversaires, Necker avait frappé le plus fort et il avait porté la première atteinte grave à leur autorité en établissant, les assemblées provinciales du Berry et de la Haute-Guyenne modèles de toutes les autres. A deux reprises différentes, dans son Mémoire au Roi » de 1778, et dans son Traité de l'administration des finances de la France » publié en 1784, il s'était élevé avec la plus grande sévérité contre les vices de l'institution des intendants. Les critiques si vives qu'il formulait, avec d'autres contem- porains *, contre leur mode de recrutement, leur ignoraance, leur ambition, leur esprit ombrageux, leur désintéressement des affaires de leur province étaient-elles justes en ce qui concerne l'intendance de Caen? Premier grief un long usage appelle uniquement aux intendances les maîtres des requêtes. Pourquoi s'entêter à les prendre dans ce corps? Leur état ne forme pas particulièrement à l'administration, car ils ne sont occupés que de rapporter au Conseil des requêtes en cassation ; ils sont donc fatalement, au début, des administrateurs inexpérimentés. Si encore on les choisissait avec discernement ! Mais, ou bien l'on suit aveuglément l'ordre du tableau, ou ce qui est pis encore, des considérations de faveur amènent de trop jeunes maîtres des requêtes à la tête des intendances'2. Ce reproche était fondé pour quelques-uns des derniers intendants de Caen. Fontette et Esmangart avaient été nommés à 34 ans, Feydeau de Brou à 22 ans, après six mois au plus de présence au Conseil d'Etat 3. 1 L'Espion déualisé attribué à Baudoin de Guémadeuc, ancien maître des requêtes, p. 216 et suiv. L'Espion anglais attribué à Pidansat de Mairobert, secré- taire des commandements du duc de Chartres, membre de l'Académie royale de Caen. Tome V, p. 96 et suiv. 2 L'Espion déualisé s'exprimait ainsi Depuis 1776 on a reçu au Conseil quel- ques fils de maîtres faits pour y être, mais qui sont de plats sujets. Voilà cependant la pépinière des 33 intendants du royaume On reçoit des fils de traitants, de maçons, de trésoriers, puis on veut que les peuples respectent ces va-nu-pieds... » p. 216-217. — L'Espion anglais, tome V, p. 96, est tout aussi dur à l'égard des inten- dants. Qu'est-ce qu'un commissaire départi ? Un jeune freluquet qui sort de Paris pour la première fois, ignorant souvent comment croît le blé, ayant presque tou- jours un intérêt contraire à celui de la province, courant la carrière de la fortune avide des grâces de la cour qu'il doit obtenir par le canal du ministre des finances... » 3 Jugement de l'Espion dévalisé sur Esmangart, p. 220-221 Esmangart, fils d'un valet de chambre du Palais Royal. . . était à Bordeaux d'où on l'a chassé en 1774 parce qu'il faisait l'important; il s'était voué en bas valet à Maupeou... Sa mère, qui était auprès de Madame de Chartres, a eu le crédit, par M. le duc d'Orléans, de placer ce beau fils à Bordeaux. Je vous demande ce qu'il a fait dans celte intendance 28 CRITIQUES CONTRE LES INTENDANTS Autre accusation, également motivée. Leur ambition les pousse à changer souvent de place, à considérer l'intendance qu'on leur a- confiée comme un simple échelon, comme un lieu de passage. Présumant qu'on avance plus par les intrigues et les relations que par le travail et l'étude, ils viennent souvent à Paris, se font remplacer par leurs secrétaires ou leurs subdélégués. Leur vie se passe à courir la France, d'une intendance à l'autre, et chacun de ces changements leur fait perdre, au grand détriment de leur province, le bénéfice des connaissances qu'ils ont acquises sur elle. Là encore Necker touchait juste, et il exprimait avec une ferme modération des vérités que les pamphlétaires du temps traduisaient avec plus de véhémence rK L'intendance de Caen avait eu à souffrir de cette instabilité de ses administrateurs. Du départ de Fontette 1775 jusqu'à la Révolution, elle compta trois intendants Esmangart 1775-1783, Feydeau de Brou 1783-1787 et Cordier de Launay. Esmangart arrivait de Bor- deaux et devait quitter Caen pour Lille. Feydeau de Brou avait déjà été, de 1776 à 1783, intendant de Bourges et de Dijon il cumulait, avec ses fonctions d'intendant, celles de directeur adjoint des économats, ayant l'expectative de cette charge possé- dée par son oncle Marville. Pendant plus de cinq ans, à la fin de l'administration de Fontette, l'intendance de Caen avait été à la merci d'un subdélégué général haineux et improbe, qui avait accumulé les fautes et les scandales 2, tandis que son chef demeu- rait à la cour comme chancelier de Monsieur. Aussi la Basse-Normandie, lasse d'éprouver les mauvais effets d'une telle administration, en attendait-elle avec impatience la réforme. Depuis assez longtemps déjà, elle avait joint ses récla- mations particulières à celles de l'opinion publique. Le vieux et ce qu'il peut faire à Caen ? » Jugement, du même libelle sur Feydeau de Brou, p. 218 De Brou, qui est à Dijon en 1780, n'a pas été six mois au Conseil. Richis- sime, beau-fils, petit-fils d'un garde des sceaux par intérim,, il méprise la place et l'état. » 1 Leur antipathie pour le travail ne leur permet pas d'acquérir des connais- sances personnelles, les provinces qu'ils régissent leur demeurent toujours égale- ment inconnues. . . » Lettre de M. à M. . . conseiller au Parlement, au sujet de ledit pour l'établissement des administrations provinciales 26 avril 1781. Ne connaissant point les lieux qu'il n'a jamais habités, où il ne réside que trois à quatre mois de l'année, l'intendant sera obligé de s'en rapporter à ses subdélé- gués pour la formation des mémoires envoyés à la cour. » L'Espion anglais, p. 97. 2 Arch. dép., Calvados, C 229. Note de d'Ormesson sur Malafait, subdélégué général de Caen. M. Malafait vante ses anciens services, mais il n'a pas travaillé gratis ; bien des gens seraient contents de se retirer comme lui, à la haine publique près. PROJET DE RÉFORME DE BALLEROY 29 marquis de Balleroy, exilé dans ses terres par l'influence de la duchesse de Châteauroux, avait occupé ses loisirs à tracer le plan d'une administration provinciale nouvelle *. Il était l'ami intime du marquis d'Argenson, avec qui il entretenait une active corres- pondance'2. C'est d'après ses conseils pressants, dit-on, que d'Argenson exposa un projet d'Assemblées provinciales dans ses Considérations sur le gouvernement ancien et présent de la France ». L'ouvrage parut en 1764, sept ans après la mort de d'Argenson. Balleroy aurait alors à nouveau songé à leur com- mun projet et l'aurait mis sous les yeux de Fontette, intendant de Caen. Celui-ci, paraît-il, le fit agréer au ministre, et fut chargé de dresser un plan qui, oublié dans les cartons du contrôle général par des intendants de finances hostiles à la réforme, devait tom- ber plus tard sous les yeux de Necker 3. Aucun document d'ar- chives ne m'a permis de contrôler la véracité de cette assertion. Il serait peut-être excessif de faire de Fontette un partisan résolu de l'établissement des assemblées provinciales. Il avait à un trop haut degré l'ambition du pouvoir pour travailler lui-même à sa propre déchéance. Il n'est pas invraisemblable toutefois d'affirmer qu'il n'approuvait pas en tout point l'ordre de choses établi à son époque, et qu'il désira une réforme administrative assez profonde. Il eut l'occasion d'exprimer ses vues à ce sujet . en 1763. Le contrôleur général Bertin, en vue d'assurer une répar- tition plus équitable de la taille, voulait alors procéder au dénom- brement et à l'estimation de tous les biens-fonds du royaume. En réponse au questionnaire du ministre, Fontette proposa un projet de cadastre, basé sur la division de la Normandie en ser- genteries 4. Les assemblées générales des communautés rurales, auxquelles prendraient part tous les contribuables, pauvres comme riches, roturiers comme nobles, tous citoyens », devaient élire chacune trois députés. Réunie au chef-lieu de la sergenterie, l'assemblée des députés paroissiaux devait nommer à son tour 3 commis- saires dont au moins un laboureur, chargés de désigner les experts et arpenteurs, de veiller à la rédaction du cadastre de la sergen- 1 E. de Barthélémy, Les Correspondants de la Marquise de Balleroy, tome I, notice préliminaire, p. 2 D'Argenson, Journal et Mémoires Société de l'Histoire de France, Paris, 1859- 1867, tome IV, p. 112, mentionne l'exil de Balleroy dans sa terre de Normandie. 3 Abbé Bidot, Histoire de Balleroy, p. 236. 4 Arch. dép., Calvados, C 4523. Voir F. Mourlot, L'Intendant Fontette,, p. 11-12. 30 PROJET DE RÉFORME DE FONTETTE terie et de régler toutes les contestations qui naîtraient à ce sujet. Les commissaires de la sergenterie, renouvelables tous les trois ans, seraient ainsi de véritables élus ». Représentants du peuple, ils jugeraient leurs pairs avec capacité, intégrité, désin- téressement ». Les sergenteries se grouperaient pour nommer trois commissaires par élection et une assemblée générale formée des 27 commissaires de l'intendance de Caen se réunirait chaque année, sous la présidence de l'intendant, pour faire connaître au roi les besoins de la province. Les circonstances ne permirent pas au ministre Bertin de réaliser ce projet. Le caractère normand s'accommoda fort bien de ce retard, tant les esprits étaient prévenus contre l'établissement d'un cadastre. Le projet de Fontette était en apparence, révolutionnaire ; c'était, avant la lettre, les Assemblées provinciales de la fin de l'ancien régime, et même les conseils généraux de notre France contemporaine. L'élection était le mode de recrutement adopté pour ces assem- blées ; le but qu'on leur assignait était la substitution d'estima- tions équitables et fermes à l'arbitraire et aux variations des anciennes évaluations fiscales. Toutefois l'intention de Fontette n'avait jamais été d'amoindrir le prestige et la puissance des intendants. L'originalité de son projet consistait dans la demande de suppression des tribunaux d'élection et des cours des aides, c'est-à-dire des juridictions anciennes encore capables de faire obstacle, sur le terrain de l'impôt, à l'extension continue des attributions de l'intendant. Fontette espérait sans aucun doute que les assemblées futures, purement consultatives, seraient des commissions fiscales entièrement dépendantes de leur président, le commissaire départi. Considérée sous ce point de vue, cette mesure de nivellement, qu'il conseillait au contrôleur général, n'eut visé qu'à affermir le despotisme du pouvoir central sur les ruines des dernières indépendances locales. La Lettre d'un habitant de C. . . Caen à M. de 1. L. de la Londe, maire de la ville de B Bayeux sur les administra- tions provinciales^ » révélait de tout autres préoccupations. A la nouvelle que Necker avait établi une Assemblée provinciale dans le Berry et s'apprêtait à en organiser une dans le Dauphiné, l'auteur anonyme de cette brochure invitait les gentilshommes de la Basse-Normandie à s'unir pour demander au Roi, par l'in- termédiaire du duc d'Harcourt, gouverneur de la province, à ce 1 Lellre sur les administrations provinciales. Amsterdam, 1779. En épigraphe, on lit Felices sua si bona noscunt, Nortnani. » DEMANDES D'ASSEMBLEES PROVINCIALES 31 moment en tournée dans le Bessin, l'établissement d'une ou de trois assemblées normandes, au chef-lieu de chaque intendance. Cet écrit marquait une véritable défiance vis-à-vis de l'intendant Esmangart Espère-t-on, y disait l'auteur, trouver plus d'amour pour la province, plus de connaissance de ses vrais intérêts dans la personne d'un commissaire du Conseil, que dans la réunion de ses propriétaires? Croit-on que ce commissaire étranger dans sa généralité en connaisse aussi bien les besoins et les ressources que les habitants? » Il est fort probable qu'à cette époque le duc d'Harcourt, le marquis de Blangy et d'autres grands seigneurs normands firent, sans succès d'ailleurs, de nouvelles démarches auprès du ministre pour obtenir l'extension à la Normandie du régime accordé au Berry tt. L'idée d'une réforme administrative n'en avait pas moins continué à faire son chemin et, en 1781, l'Académie royale des sciences, belles-lettres et arts de Rouen avait proposé pour sujet d'un de ses prix la question suivante Déterminer les avantages qui devraient résulter pour la Normandie de l'établissement d'une Assemblée provinciale » 2. En 1787, à l'Assemblée des notables, l'intendant de Rouen, Laurent de Villedeuil, qui allait devenir ministre, insista lui-même sur la nécessité d'établir des Assemblées provinciales, a ne dissi- mulant pas que la foule des occupations dont se trouvaient inves- tis les intendants les exposait à de fréquentes surprises » 3. A la même époque, un Bas-Normand saluait la prochaine réunion de ces assemblées comme devant affranchir la France de la tyran- nie ordinaire des intendants, subdélégués et autres suppôts 4V 1 On saisit la trace d'un mouvement général de la province de Normandie dans un extrait du registre de délibérations de l'hôtel de ville de Carentan, conservé aux archives du château d'Harcourt, carton 264. Par cette délibération, datée du 17 août 1779, Carentan déclare s'unir aux autres villes de la province pour obtenir les mêmes avantages que le Berry et le Dauphiné ». — En 1781, le comte de Faudoas, premier échevin noble de Caen, dénonçait en ces termes l'ambition de Duperré de Lisle, alors avocat du roi au bailliage et son concurrent à l'échevinat C'est un ambitieux, qui croit que les Assemblées provinciales auront lieu bientôt et compte y jouer un rôle intéressant ». Arch. dép., Calvados, C 1093. 2 Procès-verbal des séances de l'Assemblée provinciale de Haute-Normandie, séance du 11 décembre 1787 ; discours de Bayeux, directeur de l'Académie, secrétaire de rassemblée. 3 Nouvelles à la main, du 19 mars 1787. Journal manuscrit donnant au vicomte d'Hautefeuille, brigadier des armées du Boi, toutes les nouvelles politiques et autres de Versailles et de Paris ; du 23 janvier 1787 au 20 février 1788 Arch. dép., Calvados, E, famille d'Hautefeuille. 4 Lettre d'un candidat à Larcher de la Londe, maire de Bayeux, du 25 avril 1787. Citée dans Pezet, Bayeux à la fin du XVIIIe siècle, p. 78.. note 1. CARACTÈRE FISCAL DE LA RÉFORME 32 Ainsi, en Normandie, l'esprit public était favorable à cette institution. On y voyait un heureux essai de décentralisation administrative ; on en attendait la résurrection des anciennes libertés provinciales, dont l'exercice était depuis si longtemps suspendu. A la considérer en effet dans ses traits généraux, l'Assemblée provinciale de Caen semblait une satisfaction donnée à l'opinion publique. Son titre même révélait les préoccupations qui avaient dû guider le roi et le gouvernement. Par une habile tactique, on avait effacé les anciens noms des intendances, qui rappelaient une administration détestée, pour lui substituer des dénomi- nations provinciales. Aux anciennes généralités de Rouen, de Caen et d'Alençon, succédaient des ressorts administratifs dont les noms faisaient vibrer plus d'un cœur provinces de haute, basse et moyenne Normandie. Ce nom de Normandie, systéma- tiquement écarté du langage officiel et administratif par le despo- tisme de Louis XIV, y réapparaissait victorieusement comme une formule magique annonçant le réveil du vieux duché et le retour de ses libertés. L'étiquette nouvelle semblait prédire, à des esprits superficiels, l'avènement du régime d'autonomie tant convoité. Mais, à y regarder de plus près, l'illusion ne pouvait guère durer. Calonne, le ministre inspirateur de l'édit de 1787 *, avait, dans l'établissement des Assemblées provinciales, pour- suivi surtout un but fiscal. A ses yeux, l'association des provinces à l'administration était un expédient devenu nécessaire et un moyen efficace de parer au déficit des finances. Il faut, disait-il, faire participer les contribuables à l'assiette de leurs contribu- tions pour les leur faire paraître plus supportables et plus justes. » En réalité, l'ancienne province de Normandie restait désarti- culée, dépecée en trois tronçons, et si on lui accordait un sem- blant de décentralisation et d'institutions libres, des espèces d'assemblées délibérantes, c'était uniquement pour en tirer des subsides dont la royauté avait besoin, et qu'elle aurait voulu obtenir sans faire appel aux Etats généraux. Il y avait donc, dès le début, un désaccord complet entre les intentions du Roi et les espérances de la province, et la réforme de 1787 allait apparaître bientôt comme une demi-mesure, impuissante à satisfaire les exigences de l'opinion publique et à produire les effets qu'on s'en était promis. 1 Cet édit avait été promulgué, après la chute de Calonne, par son successeur Brienne. RECRUTEMENT DE L'ASSEMBLEE PROVINCIALE 33 L'édit de juin 1787 fut enregistré sans résistance au Parlement de Rouen, le 10 août suivant ; cette cour se plaignit plus tard, il est vrai, que l'enregistrement avait été surpris pendant que beaucoup de ses membres étaient en vacances et dans leurs terres. Dès le début, elle garda une certaine réserve, considérant sans doute cette mesure comme un acheminement vers les Etats provinciaux, dont elle ne cessait de réclamer le rétablissement 1. L'Assemblée provinciale de Basse-Normandie pouvait dès lors s'organiser. Il est incontestable que l'intendant Cordier de Launay $ et ses subdélégués ont pris une part indirecte, mais réelle, à sa formation. Le 17 juin 1787, le secrétaire de l'inten- dance priait les subdélégués de lui adresser une liste des personnes de leur ressort qu'ils jugeraient, en leur âme et conscience, être les plus proposables, dans les trois ordres, pour former l'Assem- blée provinciale ». On leur recommandait d'avoir égard à la propriété, à la considération dont la personne jouissait dans la région, au caractère moral qui la distinguait ». D'autres listes leur étaient demandées en vue de la constitution des assemblées d'élection on les invitait à répartir leurs choix sur les différents points des élections, destinées à être divisées en cinq ou six arrondissements ou districts, et à ne proposer pour la première fois que des hommes d'extraction 3 ». Ces diverses listes durent guider le choix du roi dans la désignation de la première moitié de l'Assemblée provinciale, et plus tard, le choix de ces membres eux-mêmes appelés, dans les derniers jours d'août, à compléter leur nombre et à former le noyau des assemblées d'élection. Les subdélégués ont aussi adressé une liste de candidats à la prési- dence des assemblées d'élection et parfois même fixé les chefs- lieux des districts entre lesquels les élections devaient être par- tagées u. Ce fut le 20 août que se réunit, à l'abbaye de Saint-Etienne de Caen, l'assemblée préliminaire, sur la convocation de son prési- dent, le duc de Coigny. Marie-François-Henri de Franquetot, duc de Coigny, pair de France, lieutenant général des armées du roi, grand bailli et gouverneur des ville et château de Caen, des 1 Floquet, Histoire du Parlement de Normandie, t. VII, p. 100-101. 2 Arch. dép., Calvados, C 6343. L'intendant eut, en juillet 1787, plusieurs entre- vues à ce sujet à Versailles, avec Brienne et Villedeuil. 3 Ibid. Listes établies par les subdélégués pour la formation de l'Assemblée provinciale et des assemblées d'élection. 4 Tels Robillard pour l'élection de Saint-Lô, et de la Roque pour celle de Moi- tain. Ibid., C GJ43. 'M COMPOSITION DE L'ASSEMBLEE PRÉLIMINAIRE ville et citadelle de Cambrai, bailli et capitaine des chasses de la Varenne du Louvre, était le petit-fils du célèbre maréchal de CôignyO. Sa famille était, avec celle des d'Harcourt, une des plus illustres de Normandie. La terre de Coigny, située dans le Cotentin, et qui rapportait, dit-on, livres de rente, venait d'être érigée cette année même en duché-pairie. Coigny, qui avait fait la campagne d'Allemagne pendant la guerre de Sept Ans, sous le maréchal d'Estrées, avait cinquante ans en 1787. Il jouissait d'un grand crédit à la cour, où il était un des familiers les plus écoutés de la reine Marie- Antoinette ; il était aussi connu par sa liaison avec la princesse de Guéménée. Sa situai ion bril- lante à Versailles, l'illustration de son nom, sa qualité de grand propriétaire bas-normand l'avaient désigné au choix du roi comme président de l'Assemblée provinciale de Caen. Avec lui, dix-neuf autres membres, nommés aussi par le roi, devaient composer l'assemblée préliminaire. C'étaient, dans l'ordre du clergé, les trois évêques de Basse-Normandie le vieil évêque deBayeux, du Cheylus, aumônier de la comtesse d'Artois, prélat de cour, aimant la représentation et le jeu 2, Tévêque de Coutances, Talaru de Chalmazel ;*>, et celui d'Avranches, Godard deBelbœuf, de vieille famille normande, frère cadet du procureur général au Parlement de Rouen4 ; deux autres membres du haut clergé, l'abbé de Cussy, archidiacre du Cotentin'5 et dom Verdier, prieur de l'abbaye de Savigny en Mortainais. Les repré- sentants de la noblesse étaient, outre Coigny, le marquis d'Héricy, lieutenant général des armées, dont le château de Vaussieux avait été le quartier général du camp d'invasion de l'Angleterre 1 Armand Tirette, Recueil de Documents, t. II, p. 99-100. .' Dominique de Cheylus, né à Avignon en 1719 ; successivement vicaire général , I. I, p. 510. —Belbœuf émigra pendant la Révolu- tion el mourut en Angleterre en 1868. La même année mourait aussi en Angleterre l'évêque de Coutances. Quanl à >\t\ Cheylus, il était mort en 1797 a Jersey. 5 Moii a Paris sur l'écliafaud, le thermidor an II. Wallon, Histoire du Tribunal révolutionnaire, etc., t. V, p. 70 et 111. FORMATION COMPLEMENTAIRE DE l\\SSEMBLÉE 35 formé en 1778 * ; le comte de Balleroy, lieutenant général lui aussi, fils du vainqueur de Lawfeld, du vieil ami de d'Argenson 2 ; le marquis de Canisy, maréchal de camp ; et enfin le marquis de Chiffrevast 3. Le Tiers état avait fourni dix membres un riche industriel de religion protestante, Massieu, seigneur de Saint- Manvieu, et neuf maires des principales villes de la généralité le comte de Vendœuvre, maire de Caen, qui avait assisté à l'Assem- blée des notables ; le marquis de Colleville, maire de Valognes ; Larcher de la Londe, maire de Bayeux ; Vaufleury de Saint-Cyr, maire de Mortain ; de Bacilly, maire de Saint-Lô ; Desplanques du Mesnil, maire de Carentan ; Frémin de Beaumont, maire de Coutances ; Meslé, maire d'Avranches, et Mauduit, maire de Vire W. L'assemblée préliminaire, que l'intendant vint ouvrir le 20 août en sa qualité de commissaire départi, dans la salle du chapitre de l'abbaye Saint-Etienne, dura cinq jours. Son champ d'action était nettement déterminé par le Règlement du 15 juillet. Elle devait se compléter, nommer son greffier, sa commission inter- médiaire, ses procureurs-syndics, puis former le noyau des neuf assemblées d'élection. Pour l'aider dans la première de ces opérations, l'assemblée eut sous les yeux les listes dressées par les subdélégués 5. Les cinq membres qu'elle s'adjoignit dans l'ordre du clergé furent cinq abbés ou prieurs dom Mesnilgrancl, prieur de l'abbaye Saint-Etienne ; l'abbé Bruzeau, prieur de Tailleville ; l'abbé de Champigny, abbé de Mondaye ; de Chiffrevast, abbé de Saint- Sever, frère du marquis et Hardy, prieur d'Englesqueville-Laître. Dans l'ordre de la noblesse, les choix tombèrent sur le marquis d'Hautefeuille, seigneur de Louvigny, maréchal de camp, le 1 Pezet, Bayeux à la fin du XVIIIe siècle, p. 29 et suiv. 2 Il s'était distingué au combat de Saint-Cast pendant la guerre de Sept Ans, et avait, servi en Corse sous le comte de Vaux. II mourut sur l'échafaud le 6 germinal an II. Arch. nat., W 340. 3 Mort à Paris sur l'échafaud., le 18 messidor an II. Arch. nal.. W 409. 4 Une première liste, conservée dans les bureaux de l'intendance, et qui date de juillet 1787, proposait pour le Tiers état dix habitants de Caen lieutenant général du bailliage, lieutenant général de police, lieutenant particulier des r;i\i\ et forêts, procureur du roi de l'amirauté, deux trésoriers de France, un échevin et trois négo- ciants;. Cette omission systématique de députés étrangers à Caen lit sans doute rejeter la proposition, mais le seul fait qu'un tel exclusivisme ait pu se manifester, témoigne du médiocre intérêt que l'intendant prenait à la représentation réelle de la province. 5 Les fréquentes coïncidences que l'on constate entre les propositions des subdé- légués et les choix faits par l'assemblée semblent le prouver 36 RÉPARTITION GÉOGRAPHIQUE DE SES MEMBRES comte Louis de Vassy, seigneur de Brecey, mestre de camp ; deux capitaines de dragons, le comte de Sébeville et le marquis du Quesnoy ; de Montfarville, seigneur du Mesnil-Veneron, gen- tilhomme fermier de l'élection de Saint-Lô. Les dix associés rangés dans le Tiers état furent Burdelot, maire et vicomte de Pontorson ; Flaust, lieutenant général du bailliage de Vire ; deux lieutenants particuliers de bailliages, Daigremont à Caen, et Hervieu de Pont-Louis à Carentan ; deux avocats du roi aux bailliages de Saint-Lô et de Mortain, Bernard et Levesque ; Ga- briel de Cussy, ex-directeur de la Monnaie de Caen ; de la Lande du Mesnildrey, ancien avocat au présidial de Coutances ; Le Véel, ancien notaire, bourgeois de Valognes et Faucon, bon proprié- taire et négociant à Isigny ». La répartition géographique des membres de l'Assemblée provinciale sur le territoire de la Basse-Normandie fut à peu près conforme au Règlement du 15 juillet. En effet l'élection de Caen fournit 8 députés ; les autres élections en eurent presque toutes quatre C. Ce qui est important à constater, c'est que, pour des raisons de fortune, des hommes de valeur furent, à cause de leur éloignement de Caen, écartés à priori de l'assem- blée ; certains subdélégués ne les firent figurer sur leurs listes que pour déplorer l'impuissance où la médiocrité de leurs ressources les mettait d'être utiles à leurs concitoyens 2. L'assemblée a dû y perdre des lumières assez précieuses. Autre remarque intéres- sante plusieurs des membres proposés par les subdélégués comme faisant partie de la noblesse furent inscrits dans le Tiers état tels Mauduit, de Colleville, Frémin de Beaumont, Leforestier de Vendœuvre. C'était en vertu de leurs fonctions, et non de leur qualité personnelle, que ces derniers, chefs de quatre munici- palités du ressort provincial, avaient été appelés à l'assemblée ; et c'est leur titre de maires qui les fit ranger dans le Tiers état, comme députés des villes 3. 1 L'élection de Baveux en comptait cinq, et celle de Saint-Lô trois seulement ; l'évêque de Baveux fut considéré fictivement comme député de cette dernière élection. 2 Arch. dép., Calvados, C G343. Notes de Bobillard, subdélégué le Saint-Lô, sur Le Menuet de la Jugannière Esprit très pénétrant, bon citoyen, avocat renommé, jurisconsulte instruit, mais ayant besoin de son état pour soutenir sa maison. » Sur Le Tellier du Hutrel Elocution séduisante et connaissances fort étendues,... pas assez riche pour rester longtemps à Caen, et cependant plus fait que tout autre pour Jigurer dans une Assemblée provinciale. » 3 Ce fut pour la même raison que le comte de Vendœuvre, maire de Caen, et son successeur, Ménage de Cagny, furent appelés, en qualité de membres du Tiers état, le premier, à l'assemblée des Notables de 1787, le second à celle de 1788. Arch. nat., C 1 et 'J. LEUR RÉPARTITION SOCIALE 37 Si l'Assemblée provinciale, ainsi constituée, représentait assez exactement les diverses régions de la Basse-Normandie, elle était loin d'en représenter toutes les classes. La répartition sociale de ses membres lui donnait un caractère nettement aristocratique. Le clergé n'y comptait que ses plus hauts dignitaires et on y eut vainement cherché un desservant rural. La noblesse d'épée seule figurait dans le second ordre. Quant au Tiers état, il comprenait des magistrats municipaux ou des officiers de justice ayant presque tous la noblesse de robe, de riches négociants ou proprié- taires, et pas un laboureur venu de la campagne l1. La classe des paysans était systématiquement tenue à l'écart l'Assemblée provinciale était à proprement parler une assemblée de privilé- giés. Les vues de l'auteur de la lettre de 1779 sur les administrations provinciales semblaient se réaliser la noblesse et la haute bour- geosiie allaient administrer seules. Par le fait de sa composition, due à son mode originel de recrutement, l'Assemblée provinciale, qui ne tenait pas ses pouvoirs de l'investiture populaire, n'allait- elle pas exciter la défiance des populations et apparaître à priori, comme une simple commission d'agents fiscaux, comme un instrument ingénieusement placé entre les mains du roi pour aggraver impunément les charges publiques ? Après avoir choisi pour secrétaire-greffier Alexandre, professeur à la Faculté de droit, l'assemblée procéda à la nomination de ses deux procureurs-syndics et de sa Commission intermédiaire. Les deux syndics élus furent, pour le clergé et la noblesse le comte de Balleroy et, pour le Tiers état, Le Telier de Vauville, président trésorier de France au bureau des finances. La Commission intermédiaire comprit, outre son président-né, le duc de Coigny, et les deux syndics, quatre membres un du clergé, l'évêque de Coutances ; un de la noblesse, le comte de Yassy et deux du Tiers état, Daigremont, lieutenant particulier au bailliage de Caen et La Lande du Ménildrey 2, ancien avocat au présidial de Cou- tances. 1 L'assertion de Karéiëv sur la députation des habitants de la campagne aux Assemblées provinciales est inexacte pour la généralité de Caen. Karéiëv, La Ques- tion paysanne dans le dernier quart du XVIIIe siècle, p. 114. Cf. Arch. coram., Caen, carton 20. Lettre de M. de Chazot, du 18 octobre 1788, adressant à l'assemblée du département de Caen, dont il était membre, ses plaintes sur l'absence de représen- tation des campagnes à l'Assemblée provinciale de Caen. 2 Ce dernier, malade, fut remplacé par Hervieu de Pont-Louis, lieutenant parti- culier au bailliage de Carentan. 38 NOYAU DES ASSEMBLÉES D'ÉLECTION L'assemblée s'occupa ensuite dé désigner les membres qui devaient commencer à former les assemblées d'élection, convo- quées pour le mois d'octobre. 11 devait y avoir neuf assemblées dans son ressort administratif. Le roi avait déjà choisi leurs présidents, tous dans les deux premiers ordres *. L'assemblée d'élection de Caen devait comprendre 24 membres; celles des huil autres, chacune 20 membres. C'était au total un nombre de 83 membres i '.- que l'Assemblée était appelée à choisir, parmi les listes de notabilités locales mises sous ses yeux. En général, on tira du clergé les membres les plus influents par leur origine 3>, leur situation 4 ou leur culture b; la noblesse fournit des seigneurs de vieille famille, résidant pour la plupart dans leurs terres 6 ; les députes du Tiers état furent pris parmi les officiers des justices royales et seigneuriales 7, les officiers municipaux des villes8', les avocats °', notaires^10 et médecins'11'. On y fit entrer également des négociants 12, des propriétaires cultivateurs 13, 1 Noms des présidents par élection Caen, Méry de Berthenonville, doyen du Sépulcre ; Bayeux l'évêque; Vire lu marquis de Ménîlïet ; Saint-Lô l'abbé de Chiffrevast ; Carentan le comte d'OsseviHe ; Coutances le marquis de Vassy; Valognes le comte d'Octeville ; Avranches l'évêque ; M or tain le comte de Sour- de val. 2 Sur 92 membres qui devaient composer la première moitié des assemblées d 'é- lection, les 9 présidents étaient déjà nommés. 3 L'abbé de Cairon, conseiller au Parlement de Rouen ; l'abbé de la Bazonnière, curé de Rampan l'abbé de Beaudré, chanoine ; l'abbé de Cheux, curé de Vaudry ; I abbé de Vaulleury, curé de Barentin. 4 L'abbé de Pradelle, vicaire général de Baveux ; Brigeat, vicaire général d Avranches ; l'abbé 1. Les trois autres ne comptaient 1 Sur la procédure en matière de demandes de décharge d'impôts. 2 Procès-verbal de Basse-Normandie, p. 18 à 9!. 3 Trace de l'envoi de ces instructions au premier calepin pour le départ des lettres du contrôle général », 1787. Arch. nat., H1 1G05. 4 Philippe Lamare, secrétaire de dom Goujet, bénédictin de l'abbaye de Fonte- nay, donne, dans son Mémorial, des détails assez intéressants sur cette cérémonie. La musique du régiment de Vivarais s'y lit entendre. Le duc de Coigny, en man- teau court, de velours noir, ayant un panache blanc à son chapeau, se plaça au bas du chœur, à la première place à droite dans les hautes stalles . L'assemblée dîna chez le comte de Balleioy. Mémorial, etc., édité par G. Vanel, p. 242-243. & Autres membres abbé de Cussy, marquis de Hautefeuille, marquis du Ques- noy, de la Londe, Hervieu de Pont-Louis, Lévesque et Burdelot. '»'? BUREAUX ET PROGRAMME DE L'ASSEMBLEE que huit membres ; celui des fonds et de la comptabilité fut présidé par le marquis d'IIéricy i1 ; celui de l'agriculture, com- merce et bien public, par l'évêque d'Avranches ; le 4 décembre, sur les impositions parti- culières à la généralité, imposition territoriale, impôt des bâti- ments de justice, et sur la prestation représentative de la cor- vée {. Le bureau du bien public, les 23 et 24 novembre, fit un long rapport sur le Règlement du 15 juillet 1787 et sur l'adminis- tration de la province'1. Celui des fonds et de la comptabilité, dans une des dernières séances, traita la question importante des frais qu'allait entraîner le nouveau régime administratif r,>. A la suite de ces rapports, l'Assemblée provinciale émit des vœux, élabora des projets de règlement, rédigea des arrêtés. Elle entendit aussi des mémoires, émanant soit de ses membres, soit de particuliers, qui vinrent utilement seconder ses travaux, et éclairèrent plus d'une de ses décisions. Passons rapidement en revue les uns et les autres, en les groupant sous trois principaux chefs régime des impositions ; des travaux publics ; bien public. 1° Impositions. — Les arrêtés d'ordre financier pris par l'As- semblée provinciale eurent pour objet les vingtièmes, l'impôt territorial, la corvée et la taille. L'augmentation des vingtièmes, imposée par le roi sous forme d'abonnement perpétuel, fut, on l'a vu, acceptée de mauvais gré par l'Assemblée, qui dut borner ses efforts à solliciter une remise. Elle avait cédé sur ce point pour ne pas exposer les contribuables à des recherches et vérifi- cations inquiétantes ». Mais pour marquer sa défiance et protester contre les taxations des contrôleurs, elle décida que la répartition de cet impôt serait assise sur la division foncière des paroisses en 1756, antérieure aux vérifications générales dont elle contes- tait l'exactitude. L'imposition territoriale était une charge particulière à la généralité de Gaen. Etablie en 1769 pour divers besoins locaux 6, 1 Procès-verbal de Basse-Normandie, p. 220-228. 2 Ces rapports ne sont pas insérés an procès-verbal. On les trouve manuscrits aux Arch. dép., Calvados, C 7618. i,3 Procès-verbal de Basse-Normandie, p. 279, 281, 282-286. 4 Ibid., p. 163-189. 5 Ibid., p. 315-321. 6 Levée d'abord pour les travaux du port de Granville, puis appliquée au rem- boursement des offices supprimés du Parlement de Rouen et à l'achèvement de la maison de force de Beaulieu ; consacrée en partie aux grandes routes depuis 1772. Arch. dép., Calvados, C 3124. PRESTATION DE LÀ CORVEE ET TAILLE C>7 elle s'élevait en 1787 à la somme de livres. Cette somme était alors affectée, en partie aux travaux de redressement de l'Orne, en partie au paiement des indemnités des terrains expro- priés pour cette entreprise ou pour le tracé des grandes routes. Une imposition dite des bâtiments de justice, taxe de livres levée depuis 1782, venait s'y adjoindre et devait servir aux réparations des auditoires et prisons de la généralité l. Ces deux impôts étaient assis au marc la livre des vingtièmes. L'Assemblée provinciale résolut de ne rien changer à leur assiette et garda l'ancien usage. Une protestation s'éleva dans son sein à propos de ce dernier impôt. Les députés de Mortain demandèrent que leur élection en fut affranchie, parce que le duc d'Orléans, comte de Mortain, pourvoyait seul à l'entretien des locaux de justice de sa seigneurie, et qu'elle n'était point ainsi à charge à la géné- ralité Pi La prestation de la corvée était, depuis l'intendant Fontette, substituée à la corvée en nature dans la généralité de Caen ; c'était en 1787 une taxe de livres, ajoutée au brevet général de la taille. Il y avait alors conflit à son sujet entre le ministère et le Parlement de Rouen. Celui-ci, en enregistrant la déclaration du 27 juin 1787, avait fait ses réserves et réduit le montant légitime de cette taxe à livres 3. C'était une différence de livres en faveur de la généralité. L'Assem- blée provinciale, appelée à prendre parti dans la question, hésita. Elle aurait désiré payer la moins forte somme, mais elle craignit de manquer à quelques convenances et de compromettre quel- ques intérêts, et elle crut prudent de s'en rapporter à la bienfai- sance du Roi» livres ; ruais les comptes avaient été arrêtés depuis plusieurs années depuis 1782 dans l'élection le Saint-Lô. Procès- verbal de Basse-Normandie, p. 123, INTENTIONS REFORMATRICES DE LASSEMBLÉE 71 propriétaires étaient seuls à en souffrir les plus aisés et les plus influents avaient pu se faire indemniser les premiers {}, Réseau routier incomplet, nombreuses voies amorcées et non terminées, propriétés éventrées, dettes criardes tout le mal fait sans aucun avantage correspondant », telle était en matière de travaux publics, la situation léguée par l'ancienne administration à l'Assemblée provinciale de Basse-Normandie. Cette situation était des plus périlleuses, car elle laissait l'Assemblée aux prises avec deux nécessités contradictoires d'une part, le besoin qui se faisait chaque jour plus impérieux de communications et de débouchés nouveaux, d'autre part, l'obligation de strictes écono- mies, imposée par la pénurie des ressources, et l'impossibilité de demander davantage à des impositions déjà trop accablantes. Pour compliquer les difficultés, l'Assemblée provinciale, dès le début de son administration, se trouvait en présence d'un fait accompli, d'une mesure qui lui liait les mains, paralysait son activité, annihilait ses intentions réformatrices. Peu de mois avant sa réunion, en vertu d'un arrêt du Conseil du 12 mars 1787, quarante-quatre baux d'entretien ou d'ouvrages neufs avaient été passés avec trente entrepreneurs, engageant des travaux jusqu'au 1er avril 1790, et une dépense de 1,911,000 livres 2. N'y avait-il pas contradiction entre les pouvoirs qu'on semblait vouloir donner à l'Assemblée et l'inaction forcée où ces engage- ments allaient la laisser pendant trois ans ? Devait-elle assister, impuissante, à l'accroissement de la dette publique, dont on la rendrait peut-être responsable ? L'Assemblée provinciale prit résolument le parti que les circonstances lui imposaient, et une série d'arrêtés rendus du 21 novembre au 5 décembre 1787 tracèrent son programme d'administration en matière de travaux publics. Protestant tout d'abord contre l'inaction absolue où la laisse- rait l'exécution sous ses yeux de travaux qu'elle n'aurait pas ordonnés », elle demanda à l'unanimité la résiliation des quarante- quatre adjudications d'avril r3K Prenant en main la cause des 1 De nombreuses réclamations se produisirent à ce sujet pendant la tenue des assemblées de département en 1788 Ex ;i Coutances. Arcli. dép., Calvados, C 7699 et pendant la convocation des Etats généraux, en 1789; plaintes de nombreux cahiers Breuville, Equeurdreville, Martinvast, Saint-Christophe-du-Foc, Saint-Sauvcur-le- Vicomte cahier de l'assemblée préléminaire du bailliage, etc.. 2 Procès-verbal de Basse-Normandie, p. 125. 3 Ibid., p. 158-162. 72 RÈGLEMENTS SUR LES ROUTES ET ATELIERS DE CHARITÉ propriétaires dépossédés qui, depuis plus do sept ans, attendaient ' l'effet des promesses dont on n'avait cessé de les flatter, et n'a- vaient pu toucher la somme la plus modique», elle déclara surseoir à toute confection nouvelle de routes, sauf extrême urgence, jusqu'à l'acquittement complet d'une dette sacrée pour la province » '. Elle chargea le duc de Coigny, son président, de demander au Roi une forte subvention, pour n'être point obligée à effectuer ce rachat sur les fonds de la corvée, alimentés par les seuls roturiers *. Elle accepta la contribution volontaire, offerte au nom du clergé et de la noblesse, d'une somme annuelle de 50,000 livres jusqu'à extinction de la dette 3. Elle rédigea un Règlement des travaux publics en trente-six articles, calqué sur celui du Berry et visant à l'achèvement progressif et méthodique du réseau routier par l'exécution de travaux dont la mesure serait graduée sur l'échelle des ressources et des besoins de la généralité » 4. La vicinalité rurale fut aussi l'objet de ses préoccupations. Après la lecture du remarquable mémoire du comte de Montfar- ville sur le mauvais état des chemins vicinaux ,5>, elle vota en principe la construction d'un chemin dans chaque paroisse, établi et entretenu aux frais de toute la communauté et non plus des seuls bordiers. Elle adopta un règlement en vingt-sept articles sur les ateliers de charité, qui répartissait ces derniers plus équita- blement entre les neuf élections de la généralité, neuf filles également chéries », qui introduisait une économie plus grande dans leur régie, et qui devait servir de règle et de loi immuable» pour les communautés 6. L'Assemblée provinciale porta enfin son attention sur les bâti- ments de justice de la généralité, auditoires et prisons. Ils méri- taient fort peu leur nom de palais de justice. La plupart d'entre eux, vieilles tours en ruines ou logis délabrés, étaient dans un état effrayant de vétusté et d'insalubrité. L'imposition spéciale de 50,000 livres, levée annuellement depuis 1782 sur tous les contri- buables de la généralité, n'avait profité qu'à la ville de Caen, où l'on avait fait de vastes constructions pour le Bailliage, le bureau 1 Procès-verbal de liasse-Normandie, p. -219. 2 Ibid., ibid. 3 Ibid., p. >87. 4 Ibid., p. 302-312. 5 Ibid., p. 229-235. 6 Ibid., p. 220-228. LES prisons, l'agriculture 73 des finances, les prisons civiles et criminelles T. Beaucoup de chefs-lieux judiciaires de la Basse-Normandie, Bayeux, Vire, Périers, Cérences, Coutances, Saint-Sauveur-le- Vicomte, Tori- gni se plaignaient avec raison du mauvais état des prisons, qui menaçaient ruine et qui laissaient trop souvent s'évader les détenus 2. La plus triste de ces geôles était celle d'Avran- ches ; le lieutenant général du bailliage d'Avranches, Tes- nière de Brémesnil, dépeignit à ses collègues de l'Assemblée provinciale le délabrement de cette vieille bâtisse, taillée dans les fortifications, véritable cloaque, où étaient entassés quarante prisonniers des deux sexes, foyer de toutes les maladies conta- gieuses et de toutes les lèpres morales. Son mémoire émut vivement l'Assemblée, qui ordonna la reconstruction immé- diate des bâtiments de justice d'Avranches et affecta une somme annuelle de livres pour les réparations urgentes des autres juridictions 3. 3° Bien public. — Nombre d'objets, confondus sous cette dénomination, donnèrent lieu à d'intéressants mémoires, lus pendant les trois derniers jours de la session, et dont la plupart gisent inédits dans les cartons de la Commission intermédiaire provinciale 4. Leur thème général était le développement écono- mique du pays, l'hygiène et l'assistance publique. Les intérêts de l'agriculture furent défendus par Montfarvillc, qui demanda le dessèchement des marais, le défrichement des landes et terres incultes, trop longtemps abandonnées à d'indi- gnes concessionnaires, spoliateurs de la région ^5. Pour assurer la mise en valeur rationnelle du sol, il préconisait le partage des biens communaux, après entente entre les seigneurs et les habitants, trop souvent divisés sur la question de propriété 6. L'industrie eut aussi ses protecteurs Flaust exposa la triste 1 Arch. dép., Calvados, C 1296-1302, 6496, 6755, 6856. — Ces bâtiments servent encore aujourd'hui de Palais de Justice. 2 Ibid., C 1286-1320, 6753, 6770. 3 Procès-verbal de Basse-Normandie, p. 237. 4 Arch. dép., Calvados, C 7618. 5 Les plus connus de ces spéculateurs en Basse-Normandie avaient été Boullon- morange, Polignac et d'Aspect. Ibid., C 4195 et suiv. 6 Les exigences croissantes de nombreux seigneurs, revendiquant la propriété exclusive des communaux et enlevant les droits d'usage aux habitants, sont attestées par les plaintes des cahiers de 1789 notamment du bailliage de Valognes et par les pétitions adressées au Comité des droits féodaux pétitions de Carneville, Haute- ville-sur-Mer, Agon, Bricquebec, etc.. Arch. nat, Dxiv 5. 74 LINDUSTRIE ET LE COMMERCE situation de la manufacture de draps do Vire, alors en complète décadence U» Longuet, négociant de Gaen et membre de l' Assem- blée d'élection de Gaen, fit présenter à l'Assemblée provinciale un projet sur la fabrication des toiles façon de Suisse, garats, guinées, taffetas, etc., et sur l'établissement d'une chapellerie économique ; il proposa l'introduction du machinisme en Nor- mandie pour lutter avantageusement contre la concurrence anglaise 'l>. Gaugain l'aîné, riche entrepreneur de routes, proposa de substituer la tourbe, comme nouveau combustible, au bois de chauffage, dont la Basse-Normandie s'appauvrissait de plus en plus, ou au charbon de terre, assez difficile à trouver et d'impor- tation fort coûteuse i{. Le commerce de la Basse-Normandie vivait surtout de l'exportation des produits agricoles et des ressources fournies par le voisinage de la mer. Faucon, négociant d'Isigny, se plaignit de la faveur qu'on accordait aux beurres de Grournay sur le marché de Paris, au détriment des beurres frais de sa région qui étaient cependant de meilleure qualité 4 ; il demanda l'extension du nombre des jours de fabrication du sel dans les 1 Arc h- . En raison de l'extension croissante de la besogne administra- tive, l'Assemblée demanda l'adjonction de quatre membres nou- veaux à sa Commission intermédiaire et proposa à l'agrément du roi les noms de l'abbé de Cussy, du marquis de Hautefeuille, du maire de Bayeux, Larcher de La Londe, et du lieutenant général de Vire, Flaust. Elle sollicita l'exemption de certaines charges, comme la tutelle et la curatelle, en faveur des membres de la Commission et des bureaux intermédiaires, l'exemption tempo- raire de la collecte pour tous les députés taillables des assemblées provinciale et d'élection. Enfin, la majorité de ses suffrages fut favorable à la translation des séances de la Commission intermé- l Procès-verbal de Basse-Normandie, p. 241-259. 2 Ibid., p. 259-274. D'autres instructions lurent rédigées dans le même but sur la répartition des diverses impositions taille, capilation, corvée, impôt territorial et des bâtiments de justice, etc...' Ibid., p. 290. 325 à 340. 3 Far exemple Le Telier de Vauville, trésorier de France, nommé procureur-syn- dic provincial ; Le Tuilier, procureur du roi à l'élection de Coutances ; Lemon- nier, président de l'élection de Saint-Lô ; Courtin de la Gervaisière, procureur au même siège. 4 Ibid., p. 313, 314. 82 CLÔT! RE DE L'ASSEMBLÉE PROVINCIALE diaire provinciale à Saint-Lô, vrai centre de la généralité. Cette motion, qui émana il des députés du Cotentin et qui ren- contra de l'opposition chez les députés de Caen, ne devait avoir aucun succès. Elle n'en marquait pas moins le désir de l'administration nouvelle de se séparer manifestement de l'an- cienne, lui proposant l'abandon de Caen, chef-lieu de l'inten- dance, et le choix de Saint-Lô comme capitale, l'Assemblée pro- vinciale entendait affirmer ses sentiments d'indépendance absolue vis-à-vis de l'intendant, et la raison politique ne l'avait pas moins déterminée que la raison géographique à proposer cette mesure. Le 6 décembre 1787, Cordier de Launay vint faire la clôture de l'Assemblée avec la même solennité qu'il l'avait ouverte. Il remit à ses membres une instruction relative à l'agriculture et à l'éco- nomie rurale et ajourna l'Assemblée à une date indéterminée. Elle ne devait plus se réunir. Bien que le régime administratif nouveau établi en Basse-Normandie par l'édit de juin 1787 ait duré trois années, jusqu'à l'expiration des fonctions de la Com- mission intermédiaire provinciale août 1790, il n'y eut d'Assem- blée provinciale ni en 1788. ni en 1789. Le discrédit où était rapi- dement tombée cette institution, le mouvement qui s'était pro- pagé partout en faveur des Etats provinciaux, la promesse du roi de rétablir ceux-ci formellement inscrite dans l'arrêt du Conseil du 8 août 1788, la réunion des notables de 1788 firent surseoir cette année à la convocation de toutes les Assemblées provinciales ]\ En 1789, l'Assemblée nationale constituante abolit, dans la nuit du 4 août, avec la distinction des trois ordres, les privilèges des provinces, leur individualité politique et décida la création de nouveaux cadres administratifs on jugea inutile de convoquer des assemblées dont le ressort allait être démembré et dont la composition interne ne correspondait plus au nouvel état social du pays 2. Dans sa session unique, l'Assemblée provinciale de Caen avait fait preuve d'une grande activité. Elle sembla prendre en main les intérêts de la Basse-Normandie ; elle essaya de les défendre contre l'arbitraire du pouvoir central et la rapacité du fisc ; mais sa résistance fut molle et facilement vaincue. Elle ne manqua pas 1 Lettre de Necker à l'intendant, ,no0 ; — Pontorson, bourg, 12 à 1500; — Vire, 6 à 7,000; — Condé-sur-\'oireau, bourg, 3,000 environ. Arch. dép., Calvados, C 1051. 1 Notamment les édits de 1092, 1733 et 1771. 2 L'édit visait trois catégories de villes au-dessus de 4,500; 16 2,0011;! 4,500 ; au-dessous de 2,000. 3 Le nombre des échevins variait de deux à six ; celui des conseillers de ville, de trois à six ; ces derniers n'apparaissent pas dans toutes les villes de Basse-Nor- mandie, mais seulement à Bayeux, Carentan, Sainl-Lo, Cherhourg. 4 Les notables devaient être, selon les trois catégories ci-dessus désignées, au nombre de quatorze, dix ou six. 5 La nouvelle forme suivie à Carenlan est très avantageuse et a obvié au trouble qui régnait précédemment dans les délibérations où chaque membre de la commu- nauté avait le droit d'opiner. » Observations du bureau municipal de Carenlan au subdéléguc de La Hogue, 1778. Arch. dép., Calvados, C 1156. — A Cherbourg, il semble nécessaire, dès 1717, de ne plus convoquer à l'avenir la généraïîté >U^ bourgeois, qui occasionne le plus souvent de la confusion dans les délibérations, et d'élire douze bourgeois les plus capables de traiter les affaires avec les officiers municipaux ». Arch. comm., Cherbourg, BB 2. 88 LEDIT DE 1771. SON INSUCCÈS exerçant des arts libéraux, les artisans et les laboureurs » W. Les premières classes, quoique comprenant la moindre partie de la population urbaine, comptaient le plus grand nombre de députés, ce qui donnai l aux assemblées de ces villes une consti- tution nettement aristocratique '' . Si l'édit de 1766 eût été appliqué partout à la lettre, il aurait uniformisé l'organisation municipale des villes de Basse-Nor- mandie. Mais son exécution ne fut ni prompte, ni rigoureuse. Sur les réclamations de ses officiers municipaux, des officiers de justice qui y résidaient, de ses différents corps de citoyens, plus d'une ville obtint, avec l'avis favorable des intendants, en raison de circonstances particulières », son règlement particulier. C'est ainsi que des lettres patentes de novembre 1769 donnèrent à Caen une organisation spéciale, avec 28 notables élus par les 12 paroisses 3. Coutances en eut 25, et demanda leur réduction à 12 pour favoriser leurs délibérations » 4. L'édit fiscal de 1771, qui suspendit le régime électif et rétablit en titre d'office les charges municipales, ne fit que compliquer la situation. Pour augmenter la recette, Terray avait désigné 21 villes et bourgs de l'intendance de Caen comme susceptibles d'être pourvus d'offices municipaux l5 . Mais la plupart de ces villes étaient obérées et sans ressources. Vainement Terray réduisit-il aux deux tiers la finance à payer et menaça-t-il celles qui étaient 1 Corps de*- villes nommant des députés notables. — A Àvranches, six corps clergé 1 député; nobles cl militaires 1 ; bailliage 1 officiers des autres justices, avocats, médecin-, et bourgeois vivant noblement 1 négociants, notaires, procu- reurs, chirurgiens, arts libéraux 1 ; artisans 1. \rch. dép., Calvados, C 1064. Coutances, dix corps clergé 1 ; noblesse 4 ; bailliage et présidial f4 élection fl; amirauté 1 ; avocats 2 ; procureurs 1 bourgeois vivant noblement 4 ; mar- chand- 2 ; artisans 1 . Ibid., C 1170. - Saint-Lô, huit corps clergé 1 nobles et militaires 2 bailliage il élection I avocats médecins, bourgeois vivant noble- ment 2^ ; notaires, procureurs 1 ; négociants en gros, marchands, chirurgiens, arts libéraux 2; artisan- el laboureurs 2. Ibid., C 1230. Cherbourg, sept corps clergé 1; noblesse 1 ; magistrature 1 ; avocats, médecins et gens vivant noble- ment 2 négociants en gros et marchands 3 chirurgiens, notaires, greffiers et arts libéraux 1 laboureurs et artisans H , Vrch. comm., Cherbourg, BH r>. i2i Exemples . \ Sainl Lô, sur douze notables, huit sonl pris parmi le clergé, les nobles et les gens vivant noblement, quatre parmi les marchands el les laboureurs. — A Avranches. sur six notables, un seul artisan. ! \ivh. dép., Calvados, , à Cherbourg en 1777 3>, à Valognes en 1779 4 , à Caen en 1780 5 ; mais en certains endroits, la résistance se prolongea ; et à Coutances, en 1787, les officiers municipaux étaient encore nommés par commission royale e . Plus d'une ville obtint, soit après le rachat de ses offices, soit dans l'attente de ce rachat, un nouveau règlement, d'ailleurs provi- soire. Valognes avait eu le sien en 1777 ,7', à l'instar d'un règlertient précédemment accordé à Bayeux ; ce fut le tour de Cherbourg en 1778 ', d'Avranches en 1779 0, de Saint-Lô en 1780 do». Caen rentra en possession des statuts que les lettres-patentes de novembre 1769 lui avaient octroyés Ul. L'intendant Cordier de Launay, songeait à régulariser, au mois de mai 1787, l'adminis- tration municipale de Coutances 1?. Ces divers règlements, si l'on excepte celui de Caen, s'écartaient assez sensiblement de l'esprit qui avait inspiré la législation de 1766. Ils lui étaient infidèles sur deux points principaux la composition du collège électoral et son mode d'élection. D'une part, plus d'une ville dont la popu- lation dépassait ou même habitants, et à laquelle les articles 27 et 52 de l'édit de 1766 attribuaient 14 ou tout au moins 10 notables, vit son chiffre réduit à 6, ce qui ravalait son importance à celle d'une des petites bourgades prévues à l'article 1 Lettre de Turgot du 29 février 1776. Arch. dép., Calvados, C 1050. 2 Arrêt du Conseil du 4 août 1775. Ibid., C 1184. 3 Pour 3,000 livres. Arrêt du Conseil du 20 décembre 1776. Ibid., C 1241 et Arch. comm. Cherbourg, A A 50, 51. 4 Pour 2,000 livres. Arch. dép., Calvados, C L255. 5 Pour 12,000 livres. Arrêt du Conseil du 25 juillet 1780. Ibid., C 1092, 1093. 6 Ibid., C 1173. Il en était de même ;> Vire, si l'on en croit une lettre de Mauduit, maire de cette ville, datée lu 9 septembre 1789. Ibid., C 2688. 7 21 juin 1-/77. Ibid., C 1254. Pour Bayeux, 18 avril 1777. Ibid., C 1434. 8 Ibid., C 1241, et Arch. comm., Cherbourg, AA 42. 9 Arch. dép., Calvados, C 1064 et 7649. 10 Ibid., C 1230. 11! Ibid., C 1095. 12 Ibid., C 1173. 90 RESTRICTION DES LIBERTÉS MUNICIPALES 55 du même édit'1-1. Cette diminution de l'effectif du Conseil général faisait crier à l'insuffisance de la représentation urbaine W, et privait certains corps de l'exercice de droits dont on les avait tout d'abord investis {. D'autre part, le principe électif lui-même avait été singulièrement entamé par le rétrécissement de son champ d'application. Pouvait-on appeler libres élections » cet ensemble d'opérations qui, semblant tourner clans un cercle vicieux, permettaient aux officiers municipaux, membres du bureau exécutif de l'Hôtel de Ville, de se faire élire par les notables, leurs collègues du Conseil général, c'est-à-dire par ceux- là même qu'ils avaient auparavant choisis et soigneusement triés dans un nombre de corporations déjà strictement déterminées ? Un tel mode de cooptation entre amis, dans le huis-clos propice aux combinaisons et à l'intrigue, n'était qu'une parodie du régime électoral, et la royauté ne pouvait croire que le Tiers état urbain en fût la dupe. Mais elle poussait si loin le mépris des libertés municipales, qu'elle aggrava même, dans la pratique, la situation humiliée et amoindrie qu'elle avait imposée aux villes. Après s'être réservé, pour la première fois, le choix des officiers municipaux, elle les confirma, par brevet, dans l'exercice de leurs fonctions, à l'expiration des délais fixés par les règle- ments li, négligeant ainsi de recourir, en dépit des sollicitations réitérées dont elle était l'objet, au simulacre d'élection que ceux-ci autorisaient. A la veille de la Révolution, la vie municipale présentait, 1 Par exemple, Valognes, Cherbourg, Avranclies. 2 On ne trouve pas à Valognes, écrivaient le 12 avril 1788 les officiers du bail- liage, un nombre de notables suffisant pour représenter une commune si nom- breuse ». Arch. dép., Calvados, 0507. 3 La réduction à six notables, au lieu de quatorze ou dix, empêchait parfois la représentation spéciale des chapitres, prévue à l'article 30 de ledit de 1766 voir pleintes du chapitre d'Avranches, Ibid., C 1061 ; mais, le plus souvent, elle s'effec- tuait aux dépens des derniers corps urbains, négociants, arts libéraux et artisans, c'est-à-dire au détriment du véritable Tiers état urbain. 4 A Saint-Lô, sur la proposition de l'intendant de Caen, le roi, écartant les trois candidatures qui lui étaient soumises en 1781, date du renouvellement de la mairie, prorogea pour quatre ans les fonctions de M. de Bacilly. La situation actuelle durera toute seule, avait écrit le subdélégué ; personne ne rompra le silence. » Arch. dép., Calvados, C 1230. — La prorogation des pouvoirs du comte de Van- dœuvre, maire de Caen, et du premier échevin, le comte de Faudoas, par brevet royal du 15 juin 1781, ne laissa pas de soulever des difficultés. Ibid., C 1095. — Le maintien à la mairie de Valognes d'un homme entreprenant » qui avait substitué à des lois de profonde sagesse un régime inconstitutionnel » il s'agit du marquis de Colleville, causa un vif mécontentement qui se traduisit, en 1789, par un vaste péti- tionnement en faveur du rétablissement du régime électif. Ibid., C 6507. l'oligarchie dans les villes 91 ainsi qu'on vient de le voir, dans la généralité de Caen, des aspects assez variés. L'étude approfondie du régime intérieur de chacun de ces groupements urbains révélerait des différences assez notables. Ces différences n'étaient que superficielles, et le fond était partout le même, écrit Tocqueville. » l Il y a là une exagération évidente, dont un historien contemporain a fait justice 2. Toutefois on s'explique que Tocqueville ait pu croire à l'homogénéité du régime municipal cachée sous une diversité trompeuse », parce qu'il y rencontrait partout deux traits dominants une administration oligarchique et une tutelle administrative assez étroite. D'une part, en effet, la direction des affaires communales était abandonnée, non pas aux représentants de tous les habi- tants, mais aux députés des corps, aux élus de la noblesse et de la bourgeoisie. Le principe de l'élection n'était qu'une belle façade, derrière laquelle se dissimulait une véritable oligarchie ayant pour cortège inévitable le népotisme et toute une série d'abus »3-'. A Caen, par exemple, le maire Vendœuvre et l'échevin Faudoas avaient, de 1781 à 1787, gouverné la ville en tyrans. On leur reprochait l'oubli des formes, le mépris des droits des habitants, la prodigalité dans les dépenses, la négligence dans la convocation des notables, auxquels pendant une période de trois années, les officiers municipaux n'avaient pas une fois rendu compte de l'état des affaires de la communauté, ni de l'emploi de ses deniers » 4. D'autre part, pour protéger les villes contre les suites néfastes d'une telle administration, le pouvoir central intervenait de plus en plus dans la gestion de leurs affaires, et sous le prétexte d'une tutelle consciencieuse de leurs intérêts, tendait à leur enlever les derniers restes de leur ancienne autonomie. Ce n'était pas seulement la présence du juge royal, présidant les séances de l'hôtel de ville, qui attestait l'autorité du roi, c'était surtout l'action continuelle de l'intendant qui rappelait à chaque instant aux villes leur qualité de mineures. Le maire que le roi leur 1 A. de Tocqueville, L'Ancien régime et la Révolution, p. 68. 2 Ardascheff, Pvovintsialnaia administratsia, t. I, chap. VIII édition russe, p. 498 et suivantes. 3 Ibid., t. I, p. 544. 4 Arch. dép., Calvados, C 1095. Le 23 février 1782, Meslé, subdélegué d'Avran- ches, écrit à l'intendant que le maire Lesourd. nommé par le roi lors du Règlement municipal du 4 juillet 1779, a complètement négligé les intérêts de la ville, et que de longtemps aucun compte n'a été rendu. Ibid., C 1064. 92 LA TUTELLE ADMINISTRATIVE DES VILLES donnait n'était-il pas le candidat favori de l'intendant, parfois en dépit de leurs propositions? . '. Cette exclusion presque complète des citoyens lu Tiers état de la vie munici- pale, qui était une règle presque générale pour les villes de Basse-Normandie, a dû contribuer à renforcer la part prise par le peuple des villes au mouvement révolu- tionnaire de juillet 1789. COMMUNAUTÉS ET PAROISSES RURALES 93 administrative identique, sanctionnée par la loi des 14-18 dé- cembre 1789, unifia le régime municipal de la France. Abstraction faite de ces quelques villes, on peut dire que la presque totalité des communautés d'habitants de la généralité de Caen, formées surtout de paroisses rurales, était dépourvue en 1787 d'institutions municipales nettement réglées. Leur administration était des plus simples ; autonome et plus, démo- cratique que celle des villes, elle était exercée, sans le concours d'aucune assemblée représentative, par l'assemblée générale des habitants. Nous possédons, pour la Basse-Normandie, un assez grand nombre de registres contenant les délibérations prises par ces assemblées générales, au cours des XVIIe et XVIIIe siècles, ce qui nous permet de caractériser avec exactitude le régime municipal de ces communautés rurales h. Un trait essentiel de ce régime, c'est l'union étroite, souvent même la fusion complète de la communauté » et de la pa- roisse ». Les mêmes habitants réunis dans les mêmes assemblées s'occupent des intérêts de la paroisse et de la communauté. Au XVIIe siècle la confusion est absolue le titre de certains registres paroissiaux le prouve irréfutablement "2 '. Ces assemblées se tien- nent soit au porche de l'église, dans le parvis, ou dans le cimetière, soit encore dans la sacristie, quand la saison est rigoureuse ; elles ont lieu d'ordinaire un dimanche, à l'issue de la messe ou des vêpres, à l'heure où se trouvent réunis les paysans venus de leurs 1 Entre autres documents, j'ai surtout utilisé les registres conservés aux archives des communes de 1 arrondissement de Caen, et dont M. Bènet a fait un inventaire détaillé. Série E supplément, tomes 1 et 11. [2 Ces registres s'appellent ordinairement Registres des certificats et audien- ces ». Arch. comin., Beliengrevîlle, BB1. - Registres des sertificaz et autres affères publiques de la paroisse. » Ibid., Hubertfolie BB'.j — Celui du Rosel est intitulé Livre des attestations et référés de publications et proclamations pour les affaires royales et des tailles. » Ibid., Le Rosel, BB1. — A Secqueville-cn-Bessin, il y a un Registre des baptêmes, mariages, inhumations, certificats, procurations, élections de la taille et autres affaires dépendant de l'Eglise ». Ibid., Secqueville-en- Bes-in, GG3. — Le registre qui me parait prouver le mieux cette confusion, est celui de Cairon a Registre commun de la paroisse de Cairon, contenant les certifi- cats faits et passés devant les curés dudit lieu, issue de la messe paroissiale, tou- chant les affaires et bien commun de la paroisse... tant à l'égard de la collection des deniers -qui furent appliqués à la nourriture des pauvres des Buissons et du Cairon, en la cherté et disette des blés, par arrêt du Parlement de la province, que tou- chant lélection des trésoriers qui ont administré le revenu du Trésor de Cairon, ainsi que l'élection du capitaine de la côte pour Cairon, les bannies du fouage et guet commun de la dite paroisse, de l'herbage du cimetière, réparations de l'église paroissiale et du presbytère et autres charges de la communauté. » Ibid., Cairon, BB1. \H CONFUSION ORIGINELLE ET SÉPARATION PROGRESSIF fermes ou de leurs hameaux écartés. Les questions les plus diverses s'y traitent nomination des collecteurs des tailles, enrô- lements et dérôlements pour la taille, élections de syndics, de collecteurs du sel ; équipement d'un milicien ou élection d'un capitaine du guet ; partage des communaux et bruyères, règle- ment sur les marais, bail d'une carrière ; nomination de messiers, de procureurs pour soutenir un procès au nom de la commu- nauté ; règlement des dépenses communales, réparations ou constructions d'églises et de presbytères, adjudication des pommes du cimetière, du fouage ; bannie des terres de la fabrique, examen des comptes de fabrique, nomination du custos, du trésorier ou marguillier, de la commission de charité pour la répar- tition du pain de Pâques, etc.. W. Au XVIIIe siècle, cependant, paroisse et communauté tendent à se dégager l'une de l'autre. Une sorte de démarcation semble se tracer entre leurs attributions et leurs agents. La paroisse a son trésorier, la communauté son syndic. Quoique composées des mêmes membres, les assemblées sont, à des dates diverses Pf plus particulièrement paroissiales ou communales, et pour- suivent des buts divers les premières, convoquées par le mar- guillier au banc d'œuvre, s'occupent des affaires de l'église, des revenus de la fabrique, du custos, du maître d'école ; les secondes, convoquées par le syndic, sont consacrées à la police et à l'admi- nistration de la communauté, à la gestion de ses intérêts, et aussi à l'exécution de ses obligations envers l'Etat. Sous ce dernier point de vue, le syndic prend un aspect nouveau il n'est plus seulement l'organe exécutif de l'assemblée communale, mais aussi le délégué du subdélégué de l'intendant, et le dernier agent de l'administration provinciale. Cette forme de la tutelle admi- nistrative contribue à élargir le fossé entre la paroisse et la communauté. Légalement, la distinction est faite par les juris- consultes 3 ; en plus d'un endroit, elle saute aux yeux par suite de la juxtaposition de deux communautés dans une paroisse ou de deux paroisses dans une communauté * ; parfois enfin 1 A. Bénet, Inventaire imprimé, série E supplément, tomes I et II passim 2 D'une façon générale, on voil les assemblées nommer les trésoriers vers Pâques, les collecteurs de la taille en octobre, les syndics en décembre. 3 Fréminville consacre un traité spécial aux communautés, et Jousse aux paroisses. La même distinction est faite par Guyot et par Merlin. 4 Les paroisses de Cairon, de Douvres, d'Ifs, de Langrune, de Saint-Denis-le- Gast, de Truttemer, de Beauchène renfermaient ebacune deux communautés ; dans les villes, l'ensemble de la communauté était réparti entre un nombre de paroisses plus ou moins considérable 12 paroisses ù Caen, par exemple. DOUBLE PORTÉE DE l'ÉDIT DE 1787 95 deux registres distincts de délibérations trahissent cette diver- sité i. Toutefois, la séparation n'est pas complète. L'église est restée le centre de la vie communale, la maison commune ; les assemblées se réunissent à sa porte ou dans son enceinte ; elle renferme le coffre de chêne où l'on dépose les archives locales. Le curé est officier de F état-civil ; il lit toujours au prône les ordonnances et les mandements dont le texte est ensuite affiché à la porte de l'église. L'édit de 1787 devait assez profondément modifier la vie municipale des campagnes. Sa portée allait être double. D'une part, il allait substituer le système représentatif à celui des assemblées générales d'habitants, en établissant une municipalité dans chaque communauté ; d'autre part, il devait hâter la sécula- risation de cette administration municipale en consacrant l'exis- tence distincte des bourgs et villages en tant que circonscriptions civiles, calquées sur les divisions religieuses, mais indépendantes d'elles. Pour comprendre la réforme municipale de 1787, il faut la ratta- cher à la grande réforme administrative dont elle n'est que le corollaire. La communauté était le troisième et dernier échelon de la hiérarchie administrative nouvelle ; elle venait après la pro- vince », après l'élection ou département 2. Aux Assemblées pro- vinciales et d'élection, en vertu d'un système représentatif uniformément appliqué, devaient correspondre, au degré inférieur de l'échelle administrative, des assemblées municipales, déléga- tion de la communauté. Cette substitution d'assemblées res- treintes aux anciennes assemblées générales ne causa pas une aussi vive surprise qu'on pourrait le croire. Si, en Basse-Nor- mandie, l'intendant n'avait pas, comme son confrère de Cham- pagne, systématiquement réduit les assemblées des communautés à une minorité d'habitants 3>, cette réduction n'avait pas moins dû s'opérer en fait dans beaucoup de villages ; dans ce pays de propriétés divisées et de mesnils épars, plus d'un paysan man- quait aux réunions 4. Un récent arrêt du Parlement de Rouen, 1 Exemple à Amblie Affaires de la communauté d'Amblie à partir de 1778 » Arch. coinm., Amblie, BB1, et Délibérations touchant la fabrique de la paroisse d'Amblie à partir de 1776 ».Ibid., BB2. 2 L'arrondissement, circonscription électorale, n'avait pas reçu d'organisation administrative distincte. 3 Voir Ardascheff, Provintsialnaia administratsia, tome I, p. 512, note 3. 4 Arch. commv Gavrus, BB 1. 96 LES \SSEMBLÉES PAROISSIALES ET MUNICIPALES portant règlement sur ces assemblées, avait, en 1784, restreint aux propriétaires notables seuls le droit d'y assister l. Une conception vraiment démocratique du régime municipal n'exis- tait donc déjà plus dans l'intendance de Gaen lorsqu'y furent publiés l'édit de juin 1787 et le Règlement du 15 juillet qui l'interprétait. Ce Règlement établissait dans chaque communauté rurale deux sortes d'assemblées une assemblée paroissiale, survivance de l'ancienne assemblée générale, ma;s qui, au lieu de com- prendre comme autrefois tous les habitants, était restreinte aux taillables payant au moins 10 livres d'imposition foncière ou personnelle ; une assemblée municipale, composée de trois, six ou neuf députés élus, selon le nombre des feux, et comprenant en outre un syndic également élu, et deux membres de droit, le seigneur et le curé ; pour faire partie de cette assemblée, il fallait avoir vingt-cinq ans, un an de domicile et payer au moins 30 livres d'impôts. Une instruction envoyée par le ministre Villedeuil aux assem- blées paroissiales, en vue des élections, leur recommandait de choisir de préférence leurs députés parmi les habitants capables de lire et d'écrire -J. La présidence de ces réunions électorales était partout dévolue au syndic de la paroisse. Muni des renseignements que ses subdélégués lui avaient fournis sur le nombre de feux et conséquemment de députés à élire par chaque paroisse, l'intendant de Launay rendit le 5 sep- tembre une ordonnance qui ouvrait la période électorale 3 . Les élections eurent lieu partout au mois d'octobre. L'ordre et le calme y régnèrent en général. Elles donnèrent lieu toutefois à une série d'incidents, ce qui était inévitable en présence d'un mouvement électoral aussi important, vu la nouveauté de l'opé- ration, l'inexpérience et l'ignorance de la plupart des syndics paroissiaux l4 >. D'assez nombreuses irrégularités furent com- 1 Arrêt du Parlement de Rouen, portant règlement ]>our les assemblées générales des j>aroisses tant dans les villes que dans les campagnes, et désignant les j>ersonnes qui g seront admises. 1784, Caeu, imp. Le Roy, 4 p. in-4°. Arch. dép., Calvados, C 6462. — A Tourville élection de Caen, on voit convoquer spécialement les proprié- taires notable^ par billets, à mu- assemblée générale du la paroisse. Arch. conim., Tourville, BBb. 2 Instruction du 11 août 1787. Arch dép., Calvados, CiJ.'Ul. 3 Arch. dép., Calvados, C 6344. l La majeure partie des syndics sont d'une ignorance crasse, et il faudrait en la plupart des paroisses un guide pour les faire comprendre et exécuter cette besogne. » Lettre du subdélégué de Mortain ù l'intendant, du 22septembre 1787. Ibid. IRRÉGULARITÉS DANS LES ÉLECTIONS MUNICIPALES 97 mises. A Auvers, Cats, Saint-Pellerin, deux frères furent illégale- ment nommés membres de l'assemblée municipale ; Brevands et Saint Georges de Brohon eurent pour syndics municipaux, l'un le frère, l'autre le gendre d'un député municipal ; à Vaudry, ce fut le frère du curé qui devint syndic ; à Ferrières, un noble, neveu du seigneur autant de cas d'annulation ] . En d'autres endroits, à Vierville, à Cauquigny, au Buisson, le syndic élu était en même temps membre de l'assemblée munici- pale, ce qui rendait cette dernière incomplète ; à Saint-Sympho- rien, on avait nommé deux syndics, et l'un d'eux devait être éliminé 'lL Parfois encore, on dut élire, par insuffisance d'autres candidats, des députés qui ne payaient pas le taux d'imposition réglementaire, comme à Beuzeville-au-Plain, Saint-Aubin-du- Perron, Saint-Christophe d'Aubigny, Doville, Sainte-Suzanne t3. Au Mesnil-Frémentel, pas un taillable ne réunissait les conditions voulues pour faire partie de la municipalité W, A Ducy-Sainte- Marguerite, l'assemblée électorale ne réunit que cinq personnes -V. A Fierville-en-Bessin, village de 16 feux, elle ne compta que quatre comparants; il y avait moins d'électeurs que de places à pourvoir G . Dans d'autres communautés, les élections nom- maient plus de députés que de droit, et une réduction de la municipalité était inévitable ' . Une autre cause de difficultés fut la coexistence, dans la même paroisse, de communautés qui, tout en ayant déjà leur collecte séparée, étaient trop petites pour constituer autant de munici- palités distinctes ce fut le cas des Buissons, de la Mare, de Bras, de Tailleville, hameaux de Cairon, de Douvres, d'Ifs et de Lan- grune Hl Les mêmes difficultés séparaient Isigny de ses hameaux, Gavray bourg de Gavray village, le grand Truttemer du petit Truttemer, Saint-Denis-le-Gast d'Orbeville, Ghérencé-le-Héron 1 Arch. dép., Calvados, C 7697, 7710, 7621. Au Fresne-Poret, beau-père et gendre sont élus députés municipaux. Ibid., C 7707. 2 Ibid., C 7697. 3 Ibid., C7697. 4 Ibid., C 7680. A Fresnay-le-Crotteur, une assemblée paroissiale de trois élec- teurs nomma deux députés municipaux, seuls cotisés à une somme dépassant 30 liv. Ibid., C 7681. 5 Ibid., C 7681. 6 Dans cette communauté, le syndic paroissial n'avait assemblé que quelques mendiants sans fonds d'exploitation et avait écarté les propriétaires ». Ibid., C 7670. 7 A Fontaine-Eloupefour par exemple, où la communauté ayant moins de cent feux, avait nommé six députés municipaux. Ibid., C 7681. 8 Ibid., C7664, 7670. 7 VJO INTRIGUES ET de Saint-Martin-le-Bouillant, Beauchêne des Guitons Ibid., C 7729. 6 Ibid., C 7723, 6344. RETAHDS DANS FA FORMATION DES MUNICIPALITÉS RURALES 99 et ses débiteurs, et fit passer la liste des élus per domos » où on signa sans oser contredire » ,l. A Coudevilie, ce fut une femme qui dirigea les élections Jacqueline-Perrette Le Chevalier. Elle se présenta hardiment à l'assemblée des paysans qui se tenait dans le cimetière, et à force d'insistance, les emmena chez elle où elle 'désigna elle-même les députés municipaux *, Il arriva, mais le cas a dû être exceptionnel, que l'assemblée paroissiale refusa de se réunir, comme à Brectouville W. Pour toutes ces raisons, l'organisation définitive des munici- palités rurales subit un certain retard, préjudiciable à la bonne marche de l'administration provinciale. Les assemblées d'élec- tion, à qui le contrôleur général avait confié le soin de dresser l'état de ces municipalités pendant leur session d'octobre, n'eu- rent à leur disposition qu'un nombre par trop insuffisant de procès-verbaux d'assemblées paroissiales et déléguèrent leur tâche aux bureaux intermédiaires. L'hostilité des syndics parois- siaux et des subdélégués, qui, forts de l'appui de l'intendant, gardèrent assez longtemps les expéditions de ces procès-verbaux, vint encore reculer l'époque du dépouillement 4. A la fin de janvier 1788, le contrôleur général se plaignait à la Commission intermédiaire provinciale de la lenteur de cette opération. Il est indispensable, écrivait-il, de fixer sur cet objet essentiel toute l'attention des bureaux intermédiaires en leur envoyant copie de ma lettre. Il faut employer tous les moyens lettres aux seigneurs, aux curés, aux particuliers faisant encore les l; Arcli. dép.. Calvados. C 7781. Réclamation de Vincent, sieur du Longpré, paroissien de Saint-Pierre-Lauger décembre 1787. 2 Ibid., C 7701. 3 Ibid., C 6344. A Saint-Pierre-Oursin, où deux ou trois petits fermiers exploitaient • les parcelles conquises sur le marais des Terriers, on ne put former rassemblée municipale. Ibid., C 7683. Lettre du curé de Saint-Pierre-Oursin au procureur-syndic du déparlement de Caen, 21 février 1788. H en fut de même à Alliis. prés Caen, où il n'y avait qu'une maison, occupée par un fermier des Ursulines de Caen. Ibid., C 7670. ,4 Ibid., C 6341. L'intendant avail reçu, le 11 août 1787, l'ordre d'envoyer dans chaque paroisse trois exemplaires du modèle de procès-verbal à dresser, l'un, dcvanl servir d'original, pour le greffe de la subdélégation, et les deux autres, d'expédi- tions, pour l'ancien et le nouveau syndic. Les assemblées d'élection n'ayant pas les moyens de dresser l'état des municipalités, firent demander par la Commission inter- médiaire l'exemplaire resté aux mains des anciens syndics et qui leur était inutile. L'intendant refusa, ne se croyant pas suffisamment autorisé pour priver lout-à- coup tous les syndics de sa généralité d'un titre qu'ils tenaient privativement des mains de 1 administration ». 11 dut céder toutefois, le 15 novembre 1787. sur les injonctions du contrôleur général. Sa résistance avait reculé d'un mois le dépouille- ment des procès-verbaux d'assemblées paroissiales. 100 COMPOSITION DES ASSEMBLÉES MUNICIPALES fonctions de syndics... il faut que les assemblées municipales soient toutes constituées, sinon les autres assemblées, de dépar- tement et provinciales, seraient arrêtées dans leurs opérations ultérieures et il n'y aurait plus de véritable organisation. » l Pour accélérer cette organisation, Lambert ordonnait de tran- cher par voie d'administration, et non par la voie contentieuse, toutes les difficultés qui surgissaient dans la formation des assemblées municipales. Il dessaisissait l'intendant de ce pouvoir pour éviter toute nouvelle cause d'ajournement, et faisait un pressant appel à la vigilance des bureaux intermédiaires et de leurs procureurs syndics 2. Le travail de dépouillement se pro- longea pendant le premier semestre de l'année 1788. Les élections de Bayeux et de Coutances envoyèrent leurs états de municipa- lités au mois d'avril ; celles de Mortain, de Carentan et de Vire en mai3 ; à la fin de juin quinze procès-verbaux manquaient encore pour l'élection de Caen 4. Dans presque toutes les paroisses de la généralité de Caen, les élections de 1787 investirent des charges municipales les gens que leur fortune ou leur situation sociale mettaient le plus en vue. Les assemblées municipales furent, comme l'avait rêvé Turgot, les assemblées des plus haut cotisés. La condition de 30 livres d'imposition, exigée par le Règlement du 15 juillet pour l'égibilité, faisait prévoir ce résultat. L'assemblée munici- pale était ouverte à tous les gens aisés, quel que fût leur rang social ; le syndicat, par une interprétation large du règlement, fut aussi accessible aux trois ordres. Les ecclésiastiques, les gentilshommes, les bourgeois des villes, propriétaires à la cam- pagne, les riches fermiers, tous ceux qui remplissaient les condi- 1 Arch. dép., Calvados, C 7733. Lettre du contrôleur général Lambert à la Com- mission intermédiaire provinciale de Caen, 30 janvier 1788. 2 Lettre de Lambert à la Commission intermédiaire provinciale de Caen, 6 mars 1788. Arch. dép.. Calvados, C 6344. Les procureurs-syndics provinciaux, en mars, avril et mai, réclament avec insistance aux bureaux intermédiaires les tableaux de la formation des municipalités. 3 Tableaux de formation des assemblées municipales de 1787, par élections. Ibid., C 7648 élection d'Avranches ; 7662 Bayeux ; 7679 à 7684 Caen, procès-verbaux des assemblées électorales; 7697 Carentan; 7704 Coutances; 7710 Mortain ; 7717 Saint-Lô ; 7731 Vire; je n'ai pas retrouvé d'étal pour l'élection de Valognes. 4 Lettre des procureurs-syndics provinciaux, 24 juin 1788. Ibid., C 7624. Ces tableaux ne fuient envoyés qu'en septembre. — Supplément au tableau des munici- palités du département de Caen, année 1787, envoyé le 12 septembre 1788. Etats des quinze paroisses retardataires. Ibid., C 7685. SYNDICS MUNICIPAUX. CLERCS ET NOBLES 101 tions de cens exigées, purent être élus députés municipaux ou syndics'1 . Le clergé, en dehors des curés paroissiaux, membres de droit des assemblées, fournit plus d'un syndic municipal. Colom- belles, Grenteville, Hubertfolie, Mathieu, Vacognes, dans l'é- lection de Caen *2 ; Saint - Germain - d'Ectot , dans celle de Bayeux ,;i ; Anneville, Hauteville, Urville, dans celle de Cou- tances 4 ; Saint-Martin-des-Champs, dans celle de Saint-Lô, élurent des prêtres pour syndics 5. La noblesse fut aussi représentée assez largement. Toutes les communautés n'imitèrent pas celle de Fresnes, qui élimina systématiquement les privilégiés de la municipalité élue, à la grande indignation du seigneur 6. Les Tableaux de formation des municipalités » dressés par les bureaux intermédiaires, signa- lent la nomination de nombreux gentilshommes aux fonctions de syndics. Beaucoup s'intitulent écuyers, ce qui est un signe certain de noblesse anciens officiers, gardes du corps, chevaliers de Saint-Louis, propriétaires ruraux, contribuant aux vingtiè- mes, et comme tels susceptibles de fonctions municipales élec- tives, à côté du seigneur patron que sa seigneurie impose à l'as- semblée f7. 1 Ce ne fut pas sans une vive opposition de certains paysans contre les proprié- taires fonciers non domiciliés ou contre les fermiers non propriétaires. La session de l'Assemblée provinciale de Caen nous en a laissé l'écho. Procès-verbal de Basse- Normandie, p. 166-167. 2 Arch. dép., Calvados, C 7670-7684. 3 Ibid., C 7662. 4 Ibid., C 7704. 5 Ibid., C 7717. Les procès-verbaux d'assemblées primaires électorales de mars 1789 révèlent deux autres prêtres-syndics à Saint-Remy-des-Landes bailliage de Saint-Sauveur-Lendelin, et à Canteloup bailliage de Valognes. Arch. nat., B m 54, et Bridrey, Cahiers de doléances du Cotentin, etc., t. Il, p. 166. 6 Lettre de Banville-Montmorel, seigneur du Rosel, à l'intendant. Arch. dép.,. Calvados, C 6344. Les élus sont tous du Tiers état et gens vils et incapables, un garde-chasse, la plupart ne sachant écrire et à peine signer ; c'est une cabale du Tiers état pour exclure la noblesse de la répartition des impôts, s'emparer de l'auto- rité.... et surcharger les propriétés des nobles. » ! Très nombreux exemples de syndics municipaux pris dans la noblesse élection d'Avranches, à Céaux, Curcy, Dragey, Saint-Aubin et Saint-Laurent-de-Terregatte, Saint-Pierre-Lauger, Sertilly Arch. dép., Calvados, C 7648 ; — élection de B,ayeux, à Livry Ibid., C 7662 ; — élection de Caen, à Audrieu, Boullon, Bretteville-sur-Odon, Epinay-sur-Odon, Gonneville, Missy, Saint-Contest, Sainte-Honorine-du-Fay, Saint- Ursin-d'Epron, Vaux-sur-Seulles Ibid., C 7681, 7683, 7684 ; — élection de Coutances, à Courcy Ibid., C 7704 ; — élection de Mortain, à Chèvreville, Saint-Jean-du-Corail, Ger, Heussey, Saint-Cyr-du-Bailleul, Ressuvielle, Montigny, Tinchebrai-Saint- Pierre Ibid., C 7710 ; — élection de Saint-Lô, à Agneaux, Tribehou, Domjean Ibid., C 7717 ; — élection de Vire, à Chénedollé, au Désert, à Brémoy, Campandré, Clécy, 102 SYNDICS DU TIERS ÉTAT. LES HOMMES DE LOI Ce fut toutefois du Tiers état que sortit la plus grande partie des syndics municipaux de 1787. En plus d'un endroit, dans le voisinage des villes notamment, les magistrats des juridictions royales, les avocats, les professeurs d'Université avaient leur maison de campagne, et ils y avaient fait élection de domicile. Leur situation sociale, leurs lumières, leur expérience de la vie publique faisaient d'eux des candidats sérieux aux plus hautes charges municipales et les désignaient aux suffrages des paysans avisés, soucieux de confier leurs intérêts en mains sûres \. La liste des gens de robe nommés syndics dans la Basse-Normandie est très longue. Le lieutenant criminel du bailliage de Caen est syndic à Noyers ; le lieutenant-général du bailliage de Saint- Sauveur-Lendelin est élu en la même qualité à Périers ; celui du bailliage de Vire, à Saint-Sever. Des procureurs et conseillers du bailliage obtiennent le syndicat au Rocher, près Mortain, à Tinchebrai, à Saint-Ouen-de-Beaudre, Saint-Jean-de-Daye, Con- dé-sur-Vire, Coulonces, Sainte-Marie-Laumont, Danvou, Mont- bray, Deux professeurs de droit à l'Université de Caen sont syndics à Biéville et à Mouen ; un procureur du grenier à sel à Blainville ; un avocat du roi au bureau des finances à Creully ; un conseiller au Grand Conseil à Cerisy. Quelques officiers des justices, seigneuriales, assez rares, des notaires en plus grand nombre, plusieurs huissiers et surtout une grande quantité d'avocats. Cette participation des hommes de loi à l'administra- tion municipale des campagnes en 1787 est un fait intéressant à noter elle explique le caractère général et l'orientation poli- tique des vœux contenus dans d'assez nombreux cahiers ruraux de Basse-Normandie en 1789 2>. La Graverie, Mesnil-Ozouf, Landisacq, Saint-Germain-de-Tallevende, Saint-Pierre la-Vieille. Sainte-Cécile, Sainte-Marie-des-Monts, Vaudry Arch. dép., Calvados, C7731. 1 Certains hommes de loi lurent ainsi élus syndics dans plusieurs paroisses. Courtin de la Bréaudière, conseiller à l'élection de Saint-Lù, fut nommé à Saint- Thomas-de-Saint-Lô, à Saint-Ebremond-de-la-Barre et à Saint-Martin-de-Bonfossè; Gonfrey, procureur à la même élection, fut élu syndic à Saint-Gilles et à Villiers- Fossard ; Brenet de Brais, conseiller au bailliage de Vire, à Coulonces et à Mesnil- Bobert. 2 Ces lettrés et savants des campagnes sont les intellectuels » dont parle M. Onou dans son élude sur les élections de 1789 et les cahiers du Tiers état. Ce sont ceux dont les paroles répondent aux espérances du paysan, et à qui celui ci donne toute sa confiance. Ce sont les futurs rédacteurs des cahiers politico-litté- raires » de 1789. Voir Onou, élections de 1789 et les cahiers . Celle-ci se réunit le 2 mars pour remplacer l'abbé de Cussy, déjà président de l'assemblée d'élec- tion de Coutances ; après le refus de l'abbé Bruzeau, prieur de Tailleville, d'abord élu 4, le choix tomba sur dom Mesnilgrand, prieur de l'abbaye Saint-Etienne de Caen &h Les membres de la Commission intermédiaire ne durent se trouver que très rarement au complet. Le duc de Coigny semble n'avoir jamais assisté à ses séances ; il ne se désintéressa pourtant pas des affaires de la province et on le voit souvent intervenir au- près du contrôleur général et des autres ministres sur la prière de ses collègues normands, avec qui il resta en continuelle correspon- dance 6. La présidence réelle de la Commission semble avoir appartenu successivement au comte Louis de Vassy 7, puis à l'é- vêque de Coutances 8. Les élections aux Etats généraux les enle- vèrent tous deux à l'Administration provinciale, ainsi que Flaust. La collaboration du maire de Bayeux, Larcher de la Londe, ne fut certainement pas assidue, car son nom ne figure jamais dans les actes de la Commission $h II est très probable que pendant les années 1789 et 1790 les seuls membres assemblés régulièrement furent Mesnilgrand, Daigremont et Hervieu de Pont-Louis 10^. 1; Voir ci-dessus, chap. II, p. 37. 2 Ibid., chap. IV, p. 81. 3 Arch. dép., Calvados, C 7622. Registre de correspondance de la Commission intermédiaire provinciale de Caen. Lettre du 24 février 1788. 4 Ibid. Lettre du 5 mars 1788. 5 Ibid., C 7627. 6 Traces continuelles de cette correspondance dans les deux registres de corres- pondance de la Commission intermédiaire qui ont été conservés. Ibid., C 7622, 7623. 7 Ibid., C 7622. Lettre du 9 avril 1788. 8 Ibid., C 7623. Lettre du 3 juin 1788. 9 Ibid., C 7622. On fait allusion à sa présence le 5 mars 1788, lors de l'élection de l'abbé Bruzeau. 10 Le compte-rendu de la Commission intermédiaire, imprimé en 1790, ajoute à 116 LES PROCUREURS-SYNDICS PROVINCIAUX Administrateur collectif d'un territoire assez étendu, la Com- mission intermédiaire eut ses bureaux, comme l'intendant. Le nombre des employés s'était accru peu à peu, avec la besogne il était monté de deux en octobre 1787, à huit en février 1790. Leur traitement variait de 400 à 1,000 livres. Comme leurs occupations étaient très absorbantes, on leur avait promis des gratifications annuelles et une augmentation de traitement au bout de trois ans. Cette dernière promesse ne put être tenue, par suite de la suppres- sion antérieure de l'administration provinciale, mais six de ces employés devaient être replacés dans les bureaux de l'adminis- tration départementale nouvelle *. A la tête des bureaux de la province se trouvait le secrétaire provincial ; il avait été désigné au début même de l'institution, dès le mois d'août 1787, par la première moitié des administra- teurs. Le choix s'était porté sur Alexandre, professeur en droit de l'Université et futur Recteur de l'Académie de Caen %. Aux séances de la Commission intermédiaire assistaient, mais sans voix délibérative, deux autres membres les procureurs-syn- dics provinciaux. C'étaient ses agents d'exécution, chargés d'en- tretenir en son nom la correspondance administrative avec les autres pouvoirs établis, et de veiller à l'application des décisions qu'elle avait prises. Ils étaient deux, au début, représentant l'un les deux ordres privilégiés, l'autre le Tiers état. Le syndic du clergé et de la noblesse était Charles Auguste de La Cour comte de Balleroy, lieutenant général des armées du Roi; élevé par son père dans l'amour des réformes, il avait accueilli avec enthou- siasme l'institution des Assemblées provinciales. Il avait épousé la veuve de l'intendant de la Rochelle. Sa mauvaise santé et surtout la faiblesse de sa vue le forcèrent à donner sa démission de syndic en mai 1789^; mais il resta attaché à la Commission intermédiaire jusqu'en août 1790. On jugea inutile de lui donner un successeur et son collègue du Tiers état Jacques Le Telier de Vauville, demeura seul syndic. Celui-ci était déjà conseiller au bailliage et trésorier de France au bureau des finances de Caen l*J . ces noms celui de Texier-IIautefeuille ci-devant marquis de Hautefeuille, maréchal de camp, inspecteur des troupes de la division de Normandie. 1 Arch. dép., Calvados, L, non inventorié. 2 E. Zévort, Le premier Recteur de l'Académie de Caen, Pierre-Roberi Alexandre, p. 6. 3 Arch. dép., Calvados, C 7628. 4 Ibid., L, non inventorié. COMPOSITION DES BUREAUX INTERMEDIAIRES 11/ Les instructions du 3 novembre 1787 créaient une incompatibilité entre ces fonctions et l'administration provinciale ; l'Assemblée, par ses pressantes instances, obtint le retrait de cette défense l. Agé de quarante-cinq ans environ, homme d'une compétence indiscutable et d'une conscience à toute épreuve, Le Telier de Vauviile devait assumer en très grande partie la tâche d'adminis- trer pendant trois ans le ressort provincial de la Basse-Normandie. Son nom résume l'administration provinciale nouvelle en face du représentant de l'ancien régime, l'intendant Cordier de Launay. Les bureaux intermédiaires, chargés d'administrer, sous le contrôle et le direction de la Commission intermédiaire, les neuf élections ou départements de l'ancienne généralité, avaient été constitués par la première moitié des administrateurs de l'élection au début d'octobre 1787 ''. Ils avaient pour président de droit celui de l'assemblée de département et comprenaient chacun quatre membres, un du clergé, un de la noblesse, deux du Tiers état. L'abbé Méry de Berthenonville, doyen de la collégiale du Saint-Sépulcre de Caen, présida le bureau intermédiaire de Caen, dont les membres étaient Duclos Le Goupil, chanoine du Saint- Sépulcre, de Charsigné, seigneur d'Héritot, Pitet le jeune, prieur juge consul à Caen et Renouard, propriétaire à Sermentot. A Avranches, sous la présidence de l'évêque, le bureau intermé- diaire réunit un vicaire général du diocèse, l'abbé de Brigeat, un seigneur des environs, Payen de Chavoy, et deux avocats, Lecourt et Cordoen. Le comte d'Osseville, qui présidait à Carentan, eut pour collègues le curé de la ville, l'abbé Desplanques, un ancien capitaine d'infanterie, Duprey-Desisles, et deux avocats, Laurence et Caillemer, ce dernier bailli de Coigny. Au bureau intermédiaire de Bayeux le clergé ne compta comme membre, en l'absence de l'évêque ;;', qu'un de ses vicaires généraux, l'abbé de Pradelle, auteur d'un ouvrage sur les Déports en Normandie » ; ce fut un noble, Dufayel de Berné, qui le présida ; les deux membres du Tiers étaient le médecin Dozeville et un avocat, DeJauney. Le bureau de Coutances avait pour président l'abbé de Cussy, qui devait périr sur l'échafaud le 3 thermidor an II ; on lui avait adjoint Bonnier, curé de Muneville-le-Bingard, Leforestier de 1 Arch. dép., Calvados. C 7667. 2 Voir ci-dessus, chap. III, p. 52. 3 Arch. dép., Calvados, C 7655. L'évêque n'assista qu'à une séance du bureau, 1. Les neuf syndics du Tiers état appartenaient à la magistrature ou au barreau. L'examen des registres qui nous sont conservés nous montre l'importance de leurs fonctions. Le Tuilier à Coutances, Costy à Caen, Lemonnier à Saint-Lô, Surbled des Moulins à Vire, Le Reculey de la Huberderie à Carentan, Le Tellier à Bayeux, furent les chevilles ouvrières de la nouvelle administration en face des subdélégués indifférents, démissionnaires ou déchus. La composition des bureaux intermédiaires varia assez peu celui de Bayeux fut privé des talents de Delauney dès le mois de mai 1789, par suite de son élection aux Etats généraux. Le prési- 1 Voir ci-dessus, chap. 111, p. 14-45. IMPUISSANCE DE LA COMMISSION INTERMEDIAIRE 1 19 dent du bureau de Mortain, le comte de Vassy, et Vieillard, greffier du bureau de Saint-Lô, furent appelés à Versailles à la même époque. Les deux procureurs-syndics de Valognes, de Beaudrap et Besnard Duchesne, également députés aux Etats généraux, se démirent du syndicat l'abbé Roger, de Cherbourg, fut seul choisi pour les remplacer. Quelle fut l'activité de ces divers organes pendant la période éphémère de leur administration? La Commission intermédiaire provinciale, bureau permanent de l'Assemblée provinciale de Caen, devait exécuter les décisions de celle-ci dans l'intervalle de ses sessions annuelles. Par suite des circonstances politiques cette assemblée ne fut plus jamais réunie. Suspendue en 1788 par la convocation des notables et la promesse de prochains Etats généraux, elle n'avait plus de raison d'être en 1789, depuis le jour où la Constituante avait décidé la création de nouvelles assemblées administratives. La Commission intermédiaire se trouva donc seule à la tête de l'administration provinciale de 1787 à 1790. Ce ne fut point une cause de force pour elle. Si, en effet, l'absence d'une assemblée délibérante semblait lui laisser une plus grande indépendance et l'affranchir de tout contrôle assujettissant, la trop longue durée d'un mandat dont la confiance populaire ne l'avait pas investie, et que nulle sanc- tion publique ne venait confirmer, fit s'évanouir peu à peu la puissance qu'elle aurait dû posséder. Quelle que fût leur valeur personnelle, ses membres n'avaient pas l'autorité nécessaire pour tenir vigoureusement la barre au milieu de l'agitation politique naissante, en face d'une administration rivale, inquiète et ombra- geuse, en présence de l'opinion publique à peu près indifférente à leur existence. La Commission intermédiaire aborda néanmoins sa tâche avec courage ; elle employa tout son zèle à justifier la confiance dont le gouvernement l'honorait, en se consacrant au service de ses concitoyens ». Son activité est indiscutable. Nous en avons la trace dans le volumineux Compte rendu de son administration qu'elle fit imprimer en 1790 pour justifier sa gestion auprès des administrations départementales qui lui succédaient *, et dans l'énorme masse de documents qu'elle déposa à l'appui de ce 1 Arch. dép., Calvados, C 7619. Comple-rendu par la Commission intermédiaire pro- vinciale de Basse-Normandie de son administration depuis le 7 décembre 1787 jusqu'au 4 août 1790. Caen, Le Roy, 1790, in-4°. 120 LES DEUX PHASES DE SON ACTIVITÉ Compte rendu, dans les archives du Calvados 1. Parmi ces docu- ments se trouvaient dix-sept registres deux registres de délibé- rations, trois d'enregistrement, et douze contenant la copie de sa correspondance et de celle des procureurs-syndics provin- ciaux *. Ces registres ont en grande partie disparu. Nulle trace des délibérations, ni de l'enregistrement. La correspondance seule est représentée par quatre registres, dont un fragmentaire deux de la Commission intermédiaire, du 10 février au 7 mai 1788, — et du 21 juin au 7 octobre 1788 3î ; deux des procureurs-syndics, le registre I du 29 août 1787 au 4 juillet 1788, — le registre VI du 20 décembre 1789 au 3 avril 1790 W. Malgré ces énormes lacunes, la présence dans le fonds de la Commission intermédiaire de nombreuses liasses relatives aux impositions, aux travaux publics, aux objets d'ordre économi- que 5, et la conservation des documents contemporains du fonds de l'intendance permettent une appréciation suffisamment exacte du mode d'action de la Commission intermédiaire provin- ciale de Caen. Ce ne fut pas une institution purement nominale, mais un conseil d'administration qui siégea effectivement, dans des réunions périodiques et régulières. On la voit s'assembler assez fré- quemment ; en mars 1788, les procureurs syndics écrivaient à Larcher de la Londe, maire de Bayeux La Commission se réunit deux fois par semaine, le mercredi et le samedi, à 5 heures du soir » 6. Ses séances se tinrent d'abord chez le président ; celle du 4 juin 1788 eut lieu à l'hôtel de l'évêque de Coutances W. Quand on eut installé les bureaux de l'administration provinciale dans un local spécialement loué pour eux, il est probable qu'on affecta une pièce de ce logement aux séances de la Commission intermédiaire. Il semble bien que deux ou trois membres, en dehors des procureurs-syndics, assistaient à chacune de ses déli- bérations. Dans l'histoire de cette Commission, qui comprend moins de trois années, on pourrait distinguer deux périodes. Avant la réunion des Etats généraux, elle fit preuve, au milieu de nombreux obstacles, d'une assez grande initiative et entretint 1 Arch. dép., Calvados, C 7610-8578. Ces documents forment aujourd'hui le fond très important dit de la Commission intermédiaire provinciale de Basse-Normandie. 2 Compte-rendu, p. 244. 3 Arch. dép., Calvados, C 7622, 7623. 4 Ibid., C 7624, 7625. 5 Ibid., C 7740-8578. 6 Ibid., C 7624. Lettre du 20 mars 1788. 1 Ibid. Lettre des procureurs-syndics à l'ingénieur en chef Lefehvre, du 3 juin 1788. COMMISSION INTERMÉDIAIRE ET POUVOIR CENTRAL 121 une correspondance très suivie avec les ministres, les chefs des divers services régionaux et les bureaux intermédiaires de dépar- tement. Après la réunion des Etats, vers la fin de 1789, sentant que son existence devait être abrégée par la grande réforme administrative de la Constituante, elle borna ses soins à faire exécuter les décrets de l'Assemblée Nationale sanctionnés par Sa Majesté, à surveiller les travaux publics, et à porter la plus sévère économie dans toutes les dépenses à la charge de la pro- vince ». Elle ne se considéra plus dès lors comme une véritable administration, mais comme un bureau provisoire destiné à soutenir l'édifice chancelant de la chose publique »0 en atten- dant l'arrivée au pouvoir des nouveaux corps administratifs qui devaient la remplacer. L'exercice des nombreuses attributions qui lui avaient été confiées impôts, travaux publics et bien public, mit la Com- mission en relations suivies avec les diverses administrations placées au-dessus, à côté ou en dessous d'elle le contrôleur géné- ral et les autres ministres, les Commissions intermédiaires des autres provinces, les bureaux intermédiaires des neuf départe- ments, les municipalités des principales villes de Basse-Norman- die, le service des ponts et chaussées et l'intendance de Caen. Le ministre avec lequel les intendants avaient toujours entre- tenu la correspondance la plus suivie était le contrôleur général des finances. La Commission intermédiaire continua ces relations avec Lambert accusés de réception d'arrêts relatifs à la levée des diverses impositions, demandes d'autorisation d'emploi des fonds réservés à la province, requêtes relatives à la fixation et au paiement des frais de la nouvelle administration, tels furent les objets essentiels de cette correspondance. Ses attributions en matière de finances et de travaux publics la mettaient plus spécialement en rapport direct, au contrôle général, avec deux chefs de service, l'un Blondel, intendant au département des impositions, l'autre, Chaumont de la Millière, intendant au dépar- tement des ponts et chaussées 2. En dehors de son ressort proprement dit, la Commission inter- médiaire eut des intelligences avec les autres administrations 1 Compte-rendu, p. 3. 2 Arch. dép., Calvados, C 7622, 7623. Nombreuses lettres de la Commission ister- médiaire à Lambert, Blondel, de la Millière. Les cinq calepins du départ des lettres enregistrés au contrôle général et conservés aux Arch. nat-, H 1603, peuvent don- ner une idée exacte de l'activité de cette correspondance. 1*22 COMMISSION ET BUREAUX INTERMÉDIAIRES provinciales du royaume. Le projet d'une sorte de confédération entre ces administrations avait germé dans le cerveau de plus d'un procureur-syndic. La France ne devait plus former qu'une grande famille, dont tous les citoyens, se regardant comme des frères, contribueraient par leur union et leurs découvertes à la prospérité de l'Empire » ]. En attendant la réalisation de ce vœu, on proposait la communication réciproque des procès- verbaux des assemblées, et l'échange de vues sur la meilleure gestion possible des intérêts publics. Ce sentiment de concorde fraternelle, précurseur des Fédérations futures, n'aboutit point à un résultat immédiat et la Commission provinciale de Caen n'eut guère de relations suivies qu'avec ses voisines immédiates de Rouen et d'Alençon. C'est surtout dans l'intérieur de la généralité que nous voyons agir la Commission intermédiaire. Elle correspondit presque journellement avec les bureaux intermédiaires, ses subordonnés immédiats, sur tous les objets soumis à leur commune adminis- tration. Instructions et éclaircissements destinés à interpréter les arrêts du Conseil sur la taille et la capitation ; envois de rôles d'impositions, répartition de sommes pour ateliers de charité ; délégations aux bureaux intermédiaires pour les adjudications de travaux publics ; ordres d'enquêtes et demandes d'avis sur la reconstruction des presbytères, sur les requêtes de moins-imposé, sur la formation irrégulière des municipalités ; exercice quotidien d'une tutelle administrative étroite, substituée à celle de l'inten- dant, mille objets servirent d'occasion à une correspondance abondante et ininterrompue, dirigée sur les chefs-lieux des neuf départements. C'était une source de travail écrasant, et Le Telier de Vauville pouvait, en alléguant son propre exemple, relever avec une pointe d'ironie le courage du procureur-syndic de Bayeux, qui cédait aux fatigues d'un surmenage prolongé 2i. Les relations de la Commission intermédiaire de C^ten et des bureaux intermédiaires de département furent en général assez faciles, faites de bienveillance d'un côté, de docilité empressée de l'autre ; quelques bureaux cependant firent preuve d'insou- mission. Le bureau de Caen, par exemple, était impatient de voir étendre ses attributions ; la Commission dut à plus d'une reprise refroidir son zèle, qui brûlait d'embrasser trop d'objets ». Il 1 Arch. dép., Calvados, C 7628. Lettre des procureurs-syndics provinciaux d'Auch à la Commission intermédiaire de Caen, 31 mars 1788. 2 Ibid., C 7623. Lettre du 23 juin 1788. INSUBORDINATION DE CERTAINS BUREAUX 123 voulait avoir la haute main sur les travaux de redressement de l'Orne, sur la construction des casernes et des bâtiments de justice l. L'époque des adjudications pour entretien des routes lui semblait peu heureusement choisie et il reprochait à la Com- mission de n'avoir pas concerté ses opérations avec lui. L'éta- blissement des cantonniers préposés à cet entretien par la Com mission lui paraissait une institution nuisible 2. Le bureau inter- médiaire de Valognes exprimait les mêmes appréhensions n . Celui de Coutances eut voulu avoir la direction de ces employés il voyait avec peine leur destitution réservée à la seule Commis- sion intermédiaire et désirait voir s'agrandir le cercle étroit qui circonscrivait sa propre autorité 4 ». Les bureaux intermédiaires prétendaient délibérer en toute liberté et ne soumettaient pas toujours leurs décisions à l'assentiment de la Commission inter- médiaire. Celle-ci fut obligée d'adresser une circulaire générale pour éviter une variété de méthodes nuisible à la bonne marche de l'administration » 5. Ces divergences de vues amenèrent parfois une tension dans les relations et, comme conséquence, des retards dans l'exécution des décisions de la Commission intermédiaire. L'importance de la question routière en Basse-Normandie obligea la Commission intermédiaire, chargée de la direction des travaux publics, à une correspondance des plus actives avec le service des ponts et chaussées qui avait été placé sous ses ordres. Là encore, les rapports furent loin d'être excellents. La situation que l'ancienne administration avait léguée à la nou- velle était, nous l'avons vu, désastreuse. Réseau routier impar- fait et tracé au hasard, projets coûteux à l'étude, sans ressources pour y faire face, dettes énormes que des impositions sans cesse accrues ne pouvaient parvenir à éteindre ; abus des entrepreneurs 1 Arch. dép., Calvados, C 7666. Lettre du bureau intermédiaire, 22 juillet 1788. Ibid., C 7667. Réponse de la Commission intermédiaire, 4 août 1788. 2 Ibid., C 7623. Lettre de la Commission intermédiaire, 13 août 1788. 3 Ibid. Lettre de la Commission intermédiaire, 17 août 1788. 4 Ibid., C 7700. Rapport des procureurs-syndics à l'assemblée de département de Coutances, 20 octobre 1788. — Le bureau intermédiaire de Carentan fît preuve de plus de soumission. Nous n'avons pu croire, écrit un des procureurs-syndics, que la Commission intermédiaire cherchât à s'attirer trop d'autorité, pas plus qu'à enchaîner nos actions, nos promesses... La Commission intermédiaire provinciale ne cherche point à envahir toute l'autorité... elle ne réclame d'autre supériorité que cette subordination qui est indispensable dans tous les corps, et sans laquelle l'ordre dont dépend leur existence cesserait d'y régner. » Ibid., Manche, C 176. 5 Ibid., Calvados, C 7622. Lettre de la Commission intermédiaire au bureau inter- médiaire d'Avranches, 5 mars 1788. l'M COMMISSION INTERMÉDIAIRE ET PONTS-ET-CHAUSSEES qui s'enrichissaient scandaleusement au détriment du public ; légèreté et imprévoyance du personnel des ingénieurs qui avaient agi sans compter et engagé profondément l'avenir tels étaient les maux auxquels la Commission intermédiaire devait porter remède. Elle fit preuve d'une grande vigilance, mais son action fut souvent entravée par la mauvaise volonté et l'opposition tenace des ingénieurs. Par un esprit de caste excessif, ceux-ci visaient à une indépendance presque absolue. Lefebvre, ingé- nieur en chef depuis 1772, l'avait en fait à peu près conquise. En dépit des appréciations plutôt sévères des intendants à son égard, il échappait au contrôle administratif et, par suite de sa compétence technique, vivait en maître dans son service ; les ingénieurs de département placés sous ses ordres participaient à cette situation privilégiée. Le jour où, devant le péril financier auquel l'incurie et le gaspillage avaient acculé la province, une administration nouvelle essaya de réagir, de contrôler et de corriger ces abus, elle trouva en face d'elle un personnel prévenu et hostile. Avant même qu'elle existât, l'annonce de sa création avait indisposé les ingénieurs. La plus grande régularité, les formalités les plus scrupuleuses dans les opérations sont deve- nues d'autant plus essentielles, écrivait Lefebvre à l'ingénieur de Valognes le 2 juillet 1787, que les assemblées provinciales et leurs commissions intermédiaires les examineront et scrute- ront peut-être avec le désir de nous trouver en faute » l\ La résiliation des adjudications demandée par l'Assemblée provin- ciale et poursuivie par la Commission intermédiaire devait mé- contenter les ingénieurs qui y voyaient une mesure maladroite et impopulaire. Le zèle des nouveaux administrateurs les effraya par la menace d'une surcharge de travail . Malgré les formules courtoises de l'arrêt, c'était un échec pour l'intendant devant qui ces adjudications avaient été passées. Chargée de procéder aux adjudications nouvelles, la Commission intermédiaire allait commettre un empiétement nouveau sur l'autorité de Launay. Celui-ci, blessé jusqu'au vif, allait prendre bientôt sa revanche en paralysant, au nom de la légalité, et pour une pure question de forme, les opérations de cette Commission relatives au recou- vrement de la corvée. Un long conflit, qui dura pendant la pre- mière moitié de l'année 1789, allait mettre aux prises les deux 1 Arch. dép., Calvados, C 4703. Lettre de Cordier de Launay à Necker, 27 février 1788. Pour vous seul, Monsieur », écrit-il en tête de cette lettre. Voir F. Mourlot, Rapports d'une Assemblée provinciale et de sa Commission intermédiaire avec l'intendant. Bulletin des sciences économiques et sociales du Comité des travaux historiques et scientifiques, année 1902, p. 276. 2 Voir supra, chap. IV, p. 71. LEURS CONSÉQUENCES FUNESTES 129 autorités rivales, amener le désarroi dans l'administration, accroître la misère générale, causer de graves préjudices aux intérêts économiques de la province 1. Sur un autre point, la Commission intermédiaire avait été moins heureuse. Un conflit s'étant élevé entre les bureaux inter- médiaires et les officiers d'élection, relativement à la répartition des tailles 2\ ces derniers l'avaient emporté. Sans être le complice de ce succès, l'intendant dut le voir d'un œil satisfait, car il lui rendait le département des impositions pour 1789. Une telle mesure excita le vif dépit de la Commission intermédiaire, dont ce brusque retrait d'attributions ne pouvait que diminuer le prestige aux yeux des populations. Aussi, animée à son tour de dispositions malveillantes vis-à-vis de l'intendant, renonça- t-elle à demander cette année l'augmentation du moins imposé, remise accordée par le roi pour être distribuée aux taillablçs qui avaient subi des pertes de récoltes ou de bestiaux. La raison de son mutisme est mesquine et fort peu louable. Comme ces fonds peuvent être diminués l'année suivante, et comme ils sont desti- nés à soulager la classe la plus ignorante et la plus prévenue contre les Assemblées provinciales, celle des habitants des cam- pagnes, la comparaison des secours accordés par nous avec ceux ' de l'ancien régime serait entièrement à notre désavantage et v nous ferait perdre sous le rapport du crédit et de la bienfaisance une considération qu'il nous est bien important d'acquérir » 3. En fin de compte, cette conception si étroitement jalouse que les deux administrations avaient de leur autorité, cette course à la popularité tournaient au détriment public et n'avaient que des conséquences funestes. Dans une sphère plus restreinte, les neuf bureaux intermé- diaires de département exercèrent les mêmes attributions que la Commission intermédiaire provinciale. Il existe des traces matérielles de leur activité. Nous possédons les registres de délibérations de six d'entre eux ceux de Caen, Bayeux, Vire, Avranches, Saint-Lô, Valognes, et les registres de correspondance des bureaux de Bayeux et de Carentan 4. Leurs séances se te- 1 Voir plus loin, au chapitre XII, l'exposé succinct de ce conflit. 2 Voir ci-dessous, p. 133. 3 Arch. dép., Calvados, C 4703. 4 Ibid., Registres de délibérations de Caen, C 7664 bis ; de Bayeux, C 7655 et de Vire, C 7726 ; deux registres de correspondance de Bayeux, C 7657, 7658. — Arch. dép. de la Manche, Registres de délibérations d'Avranches, C 238 ; de Saint-Lô, C 629 et de Valognes, C 633 ; registre incomplet de correspondance du bureau de Carentan, C 476. 130 BUREAUX INTERMÉDIAIRES ET PROCUREURS-SYNDICS naient dans des locaux spécialement loués pour cet usage ils devaient comprendre au moins une salle pour le greffe et une salle de réunion *. La correspondance administrative était lourde, et souvent le secrétaire se faisait assister d'un ou plusieurs commis expéditionnaires >- . Les procureurs-syndics, qui avaient leur résidence au chef-lieu du département, et qui recevaient des appointements pour leur fonction, devaient consacrer à celle-ci une grande partie de leur temps W. Ils veillaient à l'exé- cution des ordres émanés de la Commission intermédiaire ou dirigeaient la correspondance du bureau sur les divers objets du service; ils étaient, à jours fixes, à la disposition des syndics et des députés municipaux de leurs départements ; ils présidèrent aux ad- judications des travaux de construction ou de réparation de leurs églises, de leurs presbytères et de leurs écoles^ ; ils leur deman- dèrent des renseignements sur leur état fiscal et économique^1. Ce furent, en un mot, des agents de transmission entre la Com- mission intermédiaire provinciale et les municipalités. Leur tutelle fut en général acceptée sans résistance par celles-ci. Tous ces corps administratifs nouvellement organisés se solidarisèrent comme d'instinct, et la hiérarchie des fonctions fut à peu près partout respectée. Toutefois l'autorité des bureaux intermé- diaires ne fut pas sans rencontrer des résistances sur quelques points. Le plus notable exemple d'insubordination fut donné 1 Provisoirement ils s'adjoignirent quatre nouveaux membres le curé d'Engles- jueville, Wimpfen, Le Bret et Tardif. Arch. dép.. Calvados, C 7654. 2 Ibid., C 7624. Lettre des procureurs-syndics provinciaux, 30 mars 1788. 3 Exemples à Fierville-en-Bessin. Fresney-le-Puceux, Juvigny, Secqueville-en- Bessin, Torigni, Couvains, Isigny, Mesnil-Uurand, Clécy, Vaudry, Le Teileul. Lettre intéressante dos procureurs-syndics provinciaux de Caen sur le rôle des bureaux intermédiaires en celle matière, 1" juin 1788. Ibid., C 76-24. 4 Ibid.. Manche. C 629. A Moon-d'Klle, réforme d'un rùle d'imposition en présence d'un délégué du bureau intermédiaire de Saint-Lù. 5 Interventions de ce genre pour les presbytères de Marigny, de-Saint-Germain- d Elle, de Saint-Pierre-de-Cenilly élection de Saint-Lô, Ibid., Manche, C 629 ; de Boucé, de Champeaux, de Dragé élection d'Avranches, Ibid., C 238; de Vretot, de Montaigu élection de Valognes, Ibid., C 633 ; de Bény élection de Vire, du Mes- nil-Aubert élection de Coutances, Ibid., Calvados, C 7628; de Fresnes élection de Mortain, Ibid.. C 7624 ; de Colomby, de Saint-Aubin-d'Arquenay, de Blainville élec- tion de Caen, ibid. 7664 bis ; pour les écoles de Subligny, Ibid., Manche, C 238 et de Ibid., C 633. ijj Jbid., Calvados, C 7817-8088. Observations générales sur l'état des paroisses des élections de Caen et de Vire. LES BUREAUX INTERMEDIAIRES ET LES TRIBUNAUX D ELECTION 133 par la municipalité de Montmartin, dans l'élection de Carentan. L'homme d'affaires de la duchesse de Montmorency née de Matignon, un certain Germain, jouissait d'une grande influence dans cette paroisse. Il n'était pas membre de la municipalité, mais y régnait par une coterie de famille. A son instigation la municipalité refusa de réformer le rôle de la taille qu'elle avait imparfaitement dressé. Dans un libelle injurieux, Germain insulta le syndic municipal, rebelle à son influence, le procureur-syndic du département de Carentan, le bureau intermédiaire et la Com- mission intermédiaire provinciale, et il menaça de faire casser leurs arrêtés par l'intervention du baron de Breteuil. Le bureau de Carentan fit entendre des plaintes assez vives et se crut oblige de demander la destitution des députés municipaux récalci- trants '». Les relations des bureaux intermédiaires et des tribunaux d'élection qui siégeaient au même chef-lieu auraient dû être courtoises et même cordiales. Plus d'un officier d'élection était en même temps administrateur de département tels Le Tuilier, procureur du roi à l'élection de Coutances, Besnard Duchesne à celle de Valognes, Le Monnier, président et Courtin de la Ger- vaisière, conseiller à l'élection de Saint-Lô. Monlien de Perthou, président honoraire d'élection, était membre du bureau de Vire. Bureaux et élections entrèrent pourtant en conflit à propos de la taille. Après l'édit de mai 1788, qui abolissait les tribunaux d'exception en France, un arrêt du Conseil du 8 août avait réglé les formes nouvelles de la répartition de la taille sans le concours des officiers d'élection supprimés. Partout les bureaux intermé- diaires avaient agi seuls '-'. Leur inexpérience et le refus de com- munication par les greffiers d'élection des rôles de département nécessaires à la régularité de l'assiette rendirent leur tâche diffi- cile •'*. Elle s'accomplissait cependant, quand les tribunaux d'élection furent rétablis, par la déclaration du 28 septembre 1788. Le premier acte de ceux-ci fut de protester, au nom de la légalité, contre les nouvelles formes de répartition et de recouvrement 1 Arch. Manche, C 476. Registre de correspondance du département de Carentan. 2 Ibid., Calvados, C 7775. 3 Ces greffiers alléguaient alors comme prétexte de leur refus la fermeture des greffes sur la porte desquels l'intendant avait lui-même apposé son sceau ; ainsi à Avranches, lbid., Calvados, C 1398 ; à Mortain, Ibid., 7707, et à Carentan, Ibid., Manche, C 476. 134 CONFLIT AU SUJET DE LA TAILLE des impôts, qu'on avait substituées à des règles anciennes, sages et sûres » 1. Encouragés dans leur résistance par la Cour des Aides de Rouen, les officiers d'élection firent leurs chevauchées ordinaires 2, dénièrent aux bureaux intermédiaires et aux muni- cipalités rurales le droit de répartir la taille, nommèrent des collecteurs d'office suivant l'ancien usage et condamnèrent parfois à de fortes amendes les syndics et collecteurs qui se refu- saient à leur obéir $. Des lettres patentes adressées à la Cour des Aides de Rouen ne produisirent aucun effet ; celle-ci différa leur enregistrement. Le seul remède que le roi put trouver pour trancher le conflit fut de rendre à l'intendant le département des impositions pour 1789 4-'. L'opiniâtreté des tribunaux d'élection avait eu raison de l'autorité royale. Leur animosité contre les Assemblées provinciales » ^ avait triomphé et l'ancien ordre de choses était rétabli pour un an, au grand dépit de la Commission et des bureaux intermédiaires humiliés 6. En matière de travaux publics, les bureaux intermédiaires s'étaient vu confier la surveillance et l'inspection des routes, l'adjudication et la réception des édifices communaux, églises, presbytères et écoles. Ils avaient à leurs ordres les ingénieurs de département, leurs conducteurs et piqueurs et tous les voyers ou cantonniers répandus dans leur ressort pour l'entretien des chemins. Les relations entre bureaux et ingénieurs furent aussi 1 Arch. dép., Calvados, C 7700. 2 Le 11 novembre 1788, le bureau intermédiaire de Caen informe la Commission intermédiaire paroissiale que M. de Chaumotel, syndic de la municipalité de Bré- ville, vient de lui adresser un billet imprimé qui a été remis au curé de la paroisse par un sieur Bisson. Le curé est prié de prévenir ses paroissiens que le dimanche suivant, M. Boulogne, conseiller élu auquel la sergenterie de Varaville est échue pour son département des visites et chevauchées se trouvera en sa maison de Bobe- homme pour s'informer de ceux qui sont décédés ». Ibid., 7664 bis. 3 Le 29 novembre 1788, le bureau intermédiaire d'Avranches envoie à la Com- mission intermédiaire provinciale copie des ordonnances de condamnations pronon- cées par le tribunal de l'élection contre les paroisses dont les habitants n'ont pas comparu aux chevauchées pour la nomination des collecteurs selon l'ancienne forme. Arch. dép., Manche, C 238. — A Carentan, plaintes du bureau contre le pro- cureur de l'élection, qui a fait condamner à 50 livres d'amende d'assez nombreux syndics de ce département. Ibid., C 476. 4 Ibid., Calvados, C 4398, 7776. 5 Le mot est du procureur-syndic de Carentan 6 Le bureau intermédiaire de Caen déplore la décision du roi qui va enlever aux populations toute confiance dans les administrations provinciales. Arch dép., Cal- vados. C 7776. — Le 9 décembre 1788, il pria Necker de prendre sous sa protection les habitants de la campagne, afin de les préserver des vexations et discussions continuelles qu'ils éprouvent journellement de la part des juges et procureurs de l'élection, dont ils désirent et sollicitent la suppression. » Ibid., C 7666. LES BUREAUX INTERMÉDIAIRES ET LES INGÉNIEURS 135 tendues que celles de la Commission provinciale et de l'ingénieur en chef, et pour les mêmes motifs. Les ingénieurs se plaignaient de l'ingérence continuelle de ces avocats et gens de loi dans les questions où leur compétence technique était très discutable. Celui de Granville exprime à Lefèvre, son ingénieur en chef, la mortification qu'il éprouve à prendre l'heure d'un particulier de Granville, que le bureau intermédiaire de Coutances a désigné pour faire la visite des routes de son district. Vous m'aviez écrit, mon vénérable, que les assemblées d'élection non plus que leurs bureaux intermédiaires n'auraient aucun ordre à donner, et que tout le service se ferait entre vous et moi. Ne devrais- je pas tomber des nues en recevant une lettre impérative du bureau intermédiaire de Coutances et en me voyant obligé de prendre les ordres d'un particulier de ma ville? » * Est-il besoin d'ajouter que les ingénieurs ne répondaient pas avec empressement aux appels des bureaux intermédiaires et qu'ils n'y répondaient pas toujours sur un ton correct '2>. La corres- pondance échangée entre les administrateurs de département et les procureurs-syndics provinciaux est remplie de plaintes contre la lenteur et l'insubordination des ingénieurs, les retards que ceux-ci apportent aux devis des routes, leur mauvais vouloir général i. Ceux-ci à leur tour se plaignent de la surcharge qu'on leur impose en les obligeant à dresser les projets de construction ou de réparation des églises et presbytères ; ils rappellent leurs appointements impayés et menacent de démissionner 4^. La tension des rapports entre les bureaux intermédiaires d'une part, les tribunaux d'élection et le corps des ponts et chaussées de l'autre, était due à une cause d'ordre général. C'était la résis- tance de l'ancien régime contre le nouveau. Cette même cause devait influer sur les relations de ces bureaux avec les subdélé- gués de l'intendant. Ici, la rivalité d'attributions était encore plus accusée ; l'antagonisme était en quelque sorte plus étroit, 1; Arch. dép.,C 3088. Lettre de Demontrocher, ingénieur à Granville, 1? mars 1788. 2 Ibid., C 7G22. Plaintes du bureau de Valognes contre l'ingénieur Déforme, avril 1788. 3 Registre de correspondance du département de Carentan. Ibid., Manche, C 176. Ibid., Calvados, C 8567, 8570. 4 Ibid., C 7623, 7624. Il y eut cependant des exceptions, et l'on voit Didiet, ingé- nieur du département de Caen, offrir aux membres du bureau intermédiaire de ce département, le 30 juillet 1790, à la veille de la cessation de leurs fonctions, en signe d'hommage et en souvenir de leurs bonnes relations, un exemplaire de son ouvrage sur les poids et mesures. Ibid., 7664 bis. 136 LES BUREAUX INTERMÉDIAIRES ET LES SUBDÉLÉGUÉS et les motifs de froissement réciproque plus nombreux. Presque partout, c'étaient les subdélégués qui ouvraient le feu. Le subdé- légué de Bayeux, Gênas, avertissait l'intendant qu'il n'était disposé à fournir aucun renseignement au bureau intermédiaire pour la formation du rôle de la capitation des non-taillables ; s'il aimait à travailler pour son chef, indulgent et bon, il était décidé a ne rien faire pour les autres l1. Celui de Vire, Demor- treux, refusait de confier en dépôt au bureau intermédiaire les procès-verbaux de formation des municipalités de son ressort 2. Lavalley de la Hogue, subdélégué de Carentan, sembla faire cause commune avec les officiers de l'élection et, après avoir brisé les scellés apposés à ce tribunal, se contenta de remettre les clefs du greffe au procureur du Roi, au lieu de faire donner aux procureurs-syndics du département les pièces de ce greffe nécessaires à l'assiette de la taille. Il allégua que ce n'était point sa mission. D'où mécontentement du bureau intermédiaire et de l'assemblée de département, précisément réunie à cette époque, et contrariée dans ses opérations par tous ces retards. La Hogue fut dénoncé par le comte d'Osseville, président du bureau ; l'assemblée jugea sa conduite insidieuse, portant les caractères marqués d'une désobéissance préjudiciable aux droits du roi, et d'un manque absolu d'égards et d'honnêteté envers l'assem- blée et son chef » 3. C'était la rupture, assez grave, entre les représentants des deux administrations, au détriment de la bonne marche des services administratifs. Mécontents des procédés des subdélégués, les bureaux inter- médiaires n'hésitaient pas à en faire remonter la responsabilité jusqu'à l'intendant. Tel le bureau de Vire, qui dans sa querelle avec de Mortreux reprochait à Cordier de Launay de mettre sa volonté à la place d'une loi qui n'existait pas » W. Les renseigne- ments demandés aux bureaux de l'intendance étaient-ils tardifs ou trop peu abondants, les administrateurs de département jetaient les hauts cris Il semble, écrivent ceux de Caen, qu'on cherche à nous tenir dans l'impuissance d'opérer le bien qu'on doit attendre d'une administration vraiment patriotique » 5. Le bureau de Bayeux fut un de ceux qui s'élevèrent avec le plus de 1 Arch. dép., C 7624. Lettre du 2 décembre 1787. 2 Ibid., C 7730. Plaintes du procureur-syndic de Vire, du 25 novembre 1787 3 Ibid., 7690. Ibid., Manche, C 476. 4 Ibid , Calvados, C 7730. 5 Ibid., C 7666. LES BUREAUX INTERMEDIAIRES ET L'INTENDANT 137 fermeté contre l'autorité de l'intendant. Il reprocha vivement à la Commission provinciale son attitude passive. Nous exami- nons votre position, Messieurs, et nous nous demandons quelle espèce de fonction vous remplissez entre Monsieur le Commis- saire départi et nous. L'activité, les voyages, les visites, l'exa- men du détail, voilà notre attribution ; celle de M. l'Intendant est de rendre ses ordonnances sur nos opérations. Nous voyons avec peine que la vôtre à cet égard est entièrement passive. Ce que nous aurons trouvé à propos, ce que vous aurez confirmé, une opinion contraire de la part de M. l'Intendant peut en suspendre l'exécution. » Pourquoi laisser à l'intendant le con- trôle supérieur, la décision suprême? Sa capacité juridique est invoquée comme prétexte est-elle suffisante à justifier une telle procédure? On ne fait pas attention que nos assemblées sont en partie composées de jurisconsultes instruits. Quelle que soit la dignité de M. l'Intendant, ses qualités personnelles auxquelles nous ne pouvons qu'applaudir, la composition des assemblées nous donne lieu d'attendre de leur part une égale prudence dans les décisions. » Aussi le bureau intermédiaire réclame-t-il hardiment pour la Commission provinciale le monopole de l'autorité executive » nl Résumons en quelques lignes les observations de détail pré- sentées dans l'exposé précédent. La Commission intermédiaire provinciale et les bureaux intermédiaires qui fonctionnaient sous son contrôle furent composés d'hommes compétents et en général zélés ; les procureurs-syndics attachés comme agents d'exécution à ces corps administratifs étaient tous à la hauteur de leur tâche. L'activité des uns et des autres est un fait indéniable. Mais des obstacles de toutes sortes empêchèrent cette activité d'être efficace. L'administration nouvelle, à ses deux degrés, dut compter avec de sérieuses difficultés. Du côté des institutions récemment établies, comme les municipalités, l'inexpérience et parfois la défiance et l'insoumission furent les principales causes d'achoppement. Les institutions anciennes, tribunaux d'élection et Cour des aides, corps des ponts et chaussées, subdélégations 1 Arch. dép., Calvados, C 8262. Il ne s'agit plus, ajoute le bureau intermédiaire, d'une simple surveillance sur les opérations des assemblées, mais bien d'un partage de l'autorité executive ; si cette autorité est mi-partie, si l'exercice en est encbe- vêtré, si ses différents mobiles ne coïncident pas avec la plus exacte précision, il faut renoncer à l'espoir des avantages que la bienfaisance du roi se promettait de notre institution. » 138 l'administration désorganisée et intendance, loin d'apporter leur concours aux nouveaux pou- voirs régionaux, les jalousèrent, leur firent une guerre tantôt sourde et tantôt ouverte, paralysèrent à tout moment leur action. Aussi, dès 1788, des germes de décadence apparaissent aux enthousiasmes du début succèdent très vite les désillusions et le découragement. Les ressorts de l'administration se brisent dans un conflit sans issue. Vienne le mouvement révolutionnaire, nul pouvoir établi n'aura assez de vigueur pour le contenir ou le diriger. Le pays est mûr pour l'anarchie administrative. IMPORTANCE DES ASSEMBLÉES DE DEPARTEMENT DE 1788 139 CHAPITRE VII LES ASSEMBLÉES DE DÉPARTEMENT OCTOBRE 1788 Importance des assemblées de département de 1788. — Leur composition. Leurs bureaux et leur programme de travail. — L'enquête économique de 1788. — Vœux de ces assemblées en matière 1° d'impositions taille, capitation non taillable, vingtièmes ; 2° de travaux publics routes, ponts, passage du Vey ; 3° de bien public agriculture et élevage, industrie, commerce, mendicité, hygiène ; 4° d'administration obser- vations sur le Règlement du 15 juillet 1787. — Tendance générale de ces vœux et observations, œuvre de privilégiés. Par ses instructions du 3 novembre 1787, le roi avait fixé au mois d'octobre de chaque année la tenue des assemblées de département dans la généralité de Caen, et limité à une quin- zaine de jours la durée de leur session. Elles devaient précéder la tenue de l'Assemblée provinciale, afin que leurs travaux pussent éclairer les décisions de celle-ci. Cette mesure marquait nettement leur caractère de subordination, les plaçait à un rang secondaire dans l'organisation administrative de la province. Or, en 1788, par suite de la convocation des Notables, les Assemblées provinciales ne se réunirent point. Cette interruption de leur tenue, que Necker déclarait momentanée » a, et qui devait être définitive, fit passer au premier plan les assemblées de département, qui devenaient les plus hautes assemblées déli- bérantes de la généralité. Les procès-verbaux de leurs délibé- rations devaient être transmis à Necker par la voie des procureurs syndics sans aucun intermédiaire. Fières de ce droit d'adresse que les circonstances leur avaient accordé, les neuf assemblées de la généralité de Caen profitèrent de leur session de 1788, qui devait être aussi la dernière, pour 1 Arch. dép., Calvados, C 7667. Necker la motiva par la présence obligatoire d'assez nombreux présidents et membres des Assemblées provinciales à l'Assemblée des notables, convoquée pour le 3 novembre 1788. 140 COMPOSITION DES ASSEMBLÉES DE DÉPARTEMENT remplir le vaste programme de travail qu'avaient dressé leurs procureurs-syndics et leurs bureaux intermédiaires, et soumettre à un examen des plus sérieux les divers objets dont l'administra- tion leur était confiée. La composition de ces assemblées n'avait pas très sensiblement varié depuis 1787. Les modifications qui s'y étaient introduites étaient dues à des décès, des démissions ou des incompatibilités. A Bayeux, une lettre d'excuses de l'évêque président, reçue à la dernière heure, força l'assemblée à se choisir comme président intérimaire le chevalier de Berné . Trois projets sont présentés à l'assemblée d'A- vranches pour le tracé . En un mot, une active campagne fut entreprise, et toute la Normandie se crut à la veille de rede- venir une grande province indivisible et indépendante. La généralité de Caen prit une grande part à cette campagne. Ses différents organes administratifs, Commission et bureaux intermédiaires, assemblées de département, municipalités urbai- nes et rurales se firent les interprètes du vœu public. Ils s'y crurent autorisés par les termes de l'arrêt du Conseil du 5 juillet 1788, invitant les officiers municipaux des villes et des commu- nautés ainsi que tous les corps constitués, à rechercher dans leurs archives tout ce qui concernait les anciens Etats généraux du royaume. Leur grande habileté consista à lier deux questions distinctes, celle des Etats généraux et celle des Etats provinciaux, à subordonner la solution de la première à celle de la seconde, à demander que le rétablissement des Etats particuliers de la Normandie fût antérieur à la convocation des Etats généraux. Nulle part la nécessité d'associer ces deux mesures ne fut mieux exposée que dans le mémoire rédigé après la tenue d'une assem- blée générale à l'hôtel de ville de Caen, le 30 septembre 1788, par les deux commissaires désignés à cet effet Gosset de la Rousserie, conseiller au bailliage, et Costy, avocat, bailli de Courseulles. 1 Un Mémoire concernant les anciens Etals de Normandie, manuscrit non daté, mais qui a été rédigé dans le dernier trimestre de 1788, porte la signature du duc d'Harcourt. Il est conservé aux archives du château d'Harcourt, liasse 337. — Dans le même dossier ligure une note de la main du duc, relative aux Etals géné- raux de 1302 à 1496. 2 Ibid., liasse 338. Lettre de dom Lenoir au duc d'Harcourt, 30 octobre 1788. 3 Ibid., liasse 338. Lettres écrites au duc d'Harcourt par Duperie de Lisle, lieu- tenant général du bailliage de Caen, les 18 août, 10 novembre et 7 décembre 1788, envoi de renseignements extraits des archives du bailliage et de l'hôtel de ville de Caen, et d'une nouvelle édition de la Charte aux Normands. — Cf. Aperçu des cahiers des Etats généraux de la province de Normandie, tenus vers la fin du XVIe siècle et dans les cinquante-cinq premières années du XVIIe, pour servir de continuation aux éclaircissements donnés par le bailliage d'Orbec, s. 1. 1788, 27 p. 4 Ibid., liasse 338. Lettre du marquis d'Héricy-Vaussieux à la duchesse d'Har- court, 5 août 1788. SON POINT DE DEPART 159 Si la Normandie, disaient-ils, n'a point, avant l'Assemblée de la nation, présenté ses cahiers, les doléances du peuple, les impôts qui détruisent son commerce, ses manufactures et ses fabriques, ceux qui nuisent au progrès de l'agriculture, et les impôts qu'il serait possible de substituer, les formes les plus c avantageuses de perception, l'abus de quelques privilèges particuliers, comment se formerait l'ouvrage important que Votre Majesté, aidée des lumières de son peuple, a pour désir de conduire à sa perfection ? . . . Il semble donc que chacune des provinces doit, avant l'Assemblée de la Nation, méditer et approfondir ses ressources particulières comme ses besoins, et concourir à la plus grande utilité du gouvernement. . . L'uti- e lité des Etats provinciaux est trop vivement sentie pour que nous n'ayons pas l'heureux espoir d'en voir la convocation prochaine précéder l'Assemblée de la Nation » W. Il semble que le point de départ de la campagne des Etats provinciaux dans la généralité de Caen fut un mémoire du bureau intermédiaire de Bayeux. En accusant le 10 septembre 1788, à la Commission intermédiaire provinciale de Caen réception de l'arrêt du Conseil du 8 août qui venait de lui parvenir, ce bureau lui témoignait toute sa joie d'une si heureuse nouvelle et affirmait sa foi dans le prochain rétablissement des Etats normands, qui étaient un droit pour la province. Il adressait quelques jours plus tard, le 15 septembre, un mémoire sur cet objet au comte de Balleroy, procureur -syndic provincial ; émettant d'assez curieuses considérations sur les Etats généraux dont on se lasse- rait avant cinquante ans, il demandait des Etats provinciaux superposés aux trois Assemblées provinciales, et s'applaudissait de la solidité de la réclamation, jointe à la grandeur de l'exem- pie » $. Les autres départements de la Basse-Normandie acquiescèrent vite à ce projet. En écrivant aux municipalités de leur ressort pour demander leur vœu sur la forme de la convocation des Etats généraux, les procureurs-syndics de Coutances leur annoncèrent que la future assemblée de département s'occuperait des Etats provinciaux de la Normandie et qu'elle délibérerait sur les avantages qui peuvent résulter de leur rétablissement ou de la continuation des Assemblées provinciales, ou enfin du concours 1 Arch. château d'Harcourt, liasse 338. 2 Arch. dép., Calvados, C 7641. 160 PARTICIPATION DES MUNICIPALITES RURALES ET URBAINES des deux administrations » * ; ils les invitèrent à fournir leurs observations sur cet objet important. Dans plus d'une paroisse des départements de wSaint-Lô, de Coutances, de Valognes, des délibérations furent prises en faveur du rétablissement des Etats particuliers '2. Toutes les paroisses du département de Caen furent appelées à se prononcer sur cette question, et les procu- reurs syndics de Caen, leur envoyèrent même des modèles impri- més de délibérations. Les Assemblées paroissiales se tinrent pour la plupart le dimanche 5 octobre ; quelques-unes le 12 octobre. Il y eut là comme un référendum provoqué parles administra- tions locales, et dont les traces nous ont été conservées i. Il est certain que le mouvement n'a pas été spontané, mais que l'on a obéi à un mot d'ordre. 'Quelques paroisses refusèrent même de délibérer et ajournèrent leur décision à l'époque où l'on saurait la forme de ces anciens Etats pour voir s'il y avait vraiment utilité à les rétablir » *\ Dans les villes, l'initiative fut plus grande. Dès le 30 septembre, on l'a vu plus haut, une assemblée générale des notables réunie à l'hôtel de ville de Caen décidait à l'unanimité de solliciter du Roi la convocation des Etats de la province de Nor- mandie, pour préparer le grand ouvrage des Etats généraux » ; le 22 octobre, la même ville députait deux échevins à Versailles pour obtenir cette convocation immédiate !7il Le 15 octobre, dans une requête où ils résumaient l'histoire des anciens Etats nor mands, les officiers municipaux d'Avranches réclamaient le bé- fice immédiat de l'arrêt du 8 août °. Le 17 octobre c'était le tour 1 Arch. comm., Granville, registre Iter. Délibération du 17 octobre 1788. 2 Exemples à Dampierre, Sainte-Suzanne-sur- Vire, Saint-Jean-de-Uaye dépar- tement de Saint-Lo ; à Valcanville, Saint-Pierre-Eglise département de Valognes; Muneville-sur-Mer, Orval département de Coutances. Arch. communales de ces diverses communes registres des délibérations octobre 1788. Pour Daye, Arch. dép., Calvados non inventorié. 3 Arch. dép., Calvados, C 7632-7635. 4 Ibid.. C 7675. — Le curé de Maisoncelles écrit le 13 octobre que les savants du pays disent que les Etats n'auront rien d'utile, et pie d'ailleurs les Assemblées provinciales sont absolument supprimées de jeudi dernier. » Tbid., C 7675. — Les officiers municipaux de Granville pensent que la plupart des communautés de campagne ne formeront pas de vœu » comme l'espéraient le^ procureurs-syndics de Coutances. Arch. comm., Granville, registre lier, délibération du 17 octobre 1788. — Toutefois celles-ci semblent avoir adhéré au projet, si l'on en croit le rapport du bureau du Bien public de Coutances. Arch. dép., Calvados, C 7699. 5 Arch. comm., Caen. Registre des délibérations BB 96, 30 septembre 1788 et 22 oc- tobre. Cf. 6 Arch. château d'Harcourt, liasse 338. Lettre des officiers municipaux d'Avran- ches au duc d'Harcourt, 15 octobre 1788. PARTICIPATION DES ASSEMBLEES DE DEPARTEMENT lfl du Conseil général de Granville1; le 26 octobre, des officiers municipaux et des notables de Saint -Lô 2 ; le 2 novembre de l'hôtel de ville de Carentan ; le 7, de l'hôtel de ville de Cou- tances W. Le 19 novembre, le maire et les échevins de Cherbourg croient au retour très prochain des Etats, et tout en y réclamant pour leur ville une députation particulière, remercient le roi d'un si grand bienfait . Le 18, un mémoire remarquable du comte de Faudoas, un des procureurs syndics du département de Caen, servait de base à la rédaction d'un arrêté en dix articles sur la formation et le fonctionnement des Etats de Normandie 1,. Le 20 octobre, six jours avant la délibération de l'hôtel de ville, l'assemblée de Saint-Lô prenait un arrêté relatif au même objet 1]. Celui de l'assemblée d'Avranches, au contraire, daté du 21 octobre, suivit de six jours la délibération de la municipalité 1 Arch. comm., Granville. Registre des délibérations 1 1er, délibération du 17 oc- tobre 1788. Cf. Arch. dép., Calvados, C 6354, extrait imprimé des registres des déli- bérations, 6 p. in-4°, et leltre d'envoi des officiers municipaux, 21 octobre 1788. 2 Arch. château d'Hareourt, liasse 338, avec lettre d'envoi du 30 octobre 1788. 3 Arch. comm., Carentan, Registre de délibérations, 2 novembre 1788. 4 Arch. dép.. Calvados, C 6353. Extrait imprimé du registre de délibérations. 12 p. in-8°, et lettre d'envoi du 15 novembre 1788. 5 Arch. comm., Cherbourg, BBS et AA64. Cf. Arch. château d'Hareourt, liasse 338. G Ibid., Bayeux. Registre de délibérations n° 13, délibération du 8 décembre Hss 7 Une circulaire des procureurs-syndics provinciaux, envoyée le "21 septembre 1788 a leurs collègues des neuf départements, aurait contribué à grouper les volon- tés en ce sens. Les procureurs-syndics de Vire y t'ont allusion. Arch. dép.. Calva- dos, C 7725. 8 Ibid., C 7707. 9 Ibid., C 7690. 10 Arch. château d'Hareourt, liasse 338. llj Arch. dép., Calvados. C 7714. 11 12 l'appui du duc d'harcourt de cette ville l. A Bayeux, l'abbé de Pradelle, qui avait été un des initiateurs de toute la campagne par ses Recherches histo- riques sur les Etats généraux et provinciaux, eut des imitateurs. Deux membres de l'assemblée, le baron d'Ecrammeville et l'avo- cat Bunouville lurent le 18 et le 22 octobre des mémoires qui servirent de base au projet du bureau du Bien public, ratifié le 25 octobre 2. Le même jour, l'assemblée de Vire prenait la même résolution 4 DIVERGENCES SUR LE MODE D'ORGANISATION DES ÉTATS la plupart des membres y siégeaient avec voix délibérative, en vertu de leurs titres et qualités. Ce droit héréditaire de séance était incompatible avec les mœurs du temps ; le principe électif devait lui être substitué. On y tenait d'autant plus que les Assem- blées provinciales ne tiraient pas leur origine de libres élections ». Sur ce point il n'y avait qu'un cri W. Quelle devait être la circonscription électorale? Conserverait-on le bailliage comme dans l'ancien système? Les quarante-huit districts judiciaires de la Normandie, bailliages, vicomtes ou hautes justices assimilées auraient envoyé chacun un nombre déterminé de députés des trois ordres aux Etats provinciaux. Tel était l'avis de l'assemblée de Bayeux. Les autres assemblées proposèrent la circonscription financière ou administrative exis- tante l'élection ou département ces deux termes désignant le même ressort dans la généralité de Caen. Ces espèces d'arron- u dissements, en général assez bien faits, disaient les députés de Saint-Lô, semblent concentrer plus particulièrement les intérêts de chaque district par la distribution individuelle d'une masse d'impôts ordonnés par le Conseil. La réunion des intérêts rapproche plus les individus, ils se connaissent mieux, et sont plus à portée de connaître les qualités personnelles des membres qu'ils doivent choisir » 'lK Même fluctuation d'avis sur le nombre de députés que devaient contenir les Etats provinciaux. L'assemblée de Coutances, qui sollicitait des Etats particuliers pour la seule généralité de Caen, fixait ce nombre à 108 douze par élection ; l'assemblée de Bayeux en adoptant le bailliage comme base électorale, demandait 195 députés pour la province entière {i\ La municipalité de Granville, considérant la grande population de la Normandie, la somme énorme d'impôts qu'elle acquittait, demandait qu'on accordât à cette province un nombre de représentants propor- tionné à son influence politique, et proposait le chiffre de 576 4>. 1 Il n'y aura plus d'autre droit de séance que celui résultant d'une élection libre », décide l'assemblée de Saint-Lô. Arch. dép., Manche, »-i 628. — - négociants pour Rouen, Caen et Le Havre. 4 Arch. comm., Granville. Reg. des délibérations, 17 octobre 1788. Cf. Arch. châ- teau d'Harcourt, liasse 338. VOEU GÉNÉRAL FAVORABLE AU VOTE PAR TETE 165 Quelle devait être dans l'ensemble de cette représentation la part proportionnelle de chaque ordre? S'appuyant de l'exemple du Roi, qui avait décidé le doublement du Tiers dans la forma- tion des Assemblées provinciales, l'opinion réclama la même organisation pour les futurs Etats provinciaux. En général on désirait les voir composés à l'instar de ceux du Dauphiné, c'est-à- dire pour un sixième du clergé, pour un tiers de la noblesse et pour la moitié du Tiers état. Le clergé, abonné, payait moins que la noblesse et avait droit à une représentation moins forte ; quant au Tiers, qui payait la majeure partie des impôts, et dont les intérêts étaient souvent en opposition avec ceux des ordres privilégiés, il était juste de l'appeler aux Etats en nombre égal à celui des ecclésiastiques et des seigneurs réunis. Si la composition des Etats n'avait point été calquée sur celle des Assemblées provinciales, la province aurait perdu au change. Le Tiers état, après avoir été, comme le rappelait la municipalité d'Avranches, le marchepied, le sommier qui porte tout le faix », avait grandi en importance et tenait à ce que l'influence des divers ordres fût suffisamment balancée » l. Aussi faisait-il de sa double représentation une condition essentielle du rétablisse- ment des Etats provinciaux. Au cas où le roi refuserait de la lui accorder, il le suppliait de laisser les choses dans l'état où elles étaient actuellement dans la province de Normandie » 2. Ce doublement du Tiers, si énergiquement réclamé, ne pouvait produire tous ses effets que s'il était accompagné de son corollaire logique, la fusion des trois ordres en une assemblée unique au sein des Etats provinciaux. Ainsi se posait la grave question du vote par ordre ou par tête. Elle était déjà résolue pour la tenue des Assemblées provinciales, dont les bureaux avaient été formés par les membres des ordres confondus et dont les suffrages avaient été cueillis au scrutin individuel. La plupart des munici- palités et des assemblées de département demandèrent l'adoption de la même forme pour les Etats provinciaux, cette manière étant propre à accélérer infiniment les affaires. . . » 3. Des vœux d'allure aussi démocratique devaient rencontrer plus d'un adversaire. A l'assemblée de Vire, le procureur syndic 1 Lettre des officiers municipaux d'Avranches au duc d'Harcourt, 15 octobre 1788. Arch. château d'Harcourt, liasse 338. 2 Requête de l'assemblée de département de Caen au Roi, 25 octobre 1788. Ibid., liasse 338. 3 Vœu de l'assemblée de Saint-Lô. Arch. dép., Manche, C 628. Même vœu des assemblées de Coutances, de Valognes ; des villes de Caen, Rayeux, Granville. 166 LES PARTISANS DU VOTE PAR ORDRE noble protesta, au nom de ses collègues de la noblesse, presque tous absents, contre le doublement du Tiers et le vote par têteW. Dans un département voisin, celui de Falaise, dont les voix allaient se mêler à celles des électeurs de la généralité de Caen pendant les opérations de la convocation des Etats généraux, le même esprit d'opposition se manifesta. Le procureur-syndic du clergé et de la noblesse, le marquis de Ségrie, se fit, dans une lettre au duc d'Harcourt, l'interprète assez violent des craintes que la prépondérance future » du Tiers état inspirait aux ordres privilégiés. Cet ordre, dit-il, étant composé en majeure partie de rustres sans éducation, usant de leurs avantages sans aucune retenue, quand un paysan aura pris son seigneur en aide de taille, quand il le verra inscrit à côté de lui sur le rôle de la corvée, quel respect pourra lui inspirer l'eau bénite et la préséance dans le chœur ? Cette vaine distinction ne sera plus qu'un objet de dérision. Il est évident que le but de cette politique est d'affaiblir l'ordre de la noblesse par le Tiers état. N'est-il pas à craindre que M. Necker, républicain, ne favorise ce système? Il est grand temps de protester contre la nouvelle formation, qui renverse absolument l'ancienne constitution. Il est à craindre qu'on ne veuille l'introduire dans la composition des Etats provinciaux »?. En dépit de quelques voix discordantes et de tendances rétro- grades isolées, la cause du Tiers état était gagnée dans l'opinion publique. Celle-ci se prononçait pour le retour des Etats provin- ciaux bien conformes et bien organisés » 3>, c'est-à-dire adaptés aux besoins nouveaux du pays. Elle se montrait favorable au maintien du régime administratif nouvellement établi, au sys- tème des commissions intermédiaires permanentes, des assem- blées de département, des municipalités rurales. Elle réclamait le doublement du Tiers, le vote par tête et le principe de la libre élection substitué à celui de la désignation par le roi ou du recru- tement par cooptation. A y regarder de près, ses desiderata étaient ou réalisés ou à la veille de l'être. L'édit de 1787 y avait satisfait ou y promettait prompte satisfaction. Au premier cri de la croisade entreprise pour le rétablissement Cl Arch. dép., Calvados, C 7725. 2 Lettre du marquis de Ségrie, 31 octobre 1788. Arch. château d'Harcourt, liasse 338. — Lettre du comte de Vendœuvre, président de l'assemblée de Falaise, au duc d'Harcourt, 1er novembre 1788 Si l'on vote par ordre, le nombre des députés de chaque ordre sera indifférent, mais si au contraire on se détermine à compter les voix, alors le Tiers état aurait trop d'avantage. » Ibid., liasse 338. 3 Lettre du comte de Balleroy au duc d'Harcourt, 23 octobre 1788. Ibid., liasse 338. DÉBATS SUR LE CHOIX DU CHEF-LIEU 167 des Etats provinciaux, les partisans du passé avaient évoqué l'image de la Normandie féodale, du duché souverain avec ses antiques privilèges, les prérogatives de ses premiers ordres. Quand il s'agit d'organiser pratiquement ce rêve, les rédacteurs de projets reconnurent la nécessité d'introduire des change- ments dans les formes anciennes », et ils ne trouvèrent rien de mieux que l'organisation administrative existante. Que le but poursuivi fût la constitution d'Etats généraux de la province ou d'Etats particuliers à chaque généralité, ces Etats devaient être la continuation des Assemblées provinciales. Plus d'une assem- blée de département, en 1788, fit le rapprochement i. Selon le mot des procureurs syndics de Coutances, ce que la Basse-Nor- mandie demandait ressemblait si fort à l'Assemblée provinciale, qu'elle ne paraissait demander qu'un changement de nom » 3. Une autre question agitait les esprits dans quelle ville se réu- nirait l'assemblée des futurs Etats provinciaux? Le débat était circonscrit entre deux villes Rouen, capitale de la province, importante par sa population, son commerce, sa richesse, et Caen, la principale ville de la Basse-Normandie, située dans une position plus centrale. Tous les regards se tournèrent vers le duc d'Harcourt les partisans de l'une et l'autre ville sollicitèrent sa puissante intervention en leur faveur. L'intendant de Rouen plaida chaleureusement la cause de cette ville ; il fit craindre au gouvernement les suites fâcheuses qu'entraînerait l'opposition du Parlement et de la Chambre des Comptes, il lui signala l'es- prit d'insurrection » qui commençait déjà à gagner Rouen, Le Havre, Dieppe, Honfleur et les environs. De son côté, le comte de Balleroy, procureur syndic noble de la Basse-Normandie, priait le duc d'Harcourt de faire établir les Etats au centre de la province et surtout hors de portée des influences contraires, qui pourraient occasionner des choses toujours dommageables à 1 Avch- dép., Calvados, C 7699. La suppression de l'Assemblée provinciale sera une suite nécessaire de notre projet », dit le bureau du Bien public de Coutances. Nous avons pensé, dit le département de Caen en soumettant son projet au duc d'Harcourt, que la composition actuelle des Assemblées provinciales en Normandie paraissait présenter la manière la plus avantageuse de former une bonne adminis- tration, à cause de l'activité de sa correspondance et de la quantité des personnes des trois ordres qui, participant tous également aux différents détails de l'adminis- tration, veillent à l'intérêt commun... nous avons préféré d'assimiler le genre d'ad- ministration de la province au régime nouveau que nous désirons que Votre Majesté daigne adopter pour la formation des Etats de Normandie. » 2 Ibid., C 7641. 168 AJOURNEMENT DE LA RESTAURATION DES ÉTATS la chose publique » U. Les préférences du duc d'Harcourt étaient connues on savait que, pour éloigner des Etats l'influence toujours redoutable des cours souveraines de Normandie, il proposerait au roi le choix de Caen comme siège des futurs Etats provinciaux. Cette résolution avait suscité des enthousiasmes en Basse-Normandie ' 'l\ de graves mécontentements dans la Haute. Ainsi au moment même où la province, qui semblait aspirer au rétablissement de son unité, allait toucher au but de ses désirs, des germes de division éclataient et sous cette trompeuse harmo- nie perçait un antagonisme réel. La Normandie, déjà désarticulée, déjà sectionnée au point de vue administratif, l'était également au point de vue moral. L'unité normande était alors une chimère. Les circonstances s'opposèrent d'ailleurs à la réalisation immé- diate de ce projet. Ce fut en vain que, le 21 janvier 1789, le duc d'Harcourt envoya à Laurent de Villedeuil, ministre de la pro- vince, une invitation très pressante en vue de l'établissement d'une assemblée consultative, élue en même temps que les dépu- tés aux Etats généraux, et qui se joindrait à ceux-ci à Caen au mois de mars, pour travailler en commun au plan de formation des Etats particuliers ». Ce fut vainement qu'il menaça la Cour d'une insurrection de la Normandie 3. Necker, pour expliquer son retard, prétexta un travail de dépouillement considérable, occa- sionné par la multitude des requêtes arrivées de tous les points du royaume. Il consentit à la réunion consultative désirée par d'Harcourt sans pouvoir rien dire de positif sur le lieu, la forme et l'époque de cette assemblée préalable ». Il l'autorisa à faire connaître à la Normandie, en envoyant les lettres de convocation pour les Etats généraux, qu'elles seraient prochainement suivies 1 Arch. château d'Harcourt, liasse 338. Lettre de Maussion, intendant de Rouen, au duc d'Harcourt, 31 décembre 1788. — Ibid., lettre du comte de Balleroy au même, 23 octobre 1788. ? Traces d'une campagne entreprise par le bureau intermédiaire de Caen, qui provoque près des huit autres bureaux de la généralité une pétition en faveur de Caen. Arch. dép., Calvados, C 7668. — La Basse-Normandie crut, d'après un bruit qui courut alors, que les Etats étaient rendus à la province. Des lettres adressées au duc d'Harcourt les 7, 15 et 18 janvier 1789, par les députés des départements de Caen, de Saint-Lô et de Vire, pour lui demander sa protection en faveur de Caen comme siège des Etats provinciaux, regardent le rétablissement de ceux-ci comme un acte consommé ». Arch. château d'Harcourt, liasse 339. 3 Arch. nat, Bm 132. Lettre du duc d'Harcourt à Villedeuil, 21 janvier 1789. Je ne vous cacherai pas que si son vœu n'était pas écouté, qu'elle fût trompée dans cet espoir qu'elle a attendu de son silence et de sa soumission, il serait fort possible que la fermentation qui ne s'est que trop étendue dans d'autres provinces, se communi- PROMESSE D'ORGANISATION PROCHAINE 169 d'un règlement particulier concernant les Etats provinciaux l!. Quelques jours plus tard, pour simplifier l'opération, il fut décidé que cette assemblée consultative pouvait être exclusive- ment formée par les députés librement élus pour représenter la province et stipuler ses plus chers intérêts aux Etats généraux, sans qu'on leur en adjoignit d'autres ». Les députés des bailliages pourraient se réunir si le temps le leur permettait, soit en tel lieu de la province qui leur serait indiqué, soit de préférence dans le lieu même de la convocation des Etats généraux », pour aviser à l'organisation future de la Normandie 2. Par cette mesure habile, on évitait de trancher la question de préséance entre Rouen et Caen et l'on ajournait les difficultés inhérentes au rétablissement des Etats. Toutefois, pour donner satisfaction aux aspirations de la province, on prescrivait aux sujets des trois ordres de donner à leurs députés une mission particulière pour dresser un plan de formation des Etats pro- vinciaux ». Cette question restait donc entière en mars 1789. Le bruit qu'elle avait soulevé n'était pas encore éteint. Nous en retrouverons l'écho dans la plupart des cahiers de dolé- ances. 1 Arch. nat., B m 132. Lettre de tfecker au duc d'Harcourt, 25 janvier 17* 2 Ibid. Lettre de Villedeuil à Necker, 29 janvier 1789. 170 l'arrêt du conseil du 5 juillet 1788 CHAPITRE IX LA CONVOCATION DES ÉTATS GÉNÉRAUX. ,E MOUVEMENT ÉLECTORAL DANS LES BAILLIAGES DE CAEN ET DE COUTANCES Influence successivement exercée sur l'opinion publique par l'arrêt du Conseil du 5 juillet 1788, les avis des Notables et le Résultat du Conseil du 27 décembre 1788. — Malaise économique et agitation populaire. L'émeute de Caen, 5 janvier 1789. Le Règlement du 24 janvier 1789. Réclamations qu'il soulève. — Méca- nisme des opérations électorales des trois ordres. Effacement des agents du pouvoir central et liberté relative des élections. Le mouvement électoral du clergé. Inquiétude du haut clergé ; attitude hostile du bas clergé. — Le mouvement électoral de la noblesse ; conservateurs et libéraux. — Le mouvement électoral du Tiers état. 1° Assemblées primaires des campagnes. La comparution individuelle. Condition sociale des députés ruraux envoyés aux assemblées préli- minaires des bailliages rôle actif des hommes de loi. — Dans les villes, assemblées préparatoires des corps et corporations élimina- tion du prolétariat industriel ; prépondérance des corps judiciaires. Assemblées des citoyens non incorporés. — Assemblées plénières urbaines. — 2° Assemblées préliminaires des bailliages. La compa- rution des paroisses. L'élection des commissaires rédacteurs du quart réduit. Effacement des députés ruraux au profit de la bourgeoi- sie et de la robe. Depuis le 19 novembre 1787, jour où le roi avait promis la convocation assez prochaine des Etats généraux, l'attention de tous les esprits éclairés, et ils étaient nombreux en Normandie, avait été attirée sur cet important objet. Aussi, lorsque l'arrêt du 5 juillet 1788 eut prescrit de rechercher dans les greffes des villes et des juridictions les documents relatifs à cette convo- cation, lorsque l'arrêt du 8 août suivant eut fixé la date de leur réunion au 1er mai 1789 V, un immense mouvement d'opinion 1 Arrêt du Conseil d'Etat, concernant la convocation des Etats généraux du royaume, 5 juillet 1788. A. Brette, Recueil de documents, I, p. 19-23. — Arrêt du Con- seil d Etat qui fixe au 1er mai prochain la tenue des Etats généraux du royaume, etc. Ibid., p. 23-25. LES AVIS DE LASSEMBLÉE DES NOTABLES 171 se déchaîna dans cette province. La Normandie n'eut pas besoin de se recueillir longtemps elle était toute prête à répondre. Elle se hâta d'autant plus qu'elle avait lié à la question des Etats généraux celle du rétablissement des anciens Etats provinciaux, et qu'elle attachait un grand prix à la possession immédiate de ces derniers 1. Un autre stimulant fut l'annonce, pour le 3 no- vembre 1788, d'une nouvelle assemblée de Notables destinée à éclairer le gouvernement sur la meilleure forme des futurs Etats généraux. La Normandie, qui devait y compter trois députés 2>, s'empressa de formuler, à titre d'indication et de conseil, ses préférences sur le mode de la convocation. Dans la Basse-Nor- mandie, dès le début d'octobre 1788, municipalités de villes et de campagnes, Commission et bureaux intermédiaires, assem- blées de département prirent des délibérations, rédigèrent des arrêtés, des mémoires, des pétitions sur cet objets. Il n'y eut pour ainsi dire qu'un seul cri pour répudier la forme surannée de 1614. Aussi, quand arriva la nouvelle des avis rétrogrades donnés au roi par les Notables, des protestations s'élevèrent de tous les coins de la Normandie. Dans la généralité de Caen, ce fut Vire qui donna l'exemple. Une pétition circula en novembre dans toutes les maisons ; couverte de plus de deux cents signa- tures et arrêtée le 30 novembre, elle fut apportée le 6 décembre sur le bureau de l'hôtel de ville -lK Les officiers municipaux l'adres- Une déclaration royale du 23 septembre avait annoncé l'ouverture des Etats généraux pour le mois de janvier 1789. — A. Brette, ouv. cité, l, p. 25-27. Le résultat du Conseil du 27 décembre la fixa définitivement au 27 avril. Ibid., p. 37. Elle n'eut lieu, en réalité, que le 4 mai 1789. 1 Voir chap. VIII, p. 158 et suivantes. 2 Le duc d'Harcourt, le duc de Coigny et Ménage de Cagny, maire de Caen. 3 Délibérations des municipalités rurales dans le département de Saint-Lô, Sainte-Suzanne-sur-Vire 12 octobre; Dampierre et Saint-Jean-de-Daye 19 octobre, Arch. dép. Calvados, non inventorié ; dans le département de Coutances, Muneville- sur-Mer 12 octobre, Arch. comm. Muneville ; Orval 19 octobre, Ibid., Orval ; men- tion des délibérations d'Agon. Bréville, Arch. dép. Calvados, C 7699. — Délibérations des municipalités de villes Granville 17 octobre, Arch. comm., registre de délibé- rations lier; Saint-Lù 26 octobre; Arch. château d'Harcourt, liasse 338; Carentan 2 novembre, Arch. comm., registre des délibérations. — Arrêtés des assemblées de département Mortain 14 octobre 1788, Arch. dép. Calvados, C 7707 ; Carentan 16 octobre, Ibid., C 7690 ; Vire 20 octobre, Ibid., C 7725 ; Saint-Lô 20 octobre, lbid., Manche, C 628 ; Baveux 25 octobre, Ibid., Calvados, C 7654 ; Coutances et Valognes 29 octobre, Ibid., C 7699, 7720. 4 Mémoire que présentent à MM. les maire et échevins de la ville de Vire les gardes jurés de la manufacture de draps, négociants, marchands, fabriquons et autres citoyens de Vordre du Tiers état de la dite ville. Arrêté le 30 novembre 178H. Arch. nat., Ba 27, liasse 45. 172 PROTESTATION GÉNÉRALE DU TIERS ÉTAT sèrent au roi, en y joignant une délibération qui l'approuvait entièrement '0t Le mémoire des communautés et corporations du Tiers état de Rouen, que la municipalité de cette ville adopta à la même époque, et qu'elle envoya à toutes les municipalités du royaume, devait avoir plus de retentissement encore W. Cette adresse de Rouen encouragea les revendications de la Basse-Normandie et leur servit de guide. Pendant tout le mois de décembre, le Tiers état des villes manifesta sa surprise et son mécontentement à l'égard des décisions des Notables et pria le roi de passer outre ; communautés et corporations, avocats des bailliages envoyèrent au garde des sceaux ou à Necker, soit directement, soit par l'intermédiaire des assemblées de villes, qui les accompagnaient d'une délibération spéciale, de respec- tueuses mais fermes pétitions. Tour à tour, l'on voit entrer en scène Avranches 3, Granville 4, Saint-Lô 5, Bayeux 6, Caen y, Barfleur et son arrondissement ^8, Cherbourg °, Bricquebec et 1 Délibération du 6 décembre 1788. Arch. comm. Vire, registre de délibérations. 2 Mémoire des communautés el corporations du Tiers état de Rouen, approuvé par ÏHôtel de ville de Rouen, le 30 novembre 1788 ; publié par Hippeau, Le gouvernement de Normandie, tome VJ, p. 171-178. 3 Arch. dép. Calvados, C 6348. Mémoire présenté au roi par les maire et èchevins de la ville d' Avranches 1er décembre 1788. Avranches, Lecourt, 18 p. 11 reproduisait les vœux exprimés par le Mémoire des avocats du bailliage d' Avranches, 17 p., imprimé ;i la même date. Ce dernier mémoire fut adressé, le 31 décembre 1788, à la chancellerie par le barreau d'Avranches. Arch. nat., Ba 35, liasse 70. 4 Arch. comm. Granville, Registre de délibérations, 1 1er, 5 décembre 1788. 5 Mémoire des citoyens du Tiers état de Saint-Lô, du 5 décembre 1788, suivi de la délibération du 7 décembre 1788, avec lettre d'envoi des officiers municipaux au garde des sceaux, du même jour. Arch. nat., Ba 35, Le 16 décembre, Le Menuet en- voyait à Necker un Mémoire des avocats du bailliage de Saint-Lô, rédigé le jour même. Ibid. 6 Ré vint donner satisfaction partielle aux demandes des Bas-Normands. Il annon- çait que le nombre total des députés aux Etats généraux serait formé autant que possible en raison composée de la population et des contributions de chaque bailliage, que le nombre des dépu- tés du Tiers état serait égal à celui des deux autres ordres réunis et que les prochaines lettres de convocation établiraient cette proportion. Le roi avait donc repoussé l'avis des notables. Bien plus, adoptant les vues de Necker, il traçait tout un programme de réformes et comme un cahier général modèle de doléances ; il y promettait la périodicité des Etats généraux, le rétablissement immédiat des Etats provinciaux 2, le consentement de l'impôt par la nation, des lois sur la liberté individuelle et la liberté de la presse, le compte exact des dépenses annuelles. En un mot, au seuil même des élections, le roi décrétait une révolution pacifique et réglée fi. 1 Résultai du Conseil d'Etal tenu à Versailles devant le roi 27 décembre 1788. A. Brette, ouv. cité. I, p. 37. 2 On crut même alors que ce rétablissement était un acte consommé ». Voir chapitre VIII. p. 108. 3 Aulard. Histoire de lu Révolution française, p. 32, et le Programme royal aux élections de 17B% dans Etudes et leçons sur la Révolution française, lrt série, p. 41-54. LACUNES DES CONCESSIONS ROYALES 175 Le Résultat du Conseil fut accueilli en Basse-Normandie avec une respectueuse reconnaissance ». Plusieurs villes exprimèrent au roi par des Adresses de remercîments » la douce émotion » qu'elles avaient ressentie à sa lecture. On a conservé celles de Vire *, de Saint-Lô % de Valognes 3>, et deBayeux 4. Toutefois il y avait des lacunes dans les concessions royales. La Normandie n'avait reçu aucune réponse à deux de ses deman- des les plus pressantes l'interdiction à la noblesse du droit de représenter le Tiers état et la promesse du vote par tête dans une assemblée unique. La récente déclaration du gouvernement était muette sur ces deux points. Les villes de Basse-Normandie, tout en s'avouant satisfaites des résultats obtenus, résolurent de ne pas s'endormir sur une demi-victoire. Elles pensèrent, avec la commune de Rouen, que sur le premier point les justes motifs de la pétition du Tiers n'avaient pas cessé d'exister » et elles se promirent d'user de circonspection clans leur choix. Elles persé- vérèrent dans leur projet d'unification de la future assemblée, et pénétrées du même esprit de concorde et de résignation que Rouen, elles attendirent de l'évidence des principes, du doux empire de la persuasion et du désir commun du bien public, que les trois ordres, cessant de se regarder comme trois frac- tions de la nation et de s'isoler comme des partis contraires, consentissent à s'y réunir pour former par des délibérations communes cette unité désirable sans laquelle on concevrait difficilement une vraie et utile représentation nationale ». L'union fraternelle des trois ordres en vue de soulager les charges du peuple aurait été plus que jamais nécessaire à ce mo- ment, où l'agitation provoquée par la misère et les souffrances publiques menaçait la sécurité et pouvait susciter de graves embarras au gouvernement. L'hiver de 1789 avait été long et rigoureux. Epuisé par une série d'années mauvaises 5, le peuple 1 17 janvier 1789. Arch. comm. Vire. Registre des délibérations, BB1. 2 Adresse de remercîments au roi par les officiers municipaux de Saint-Lù 19 jan- vier 1789. Arch. nat., Ba 35, 1. 70. 3 Adresse de remercîments des officiers municipaux au garde des sceaux Barentin. 20 janvier 1789. lbid., Ba 35, 1. 70. 4 Adresse de remercîments au roi par les officiers municipaux. 21 janvier 1789. Ibid., Ba 27, 1. 45. A Caen, lorsqu'on annonça à l'audience du bailliage la nouvelle de la double représentation du Tiers, des applaudissements unanimes éclatèrent dans la salle ». On fut toutefois surpris que le roi y eût consenti. Esnault, Mémoires de la ville de Caefi, p. 1.. 5 Etat de la récolte de 1788 adressé par l'intendant, 31 octobre 1788. Arch. dép., Calvados, C 2638 et 2711. — On trouve la trace de l'inquiétude des campagnes dans 170 MALAISE ÉCONOMIQUE. L'ÉMEUTE DE CAEN des campagnes était réduit à la plus grande détresse le froment, le sarrasin, nourriture principale du paysan bas-normand, le cidre manquaient. Des épizooties avaient décimé le bétail ; la rareté du bois rendait le combustible très cher. Ce profond malaise économique, supporté avec résignation dans les villages, amena des désordres dans les villes, où les souffrances s'exaspé- raient par le contact. La moindre occasion y était propice à l'émeute. A Caen, le 5 janvier 1789, veille de l'Epiphanie, les boulangers, avec l'autorisation du lieutenant général de police, avaient supprimé la distribution traditionnelle du gâteau des Rois » al La foule irritée força et pilla leurs boutiques ; elle se rua ensuite à l'hôtel du lieutenant général qu'elle envahit. Elle en brisa les portes et les fenêtres, vola tous les meubles de la cuisine, les nipes de la domestique, tenta de mettre le feu à la maison, brisa les bois et les volets des fenêtres et les jeta dans la rue W. Les troupes de la garnison et la milice bourgeoise purent contenir l'émeute, mais la situation était grave et il fallut prendre des mesures urgentes pour secourir les indigents et faire cesser les troubles. On chercha des ressources de tous côtés. Le nouveau directeur du théâtre de Caen donna une représentation au béné- fice des pauvres T!; les grenadiers du régiment d'Artois, qui étaient de garde aux représentations, abandonnèrent au profit de ceux-ci la solde attachée à leur service. Les prieur et juges- consuls versèrent la dépense de leur repas de corps annuel, soit livres, entre les mains des curés de la ville qui préparaient les Onservations générales annexées aux états d'imposition de 1788 conservés pour les les élections de Caen et de Vire ; voir les paroisses suivantes 1° dans l'élection de Caen Benouville, Arch. dép., Calvados, C 7835 ; Billy, C 7841 ; Bissières, C 7812 ; Blainville, C 7843 ; Cheux, C 7865 ; Colle ville-sur- Orne, C 7871 ; Colombelles, C 787-2 ; Espins, C 7887 ; Grainville-sur-Odon, C 7906 ; Grcntheville, C 7907 Juvi- gny, C 7919; Le Locheur, C 7926; Longvillers, C 7927; Montigny, C 7942 ; Monts, C7943; les Moutiers, C 7947; Mutrécy, C 7948; Parfouru, C 7953; Bocquancourl. C 7963 ; Saint-Aubin-d'Arquenay, C 7969 ; Saint-Ouen-du-Mesnil-Oger, C 7979 ; Saint-Pair, C 7980; Saint-Pierre-du-Jonquet, C 7981 ; Sannerville, C 7987 ; Touffre- ville, C 7996 ; Troarn, C 8000 ; Troismonts, C 8001 ; Vacognes, C 8002 ; Valineray. C 8004 Vieux, C 8009; — 2° dans l'élection de Vire Champ-du-Boult, C 8026 ; La Lande-Vaumont, C8041; Le Mesnil-Benoît, C 8046 ; Ondefontainc, C 8053 ; Perrigny, C 8054 ; Saint-Sever, C 8078. 1 Esnault, Mémoires de Caen, t. I, p. 2. Cf. Dufour, Mémoire et Remarques, t. I, p. 29. 2 Lettre de Le Harivel de Gonneville, lieutenant général de police, à l'intendant Cordier de Launay. 6 janvier 1789. — Lettre le celui-ci à Necker même dalej. Arch. dép., Calvados, 26?5 ; Journal de la Basse-Normandie, 1789, n°3. Ou donna en spectacle l'Amant jaloux el la Dut.. 18 janvier 1789. LA FERMENTATION POPULAIRE 177 des soupes économiques et veillaient aux distributions de riz C1. La municipalité enrôla les travailleurs âgés de plus de dix ans pour balayer la neige des rues 2. Un arrêté du bailliage autorisa une quête par paroisse ; les magistrats la firent eux-mêmes et elle rapporta, en quatre jours, la somme de livres, aussitôt distribuée aux curés pour les pauvres 9t Dans toute l'étendue de la généralité de Caen, mêmes souf- frances, même inquiétude, même agitation. Aubin, maire de Condé-sur-Noireau, signale à Necker l'état alarmant des orphe- lins, infirmes et indigents, prêts à mourir de faim et de froid » après de longs mois de privations 4. La municipalité de Gran- ville organise des soupes populaires et un magasin de blé 5; celle de Vire, des ateliers de charité 6; à Carentan, des distri- butions d'argent ont lieu ?. Sur une requête pressante de la Com- mission intermédiaire provinciale de Caen, Necker autorise celle-ci à prélever, en faveur des pauvres de la généralité, une somme de livres sur les fonds libres de la capitation 8. L'inten- dant Cordier de Launay obtient du ministre une somme de livres, destinée à payer l'approvisionnement en grains qu'un négociant de Caen a fournis 9. Ces dons insuffisants, rapidement engouffrés, font courte trêve à la misère et n'em- pêchent ni les grondements ni les troubles populaires. L'arrêt du Conseil du 23 novembre 1788, laissant libre cours à la circulation des grains dans l'intérieur du royaume, inquiète et agite le peuple dans presque toutes les élections de la généralité , écrit l'intendant ; les murmures et la fermentation sont à leur com- ble »10. Une sédition éclate à Carentan à l'occasion d'un enlève- 1 Journal de la Basse-Normandie. 1789, n° 2, 11 janvier 1789. — Desbordeaux, curé de Saint-Julien de Caen, envoie au rédacteur de ce journal la recette d'une soupe économique qu'il fait pour ses pauvres 30 pots par jour, taisant plus de 100 portions, le tout ne lui coûtant que 6 1. 13 s.. Elle est faite de pommes de terre, graisse, oignons. sel, poivre et pain. Ibid . n° 3, supplément. 2 Arch. comm., Caen, BB™. 3 Journal de la Basse-Normandie, 1789, n° 3, supplément. 4 Lettre d'Aubin, bailli et maire de Condé-sur-Noireau, à Necker, du Ier avril 1789. Arch. comm., Condé-sur-Noireau, BBS. 5 Ibid., Granville, Registre des délibérations, 10 et 19 décembre 1788. 6 Ibid., Vire, Registre des délibérations. 7 Ibid., Carentan, Registre de délibérations, 3 janvier 1789. 8 Lettre de la Commission intermédiaire provinciale, 12 janvier 1789, et réponse de Necker, 29 janvier 1789. Arch. nat., H1 1420. 9 Lettre de Cordier de Launay à Necker, 29 janvier 1789, et réponse de Necker, 7 février 1789. Arch. nat.. II1 1420. 10 Lettre de Cordier de Launay, du 28 mars 1789. Arch. dép., Calvados, C 2688. 12 178 LE RÈGLEMENT DU 24 JANVIER 1789 ment de grains et se propage jusqu'à Saint-Lô ll. Le duc de Beuvron envoie des troupes à Valognes afin que les émeutes ne s'y renouvellent pas » 2. Ce fut au milieu de cette fermen- tation que tomba le Règlement du 24 janvier 1789, qui traçait les règles pour la convocation et l'élection aux Etats généraux W. La convocation, étant un acte de l'autorité judiciaire, se fit par bailliages, selon les anciennes formes, et non par départe- ments, comme le demandait l'opinion publique. L'article 2 du Règlement divisait les bailliages en principaux et secondaires. Cette division n'avait pas pour but de rabaisser au-dessous des bailliages principaux ceux de la deuxième classe la qualification de secondaire n'avait rien d'humiliant pour ces derniers ; le garde des sceaux s'empressa de l'écrire aux officiers de ces juridictions, pour éviter tout froissement 4. Une telle distinction n'était applicable que dans cette circonstance et en matière électorale seulement on l'avait imaginée pour ramener les opérations de la convocation aux formes de 1614. Les bailliages principaux devaient députer directement aux Etats généraux, les bailliages secondaires indirectement et au second degré. Le territoire de la généralité de Caen comprit, approximativement, deux bailliages principaux, ceux de Caen et de Coutances. Au ressort électoral de Caen furent rattachés les bailliages secondaires de Bayeux, Torigni, Vire et Falaise ; à celui de Coutances les bailliages secon- daires de Saint-Lô, Avranches, Valognes, Saint-Sauveur-Lende- lin séant à Périers, Saint-Sauveur-le-Vicomte, Cérences, Mor- tain et Tinchebrai 5. 1 Arch. dép., Calvados, C 2675. 2 Ibid., C 1970. 3 Règlement fait par le Roi pour l'exécution des lettres de convocation, publié par Brette, ouvr. cité, 1, p. 77. 4 Arch. dép., Calvados, C 6345. 5 M. Brette a publié, dans son Atlas des bailliages ou juridictions assimilées ayant formé unité électorale en 17H9, une carte très précise reproduisant la généralité de Caen dans ses rapports avec les bailliages ou juridictions assimilées qui servirent alors de circonscriptions électorales. Elle montre de façon saisissante l'enchevêtre- ment des diverses juridictions dont les contours sont souvent bizarres, et qui, sous le nom d'extensions, comptent de nombreuses enclaves dans les ressorts parfois très éloignés. Le bailliage de Tinchebrai a trois enclaves dans celui de Caen 1° Coudé, Athis et environs; 2° Aunay et Bauquay ; 3° Coulvains. Falaise a une enclave dans Caen Saint-Ouen-du-Mesnil-Oger. Le bailliage de Torigni envoie dans le bailliage restreint de Saint-Lù une protubérance en forme de trompe. d'Aire! à Rampan. Coutances a deux extensions dans Saint-Sauveur-Lendelin Le Pirou et Gouville. Saint-Sauveur-Lendelin a une enclave dans Coutances Agon, et deux dans Saint- Sauveur-le-Vicomte 1° Saint-Nicolas, Donville ; 2° Besneville. Huit extensions du RÉCLAMATIONS DES BAILLIAGES 179 La situation était moins nette que ne semblait le supposer le Règlement du 24 janvier. A peine connut-on les termes de celui-ci que des réclamations nombreuses se produisirent 0. Si les bail- liages secondaires de Caen acceptèrent la situation provisoire qui leur était faite, plusieurs de ceux du Cotentin protestèrent. Angot, bailli de robe longue du siège de Saint-Sauveur-le-Vicomtc écrivit au garde des sceaux qu'il fermerait les yeux sur le droit de son bailliage à députer directement aux Etats généraux 2. Les officiers du bailliage de Valognes rappelèrent à Necker l'étendue, la population, les charges fiscales de leur ressort et la considération toute spéciale dont il aurait dû être l'objet 3. Ce fut à Mortain que les récriminations furent les plus vives. Après le comte de Sourdeval, président de l'assemblée de département W, Vaufleury de Saint-Cyr, lieutenant général du bailliage, et le comte de Géraldin, grand bailli d'épée, firent valoir avec insis- tance les droits anciens du bailliage à la représentation directe 5. Le collège des avocats, le syndic militaire, les citoyens des trois ordres joignirent leurs revendications à celle des officiers de cette juridiction dans une assemblée tenue le 21 février 1789. Le 9 mars, en dépit du Règlement du 24 janvier, une assemblée bailliage de Saint-Sauveur-le-Yicomte bigarrent celui de Valognes. Le bailliage de Carentan, qui a une extension dans Valognes, Barneville-sur-Mer, possède non loin de sa frontière une enclave de ce dernier bailliage, Montgardon, et en plein cœur une enclave de Saint-Sauvetir-le-Vicomle, Liesville, Houesville, Angoville-au-Plain. Le bailliage de Cérennes, aux formes déchiquetées, s'enfonce dans celui de Cou- tances, et y détache deux enclaves Lingrevillc et Yquelin. Une extension d'Ar gentan occupe le centre du bailliage de Mortain. Il est à remarquer que le bailliage de Falaise, à part une douzaine de paroisses de l'élection de Vire, n'appartient pas au cadre territorial de la généralité de Caen. 1 De toutes les provinces, la Normandie avait dû recevoir la première ce règle- ment. La Normandie sera mise la première en mouvement sur cette grande affaire, afin qu'elle continue de servir d'exemple et de modèle... » Lettre de Necker au duc d Harcourt. 25 janvier 1789. Arch. nat., BUI 132. 2 Lettre d'Angot au garde des sceaux, 17 février 1789. Ibid., Ba 35, 1. 70. 3 Lettre des officiers du bailliage de Valognes au directeur général des finances, 19 février 1789. Ibid. 4 Le comte de Sourdeval avait, par l'entremise de la Commission intermédiaire provinciale de Caen, transmis sa requête à Necker le 20 janvier 1789. Ibid., Ba 35, 1. 70. — La réclamation d'une représentation directe du bailliage de Mortain aux Etats géné- raux se trouve au registre de l'assemblée du département de Mortain tenue en octo- bre 1788. Arch. dép., Calvados, C 7707. 5 Lettres de Vaufieury de Saint-Cyr à Necker, 11 et 15 février 1789. Lettres du comte de Géraldin à Necker et au garde des sceaux, 18 février 1789. Arch. nat., Ba 35, 1. 70. Sur ce différend, voir abbé Pigeon, Le grand Bailliage de Mortain en 1789 Mém. de la Société académique du Cotentin, 1880, III, et Un Episode de la convocation des Etals généraux le conflit de deux Bailliages Révol. française, t. XXXIV, 14 jan- vier 1898. 180 RÉCLAMATIONS DES VILLES ET COUPS des trois ordres fut réunie à Mortain sous la présidence de Géral- din elle se contenta d'ailleurs d'une vaine protestation et ne prolongea pas autrement sa résistance. A l'instar du bailliage de Mortain, plusieurs villes de Basse- Normandie aspiraient à une représentation directe. Vire exposa qu'elle avait eu ses députés particuliers aux Etats de 1467 1. Saint-Lô, tout en faisant au bien général le sacrifice de ses droits, tint à les faire constater, à défaut de ses registres perdus, par des citations extraites de la Chronologie des Etats de 1467 » "2. Cherbourg fit valoir l'importance de sa situation comme clef et forteresse de la province », sa population accrue par suite des travaux immenses que le roi y avait ordonnés et se glorifiant d'avoir été l'objet du premier voyage » de Louis XVI, lui demanda une députation spéciale aux Etats généraux *. L'Université de Caen, par la voix de son recteur Tirard Deslongchamps, pria le garde des sceaux de lui marquer si elle aurait ses représentants aux Etats généraux, surtout lorsqu'on y traiterait de l'éducation publique » ' 4 . Le Bureau des finances de Caen avait eu soin d'établir par les extraits de ses registres, relatifs aux Etats de 1484, de 1576 et de 1614, le droit qu'elle avait d'y députer un trésorier de France 5. Le gouvernement rejeta toutes ces prétentions et déclara vouloir s'en tenir, sans déroger, aux principes généraux qui avaient inspiré la convocation. Il ne s'arrêta pas davantage aux réclamations des villes qui, comme Granville, se déclaraient lésées par la concession d'un trop petit nombre de députés à l'assemblée bailliagère 6 ; ni à celles des chapitres qui, mécon- i\u Conseil chargés de régler la convocation n'a- vaient rien trouvé ù changer. Ibid., B1" û'A. MÉCANISME DES OPERATIONS ÉLECTORALES 181 tents, comme celui de Bayeux, de n'avoir qu'un délégué par dix chanoines, demandaient la représentation individuelle de leurs membres à l'assemblée du clergé l ; ni à celles des corporations, qui redoutaient l'influence prépondérante des magistrats dans les collèges électoraux des villes 2l En ce qui concerne la Basse- Normandie, il appliqua à la lettre les dispositions du Règlement du 24 janvier 1789. D'après ce Règlement, les deux premiers ordres ne devaient tenir qu'une seule réunion électorale, au chef-lieu des deux bailliages principaux, c'est-à-dire à Caen et à Coutances. Tous les nobles, en personne ou par procureur, étaient convoqués à l'assemblée de la noblesse. Les ecclésiastiques bénéficiers avaient voix individuelle dans celle du clergé ; les non-bénéficiers ainsi que les membres des communautés séculières et régulières, n'avaient droit d'y être représentés que par députés. Ces assem- blées devaient nommer directement leurs députés aux Etats généraux le clergé et la noblesse avaient droit, dans le bailliage de Cotentin, chacun à quatre députés ; dans celui de Caen, chacun à trois. Le mécanisme était plus compliqué pour l'élection du Tiers état. Les assemblées primaires des campagnes devaient choisir un certain nombre de députés en raison de leur population 3 ; celles des villes où les délégués des corps et corporations, groupe déjà réduit, venaient se joindre aux autres citoyens indépendants du Tiers état, avaient droit à quatre députés. Un état particulier, annexé au Règlement, désignait nominativement les villes les plus importantes auxquelles on accordait une députation plus nombreuse ; six villes se trouvaient ainsi désignées dans l'étednue des deux bailliages de Caen et de Cotentin. C'étaient Caen, avec 30 électeurs ; Cherbourg, avec 10 ; Granville, avec 8 ; Bayeux, 1 Lettre du lieutenant-général du bailliage de Caen au garde des sceaux, 19 fé- vrier 1789. Arch. nat, Ba 27, 1. 45. La protestation du chapitre de Bayeux aura sa réper- cussion dans l'assemblée du clergé de Caen. — Cf. la lettre d'un chapelain de Cou- tances, Desplanques de Ventigny, à Necker, 25 février 1789. Ibid., B111 53. 2 Lettre de Le Fauconnier, syndic des maîtres en pharmacie de Caen, à Necker 22 février 1789 ; demande d'explication sur l'article 26 du règlement crainte que les juges des bailliages, eaux et forcis, bureau des finances, élection, grenier à sel, .juges aux dépôts, cours des monnaies, amirautés, hautes justices, etc., si on les con- sidère comme corps autorisés, n'aient la prépondérance sur les députés des arts mécaniques et la majorité dans l'élection des trente députés de la ville de Caen. Ibid., Ba 27, 1. 45. 3 Elles devaient nommer deux députés en raison de 200 feux et au-dessous ; trois, au-dessus de 200 feux ; quatre, au-dessus de 300 feux, et ainsi de suite. 182 LIBERTÉ DES ÉLECTIONS. GOUVERNEUR ET COMMANDANT EN CHEF Coutances et Valognes, avec 6. Les délégués des paysans et ceux du Tiers état des villes devaient se réunir pour former l'assemblée préliminaire du bailliage. Les quinze assemblées préliminaires qui se tiendraient dans le ressort des deux bailliages principaux devaient se réduire alors au quart d'entre elles ; ces nouveaux élus devenaient à leur tour les électeurs du Tiers état dans les deux assemblées générales de Caen et de Coutances. La première avait droit à six députés, la seconde à huit. La période électorale, ouverte dès le début de février dans les ressorts judiciaires de Basse-Normandie, y fut close par la réu- nion plénière des trois ordres, qui eut lieu à Caen et à Coutances le 16 mars 1789. Le gouvernement se fit une règle de la neutralité la plus absolue. Tous ceux qui, à un titre quelconque, le repré- sentèrent reçurent l'ordre de se tenir en dehors du mouvement électoral, de n'exercer aucune pression sur la rédaction des vœux et le choix des députés aux Etats généraux. Le duc d'Har- court, gouverneur de la province, retenu à Meudon auprès du jeune Dauphin dont il était le gouverneur, resta étranger aux événements et se contenta de prendre des informations sur eux au fur et à mesure qu'ils se déroulaient W. Son frère, le duc de Beuvron, commandant en chef 2, eut pour unique mission de maintenir, de concert avec l'intendant, le bon ordre et la tran- quillité publique. On lui recommanda d'user de prudence et de modération, d'éviter soigneusement tout ce qui pourrait avoir l'apparence de la contrainte, et faire craindre l'influence de l'autorité » 3. Il tomba d'ailleurs malade au mois de mars pen- dant un séjour à Rouen 4. Vers la fin de février 1789, l'intendant avait attiré son attention sur les troubles qu'essayaient de fomen- ter à Caen des jeunes gens venus de Rennes, sur leurs assemblées 1 Lettres écrites au duc par le marquis de Blangy et le duc de Coigny. Arch. château d'Harcourt, liasse 339. Minute autographe de réponse du duc d'Harcourt au duc de Coigny, 18 mars 1789 Je vous remercie, mon cher, duc, de votre attention à me mander la marche de votre assemblée... Je reçois jusqu'à présent des nouvelles également tranquillisantes des divers bailliages de la province... J'en rends un compte exact au roi, qui prend un véritable intérêt à la province... » — François- Henri, duc d'Harcourt, alors âgé de 63 ans, était gouverneur de la Normandie depuis 1783. — VoirBrette, ouv. cilé,, t. I, p. 391. 2 Anne-François d'Harcourt, duc de Beuvron, alors âgé de 61 ans, après avoir été commandant en second, était devenu commandant en chef en Normandie. A. Brette, Ibid., t. I, p. 437. 3 Lettre de Villedeuil au duc de Beuvron, 12 février 1789, publiée par Hippeau, ouv. cité, t. Vf, p. 27. 4 Lettre de Maussion, intendant de Bouen, au duc d'Harcourt, 27 mars 1789. Arch. château d'Harcourt, liasse 339. RÔLE PASSIF DE L'INTENDANT 183 en plein ailleurs scènes tapageuses au théâtre *. Ce ne fut qu'une vaine alarme ; tout se borna à quelques bruyantes manifesta- tions d'étudiants et l'autorité militaire n'eut pas à intervenir 2. ; L'intendant de Caen, Cordier de Launay, avait reçu des mi- nistres Villedeuil et Barentin des ordres encore plus précis que le duc de Beuvron. On le priait de s'employer à faciliter l'exécu- tion des règlements, et à procurer, autant que possible, la célérité et l'uniformité, tout en s'abstenant avec le plus grand soin rela- tivement aux élections de tout ce qui pourrait présenter l'appa- rence de la contrainte, de la gêne ou même de l'influence, l'in- tention du roi étant d'y faire régner une entière liberté » 3. Etait-il besoin d'ailleurs de lui faire de telles recommandations? A quelle influence pouvait prétendre un magistrat dessaisi de son ancienne autorité, et dont la disparition était souhaitée par tous? Cordier de Launay resta par principe étranger aux délibé- rations des diverses assemblées électorales de la généralité et se borna à transmettre au pouvoir central les renseignements que lui adressèrent ses subdélégués W. Il n'avait plus d'ailleurs une grande confiance dans le concours effectif de ces derniers. Sa lettre du 15 janvier 1789 au garde des sceaux est très significative sur ce point Je ne vous dissimulerai pas, Monseigneur, lui écrivait-il, que depuis les changements médités ou survenus, mes subdé- légués ont perdu beaucoup de leur influence sur les communau- tés, de leur crédit et de leur considération même dans l'opinion publique, quoiqu'il n'aient point démérité aux yeux de l'admi- nistration. Je l'ai prévenu, il y a déjà quelque temps, de leur découragement et de l'intention où plusieurs étaient de cesser les rapports qu'ils avaient avec le Conseil pour se procurer 1 Minute de lettre écrite le 22 février 1789 de la main de l'intendant. Arch. dép., Calvados, C 6346. Monsieur le duc, je crois de la prudence de vous prévenir sur le sujet de mes appréhensions. Plusieurs jeunes gens de Rennes sont arrivés dans cette ville. Grand nombre de personnes du Tiers, presque tous d'un âge incompétent, s'as- semblent irrégulièrement au buffet du cours et y tiennent des séances politiques. On avait commencé à arborer des cocardes et à se parer de boucles et de boutons caractéristiques des distinctions adoptées par le Tiers état. Il y a eu avant-hier grand tapage à la Comédie, et l'état de faiblesse militaire où nous sommes réduits, a contraint de céder au parterre... » 2 Lettre du duc de Coigny, 10 mars 1789. Arch. château d'Harcourt, liasse 338. 3 Lettres de Villedeuil, 1er février 1789, et de Barentin. 10 février 1789, à l'inten- dant de Caen. Arch. dép., Calvados, C 6345. 4 Comme je me suis abstenu d'avoir ni directement ni indirectement la moin- dre influence sur les délibérations qui ont été prises, écrivait-il le 8 avril 1789, et que je n'en ai de connaissance que par des informations particulières et par la voie publique, je ne tenterai point de vous en oflrir l'analyse ni le résultat. » Ibid. 184 EFFACEMENT DES SUBDÉLÉGUÉS dans le système actuel une existence politique plus conforme à leurs vues. Je les ai retenus jusqu'à présent par les liens de la confiance et de l'attachement ; mais il est à craindre que l'im- pulsion de l'intérêt personnel, et l'espoir fondé de figurer d'une manière plus intéressante même aux yeux de leurs conci- a toyens ne leur fasse adopter d'autres principes et d'autres règles de conduite. Il est d'observation que la plupart de nos subdélégués sont lieutenants généraux de bailliage, et il faut convenir que dans ce moment leur rôle est très embarras- sant » f*. Ainsi, d'après les prévisions de l'intendant, deux sortes de raisons devaient empêcher ses subdélégués de la secon- der utilement chez les uns l'effacement résultant du déclin de leur popularité ; chez les autres le désir de reconquérir cette popularité par l'abandon de leurs fonctions. Ces prévisions étaient assez justes. Le Harivel de Gonneville, qui avait succédé dans la subdélégation de Caen à Le Paulmier décédé en 1788, était impopu- laire, surtout comme lieutenant de police le pillage de sa maison dans l'émeute du 5 janvier en était une preuve. De Mortreux, subdélégué de Vire, fut écarté dès le premier vote et ne comparut pas à l'assemblée préliminaire du bailliage. Il en fut de même pour Gênas à Bayeux et pour Mombrière à Coutances. Le grief le plus sérieux qu'on leur fit était leur attachement à l'inten- dant '2. Couraye du Parc, maire et subdélégué de Granville, ne fut pas élu député de sa ville à Coutances ; la lettre découragée qu'il avait écrite à Launay fit un instant craindre à celui-ci qu'il ne voulût déserter son poste f3. Garantot fut un des dix délégués de Cherbourg à l'assemblée préliminaire de Valognes, mais il n'alla pas plus loin. Ni Robillard, subdélégué de Saint-Lô, ni Sivard de Beaulieu, subdélégué de Valognes, ni Lavalley de la Hogue à Carentan, malgré leur qualité de lieutenant général, qui leur donnait la présidence des assemblées électorales de leur bailliage, ne furent choisis au nombre des députés désignés par celles-ci. Leur passé d'administrateur avait sans doute amassé contre eux des rancunes tenaces, qui trouvaient en ce jour l'oc- 1 Trois d'entre eux occupaient cette fonction. Robillard à Saint-Lô, Sivard de Beaulieu à Valognes, Lavalley de la Hogue à Carentan. 2 Le subdêlégué de Vire se trouva à la première assemblée générale où tout le inonde était invité ». Il n'assista pas aux autres et ne sait ce qui s'y est passé. Je n'en ai rien vu, écrit-il, car, comme on sait que je vous suis très attaché, on ne m'a nommé ni appelé en chose quelconque ». Lettre de Mortreux à l'intendant. 12 avril 1789. Arch. dép., Calvados, C 6359. 3 Lettre de Couraye-Duparc à l'intendant, 18 février 1789. Ibid., C 635L LES MEMBRES DE L' ADMINISTRATION PROVINCIALE 185 casion de se manifester. Sur les onze subdélégués de la généralité de Caen, un seul assista à l'assemblée des trois ordres d'un grand bailliage ce fut de Montitier, subdélégué d'Avranches et lieute- nant particulier de l'élection l. Encore son élection avait-elle soulevé des objections de principe et ne dut-il son succès qu'aux sympathies des électeurs pour sa personne *. Si l'ancienne administration, systématiquement tenue à l'écart des assemblées délibérantes, et s'en défendant elle-même l'accès, n'y joua aucun rôle et n'influa en rien sur leurs décisions, la nouvelle administration provinciale, au contraire, envoya aux assemblées du Tiers un grand nombre de ses membres. Beaucoup de ceux-ci avaient déjà dit leur mot pendant les pré- ludes de la convocation, soit comme officiers municipaux des villes, soit comme juges ou avocats des bailliages et des élections. Us avaient à ce titre, en plus d'un endroit, formulé les vœux du Tiers état, rédigé les protestations ou les adresses de reconnais- sance au roi. Ils étaient tout prêts à consigner à nouveau dans les cahiers les aspirations de leur ordre. Aussi les retrouverons- nous bientôt en possession d'un rôle actif et d'une influence prépondérante, d'abord comme députés de leurs paroisses rurales ou de leurs villes, puis en qualité de commissaires-rédacteurs dans les assemblées préliminaires, et quelques-uns enfin comme députés de leur bailliage aux Etats généraux 3. Ajoutons toutefois qu'ils durent cette influence à leur valeur personnelle, 1 A une lettre où Montitier semble lui demander des directions, lintendant répond le 10 mars 1789. Cordier de Launay voit avec plaisir que malgré l'empire des préjugés son mérite et son patriotisme l'ont placé au rang des députés. Il ne voit pas d inconvénient à ce que Montitier se conforme aux vœux de ceux dont il a fixé le choix ; il le laisse fort libre à cet égard et ne veut influer en rien dans sa détermi- nation, » Arch. dép., Calvados. C 6348. — Montitier devait mourir à Coulances, le 1er avril 1789, des suites d'un abcès occasionné par la chute d'une trappe sur sa tète, dans une de ses visites au Mont-Saint-Michel. Ihid., C 6354. 2 Dans la première assemblée du bailliage d'Avranches, on avait donné publique- ment lecture d'une lettre anonyme, imprimée, adressée à l'hôtel de ville, pour exclure des suffrages les anoblis, les; subdélégués, etc.. » Lettre de Montitier à l'in- tendant, 7 mars 1789. Ibid., C 6348. 3 Voir ci-dessous, à propos du mouvement électoral du Tiers état. Les membres de l'administration provinciale de Basse -Normandie appartenant au Tiers, qui furent députés aux Etats généraux; sont Delauney, membre du bureau intermé- diaire de Bayeux; Besnard-Duchesne, procureur-syndic du département de Valognes ; Vieillard, secrétaire de l'assemblée de département de Saint-Lù ; de Cussy, Flaust, Desplanques-Dumesnil et Burdelot, membres de l'Assemblée provinciale. — Dans l'ordre du clergé, l'administration provinciale de Basse-Normandie envoya aux Etats généraux Levesque, curé de Tracy ; dans celui de la noblesse le duc de Coigny. le comte de Vassy, le baron de Wimpfen, Beaudrap de Solteville. 186 EVÊQUES, BAILLIS D'ÉPÉE, LIEUTENANTS GENERAUX à leur situation depuis longtemps en vue, à la considération sociale dont ils jouissaient anciennement, et non au titre d'admi- nistrateur qui leur avait été tout récemment confié. Dans ses divers choix, le peuple visait, non pas à récompenser le membre zélé du bureau intermédiaire ou le procureur-syndic qui gérait avec vigilance les affaires publiques, mais à s'assurer l'appui de l'homme de loi expert, de l'avocat renommé, à confier en mains sûres la défense de ses intérêts. Ce fut donc une action surtout individuelle qu'exercèrent ces divers administrateurs ; et celle-ci ne fut empreinte d'aucun caractère officiel aux yeux de ceux qui la subirent. Les trois évêques de Basse-Normandie ne devaient avoir aucune influence sur l'ordre du clergé. A l'assemblée de Cou- tances, l'évêque de cette ville, Talaru, n'exerça guère qu'une présidence nominale ; il ne fut élu que le dernier des quatre députés du clergé, après trois curés de campagne. Godard de Belbœuf, évêque d'Avranches, humilié, n'attendit pas la fin des séances pour regagner son diocèse. A l'assemblée de Caen, de Cheylus, évêque de Bayeux, vaincu par une opposition presque unanime de son clergé, avait opéré une bruyante retraite dès la première séance et laissé à d'autres le soin de présider les opéra- tions électorales. S'il y eut un mot d'ordre donné, ce fut du clergé rural qu'il partit ; s'il y eut pression dans les délibérations, ce fut de bas en haut qu'elle s'exerça M. Dans l'ordre de la noblesse, même indépendance probable. Le grand bailli d'épée du Cotentin, le septuagénaire marquis de Blangy, était mourant et ne put venir présider l'assemblée de Coutances W. Le duc de Coigny, grand bailli d'épée de Caen, président de l'Assemblée provinciale de Basse-Normandie, homme considérable dans la province et persona grata à la Cour, vint diriger les délibérations de l'assemblée de Caen, qui devait l'élire pour son premier député. Aux deux assemblées définitives du Tiers état de Caen et de Coutances, les deux lieutenants généraux qui présidèrent les séances jouèrent le rôle assez effacé et discret d'arbitres et de conciliateurs, et non celui de chefs de parti. Aussi, ni Duperré de Lisle, à Caen, ni Desmarets de Monchaton, à Coutances, 1 Pour les délails, voir plus loin, p. 191, 192. 2 Il mourut à Fontaine-Ktoupefour, près Caen, et y fut inhumé le 25 août 1' Arch. comm., Fontaine-Etoupefour, GG 5. LE MOUVEMENT ÉLECTORAL DU CLERGÉ 187 n'exercèrent d'action marquante sur ces assemblées. Leur rôle se borna à ouvrir et à clore les séances, à coter et parapher les procès-verbaux et les cahiers. Ainsi, un gouverneur absent, un commandant en chef malade, un bailli d'épée mourant, trois évêques sans prestige et sans autorité dans leurs diocèses, un intendant conscient de sa dé- chéance et circonspect par système, des subdélégués impopu- laires et découragés, des lieutenants généraux de baillages assez effacés, tels étaient en Basse-Normandie, en février 1789, les représentants d'un gouvernement qui entendait lui-même laisser aux électeurs une entière liberté pour l'expression de leurs vœux et la désignation de leurs mandataires. Dans de pareilles condi- tions, le mouvement électoral put se développer sans contrainte dans l'étendue des deux bailliages de Caen et de Coutances. Toutes les opinions purent s'y manifester, toutes les audaces s'y produire. Ce fut l'ordre du clergé qui se montra le plus audacieux. Ses assemblées furent les plus agitées et les plus tumultueuses ; ses élections, dans le bailliage de Caen, furent les seules marquées d'un caractère vraiment démocratique. Dès le début de la période électorale, le haut clergé conçut des inquiétudes sur l'issue des opérations futures. Il entrevit les périls dont le menaçait le Règlement du 24 janvier 1789 en bouleversant la composition antique de son ordre aux Etats généraux ». Les chapitres des cathédrales surtout, réduits à un député par dix chanoines, protestèrent contre ce qu'ils appelaient une lésion de leurs droits. On sent nettement percer dans leur requête la peur des desservants ruraux, qui, au jour du vote, seront le nombre et la force. D'après le Règlement, dit le cha- pitre de Bayeux, il est possible que nul évêque ne soit député aux Etats généraux. Il est à craindre que le nombre prodigieux de jeunes ecclésiastiques sans bénéfices appelés aux assemblées électorales ne puisse guère accroître la masse des lumières de l'assemblée particulière de l'ordre du clergé, et qu'il n'ajoute infiniment à l'embarras de ses délibérations. Leur nombre est tel, surtout en Normandie, que, par cet avantage seul, ils pourraient concentrer en eux-mêmes la députation de l'ordre du clergé aux Etats généraux. Du moins ils influeront très puissamment, s'ils le veulent, sur le choix des députés » *. 1 Protestation faite par le chapitre rie Bayeux, le 14 mars 1789. Arch. du greffe de la Cour d'appel de Caen. Cf. Arch. nat., Ba 27, 1. 45. 188 INQUIÉTUDE DU HAUT CLERGÉ Ce que les chanoines de Bayeux écrivaient, tout le haut clergé des trois diocèses d'Avranches, de Bayeux et de Coutances le pensait. Il en voulait au roi d'avoir, dans ses lettres de convo- cation, trop fait l'éloge des curés et laissé dégrader les évêques et les chapitres . Il pensait, avec l 'évoque de Bayeux, qu'il y avait deux ordres distincts dans le clergé, l'un qui gouvernait, l'autre qui était gouverné , et il considérait comme mal fait et inconstitutionnel un Règlement qui allait permettre aux vicaires et curés aigris d'humilier leur évêque ». Tout en se réser- vant d'en imposer par une protestation solennelle au prolétariat ecclésiastique réuni dans les prochaines assemblées électorales, les grands dignitaires du clergé bas-normand n'en suivaient pas moins d'un œil inquiet la campagne menée par les prêtres ruraux pour la conquête de la députation. Si les chefs de la hiérarchie ecclésiastique, les aristocrates de Tordre, avaient des raisons intéressées pour demander le main- tien de leur situation, la plénitude de l'autorité épiscopale et la subordination du clergé, les curés au contraire désiraient ardem- ment la cessation des nombreux abus dont ils souffraient et sai- sirent avec enthousiasme l'occasion d'exposer leurs légitimes griefs. La lettre du roi, enivrante pour eux, exalta leur effer- vescence » W. Leurs évêques ne pouvaient exercer une forte action sur eux. Ils ne résidaient pas, n'avaient pas pris avec eux le contact qui décide et affermit les sympathies. Le clergé de Coutances s'était plaint à maintes reprises des fréquentes absences de son vieil évêque Talaru,[trop assidu au château des Matignon 2. L'évêque de Bayeux, du Cheylus, homme de manières distinguées, aumô- nier de la comtesse d'Artois, était un prélat de cour, aimant la belle société, mondain, joueur, trop au-dessus de son clergé pour s'intéresser à lui 3. Godard de Belbœuf, évêque d'Avran- ches, d'une vieille famille noble de Normandie, passait pour autoritaire, s'était fait des ennemis dans son clergé, et l'un de ses prêtres, Bécherel, venait de gagner contre lui au Parlement de Rouen un procès engagé à propos d'un trait de dîme 4. I Protestation faite le 20 niais 17N9 par les députés du chapitre de Baveux, près de Villedeuil. Arch. nat., Ba 27, 1. 15. 2 Desdevises du Désert, Le Cotentin en 1789, p. 36. 3 Depuis que M. de Cheylus était à Baveux, écrit un de ses successeurs, il s'é- tait endormi dans la mollesse et les plaisirs, au milieu de quelques flatteurs qui le berçaient. • Bisspn, Mémoires, fol. 77. \ Abbé Pigeon, Le grand Bailliage de Mortaih en 1789. Mémoires de la Société aca- démique du Cotentin, t. III, p. 52G. ATTITUDE HOSTILE DU BAS CLERGÉ 189 Dans les cahiers particuliers qu'ils rédigèrent pendant la période électorale, les curés manifestent nettement leur état d'esprit, hostile aux évêques, aux grands vicaires, aux chapitres, aux abbayes. Ils opposent la condition de l'utile pasteur, du desservant à la portion congrue, exposés à voler à toute heure au secours des malades et des malheureux, à celle du riche prélat qui possède livres de rente, sans faire la moindre aumône, ou du chanoine qui jouit de trois ou quatre mille livres de revenu annuel, moyennant l'assistance au chœur pendant trois heures par jour et seulement neuf mois de l'année *. Les uns sont trop riches, et, vivant au sein des délices et de l'opulence, scanda- lisent les peuples par l'usage qu'ils font des biens de l'Eglise, tandis que les autres, ceux qui forment la partie utile et labo- rieuse, réduits à la pauvreté, sont forcés de s'avilir pour se pro- curer le simple nécessaire» *. Ils demandent l'amélioration de leur sort, l'augmentation des portions congrues, l'abolition des déports, charge odieuse particulière à la Normandie, qui ruinent les paroisses au profit des vicaires généraux 3. Suppres- sion des abbayes rurales d'hommes comme inutiles, suppression des seigneuries attachées aux abbayes et aux canonicats, obli- gation des bénéficiers à la résidence, des décimateurs à la cha- rité *, tels sont leurs vœux à peu près unanimes. Les curés ad- 1 Cahier rédigé par le ctiré de Cartigny et autres curés du diocèse de Baveux, publié par llippeau, ouv. cité, I. VII, p. 199-206. 2 Cahier de Jacques Seigle, curé de Monceaux, dans Hippeau, ouv. cité, t. VII, p. 206-209. 3 En vertu de ce droit, les évoques et archidiacres normands jouissaient, les pre- miers pour deux tiers, les autres polir un tiers, de tous les revenus appartenant à une cure, pendant le première année à chaque mutation de titulaire. Par contre ils étaient obligés à assurer la desserte de la paroisse pendant cet intervalle. Dans la réalité, ils louaient les revenus à l'encan et leur fermier livrait l'administration de la paroisse au plus bas prix possible à un desservant de passage, trop pauvre lui- même pour soulager les autres. — Sur les abus du déport, véritable droit d'annates local, voir' abbé Bernier. Essai sur le Tiers étal rural de Basse-Normandie, p. 110. 4 Cahier de plaintes, griefs et doléances, rédigé par huit curés du diocèse de Bayeux Isigny et autres paroisses, publié par Hippeau, ouv. cilê. t. VII, p. 178-182. Cahier des observations qui peuvent concerner le bien de l'Etat et de la religion, présenté par Bense, curé du Manoir, publié par Hippeau, ibid., p. 187-191. I se plaint des détenteurs de dîmes, qui ont des entrailles de fer ». Cette année, dit-il, ils n'ont pas daigné répondre à une lettre pie je leur ai écrite en faveur de mes pauvres; et, depuis que je suis curé dans la paroisse, je n'ai jamais reçu un sol de leur part. » — Le clergé rural est d'accord sur ce point avec les paysans. Quelle part, évèipie de Coutances, avez-vous faite aux pauvres des paroisses dont vous avez récolté les dîmes ? Vous avez tout enlevé, tout consommé ! » Cahier de Saint- Vaast-la-Hougue. Voir les cahiers du Tiers étal des bailliages de Coutances et Valognes Bridrey, Cahier du Cotentin, tomes I et II, passim. 1. DEMANDES DE REFORMES DES CURÉS mettent fort bien l'idée de leur contribution collective aux impôts, mais la plupart voudraient garder lé privilège de s'im- poser eux-mêmes aux décimes. Cette répartition continuerait à être faite par la chambre ecclésiastique de chaque diocèse, dont la composition serait modifiée. Les députés des curés, qui forment la masse des ecclésiastiques du diocèse, y sont toujours l'infinie minorité ; il faut augmenter leur nombre et leur donner une part plus grande à une répartition qui intéresse la majorité du clergé 1. Il faut se garder aussi contre les abus d'autorité des évêques. Des synodes annuels ou triennaux, composés de tous les ecclé- siastiques du diocèse, éliraient un conseil permanent chargé de siéger avec l'official et d'assister l'évêque dans l'administration de la justice -. Pour opérer ces réformes et réaliser ces améliorations, les curés comptent sur l'Assemblée nationale. Ils s'en remettent à elle du soin de détruire les abus de l'Eglise, ils provoquent son inter- vention dans un domaine dont plus tard ils lui interdiront l'accès, dans le règlement de questions vitales comme celles des rapports avec Rome, de la distribution des pouvoirs ecclésiastiques ou du sort des biens d'Eglise. L'on trouve déjà en germe, dans ces cahiers particuliers, la future Constitution civile du clergé. Les curés bas-normands avaient eu tout le temps de dresser leur programme de revendications. Pendant un mois et demi, il leur avait été donné d'assister au mouvement électoral du Tiers état ; ils en avaient été partout les témoins ; quelquefois ils y avaient joué le rôle d'acteurs. Partout ils avaient annoncé au prône la date de l'assemblée électorale de leur paroisse ; en plus d'un endroit ils avaient, directement ou indirectement participé à ses délibérations ; sur quelques points même ils l'avaient pré- sidée 3. La communauté de leurs intérêts ne les avait-elle pas rapprochés souvent des paysans? N'avaient-ils pas à se plaindre du haut clergé comme le Tiers se plaignait de la noblesse, et pour les mêmes raisons? Ils suivirent donc avec une complai- 1; Souhait et doléances pour une réforme clans la chambre ecclésiastique chargée de la répartition des décimes, que fait Jean-Jacques Bouffey, prêtre, curé de Saint -Aiynan-le- Malherbe. diocèse de Bai/eux, dans Hippeau, ouv. cité, t. VU, p. 191-199. 2i Vœu de Jacques Seigle, curé de la paroisse de Monceaux. Vœux du clergé de Saint-Pierre-de-Caen, dans Hippeau, ouv. cité, t. VII, p. 206 et 159. 3 Exemples à Mondeville bailliage de Caen ; Aubusson, La Chapelle-Cesselin, Roucamp, Saint-Pierrc-du-Tronchet bailliage de Vire ; Saint-Martin-le-Vieux bail- liage de Coulances ; Maupertuis. Omonville-la-Petile, Sideville, Sortosville près Valognes, Saint-Martin-le-Gréard. Sa4nte-Geneviève bailliage de Valognes. LA COALITION DES CURES 191 santé attention les doléances de leurs paroissiens. Il arriva même qu'ils en inspirèrent plus d'une. Maint d'entre eux fut directe- ment incité à se mêler au mouvement. Un prince du sang, le duc d'Orléans, apanagiste du comté de Mortain, ne fit-il pas adresser à tous les curés du Mortainais par son agent, le marquis de Limon, une circulaire les invitant à donner de bons conseils à leurs paroissiens »?*. Plus d'un cahier rural, en tout cas, contient des traces évidentes de leur influence. Quand les diverses assemblées préliminaires des bailliages secondaires rédigèrent leurs cahiers, les curés virent avec joie que les vœux émis sur la religion leur étaient favorables. Le Tiers état, d'une façon générale, s'y montrait ennemi des moines et des grands dignitaires, ami des desservants ruraux. Les doléances du bailliage de Caen, quand elles furent connues, firent la plus grande sensation dans le clergé. On les réimprima jusqu'à trois fois de suite 2. Une campagne ouverte fut-elle entreprise dans les deux grands bailliages de Caen et de Coutances en vue des élections du clergé? Aucun document ne le prouve. Un arrêt du Conseil du 25 février 1789 avait interdit les réunions en corps de cet ordre. Il semble toutefois que, dans ces deux ressorts, l'exclusion des hauts digni- taires du clergé était chose tacitement convenue et que l'entente s'était déjà faite sur plusieurs noms. L'abbé Soulavie, qui joignait à ses fonctions de vicaire général de l'évêque de Châlons celles de curé de Septvents dans le Bocage, et qui dut être un des plus ardents agitateurs du clergé bayeusain, nous a laissé des élec- tions du bailliage de Caen un journal assez intéressant 3. Dès le 6 mars 1789, dix jours avant la réunion de l'assemblée électo- rale, il écrivait à Necker L'ordre des curés ne veut que des curés pour députés et leur choix paraît déterminé ». La veille de l'élection il lui écrivait à nouveau L'assemblée élira trois curés pour Paris ; depuis plusieurs mois le parti qui était pris avait nommé d'avance trois à quatre sujets qui réunissent les voix » 4. Mêmes pronostics pour l'assemblée de Coutances. 1 Journal de la Basse-Normandie, année 1789, n° 12, supplément. 2 Journal des élections du bailliage de Caen, par Soulavie. Arch. nat. , Ba 27. 3 Sur Soulavie, voir le travail de A. Mazon, Histoire de Soulavie, naturaliste, diplo- mate, historien, 2 vol.. Paris, 1893. —A. Brette a publié les sept bulletins de Soulavie dans La Révolution française, 1894, p. 162 sqq., sous ce titre Les Elections du Clergé du Bailliage de Caen en 1789. 4 Le 14 mars, Le Tuai, curé de Saint-Viger-le-Grand, diocèse de Baveux, adressa à Necker une plainte contre son évêque, qui lui avait refusé l'autorisation de se 192 LES CURÉS A L*ASSAUT DK LA DEPUTATION o L'ordre ecclésiastique, écrit à l'intendant dès le 16 mars le subdélégué d'Avranches, Montitier, composé pour la plupart de curés, malgré la politesse et la prévenance affectueuse des deux prélats ], paraît décidé à ne pas leur accorder son suf- frage. . . Ils veulent que les prélats les traitent avec plus d'égards, et soient enfin convaincus que les curés et les autres ecclésiastiques forment la portion la plus essentielle du clergé . . . Il est probable que leurs députés pour Versailles seront élus dans la classe des curés » 2. Ainsi, à la veille des élections, le clergé des trois diocèses de Bayeux, d'Avranches et de Coutances était apparemment divisé en deux partis d'inégale force les épiscopaux et leurs adver- saires, ceux-ci beaucoup plus nombreux. Le clergé démocratique, recruté parmi les fils de laboureurs et de paysans, et désireux de se soustraire au joug oppressif du clergé aristocratique, issu de la noblesse, allait prendre dès le premier jour une vigoureuse offensive, et marcher avec une hardiesse parfois brutale à l'assaut de la députation. Avant toute réunion, sa victoire était assurée. Comme le clergé, la noblesse ne formait pas un ordre unifié et compact en Basse-Normandie. A côté de la grande noblesse, étrangère au pays par son origine, et qui y possédait les plus riches terres, le duc d'Orléans, comte de Mortain, les Grimaldi- Matignon comtes de Torigni et barons de Saint-Lô, les Mont- morency, les Sully, les Brancas, les Soubise, les Juigné, etc., il y avait une noblesse locale, d'illustration plus ou moins ancienne faire remplacer par un vicaire, sans doute pour rendre impossible son voyage à l'as- semblée électorale de Caen. Le but de la conduite de Monseigneur, écrivait Le Tuai, est d'empêcher que ce ne soit trois curés d'être députés aux Etats de Ver- sailles, et d'y en faire parvenir selon son vœu ». Arch. nat., Ba 27, 1. 45. Il Les deux évoques de Coutances et d'Avranches. 2 Lettre de Montitier à l'intendant, 10 mars 1789, Arch. dép., Calvados, G 0353.— Cette entente préalable entre les curés du Cotentin est attestée par un autre docu- ment significatif. Le 20 février 1789, Lelubois, curé de Fontenay, celui-là même qui devait être élu premier député du clergé à l'assemblée le Coutances, écrivait à Neckef au nom de ses confrères, auxquels des arrêts défendent de s'assembler eu corps, sans quoi ils auraient pris la liberté de lui adresser cette supplique ». Il lui représente que, pour répondre à ses vues, il est de la plus grande importance que „ e clergé du second ordre, qui peut s'assimiler au Tiers état comme le peuple rela- tivement à la noblesse, se trouve en grand nombre à l'assemblée qui nommera les députés pour les Etats généraux ». Pour loger tant de monde, les séminaires lui paraissent indispensables; il prie Necker de les faire évacuer pendant la durée de l'assemblée électorale pour que les logements soient libres. — Cette démarche directe auprès du ministère, par dessus la tête de révêque, faite au nom des curés par leur futur député, est l'indice d'une ligue occulte du bas clergé, dont Lelubois était un des meneurs. Arch. nat., B"1 53. MOUVEMENT ÉLECTORAL DE LA NOBLESSE. LES LIBERAUX 193 et de fortune variable, mais qui avait conservé un pied dans la contrée tels les Coigny, les Vassy, les Faudoas, les Balleroy, les Cussy, les Auxais, les Bricqueville, les Vendœuvre, les Osse- ville, les Rotours, les Carbonnel, les Bonvouloir, et tant d'au- tres 1]. Attachés à leur pays, ces gentilshommes étaient prêts à en défendre les intérêts la plupart d'entre eux étaient associés à l'administration provinciale depuis la réforme de 1787. A la session de l'Assemblée provinciale de Caen, la députation de la noblesse, jointe à celle du clergé, avait offert une contribution volontaire annuelle de livres jusqu'à complète extinction des dettes que la généralité avait contractées envers les paysans expropriés pour les travaux des routes 2. D'Auxais de Monfar- ville, président de l'assemblée du département de Saint-Lô, y avait pris la défense des petits propriétaires ruraux dans son mémoire sur les bordiers r. Le comte Louis de Vassy avait préconisé la création de cours d'accouchements dans les villes et la construction de maisons salubres pour les paysans . Cette large accession des gens de robe à la députation rurale s'explique encore par une autre considération. Si l'on excepte les six villes nominativement désignées dans F Etat annexé au Règlement du 24 janvier 1789 » f4, toutes les autres villes des deux grands bailliages de Caen et de Coutances n'avaient droit qu'à quatre députés. Il y avait même là une inégalité assez cho- quante. Tandis qu'en vertu de l'article 31 du Règlement, des bourgs sans organisation municipale eurent droit à une repré- sentation plus nombreuse par exemple Bricquebec à 10 députés, Saint-Sauveur-Lendelin à 8, Vassy à 7, Périers, Brix, Saint- Vaast à 6, etc . . . , des villes chefs-lieux d'élection, comme Avranches, Carentan, Saint-Lô, Vire furent réduites à élire quatre députés. C'était un trop maigre enjeu pour l'ambition 1 Voir ci-dessus, chap. V, p. 2 Le Garpentier à Vire et Amette à Ferrières, sont deux étudiants en droit; Tail- lebrocq à Baron, Mattingley à Gavrus, Dumanoir à MonlsurvenL Duchesne au Désert, Tétrel à La Trinité, Théauit des Orgeries à Saint-Aubin-de-Terregate, sont Licenciés ès-lois. 3 et Debled, procureurs au bailliage de Caen, sont '-lus à Canteloup et à Ainayr-sur-Orne — Huissiers députés ruraux Mette, à Courson ; Lemarchant, à Lesnault ; Fillâtre, à Bréeey ; et Lefràhc-Bouillonnière, à Hambye. 1' Etal par ordre alphabétique, contenant les noms des villes des pays d'élection qui doivent envoyer plus de quatre députés, publié par A. Bivtle, ouv. rilé, I. p. 101. SUCCÈS ÉLECTORAUX QU'ILS Y OBTIENNENT 203 des nombreux officiers de justice et hommes de loi qui habi- taient ces villes. Perdus dans la foule des électeurs urbains, ils étaient, au contraire, des personnages de premier plan dans les assemblées rurales. Ils s'y firent élire et vinrent tenir leur place, comme députés des campagnes, aux assemblées bailliagères ]>. On en trouve une preuve éclatante dans les opérations électorales du bailliage de Vire. Au procès-verbal de l'assemblée prélimi- naire du bailliage tenue à Vire le 5 mars 1789, figurent comme députés ruraux une vingtaine de citoyens désignés en qualité d'électeurs sur le procès-verbal de l'assemblée urbaine du 26 fé- vrier 2!. Entre ces deux dates, la paroisse de Coulonces avait élu deux conseillers au bailliage, Brenet de Brais et Mauduit de la Groudière. Saint-Germain de Tallevende, placé aux portes de la ville, avait député un autre conseiller au bailliage, Faucon de Saint-Germain et un procureur honoraire à 1'éiection, Surbled de la Mahère. De Sainte-Marie-Laumont vinrent le conseiller Vivien et l'avocat Cotelle ; du Theil, le doyen des conseillers, du bailliage Saillofest de la Tigerie, qui en était lieutenant parti- culier. Cahours, maître des eaux et forêts à Vire, fut député de Pontfarcy. Des avocats, des notaires, des huissiers virois vinrent représenter Beaumesnil, Courson, Campagnolles, Saint-Pierre- Tarentaine et d'autres paroisses du Bocage. Une telle consta- tation est importante. Elle permet de suivre l'action continue exercée par la bourgeoisie de robe dans la série des assemblées électorales du Tiers état. Elle sert à éclairer d'un jour nouveau l'étude critique de la rédaction des cahiers. 1 Le fait de ces élections rurales a été général en Basse-Normandie. Cf. une lettre de Montitier, subdélégué d'Avranclies à l'intendant, 27 février 1789 Les offi- ciers du bailliage de Coutances ne se sont pas trouvés aux assemblées des villes tenues par les officiers municipaux ; on dit qu'ils se proposent d'aller dans les paroisses où, sont situés leurs biens et les maisons de campagne qu'ils habitent pen- dant les vacances, pour y concourir à la nomination des députés ». Arch. dép., Cal- vados, C 6353. — Dans d'autres bailliages, l'élection des juges royaux et hommes de loi par les paroisses rurales avait précédé la tenue des assemblées urbaines. A Caen, par exemple, les députés urbains furent élus le 4 mars Costy, un des trente députés de Caen, avait déjà été député par la paroisse de Maisoncelles-sur-Ajon. Daigremont, lieutenant particulier, était, dés le 1er mars, député de Fontenai-le-Pes- nel ; Roussin, conseiller au bailliage, député de Vieux, etc. L'abbé Soulavie fait allusion, dans son journal manuscrit, à ces élections des hommes de loi dans les paroisses rurales du bailliage de Caen. Le 1er mars, écrit-il, les paroisses de cam- pagne nomment leurs députés, et plusieurs privilégiés, qui avaient été éloignés de l'assemblée de la ville, accoururent à leurs propriétés des campagnes où ils se firent élire. »> Arch. nat., Ba 27, 1. 45. 2 Cf. F. Mourlot, La conuoeation des Etats généraux de 17H9 dans le Bailliage de Vire. La Révolution française, t. XXXI, 1896, p. 380-346 et 414-420. 204 LES ÉLUS DE L'INDUSTRIE, DU COMMERCE ET DE L'AGRICULTURE En dehors des juges et des hommes de loi, les députés ruraux se recrutèrent, en assez petite quantité, parmi les gens exerçant des professions libérales professeurs d'Université l\ médecins '2> chirurgiens 3, arpenteurs-géomètres *. L'industrie et le com- merce, sans être systématiquement éliminés de la députation rurale, n'ont fourni qu'un nombre insignifiant d'élus. Dans une région où le littoral est si développé, où la population presque entière vit de la mer, on s'attendrait à voir représenter les indus- tries maritimes, à trouver des noms d'armateurs, de construc- teurs de navires, de capitaines et de matelots. Seuls quelques officiers gardes-côtes, quelques officiers d'amirauté rappellent le voisinage marin 5. Un bourg industriel, comme Villedieu, ne compte qu'un seul marchand sur huit députés. Les industries locales, dans certaines régions, fournissent çà et là quelques représentants l'Avranchin délègue des sauniers 6, le Bocage, des papetiers et des tanneurs 7. La grande majorité des élus appartient à l'élément rural laboureurs » dans les pays de culture, herbageurs » dans les pays d'élevage fS . La plupart d'entre eux étaient syndics muni- 1 Lecoq de Bu-ville, professeur à la Faculté de droit de Caen, élu à Biéville ' Moysant, bibliothécaire de l'Université de Caen, à Verson. 2 Médecins Briard, à Cheux ; Cauvet, à Mondeville ; Havard, à Villedieu ; Couil- lard, à Bréville ; Bécherel el Laroche, à Saint-Hilaire-du-Harcouët ; Poirier, à Brécey ; Roussel, aux Loges ; Roullier et Durand, à Saint-Cornier-des-Landes ; Denis, à Saint-Sauveur-le-Vicomte ; Sarouve, à Périers ; Questin, à Barfleur ; Lehurey, à Saint-James. 3 Chirurgiens Osmond, à Argences ; Mûrie, à Bény Vigeon, à Septfrères ; Hastey, à Bricqueville-sur-Mer ; De la Cour, à Coudeville ; Hamelin, à Roncey ; Rabasse, à Saint-Martin-le-Vieux ; Surget, à Saint- Romphaire ; Anfray, à Sourde- val ; Boutry, à Barenton ; Haye-Ladivière, à Saint-Georges-de-Rouellé ; Lemarchand, à Mesnil-Thébaut ; Lair, ;'i Saint-Hilaire-du-Harcouët ; Roussel, à Brécey. 4 Géomètres Dupoul de la Morlière, au Petit-Truttemer ; Boursin, à Tirpied. 5 A Anneville-en-Cères, Barfleur, Dinneville, Port-Bail, Tourville, Le Vretot, Valcanville. — Sur la représentation des diverses professions aux assemblées électorales du Cotenlin, voir un mémoire de M. Bridrey publié dans les Comptes-rendus de l'As- sociation française pour l'avancement des Sciences. Cherbourg, 1905, p. 1079 et suiv. 6 Coupard et Bouffaré, sauniers, à Courtils ; Lebiguet et Lampérière. à Vains ; Bienvenu, à Genest ; Lechevalier, à Saint-Jean-le-Thomas. 7 Papetiers Nougeot et Chaplière, à Brouains ; Gasté, à Chérencey ; Homo les Vallées, à Vengeons. — Tanneurs Queslier, à Chèvreville ; Poulain, au Neufbourg. — Ajoutons, parmi les autres genres de commerce un teinturier à Ver; un boulan- ger à Monlhuchon ; des négociants à Ducey et au Fresne-Poret ; des marchands à Saint-James et Saint-Nicolas-des-Bois, à Fontenay et à Parigny. 8 Les professions étrangères à l'agriculture étant mentionnées aux procès-ver- vaux des assemblées, il est permis de croire, lorsque ces derniers sont muets, que les élus non qualifiés sont des paysans, propriétaires ou fermiers, adonnés à la vie rurale assez souvent, d'ailleurs, apparaît la mention de laboureur. ÉLIMINATION DU PROLÉTARIAT RURAL 205 cipaux et présidaient l'assemblée électorale de leurs paroissiens 0 Qn'ils fussent propriétaires, ou fermiers, ou tenanciers à un titre quelconque, ils étaient probablement tous rangés dans la caté- gorie des possédant-fonds. Il semble que les prolétaires ruraux, manœuvres, journaliers, travailleurs mercenaires, les futurs citoyens passifs de la Constituante, aient été partout écartés. Je n'en trouve mentionnés que deux, dans la paroisse de Gri- mesnil bailliage de Coutances et à Cagny bailliage de Caen. Dans les six villes de la généralité de Caen auxquelles le Règle- ment royal accordait une représentation exceptionnelle 2, c'est- à-dire à Caen, Bayeux, Cherbourg, Coutances, Granville et Valognes, les opérations électorales furent un peu plus compli- quées. Les assemblées urbaines du Tiers état y furent formées par les délégués des communautés d'arts et métiers, les représen- tants des divers corps et ceux des citoyens non incorporés. Chacune des communautés d'arts et métiers se réunit au siège de la corporation pour nommer ses députés et leur donner des instructions. Ces assemblées préliminaires n'ont laissé aucune trace à Coutances et à Valognes ;J. Le procès-verbal de l'assem- blée du Tiers état de Granville, tenue le 27 février 1789, men- tionne la présence des députés des corporations 4. Les archives 1 Voir ci-dessus, chap. V. p. 104. 2 Les autres villes de la généralité de Caen comprises dans les deux ressorts judiciaires de Caen et de Coutances, n'eurent droit qu'à quatre députés en vertu de l'article 31 du Règlement du 21 janvier 1789. On n'a conservé les procès-verbaux d'assemblée électorale que pour trois d'entre elles Carentan, Saint-Lô et Vire. A Carentan, l'assemblée des électeurs, forte de 106 membres, réunie le 1er mars dans une salle de l'hôpital, élut pour députés Desplanques-Dumesnil, maire de la ville ; Hervieu de Pontlouis, lieutenant particulier du bailliage, et deux avocats, Lereculley de la Huberderie et Caillemer. Bridrey. Cahiers de doléances, t. I. p. 712. — A Saint- Lô, deux assemblées successives celle du 27 février, où l'on élut six commissaires pour la rédaction du cahier, et celle du 6 mars, où l'on élut quatre députés, tous avocats Vieillard fds. de Boismartin, Lemenuel de la Jugannière, et Bernard. Arch. nat., B1" 54. — A Vire, le 26 février, 171 assistante réunis dans la chapelle de Saint-Thomas, élurent Flaust, lieutenant général du bailliage ; Mauduit, maire de la ville ; Monlien de Perthou, président de l'élection, et Surirey, premier juge-con- sul et échevin. F. Mourlot, La Convocation dans le bailliage de Vire, article cité, p. 309. 3 Le procès-verbal d'assemblée du Tiers état de Valognes du 5 mars 1789 men- tionne en bloc les cinquante et un comparants représentants des différentes cor- porations, corps et communautés de cette ville, des bourgeois et habitants ». Nulle indication plus précise. Arch. greffe du Tribunal civil de Coutances. Voir Bridrey, , ouv. cité, t. II, p. 7. 4 Arch. coram. Granville, Registre des délibérations, séance du 27 février 1789. Bridrey, oau. cité, t. I, p. 111-114 Négociants et armateurs, capitaines de na- vires, chirurgiens, procureurs, apothicaires, marchands, huissiers, perruquiers, 206 ASSEMBLÉES DES CORPS ET CORPORATIONS DANS LES VILLES municipales de Cherbourg conservent, avec la liste complète des membres des diverses corporations de la ville, celle des députés que ces corporations envoyèrent le 4 mars 1789 à l'assemblée urbaine du Tiers état ]. Ces documents ne nous renseigneraient pas de façon suffisante sur les premières opérations électorales des villes des bailliages de Caen et de Coutances ; deux d'entre elles heureusement, et non des moins importantes, Caen et Bayeux, offrent des informations plus précises. Leurs archives munici- pales ont conservé les procès-verbaux de la plupart des réunions corporatives préparatoires qui ont été tenues du 21 au 28 février 1789 celles de Caen contiennent 31 procès-verbaux et 29 cahiers de corporations '2 ; celles de Bayeux, 32 procès-verbaux, 11 ca- cordonniers, cabaretiers, menuisiers, charpentiers, marins, boulangers, tonneliers tailleurs et tisserands ». 1 Arch. corn m., Cherbourg, AA G4. Voici, dans l'ordre du procès-verbal de l'as- semblée du 4 mars 1789, 1 énumération des groupements corporatifs adonnés au com- merce ou à l'industrie Porteurs de commission de la marine ; entrepreneurs de travaux du roi ; négociants, fabricants de draps et marchands merciers, de fer et de vin ; tanneurs, teinturiers, selliers, bourreliers ; capitaines de long cours ; maîtres au cabotage ; constructeurs de navires; maîtres charpentiers, voiliers et cordiers marchands épiciers graissiers ; maîtres perruquiers; maîtres tailleurs; aubergistes; tonneliers; cafetiers; traiteurs; pilotes lamaneurs ; bouchers; boulangers; cabare- tiers chapeliers ; menuisiers ; forgerons, armuriers, ferblantiers ; cordonniers ; maçons ; meuniers. > Voir Brîdrey, oui', cité, t. 11, p. 43-4G. 2 Arch. connu., Caen, AA 47. Procès-verbaux d'assemblées électorales de 31 com- munautés d'arts et métiers, réunies du 21 au 25 février 1789 au bureau de la c. Par suite d'un tel empressement, les assemblées préliminaires des bailliages furent partout au complet. Si dans les ressorts judi- ciaires de petite étendue, le nombre des députés présents ne forme 1 Un certain nombre de paroisses se trouvent dans ce cas particulier Isigny, Anctoville, Banville, Fresnay-sur-Mer, Louvières, Saint-Loup-Hors bailliage de Bayeux; Anctoville bailliage de Coutances; Gouberville. Neuville-au-Plain, Vras- ville bailliage de Saint-Sauveur-le-Vicomte. — Réville, au bailliage de Valognes, envoya deux députés sur quaire. 2 Sur les défauts de paroisses dans les deux ressorts de Caen et Coutances, voir Onou, La Comparution des paroisses en 1789, dans La Révolution française, t. XXXII, 1897, p. 339. Sa liste présente quelques erreurs. Cf. Bridrey, ouv. cité, t. I, p. 9, 10. 214 TRANQUILLITÉ DES ASSEMBLÉES pas un total très élevé, comme à Cérences 26 députés, à Tinchebrai 79, ou à Saint-Lô 80, l'effectif fut plus considérable à Saint- Sauveur-Lendelin, Saint-Sauveur-le-Vicomte, Carentan, Torigni, où il dépassa la centaine ]\ L'assemblée de Mortain atteignit presque deux cents membres 191 ; celle d'Avranches réunit 217 députés et celle de Vire 259. Dans les trois bailliages de Valognes, Bayeux et Caen, qui comprenaient un grand nombre de paroisses rurales, les procès-verbaux mentionnent la présence de 324, 311 et 488 députés. Malgré leur importance numérique, ces réunions furent des plus pacifiques, au témoignage des con- temporains. Les assemblées se sont passées dans le plus grand ordre et la plus grande harmonie, écrit Robillard subdélégué et lieutenant général à Saint-Lô, tout esprit de parti a été éloigné»^2. Desmarets de Montchaton, lieutenant général du bailliage de Coutances, en écrit autant au garde des sceaux sur les opérations électorales de son bailliage J'ai joui de la satisfaction de voir régner dans cette assemblée la concorde et l'esprit de patrio- tisme si désirables dans la circonstance. Chacun s'est empressé de donner des preuves de son zèle » 3. A Avranches, l'harmonie, la concorde et la liberté des suffrages ont passablement régné dans les différentes assemblées » [\ L'assemblée du Tiers état de Valognes s'est passée assez tranquillement, car on ne peut appeler troubles quelques clameurs indispensables à la réunion d'une multitude un peu tumultueuse » 5. Cette tranquillité est due en grande partie au procédé de tra- vail qu'adoptèrent la plupart de ces assemblées. Comme il fallait un certain temps pour fondre les cahiers particuliers des villes et des campagnes en un cahier unique, elles confièrent cette tâche, dès leur séance d'ouverture, à un certain nombre de com- missaires ^6. Le mode d'élection des rédacteurs varia selon les 1 A Carentan, 111 membres; à Saint-Sauveur-Lendelin, 118; à Saint-Sauveur-le- Vicomte, 131 ; à Torigni, 136. 2 Arch. dép., Calvados, C 6356. Lettre du subdélégué Robillard à l'intendant. 3 Arch. nat., Ba 35, liasse 70. Lettre du lieutenant général du bailliage de Cou- tances au garde des sceaux, 16 mars 1789. 1 Arch. dép., Calvados, C 6318. Lettre du subdélégué de Montitier à l'intendant 7 mars 1789. 5 Ibid., C 6358. Lettre du subdélégué Sivurd de Beaulieu à l'intendant, 16 mars 1789. 6 Dans deux assemblées préliminaires de bailliage le cahier fut rédigé en com- mun à Cérences, où l'assemblée, qui comptait 26 membres, élut 7 députés le 2 mars 1789 Bridrev, ouv. cilr, t. II, p. 787, et à Vire, où les députés demandèrent à vaquer tous » à la rédaction du cahier. Procès-verbal de l'assemblée préliminaire du bailliage de Vue. Arch. dép., Calvados, non inventorié. ÉLECTION DES COMMISSAIRES REDACTEURS 215 bailliages. A Coutances, l'assemblée divisa les paroisses com- parantes en cinq districts et chacun d'eux nomma deux commis- saires M. Celle de Bayeux les élut en faisant l'appel des sergen- teries. À Caen, l'on discuta pour savoir si on les nommerait par arrondissement ou successivement ». Les paroisses de campagne désiraient l'élection par arrondissement ; mais une ordonnance du bailliage déclara cette forme contraire au règlement et après avoir choisi les six commissaires de Caen, l'assemblée se mit à procéder isolément à la nomination des dix-huit commissaires ruraux, à haute voix et par ordre alphabétique des villages. Cette opération menaçait de traîner en longueur et malgré des protes- tations, on se vit obligé d'élire en bloc les huit derniers commis- saires 2\ Ces commissions comprirent en général un nombre assez res- treint de membres vingt-huit à Bayeux, vingt-quatre à Caen, vingt à Saint-Lô, quinze à Torigni, douze à Carentan, Mortain, Valognes, onze à Coutances et à Avranches, dix à Saint-Sauveur- le-Vicomte, sept à Périers, six à Tinchebrai W. Pendant que s'accomplissait sans bruit leur travail, les assemblées s'étaient séparées. Quelques-unes d'entre elles se réunirent à nouveau pour entendre la lecture du cahier bailliager, lui donner leur appro- bation et élire le quart de leurs membres comme députés au bailliage principal ; cette seconde réunion était forcément incom- plète, plus d'un délégué rural n'y revint pas, ou ne fit qu'y apparaître. A Caen, écrit Soulavie, le lieutenant général proposa à l'assemblée d'élire en bloc les 122 députés du bailliage. Le parti de la robe et de la municipalité soutint cet avis et les dépu- te tés de la campagne y consentirent, déposant entre les mains du lieutenant général et du procureur du roi une liste de 122 députés et se retirèrent » 4. Dans maint bailliage les assemblées n'exercèrent même pas ce contrôle de forme sur la rédaction du cahier. Pour éviter aux Cl Arcli. nat., B 35, liasse 7n, et Àrch. du greffe du Tribunal civil de Cou lancés. Dans ce dépôt est conservé le procès-verbal d'élection des deux commissaires d'un de ces cinq districts, celui de Villedieu. Les autres étaient Coutances, Granville, Gavray, Tessy. 2 Arch. nat., Ba 27, liasse 15. Bulletins de l'abbé Soulavie. 3 Procès-verbaux des assemblées préliminaires du Tiers état de ces divers bail- liages; tous ceux du bailliage de Cotentin, au greffe de Coutances, sauf celui du ressort propre de Coutances Arch. nat., Ba 35, 1. 70 ; ceux de Bayeux et Torigni, au greffe de la Cour d'appel de Caen, et celui de Caen aux Arch. nat., BH 27, I. 4~>. 4 Arch. nat., Ba 27, liasse 45. 216 ÉLECTION DES DEPUTES DU QUART RÉDUIT trois quarts des députés ruraux les frais onéreux d'un retour à la ville 0>, elles procédèrent à la fois à la nomination des rédacteurs et des députés au bailliage principal et s'en remirent à ces der- niers du soin de tout régler. Celle d'Avranches, composée de 217 délibérants, donna le 5 mars 1789 à ses 54 députés plein pouvoir d'arrêter et signer le cahier général des plaintes, deman- des et doléances tel et en l'état qu'il aurait été rédigé par les dits sieurs commissaires et qu'il leur serait représenté le vendredi 13 de ce mois » ; elle se sépara ensuite définitivement 2. Les 301 députés rangés dans les cinq districts électoraux du bailliage de Coutances, en même temps qu'ils choisissaient les commissaires rédacteurs du cahier unique, désignèrent le quart d'entre eux afin de l'examiner et d'y faire pour le bien commun telles obser- vations qu'ils aviseraient ». Ils déclarèrent s'en rapporter en tout à la prudence et à la décision de ceux-ci » 3. A Saint-Lô, les 20 commissaires rédacteurs élus dès le premier jour se trou- vèrent former juste le quart de l'assemblée 4. L'assemblée du bailliage de Saint-Sauveur-Lendelin, réunie à Périers le 9 mars, forte de 128 députés, se réduisit au quart le lendemain et donna à ses 31 délégués mission d'approuver le travail que les sept com- missaires devaient leur présenter le 13 mars 5. Cette hâte des paysans à retourner à leurs champs favorisa le succès électoral des magistrats et des hommes de loi. Plus d'un d'entre ceux-ci, après avoir été éliminé par les suffrages urbains, rentrait le front haut à l'assemblée bailliagère, comme élu d'une paroisse rurale. Ils n'étaient, à vrai dire, qu'une minorité plus ou moins importante selon les ressorts à Coutances, où ils étaient 54 en face de 216 laboureurs, ils formaient à peine le sixième de la représentation du bailliage ; à Mortain, ils étaient moins de 30 sur 191 députés ; à Tinchebrai, moins de 10 sur 97 présents. Dans les autres assemblées préliminaires du Cotentin et dans celles du ressort de Caen, ils étaient aussi, sans qu'on puisse en préciser la proportion, en infériorité numérique par rapport aux délégués paysans, désignés sous le terme de laboureurs ou de propriétaires ; ils partageaient cette infériorité avec les représentants urbains 1 Beaucoup d'entre eux étaient pressés de rentrer dans leurs fermes pour faire les mars ». Voir Bridrey, oiw. cité, t. 1, p. 14. 2 Arch. greffe du Tribunal eivil de Coutances. Procès-verbal de l'assemblée pré- liminaire du Tiers état du bailliage d'Avranches, 5 mars 1789. 3 Ibid., Etat des députés du district de Villedieu, 3 mars 1789. 4 Ibid., Procès-verbal de l'assemblée préliminaire du Tiers étal du bailliage de Saint-Lô, 10 mars 1789. 5 Arch. nat., Bm 54. EFFACEMENT DES DEPUTES RURAUX 217 de l'industrie et du commerce, assez clairsemés dans la masse des électeurs. Et cependant, par un acte de véritable abdication, les laboureurs, qui avaient la prépondérance numérique dans les assemblées et qui pouvaient la conserver dans les commis- sions et les députations, s'effacèrent presque partout devant une minorité plus éclairée et plus audacieuse. La nécessité d'un séjour plus ou moins prolongé à la ville pour la rédaction et la ratification des articles du cahier de l'assemblée préliminaire donna l'avantage aux habitants des villes, à ceux qui y avaient leur rési- dence et leurs occupations. Par une habile tactique, issue des cir- constances, l'élément urbain, dans la plupart des assemblées, prit le pas sur l'élément rural; dans ces réunions, tenues par autorité de justice, les gens de robe parvinrent à éliminer la masse des paysans, à substituer à la force incohérente du nombre l'influence victorieuse de leur fortune, de leur situation sociale et de leurs lumières. On vit cette influence se manifester à deux reprises, d'abord dans le choix des commissaires rédacteurs du cahier, puis dans l'élection des députés du quart réduit » ' . A Coutances, malgré la division en districts qui eût dû être favorable au recrutement rural, on compte, sur 11 commissaires, un conseiller et un procureur en élection, cinq avocats, deux médecins, un négociant et un seul laboureur. A Saint-Lô, douze hommes de loi, un médecin, un négociant l'emportent, dans une commission de 20 membres, sur trois laboureurs et trois sieurs propriétaires ». A Tinchebrai, en plein Bocage, aucun des six rédacteurs n'est un paysan les élus sont le lieutenant général du bailliage et le procureur du roi, trois avocats et un médecin. A Mortain, où 31 paroisses sur 70 n'ont envoyé que des labou- reurs comme députés, et où ceux-ci comptent 113 voix sur 191 présences, les douze rédacteurs du cahier sont huit avocats, deux médecins, un conseiller au baillage, un négociant. A Avran- ches, la commission de onze membres comprend huit hommes de loi et trois laboureurs. A Valognes, sur onze membres, la commission de rédaction ne compte que cinq laboureurs ; les sept membres, qui forment la majorité, sont le lieutenant parti- culier du bailliage, le procureur du roi de l'amirauté de Saint- Vast, le bailli de Bricquebec, le vicomte de Barfleur, un conseiller honoraire au Conseil supérieur de Corse et deux avocats. Sans avoir une majorité aussi écrasante dans les autres bailliages, à 1 Voir, pour les bailliages du Cotentin, Bridrey, La Représentation des Profes- sions, etc. 218 PRÉPONDÉRANCE DE LA BOURGEOISIE URBAINE Caen, Bayeux, Torigni, à Saint-Sauveur-le-Vicomte, les hommes de loi contrebalancèrent tout au moins dans les commissions l'influence des laboureurs. La même élimination des laboureurs s'accomplit dans l'élection des députés du quart réduit ». Elle fut moins accusée toutefois. Le nombre de ces députés étant beaucoup plus élevé que celui des rédacteurs, force fut aux assemblées d'adjoindre à ceux-ci, pour compléter la délégation, une escorte parfois assez considé- rable de ruraux. Dans certains bailliages, comme Valognes, Saint-Sauveur-le-Vicomte, Tinchebrai, les paysans l'emportèrent sur les hommes de loi W ; dans ceux de Carentan, de Cérences, de Saint-Sauveur-Lendelin, d'Avranches, les deux catégories de députés se firent à peu près équilibre *. Il en fut de même dans le bailliage de Vire, où la balance se tint égale entre urbains et ruraux l8, tandis qu'elle pencha sensiblement en faveur de l'in- fluence urbaine dans le bailliage de Caen *. Dans trois bailliages, le triomphe de la bourgeoisie de robe fut significatif. A Mortain, sur 48 députés, le quart seulement est composé de laboureurs 12; le reste est formé par des avocats 14, des médecins et chirur- giens 8, des notaires 2, un conseiller au bailliage, cinq bour- geois vivant noblement et quelques négociants. A Coutances, les hommes de loi formaient le dixième de l'assemblée préliminaire ; ils furent la moitié de la députation sur 80 députés, 29 seulement él nient laboureurs. Saint-Lô surtout offrit le spectacle d'une annihilation presque totale des campagnes au profit de la ville ; les commissaires rédacteurs, au nombre de 20, composèrent la députation du bailliage. Trois laboureurs y furent admis, ainsi qu'un négociant. Les 16 autres députés étaient des juges, des avocats, des procureurs ou des médecins, c'est-à-dire des bourgeois. fl Le quarl réduit comprit, à Valognes, 42 laboureurs contre 23 hommes de lui et 7 négociants ; à Saint-Sauveur-le-Vicomte, 24 laboureurs et 3 herbageurs contre H gens le robe à Tinchebrai, sur 23 députés, il n'y eut que 5 avocats ; le reste des élus lui formé de propriétaires, laboureurs ou gens non qualifiés. 2 Le quarl réduit compta, à Carentan. sur 32 députés, 10 ruraux contre 13 geas de loi; à Cérences, 1 laboureurs contre î hommes de robe ; à Saint-Sauveur-Lende- lin, 15 hommes de loi contre 11 laboureurs el ;{ négociants ; à lÀvranches, 23 gens de oi contre 20 laboureurs et 10 marchands. 3 Sur les 06 députés que compta le quart réduit du bailliage de Vire, une tren- aine de gens de loi et quelques négociants faisaient équilibre aux propriétaires et laboureurs formant l'autre moitié de la députation. 4 Sur les 122 députés formant le quart réduit du bailliage de Caen, on compte, outre les députés urbains, i hommes de robe parmi les 18 commissaires ruraux, dont plusieurs résidaient à Caen, et une quarantaine de gens de loi et négociants de Caen parmi les 74 députés dits de la campagne ; au total, environ 80 députés urbains. VICTOIRE DES GENS DE ROBE 219 L'évolution de la campagne électorale du Tiers-état, dans les deux bailliages principaux de Caen et de Coutances, avait été très favorable aux villes. La majorité rurale, si écrasante au début, allait se fondant peu à peu dans les assemblées électorales graduelles. Les gens des villes en avaient imposé aux paysans, s'étaient attribué la meilleure part dans les commissions et une place notable au sein des délégations. Et c'est la robe, plus encore que le négoce ou l'industrie, qui avait profité de cette évolution . Outre le procès-verbal au l lien tique de l'assemblée du clergé de Caen et la correspondance de Coigny, nous possédons sur cette réunion d'autres renseignements fort intéressants les protes- tations successives adressées par l'évêque de Bayeux et son chapitre au ministre de la province, Villedeuil 3 ; une lettre écrite de Caen le 21 mars 1789 à M. B. . . » et que j'attribuerais à Revel de Bretteville, procureur du roi au bailliage W; le Journal de Soulavie. Curé de Septvents au bailliage de Torigni depuis 1787, l'abbé Soulavie, qui était en même temps vicaire général de l'évêque de Châlons, s'associa avec passion au mouve- ment électoral de 1789 et joua un rôle des plus actifs dans l'as- semblée du clergé de Caen, où il chercha vainement à se faire élire. Ses bulletins manuscrits, adressés au jour le jour à Necker, contiennent une relation fort curieuse des événements l5. En rapprochant ces documents divers, et en tenant compte des exagérations inspirées à leurs auteurs par l'esprit de parti, on peut reconstituer assez exactement les scènes vraiment drama- tiques auxquelles donna lieu l'élection des députés du clergé. Dans le diocèse de Bayeux, comme dans ceux de Coutances et d'Avranches, cet ordre était divisé en deux camps l'évêque et les gros commendataires d'une part, les curés et les petits bénéficiers de l'autre. L'évêque de Bayeux, du Cheylus, qui passait pour avoir plus de livres de revenu annuel, n'était pas des plus populaires. Les curés lui en voulaient parce que quelques-uns d'entre eux avaient plaidé contre lui pour avoir une augmentation de traitement qu'il leur refusait malgré 1 Esnault, Mémoires de la ville de Caen, t. I, p. 4. 2 Lettres du duc de Coigny à Necker et Villedeuil. Arcli. nat, Ba 27, 1. 45. Ct Arch. château d'Harcourt, 1. 338. Lettre du même au duc d'Harcourt. Le rédacteur du catalogue manuscrit de ces archives attribue à tort ces Ici lies au marquis d'IIé- ricy. 3 Arch. nat., Ba 27, 1. 45. Ibid., C 17, 1. 38. Arch. greffe de la Cour d'appel de Caen. Registre n° 4. 4 Copie d'une lettre écrite de Caen le 21 mars 1789; pas de signature. Arch. nat., Ba27, 1. 45. 5 Journal des élections du bailliage de Caen ; 7 pièces. Ibid., publiées par A. Brette dans La Révolution française, t. XXVII, p. 162-169. Cf. A. Mazon, Histoire de Soulavie,. naturaliste, diplomate, historien, t. II. p. 85-90. MALVEILLANCE RECIPROQUE DES DEUX PARTIS 227 ses revenus considérables ». On lui reprochait aussi d'avoir récemment interdit les Capucins de Caen, très respectés dans la ville l. On l'accusait enfin d'avoir voulu enlever les pouvoirs à tous les vicaires des paroisses pour empêcher l'absence des curés et les écarter des élections 2. Le bas clergé était en grande majorité hostile, non seulement à l'évêque, mais au chapitre de la cathédrale de Bayeux. Dès la veille de l'assemblée les curés avaient tenu, en dehors de l'abbaye Saint-Etienne qui leur avait été assignée pour leur réunion, des conférences particulières, convoquées par billets anonymes, à l'église voisine de Saint-Nicolas. Ces conférences clandestines et illégales », tenues malgré l'arrêt du 25 février 1789 et la défense de l'évêque, avaient excité chez celui-ci une vive indignation. Elles avaient eu pour but de préparer les opinions et les élec- tions » i>. On y avait tenu des propos séditieux, on y avait arrêté les listes des commissaires et des députés. On semblait tout y avoir réglé d'avance. Déjà fort mécontent du Règlement du 24 janvier, qui décimait son chapitre et donnait la prépondérance au clergé du second ordre, l'évêque du Cheylus était arrivé à Caen avec des vues hostiles ». La manifestation de Saint-Nicolas accrut son dépit. D'accord avec son chapitre, il résolut de faire un éclat, de procéder par l'intimidation, et de rompre l'assemblée ». Il débuta par un discours incendiaire où il fronda de la manière la plus indé- cente le Règlement du Roi ». Le lieutenant de police trouva ce discours si affreux » qu'il en interdit l'impression 4. Avec des dispositions si malveillantes de part et d'autre, la lutte ne devait pas tarder à s'engager 5. La première journée 17 mars, assez paisible, fut consacrée à l'élection du secrétaire de l'assemblée, au scrutin individuel. Lefrançois, curé de Mutrécy, 1 Esnault, Mémoires de la ville de Caen, p. 4. 2 Lettre de Le Tuai, curé de Saint- Vigor-Ie- Grand, citée ci-dessus, ch. IX, p. 191, note 4. Arch. nat., Ba 27, I. 45. Bisson adresse à du Cheylus le même reproche Il lit tous ses efforts, écrit-il, pour écarter de l'assemblée quelques curés remuants dont il redoutait les principes austères. » Mémoires, fol. 78. 3 Lettre de l'évêque de Bayeux à Villedeuil, 22 mars 1789. Arch. nat., Ba27, 1. 45. 4 Lettre écrite à M. B... auteur anonyme le 21 mars 1789. Ibid. J'ai retrouvé ce discours prononcé par l'évêque de Bayeux à l'ouverture de l'assemblée de l'ordre du clergé le 17 mars 1789, aux Arch. comm. Caen, ancien carton 20. 5 Ce discours déplacé, écrit Bisson, produisit tout son effet. Il acheva de soule- ver tous les esprits contre M. l'évêque et contre le chapitre de sa cathédrale et devint le signal du scandaleux combat qui eut lieu contre le prélat, ses grands vicaires et chanoines et le reste du clergé. » Mémoires, fol. 78. 228 TUMULTE ET CONFUSION DE L'ASSEMBLÉE recueillit la plupart des suffrages. Le 18 mars, le tumulte com- mença, lorsque le chapitre de Bayeux demanda à présenter ses observations. Il contestait la validité du Règlement du 24 jan- vier, proposait de déclarer l'assemblée inconstitutionnelle et demandait la nomination de commissaires pour délibérer sur cette proposition. Ses membres se retirèrent ensuite pour ne pas gêner les décisions de l'assemblée. Après leur dépari, la discussion s'éleva et prit bientôt un caractère aigu. Pendant plus d'une demi-heure, au milieu d'un vacarme indescriptible, les partisans et les ennemis de l'évêque et du chapitre furent aux prises. La très grande majorité refusa de mettre en délibération le Règlement royal. Quand Soulavie, monté sur une table au milieu de cette confusion, demanda le vote par mains levées sur ce point, cin- quante têtes pelées se dressèrent pour juger le règlement, et mille mains se levèrent contre le jugement » i1. Les épiscopaux furent impuissants à se faire écouter, et quand le chapitre rentra, on lui signifia le refus de ses propositions. Il déposa alors sur le bureau de l'assemblée une protestation passée devant notaire à Bayeux le 13 mars, et se retira. L'évêque sentit sa situation absolument compromise 2. Il perdit la tête et s'écria à haute voix que le Règlement royal n'était qu'un maussade chiffon et une mépri- sable besogne, un chiffon détestable auquel il n'obéirait jamais »3. Faisant cause commune avec son chapitre, il se retira aussi en prétextant le peu de tranquillité qui régnait dans l'assemblée et l'indécence des clameurs qui troublaient les opérations et les suf- frages 4. Le chapitre de Sées, l'abbé de Troarn par son procureui, 1 Mazen, Histoire de Soulavie, t. I, p. 85 sqq. — Après une demi-heure, écrit l'évêque de Bayeux à Yilledeuil. on fit rentrer les membres du chapitre pour leur annoncer le rejet de leur proposition. Quelqu'un Mesnilgrand représenta qu'on n'avait pas été aux voix, qu'il ne pouvait y avoir délibération. Aussitôt bruit affreux et le refus se trouva tumuïtuairement consommé. » Lettre de du Cheylus à Ville- denil. 22 mars 1789. Arch. nat, Ba 27, 1. 45. 2 Il y eut, écrit Bisson, une sorte d'émulation parmi les curés à qui le moleste- rait davantage. » Mémoires, fol. 78. 3 Lettre écrite à M. B., 21 mars 1789. Arch. nat., Ba 27, 1. 45. 4 Lettre de l'évêque de Bayeux à Villedeuil, 22 mars 1789. Ibid. Du Cheylus y pro- teste auprès du ministre contre l'inexactitude du procès-verbal de sa retraite, tel qu'il a été rédigé par le lieutenant général du bailliage pie le tumulte de l'assem- blée avait forcé d'intervenir. — Vous verrez par ce procès-verbal, écrit le procu- reur du roi au bailliage de Caen, que lors des discussions de l'évêque et de son clergé nous tûmes appelés, M. Delisle et moi, pour y mettre la paix dans l'assem- blée , que le bon évêque n'avait pas même un secrétaire pour rédiger un procès-ver- bal, que celui que l'on va recevoir fut rédigé sous notre dictée, et qu'actuellement Monseigneur bonde contre nous pour l'avoir fait. » Lettre du 21 mars 1789. Ibid. RIVALITÉ DE SOULAVIE ET DE MESNILGRAND 229 de Cairon, abbé de Barbery, Méry de Berthenonville, doyen du Sépulcre, et quelques autres adhérèrent à la protestation du chapitre. Mesnilgrand, prieur de l'abbaye Saint-Etienne, un des membres les plus actifs de la Commission intermédiaire provinciale, très ambitieux et désireux de capter les suffrages en ménageant les deux partis, y adhéra aussi, mais en formulant des réserves ; il déclara respecter le Règlement royal » et se contenta d'une protestation platonique pour l'avenir. Une partie del'Univer- sité de Caen se rangea à son avis. Ces diverses protestations restè- rent d'ailleurs sans effet l'immense majorité de l'assemblée se rallia à la voix du prêtre Jarry qui en faisait justice, et sans se préoccu- per davantage du départ du chapitre et de l'évêque, auquel, par courtoisie, elle avait envoyé une délégation pour le prier de revenir sur sa détermination, elle continua à délibérer sous la présidence de l'abbé de Barbery tt. Sur la proposition de Sou- lavie, vingt-cinq commissaires cinq par bailliage furent élus pour la fusion des cahiers particuliers $. Soulavie fut l'un des commissaires du bailliage de Torigni et le rédacteur général du cahier. Il avait déjà exposé son programme de réformes dans une brochure intitulée V Aristocratie enchainée 3. II y demandait la soumission des biens du clergé à l'impôt, la fusion du clergé et des autres ordres, le retour des dîmes au curé après la mort des commendataires. Il espérait faire accepter ce programme aux curés, en grande majorité dans la commission, où il n'était entré que cinq religieux. Mais le chef de cette minorité, le béné- dictin Mesnilgrand, jeune, vigoureux et beau parleur » fut assez habile pour effrayer les autres commissaires, et bientôt Soulavie se trouva isolé. Obligé de modifier contre son gré les 1 Un vieillard moribond s'est saisi du fauteuil et s'est nommé président... » Journal des élections, etc., 22 mars 1789. Arch. nat, Ba 27, 1. 45. 2 Commissaires-rédacteurs élus Pour le bailliage de Bayeux Le Tuai, curé de Saint- Vigor-le-Grand ; Liot, curé de Catilly ; Scelles, curé de Houtteville ; Delleville, curé de Crépiu, et le prieur de Saint-Vigor. Pour le bailliage de Caen Levêque, curé de Tracy ; les curés de Hamars, de Saint-Sauveur et de Saint-Nicolas de Caen et dom Mesnilgrand, prieur de Saint-Etienne de Caen. Pour le bailliage de Falaise Le Tellier, curé de Bonnœil ; les curés de Saint-Germain de Falaise, de Mézidon, de Sainte-Opporlune et de Pont, près Jores. Pour le bailliage de Torigni Soulaville ainsi écrit le procès-verbal original, curé de Septvents ; les curés de Sallen, La Chapelle-IIeuzebrocq, Saint-Clair et le prieur de Guilberville. Pour le bailliage de Vire les prieurs de Carville et de Roullours ; les curés de Saint-Martin-de-Talle- vende, Saint-Germain-du-Crioult et Cerisy-Belle-Etoile. 3 La deuxième partie de cette brochure était intitulée Les doléances des curés de Normandie présentées par le sieur Soulavie, curé de Septuents, au bailliage de Caen 16 pages. 230 ÉLECTION DE TROIS CURÉS RURAUX articles du cahier général, puis mortifié par l'accueil plutôt froid que sa lecture avait trouvé parmi ses auditeurs, Soulavie donna avec éclat sa démission de rédacteur. Il distribua une protesta- tion imprimée contre la déloyauté des commissaires, demanda à prouver par témoins que plusieurs de ceux-ci avaient essayé de le corrompre par des présents, accusa les épiscopaux de faire boire les curés dans l'abbaye ». La faction des commendataires tenta de le perdre. Une sentence du bailliage lui interdit l'assis- tance aux assemblées ; Mesnilgrand lui en fit fermer l'accès et le séquestra même pendant plusieurs heures dans une salle de son abbaye. A la prière des curés, et après rétractation publique de ses accusations, Soulavie rentra dans la chambre du clergé et put assister aux dernières séances. Mais il n'y joua désormais aucun rôle et ne fut pas élu aux Etats généraux, pas plus d'ail- leurs que son rival Mesnilgrand. Ce furent trois curés ruraux qui rallièrent la majorité des suffrages *. Le secrétaire de l'assemblée, Lefrançois, curé de Mutrécy, fut le premier des trois députés. Le même jour 26 mars fut élu le premier commissaire du bailliage de Caen, Levêque, curé de Tracy. Le Tellier, curé de Bonnœil et premier commissaire du bailliage de Falaise, fut nommé le 27 mars. La- rancune des curés contre l'évêque, son chapitre et les moines avait persisté jusqu'à la fin des élections. C'était la victoire du bas clergé et sa revanche contre les humiliations et les vexations qu'il avait endurées. Ces élections avaient un caractère démocratique indéniable le premier ordre, celui des gouvernants », était battu par le second, celui des gouvernés ». Vainement l'évêque et le chapitre protes- tèrent-ils contre les décisions de l'assemblée électorale et refu- 1 Les curés avaient leur siège fait avant l'ouverture de l'assemblée électorale, témoin les lettres de Soulavie, curé de Septvents, et de Le Tuai, curé de Saint- Vigor- le-Grand, à Necker, 6 mars et 14 mars 1789 voir ci-dessus, chapitre IX, p. 191-192. Leur entente persista pendant la durée de l'assemblée. Bisson, dans ses Mémoires, raconte, sur leurs manœuvres, des détails assez intéressants Les curés, dit-il, ne voulurent que des curés pour les remplacer. 11 en fallait trois pour le bailliage de Caen, et ceux qui furent désignés et qui réunirent la majorité des suffrages furent le sieur Lefrançois, curé de Mutrécy, Lévèque, curé de Tracy-Bocage, et Letellier, curé de Bonnœil. En prenant les trois lettres initiales de ces trois paroisses, ils en firent une espèce de mot d'ordre ou de guet assez singulier, au moyen duquel les curés s'assuraient mutuellement qu'ils étaient dans la même opinion sur le choix des députés à nommer. Le premier disait à l'autre M'aimes-lu bien ? et l'autre devait répondre Ma toute belle. Quand on s'était parlé ainsi de part et d'autre, on se ser- rait la main l'un à l'autre en signe d'union de cœur et de sentiment. » Mémoires, fol. 79 V. l'assemblée de la noblesse a coutances 231 sèrent-ils de reconnaître les députés du clergé. Leur attitude fut blâmée par tous, même par le roi 1>. Les deux assemblées de la noblesse, celle de Coutances comme celle de Caen, furent plus paisibles. A Coutances, l'ordre de la noblesse se réunit le 20 mars dans l'église des Capucins, sous la présidence du doyen d'âge, Plessard de Servigny 2. Le marquis de Caillebot la Salle, lieutenant général des armées du roi, dirigea bientôt les séances, en l'absence du grand bailli d'épée, le marquis de Blangy, vieillard qui s'éteignait alors dans un château des environs de Caen 3. L'assemblée élut pour secrétaire Frémin de Beaumont, procureur syndic noble du département de Coutances. Elle procéda le 21 mars à l'élection de onze commissaires chargés de la rédaction de son cahier. Chacun des dix bailliages secon- daires devait fournir un rédacteur, et le onzième devait être élu par l'assemblée. Les suffrages tombèrent sur des hommes déjà initiés à l'administration et qui avaient tous joué un rôle plus ou moins actif comme présidents ou députés des assemblées de département ou comme procureurs syndics *î. C'est parmi eux qu'allait être choisie la plus grande partie de la députation. Après trois jours de travail, ces commissaires, qui avaient eu à leur disposition de nombreux mémoires particuliers, soumirent à la discussion de l'assemblée les articles de leur cahier. L'élection des quatre députés aux Etats généraux prit quatre jours et fut des plus calmes. Pas la moindre querelle ne s'y éleva. Mais la majorité fut difficile à atteindre, les suffrages s'égarant sur une vingtaine de candidats 5. Sur quatre députés, deux seulement 1 Lettre de Delessart, du 1er avril 1789, sur la surprise indignée du roi à cette occasion. Arcb. nat, Ba 27, 1. 45. L'évêque de Bayeux, en juin 1789, refusa de recon- naître l'ordre du clergé au sein des Etats généraux et d'adhérer à ses délibérations. Ibid. 2 Procès-verbal de l'assemblée de la noblesse du bailliage de Coutances. Arch. nat., C 18, 1. 62. Ibid., B"1 53. 3 Voir ci-dessus, chap. IX, p. 186, note 2. 4 Commissaires-rédacteurs de la noblesse pour le bailliage de Cotentin. Cou- tances Le Forestier de Mobecq ; Cérences Le Forestier de Munevîlle ; Saint-Lô d'Auxais de Montfarville ; Avranches Artur de la Villarmois ; Mortain de Vau- fleury de Saint-Cyr ; Carentan Le Maignan ; Valognes Beaudrap de Sotteville ; Saint-Sauveur- le- Vicomte d'Anneville du Vaast ; Saint-Sauveur-Lendelin Achard de Bonvouloir ; Tinchebrai de Gassé, du bailliage de Valognes élu par l'assemblée à la pluralité des voix, vu l'abstention en bloc de la noblesse de celui de Tinche- brai ; le onzième commissaire, élu aussi par toute l'assemblée, fut Michel de Cham- bert. 5 Lettre du comte de Vassy, 31 mars 1789. Arch. dép., Calvados, série E, famille Vassy. 232 LES DÉPUTÉS NOBLES DU COTENTIN furent élus au premier tour de scrutin ; il fallut deux tours pour l'élection du troisième, et trois tours pour celle du dernier. Le premier élu fut Achard de Bonvouloir, seigneur patron du Désert, près Saint-Lô, ancien capitaine de cavalerie. C'était un des plus fougueux aristocrates de l'assemblée, un des partisans les plus opiniâtres de l'Ancien régime, un des plus ardents défenseurs des privilèges nobiliaires. Il avait exprimé avec véhémence ses opinions dans son Tribut d'un gentilhomme normand à V Assem- blée des notables. Il passa au premier tour de scrutin, le 28 mars. Son élection était caractéristique et dévoilait les tendances rétrogrades de l'assemblée. Le second siège fut attribué, le 29 mars au soir, à Beaudrap de Sotteville, ancien officier au corps royal de l'artillerie, procureur syndic noble du département de Valognes. On se rappelle les motifs de son triomphe sur Colleville à l'occasion de l'élection au syndicat en 1788 l\ et la signification de cette nouvelle victoire électorale n'était douteuse pour per- sonne. Le 30 mars, un noble de l'Avranchin, Artur de la Villar- mois, fut nommé au premier tour. Le quatrième siège fut disputé entre Leclerc de Juigné, comte de Courtomer, seigneur de Sainte- Mère-Eglise, maréchal de camp des armées du roi, parent de l'archevêque de Paris, et Frémin de Beaumont, secrétaire de l'assemblée. Au scrutin de ballottage ce fut le premier qui l'em- porta. La noblesse du Cotentin n'avait pas élu un seul noble de robe c'est dans l'aristocratie militaire et foncière qu'elle avait à dessein choisi ses représentants. L'assemblée de la noblesse du bailliage de Caen, réunie à l'abbaye Saint-Etienne, tint douze séances du 17 au 28 mars 1789. Le grand bailli d'épée, le duc de Coigny, la présida *. Les huit plus anciens gentilshommes de chacun des cinq bailliages réunis formèrent une commission de quarante membres, qui élut pour secrétaire Grandin de la Gaillonnière. On procéda ensuite à l'élection de vingt-cinq commissaires cinq par bailliage pour la rédaction du cahier de doléances. Beaucoup d'entre eux étaient aussi des membres de l'Assemblée provinciale ou des assemblées de département, tels pour le bailliage de Caen, le comte d'Osse- 1 Voir ci-dessus chap. III, p. 14, noie 2. f-2 Procès-verbal de l'assemblée de la noblesse du bailliage de Caen. Arch. greffe de la Cour d'appel de Caen, Registre n° 3. Cf. Arcb. nat, C 17, 1..88etBm 40. Le mar- quis de Than, lieutenant-général d'épée au bailliage de Caen, qui avait réclamé la présidence de la noblesse, fit, au début de l'assemblée, une protestation purement formelle vu lu présence du grand bailli. l'assemblée de la noblesse a caen. ses députés 233 ville, le marquis de Cagny et le marquis d'Héricy de Vaussieux ; pour celui de Bayeux, le comte de Faudoas, de Berné, de Wimp- fen ; pour Falaise, le comte de Vendceuvre ; pour Vire, le comte de Vassy, le marquis de Canisy, des Rotours baron de Chaulieu et Brouard de Clermont. Du 18 au 23 mars, ces commissaires travaillèrent en commun pour fondre en un seul les différents cahiers particuliers qui leur avaient été remis. Le 23, le comte d'Osseville en commença la lecture devant l'assemblée ; elle dura trois jours. Dès les premières séances, sur la proposition du duc de Coigny, la noblesse avait fait abandon de ses privilèges pécu- niaires, tout en exprimant le désir du maintien de ses autres privilèges *. Le 26 mars, le baron de Wimpfen lut un long mé- moire, demandant une marque distinctive pour la noblesse des deux sexes, en dédommagement des sacrifices qu'on exigeait d'elle 2. îl fut acclamé et ce succès opportun le mit en vue pour la députation. L'assemblée avait à nommer trois députés ; l'attri- bution de ces trois sièges nécessita, pour chacun, deux tours de scrutin. Le duc de Coigny, président, fut le premier élu ; le comte Louis de Vassy obtint le second rang. Tous deux étaient de vieille noblesse normande, comptaient parmi les grands proprié- taires fonciers du pays et avaient joué pendant ces dernières années un rôle considérable dans l'administration de la province. Un autre gentilhomme, d'origine, normande, le rapporteur des doléances de la noblesse, le comte d'Osseville, dont le zèle géné- reux avait eu déjà tant d'occasions de se manifester, recueillit un nombre assez grand de suffrages pour le troisième siège. Mais il trouva un concurrent plus heureux dans la personne du baron Félix de Wimpfen, dont le mémoire sur un nouvel ordre de che- valerie venait de séduire l'assemblée. Wimpfen n'était normand que d'adoption né dans une petite ville de la Basse-Alsace, il avait servi dans des régiments étrangers à la solde de la France, pris part à la guerre de Sept Ans, à l'expédition de Corse, à la guerre de l'indépendance américaine. Pendant son séjour au 1 Une lettre du 23 mars 1789, écrite par un membre de la noblesse, Néel de Ton- tuit, faisait un pressant appel à l'union. Songeons au bien public, écrit-il,... Que la parfaite équité serve de base à la démarcation des privilèges de cbaque ordre. Sacrifions-nous au bien-être de la patrie, chacun dans la mesure où nous pouvons la servir... Accordons à nos députés] la liberté de sacrifier nos droits. » Cette lettre nous est connue par une copie transcrite à la suite du cahier des armuriers, fourbis- seurs et couteliers de Caen. Arch. comm., Caen, ancien carton 20. 2 Arch. nat., Ba 27, 1. 15, dossier 6, et Bm -10. p. 352 publié par Hippeau, t. Vil, p. 231. Cf. ci-dessus, chap. IX, p. 194. 234 l'assemblée du tiers état A CAEN camp de Vaussieux 1778-1780, il avait épousé une châtelaine du Bessin, et il était devenu seigneur de Saint-Germain-la-Lieue, près Bayeux. La paix de Versailles l'y avait ramené comme maréchal de camp en 1784. Il y vivait depuis cinq ans ; membre de l'académie locale, il occupait ses loisirs à des travaux sur l'art militaire, et à des études philosophiques et littéraires 1. En 1788, il avait été choisi comme député de la noblesse à l'assemblée du département de Bayeux. Le rôle actif qu'il joua dans l'assemblée électorale de Caen le fit préférer au comte d'Osseville et le scrutin de ballottage lui attribua la troisième députation *. Les élections de la noblesse du bailliage de Caen avaient eu un caractère aristocratique, autant que celles du Cotentin. Pas un noble d'office n'était député de cet ordre. La noblesse de race l'avait emporté 3. Les assemblées générales du Tiers état commencèrent à des dates différentes à Caen et à Coutances. Dans la première de ces villes, 455 délégués des bailliages se réunirent le 17 mars à l'abbaye Saint-Etienne, sous la présidence du lieutenant général Duperré de Lisle 4. Trois commissaires furent désignés par bailliage pour fondre les cinq cahiers bailliagers en un seul ; ces quinze rédac- teurs étaient des magistrats, des avocats ou des négociants 5. Delauney, député de Bayeux, semble avoir été le plus actif d'entre eux et comme le rapporteur général. Leur besogne étant achevée le 21 mars, le cahier général fut lu en assemblée publique et plusieurs changements y furent faits. Des observations pré- sentées le 23 mars par deux députés du bailliage de Caen, Le Canu et Laurent, et une protestation de Le Tellier, avocat de Bayeux, qui rallia 68 signatures, déposée le 26 mars sur le. bureau de l'Assemblée, ajournèrent jusqu'à cette date la rédaction défi- nitive du cahier. Delauney dut prendre la parole pour défendre 1 Voir Pezet, Bayeux au XVIIIe siècle, p. 60 et suivantes. 2 On fut surpris, dit un contemporain, de la nomination de Wimpfen, comme si dans la noblesse du pays on n'eut pu trouver un homme capable et digne de cet honneur ». Esnault, Mémoires de la ville de Caen, t. I, p. 4. 3 Voir Pezet, ouv. cité, p. 105. 4 Arch. greffe de la Cour d'appel de Caen. Registre n° 2 intitulé Procès-verbal de l'ordre du Tiers état 1789. Cf. Arch. nat., C 17, 1. 38 et B1" 10. 5 Commissaires-rédacteurs du Tiers état. Pour le bailliage de Caen de la Rue, Costy, Lamy ; pour celui de Bayeux Delleville, Delauney et de la Londe Sainte- Croix ; pour celui de Falaise Bertrand l'IIodiesnière, de l'Epine et Poulain de Reau- chesne ; pour celui de Torigni Ileudeline, Pain, Fleury ; pour celui de Vire Flaust, Lecourt et Brenet de Rrais. LES DÉPUTÉS DU TIERS ETAT DU BAILLIAGE DE CAEN 235 l'œuvre des commissaires *, et réussit à faire accepter le cahier par une majorité de paysans pressés de retourner aux travaux des champs 2. Les opérations électorales commencèrent le 22 mars et durèrent trois jours. Douze tours de scrutin furent nécessaires pour nom- mer six députés. Le premier député fut l'avocat bayeusain Delau- ney, un des commissaires et celui qui avait pris la part la plus active à la rédaction des doléances membre de l'Académie des lettres de Bayeux, poète à ses heures, c'était un esprit distingué et un administrateur consciencieux qui avait donné de grandes preuves de compétence, surtout en matière de travaux publics, comme député du bureau intermédiaire de Bayeux. Il fut élu au second tour le 23 mars. Le même jour, le bailliage de Falaise fournit le second député les suffrages s'étant partagés entre deux de ses commissaires, Bertrand de l'Hodiesnière, procureur du roi, et Poulain de Beauchesne, propriétaire à Saint-Martin- l'Aiguillon, le scrutin de ballottage donna l'avantage à ce der- nier. Le troisième député fut plus difficilement élu. On annula le premier scrutin parce qu'un électeur du bailliage de Falaise, Lebailli des Loges, avait déposé deux bulletins dans l'urne ; le second et le troisième tour ne donnèrent aucun résultat les voix se partageaient entre le lieutenant général qui présidait l'assem- blée, Duperré de Lisle, et un négociant protestant de Caen, commissaire du bailliage, Lamy. Celui-ci l'emporta au quatrième tour. Restaient trois sièges à attribuer les deux bailliages de Vire et de Torigni en obtinrent un. Le lieutenant général de Vire, Flaust, et le conseiller assesseur de Torigni, Pain, furent tous deux élus au premier tour, le 25 mars. A ce moment, un des députés de la ville de Caen, de Cussy, ancien directeur de la Monnaie, se leva et lut à l'assemblée un long mémoire apologé- tique pour réfuter des écrits injurieux dirigés contre sa personne ; la lecture finie, il annonça son intention de quitter l'assemblée. il Le discours de Delauney figure parmi les pièces annexées au procès-verbal de l'assemblée. Arch. greffe de la Cour d'appel de Caen. On y trouve également la pro- testation rétrograde de Letellier, avocat de Bayeux, et des observations de Lecanu et Laurent, dont l'étude sera plus opportune dans le chapitre suivant consacré aux cahiers. 2 Toutefois, on trouve d'assez nombreuses protestations à la suite du cahier, émanant de rédacteurs eux-mêmes. Flaust, lieutenant-général du bailliage de Vire, l'un des quinze commissaires, qui fut même un des députés du Tiers aux Etats généraux, signe le cahier comme rédacteur et sans l'approuver ». Brenet et Louis Lamy, deux autres commissaires, sont aussi parmi les protestataires. Voir ci-dessous, chap. XI, p. 290. 236 l'assemblée du tiers état a coutancês Cette diversion habile le servit les assistants le prièrent de demeurer au milieu d'eux, et pour rendre hommage à sa droi- ture », lui confièrent le sixième mandat de député aux Etats généraux. Trois officiers des juridictions royales, un avocat, un négociant et un grand propriétaire rural, tel fut le bilan des élections du Tiers état pour le bailliage de Caen. Celui du Cotentin avait droit à huit députations. L'assemblée électorale, réunie le 20 mars dans la grande salle du présidial de Coutancês, y tint ses séances jusqu'au 30 mars *. Elle fut nom- breuse jusqu'au bout et le procès-verbal des dernières réunions nous révèle 367 votants. Comme il y avait dix bailliages, c'est-à- dire dix cahiers à fondre en un seul, on décida de confier ce travail à dix-neuf commissaires, deux pour chacun des bailliages de Coutancês, Saint-Lô, Avranches, Carentan, Mortain, Périers, Saint-Sauveur-le-Vicomte et Tinchebrai, et un pour le petit bailliage de Cérences. Le choix fut significatif 11 avocats, 6 baillis, lieutenants généraux ou particuliers, 2 procureurs au bailliage ou à l'élection 2. Desplanques Dumesnil, maire de Carentan, fut, comme doyen d'âge, le président de la commission ; mais le rôle le plus actif dut appartenir à un avocat de Mortain, Le Sacher de la Pallière, qui fit passer à peu près tous les articles du cahier de son bailliage dans le cahier général. Après la lecture et la discussion de ce cahier, qui furent des plus minutieuses et prirent trois jours entiers, on ouvrit le scrutin pour l'élection des huit députés. Il avait été convenu que chacune des six élections nommerait un député et que celles de Valognes et de Coutancês fourniraient deux représentants » 3. C'était une protestation de fait contre la division bailliagère et une reconnaissance anticipée 1 Procès-verbal de rassemblée du Tiers état du grand bailliage de Coutancês. Arch. nat., C 18, 1. 32. Cf. Bm 53. 2 Commissaires-rédacteurs du Tiers état. Pour le bailliage de Coutancês Duha- mel, lieutenant général de police et Letullier, avocat, procureur du roi à l'élection ; pour Saint-Lô Lemenuet de la Jiigannière et Vieillard fils, avocats; pour Avran- cbes Tesnière de Brémesnil, lieutenant général du bailliage et Morin, avocat ; pour Carentan Desplanques-Dumesnil, maire de la ville et Caillemer, avocat pour Cérences Broban, lieutenant général du bailliage ; pour Mortain Le Sacher de la l'allière et Le Bebours de la Pigeonnière, avocats pour Saint-Sauveur-Lemh lin séant à Périers Pouret-Boquerie, procureur du roi au bailliage et Euvremer, avo- cat pour Valognes Besnard-Duchesne, lieutenant particulier au bailliage et Cour- taut-Desfontaines, avocat ; pour Saint-Sauveur-le-Vicomte Angot, bailli de robe longue et Glatigny, avocat pour Tinchebrai Lelièvre de la Provôtière et Laîné- Deshayes, avocats. 3 Lettre de Monlitier, subdélégué d'Avranches, à l'intendant Cordier de Launay 16 mars 1789. Arch. dép., Calvados, C 6353. LES DÉPUTÉS DU TIERS ÉTAT DU COTENTIN 237 du département comme véritable circonscription électorale. Sur un autre point encore, l'assemblée réalisa les vœux exprimés en 1788 par le Tiers état bas-normand elle convint verbalement, écrit un témoin, de ne choisir aucun représentant dans la classe des privilégiés » *. Vu la pluralité des opinions, ces der- niers, malgré l'injustice de cette réclamation », ajoute Ferey de Montitier, furent obligés de garder le silence. Le premier député élu fut Le Sacher de la Pallière, du départe- ment de Mortain. La part prépondérante qu'il avait prise à la rédaction du cahier le désignait à tous les suffrages et il passa au premier tour. Il ne fallut pas moins de douze scrutins pour nommer les sept autres députés. Chaque département devant fournir d'abord un représentant, le deuxième siège fut attribué à Avranches par l'élection de Burdelot, vicomte et maire de Pontorson, membre de l'Assemblée provinciale de Caen. Saint-Lô fournit le troisième député dans la personne d'un avocat, Vieil- lard fils, secrétaire de l'assemblée du département. Valognes obtint le quatrième siège, avec Besnard Duchesne, lieutenant particulier du bailliage. Le cinquième député, du département de Coutances, fut un armateur de Granville, Perrée Duhamel. On choisit le sixième dans le département de Carentan ce fut Desplanques Dumesnil, maire de cette ville. Pour compléter la députation, il restait deux membres à élire dans les départements de Valognes et de Coutances. Pouret Roquerie, procureur du Roi au bailliage de Saint-Sauveur-Lendelin, séant à Périers, fut élu septième député, au premier tour. Ce ne fut qu'au troisième tour qu'on parvint à nommer le huitième député la chance, bientôt circonscrite entre Drogy, avocat à Coutances et Angot, bailli de robe longue à Saint-Sauveur-le-Vicomte, tourna en faveur de ce dernier. Des administrateurs, des magistrats, des avocats, un gros négociant, tels sont les élus du Cotentin. A Coutances comme à Caen, c'est le triomphe de la robe et de la bourgeoisie. 1 Lettre de Montitier, subdélégué d'Avranches, à l'intendant Cordier de Launay^ 1G mars 1789. Arch. dép.. Calvados, C 6353. ' LES CAHIERS DES TROIS ORDRES CHAPITRE XI LES CAHIERS DES TROIS ORDRES DANS LES BAILLIAGES DE CAEN ET DE COUTANCES Prestation de serment des députés et remise des cahiers généraux. — Les cahiers du clergé incidents provoqués par leur rédaction, à Coutances et à Caen. Leurs tendances communes. Leurs vues diver- gentes. Les revendications du bas clergé relatives à son organisa- tion ; son ardent désir d'émancipation. — Les cahiers de la noblesse. Plus d'étroitesse et d'égoïsme dans les vœux du bailliage de Cou- tances ; plus d'ampleur et de générosité dans ceux du bailliage de Caen. — Les cahiers du Tiers état, produits de réductions successives opérées à plusieurs degrés. Lacunes de la documentation qui les concerne. — I. Cahiers primaires. 1° Cahiers des paroisses rurales a doléances d'intérêt local, ayant trait surtout à la question agraire plaintes, non du prolétariat rural, mais des détenteurs du sol. Leur sincérité. Leurs précédents requêtes à l'intendance et Observations générales de 1788. Leur véracité relative. — b doléances d'intérêt général. Influence des écrits publics et des modèles généraux, d'une part, des hommes de loi, d'autre part, sur la rédaction des cahiers ruraux. Questions d'ordre général traitées par ceux-ci. Le style des cahiers ruraux les cahiers incorrects ou naïfs ; les cahiers politico- littéraires. Groupements de cahiers et cahiers-types. — 2° Cahiers des villes, tantôt produit direct d'une assemblée unique, tantôt fusion des doléances d'assemblées préparatoires pour six villes de la géné- ralité de Caen. Prépondérance des bourgeois et gens de robe dans les commissions de rédaction élimination du prolétariat urbain, industriel et ouvrier. Prédominance des vœux d'intérêt général au détriment des vœux d'intérêt régional et local d'ordre économique, et notamment des vœux agraires. — II. Cahiers des assemblées pré- liminaires de quinze ressorts bailliagers. Prépondérance de l'élément urbain au sein des commissions de rédaction, et influence très mar- quée du cahier du chef-lieu dont la substance est souvent presque intégralement adoptée. Exemples précis. Motifs invoqués par les rédacteurs pour justifier l'élimination de nombreux vœux locaux plaintes que celle-ci soulève. Envois directs de cahiers primaires à Versailles. — III. Cahiers généraux du Tiers état à Caen et à Cou- tances. A Coutances, influence dominante de Sacher de la Pallière et du cahier de l'assemblée préliminaire de Mortain. A Caen, incidents et protestation contre le cahier définitif, où perce visiblement l'in- fluence des commissaires de Caen et de Baveux. PRESTATION DE SERMENT. REMISE DES CAHIERS 239 Vœux des cahiers bas-normands relatifs à l'administration provinciale Indifférence presque absolue à l'égard des intendants et des subdé- légués. Désir du maintien des Assemblées provinciales formulé çà et là. Presque unanimité des vœux en faveur du rétablissement des Etats provinciaux. Sur ce dernier objet, aspirations élevées du Tiers état, qui, en prévoyant le sacrifice nécessaire de l'autonomie provin- ciale, prépare l'unité nationale. Le 30 mars 1789, en l'église Saint-Etienne de Caen, dans une assemblée générale des trois ordres, le lieutenant général du bailliage de Caen, Duperré de Lisle, recevait la prestation de serment des députés de ce bailliage aux Etats généraux tf. La même cérémonie eut lieu clans la cathédrale de Coutances le 1er avril, sous la présidence du lieutenant général Desmarets de Montchaton, pour les députés du bailliage de Cotentin 2>. La prestation de serment fut accompagnée, à Coutances, par la remise aux députés des trois ordres des trois cahiers où se trou- vaient définitivement arrêtées les doléances et remontrances du bailliage. A Caen, les cahiers généraux du clergé et de la noblesse furent probablement emportés par les députés de ces deux ordres ; quant à celui du Tiers état, il ne fut adressé que le 17 avril 1789 à Lamy, l'un des six députés du Tiers, par le lieutenant général du bailliage de Caen. Les six cahiers des deux bailliages de Caen et de Cotentin •', forment un volume si mince que cinquante pages imprimées suffiraient à les contenir, et sont d'un poids si léger que la main d'un enfant les soutiendrait sans peine. Ils avaient pourtant l'ampleur d'une importante manifestation sociale ; ils étaient lourds des revendications de nombreux milliers de citoyens. 1 Procès-verbal de prestation de serment des députés du bailliage de Caen, nom- més aux Etats généraux. Arch. nat., C 17, 1. 381. — Cf. Arch. dép., Calvados, C 7636, et Journal de la Basse-Normandie, du 5 avril 1789. 54 Lettre du lieutenant général de Montchaton au garde des sceaux, 2 avril 1780. Arch. nat.. Ba 35, 1. 70. — Procès-verbal de l'assemblée des trois ordres du bailliage à la suite duquel est celui de prestation du serment des seize députés du bailliage. Ibid., C 18, — Cf. abbé Pigeon, Le grand bailliage de Morlain en 1789, t. 111, ]. 531. Cinq députés manquaient à cette dernière réunion l'évèque de Coutances, malade, Le Sacher de la Pallière, Burdelot, Bernard Duchesne et Angot, partis la veille pour affaires urgentes. 3 On possède la série presque complète des cahiers originaux des trois ordres, aux greffes de la Cour d'appel de Caen pour le bailliage de Caen et du tribunal de première instance de Coutances pour le bailliage de Cotentin ; les fonds des Archives nationales renferment aussi d'autres exemplaires de ces cahiers, pièces originales ou expéditions authentiquées, séries Ba 27 et 35, C 17 et 18, ou simples transcriptions de la collection improprement dite collection Camus, B 40, 53 et 54. 240 COMMISSAIRES RÉDACTEURS DU CLERC. É A COUTANCES Rédigés dans des milieux différents, inspirés par des préoccu- pations souvent contradictoires, ils allaient offrir, avec le spec- tacle d'un zèle enthousiaste universel pour le bien public, la trace de divergences nombreuses entre les trois ordres sur les moyens de le réaliser. Pour s'en convaincre, il suffit d'en examiner les dispositions essentielles, d'en analyser sommairement le contenu, de dégager la portée, l'esprit et autant qu'il sera possible l'origine première des vœux qu'ils contiennent. Les cahiers du clergé, à Coutances lJ comme à Caen 2, furent en grande partie l'œuvre des curés à qui leur nombre assura la prépondérance dans les assemblées et dans les commissions. Toutefois l'influence du haut clergé n'y fut pas complètement annihilée, comme la violence du mouvement électoral aurait pu le faire pressentir. L'assemblée ecclésiastique du Cotentin, moins houleuse que celle de Caen, tout en reléguant au quatrième rang de ses élus l'évêque de Coutances, lui avait cependant confié le mandat de député. Parmi les douze membres de la sous-commis- sion chargée de la rédaction définitive du cahier figuraient l'abbé de Cussy, archidiacre du Cotentin, l'abbé régulier de la Luzerne, Gautier de l'Espagnerie, le curé de la collégiale de Mortain, Lebel, et un chanoine du chapitre de Coutances, l'abbé Dubois. Il est fort probable que la majorité des commissaires, choisis dans le clergé des paroisses, subit l'ascendant de la minorité, formée des hau»ts dignitaires. Les cahiers particuliers des vingt-huit doyennés, qui n'ont pas été retrouvés, durent servir de base à la confection du cahier général ; les rédacteurs furent accusés d'avoir systématiquement éliminé certains de ces cahiers, comme suspects de tendances trop hardies, et cette accusation amena même des dissensions dans l'assemblée 3. A Caen, après le 1 Cahier de Coutances original au greffe du tribunal de première instance de Coutances ; copie dans la série Bm 53; publié par Ilippeau, ouv. cilè, t. VIII, p. 1 à G. 2 Cahier de Caen original au greffe de la Cour d'appel de Caen Registre n° 4 inti- tulé Procès-verbal de l'ordre du clergé... avec les pièces et pouvoirs y établis, pièce 1; copies collationnées aux Arch. nat., C 17, liasse 1, dossier 382, pièce 11 ; B1 27, liasse 45, dossier 3, pièce 2 ; transcription dans le B"1 40, pièce 40 ; publié par Hippeau, ouv. cilè, t. VII, p. 151 à 159. 3 Protestation imprimée s. 1. n. d. de la minorité du clergé du bailliage de Cou- tances, rédigée par trente-six prêtres ; lettre d'envoi du 27 mars nu garde des sceaux, signée par Tristan Brission, curé de Saint-Sauveur-Lendelin, et Le Jardinier des Landes, curé de La Feuillie. Arch. nat., Ba 35, liasse 70. Cette protestation a été publiée par Ilippeau, ouv. cilè, t. VIII, p. 6. — Pour plus de détails sur l'attitude du clergé du Cotentin lors de la rédaction de son cahier général, voir Bridrey, L'Assem- blée générale des trois ordres à Coutances Revue de Cherbourg el de la Basse-Nor- mandie, 15 février 1907, p. 121-125. COMMISSAIRES RÉDACTEURS DU CLERGÉ A CAEN 241 tumulte de la première heure, après le départ bruyant de l'évêque de Bayeux et de son chapitre, les curés avaient élu vingt-cinq commissaires pour la rédaction de leur cahier les quatre cin- quièmes d'entre eux étaient membres du clergé paroissial ; cinq seulement appartenaient au clergé régulier. La victoire du clergé du second ordre » semblait assurée par le choix de son ardent dé- fenseur, le curé de Sept vents, Soulavie, comme rédacteur général du cahier. Il emporta les cahiers particuliers, dont la masse formait une imposante collection1;, et passa quatre nuits sans dormir», plongé dans cette analyse laborieuse. Il y cueillit les vœux les plus agressifs contre les moines et les gros décimateurs ; il réclama la fusion des ordres et l'inscription du clergé au rôle commun de l'impôt. Ce fougueux champion effraya vite ses partisans par son ambition, son esprit novateur et l'audace de ses vues. Les cinq commissaires du clergé régulier, et à leur tête le bénédictin Mesnilgrand, prieur de l'abbaye de Saint-Etienne, auquel sa situation et son caractère assuraient une grande influence dans la Commission, n'eurent pas de peine à retourner l'opinion de leurs collègues. Resté seul de son avis, Soulavie se retira en fermant la porte avec bruit . A l'entendre, ce fut la moinaille qui fit l'enfant ». Le propos est exagéré; toutefois la disparition de Soulavie assura le triomphe des modérés iiK Les deux cahiers du clergé ne sont pas de même étendue celui de Caen est presque deux fois plus long que celui de Coutances. Et pourtant celui-ci, sous sa forme concise, est plus riche de fond et louche à plus d'objets 4l. En tête de leurs revendications li Outre le cahier général du clergé, on ne connaît à l'heure actuelle, pour le grand bailliage rie Caen, jue fie s" cahiers particuliers suivants ceux du clergé de Saint-Pierre de Caen, Notre-Dame Us ont, écrit-il, arbitrai- rement l'ait tout ce qu'ils ont voulu. » Lettre du 12 avril 1789. Ibid., Ba 27, liasse ir,. {A Le cahier du clergé du bailliage de Caen est divisé en sept chapitres de la religion et des mœurs; constitution française ; constitution particulière de la Nor- mandie ; constitution du clergé ; finances ; législation ; procuration et pouvoirs. 11 16 342 CAHIERS \H CLERGÉ A CAEN ET V COUTANTES communes, ils placèrent l'obligation pour le gouvernement de protéger la religion catholique. Si l'on montra, à Coulances, une certaine tolérance en faveur des protestants, on fut intraitable à Caen contre tous les dissidents V. Des deux côtés, on exigea le res- pect dû aux choses, aux jours, aux lieux et aux personnes de la religion », la destruction des mauvais livres ». Caen proposa l'adoption d'un plan d'éducation nationale, catholique et monar- chique. Dans les deux bailliages, le clergé émit son avis sur la Consti- tution. Il réclama la périodicité des Etats généraux, la rédaction d'une charte constitutionnelle précédée d'une Déclaration des droits du citoyen. Il sembla préoccupé surtout de mettre un frein au despotisme royal, de prendre ses précautions contre l'arbi- traire ministériel. Dans cette monarchie ainsi restaurée il reven- diqua la première place W. Si, par une extrême prudence, il n'effleura d'aucune allusion la question alors brûlante du vote par ordre ou par tête, sa conception générale de l'Etat ne laisse aucun doute sur ses préférences à cet égard. En face de l'impôt, le clergé des deux bailliages n'eut pas la même attitude. A Cou- tances, la majorité demanda à conserver ses formes » d'assiette et de répartition, se déclarant prête aux sacrifices pécuniaires » que les circonstances exigeraient $. Le clergé de Caen, gagné an* idées de Soulavie, demanda à rentrer au regard de l'impôt dans la classe commune des citoyens » et renonça à toute espèce de distinction pécuniaire, à la condition que l'Etat se chargeât de ses dettes. Les nombreuses réformes que, dans l'ordre social, judiciaire, économique l'opinion publique signalait aux futurs est plus verbeux que le cahier de Coutances, divisé en quatre parties religion ; législation ; impôts et finances ; clergé, el comprenant en tout soixante et un articles très brièvement formulés. 1 One la religion catholique soit la seule religion reçue el dominante dans loul le royaume... que tout autre culte -.il absolument défendu et prohibé. » Clergé du bailliage de . intitulé ; Procès-verbal de l'Assemblée de la noblesse... avec les pièces et pouvoirs \ relatifs, pièce . ci au* Arch. nat., Ba 27, liasse 15, dossier j ; Arch. dép., Calva" dos, série l>> non inventoriée, copie certifiée conforme par le duc île Coigny trans- cription dans la série I'."' in publié par Hippeau, uuv. cité, t. Nil, p. 220 231. 2 Cahier de la noblesse de Coutances. Original au greffe du Tribunal le pre- mière instance de Coutances ci aux Vrch. nat., I." r». liasse 70, dossier i; transcrip lion dans la série B"' 53 ; publié par Hippeau. ouv. cité, t. VIII. p. 7 12. LE CAHIER DE LA NOBLESSE DU COTENTIN 245 chique et le vote par ordre au sein des Etats généraux. Mais ils reflètent, sur beaucoup d'autres points, des sentiments et des préoccupations assez dissemblables chez les membres des deux assemblées. La noblesse du Cotentin, dont le cahier ne compte que vingt-quatre articles, se renferme dans un horizon très res- treint. Elle proteste d'abord contre le Règlement du 24 janvier, parce qu'il a doublé la députa Lion du Tiers état et elle déclare ne lui accorder qu'une obéissance provisoire V. Elle est hypno- tisée par une idée fixe le maintien de ses privilèges honorifiques et pécuniaires sous un roi constitutionnel. Et ce qu'elle entend par régime constitutionnel, c'est le retour de l'ancienne monar- chie tempérée par des Etats généraux périodiques, et de l'an- cienne autonomie provinciale, incarnée dans les Etats provin- ciaux ; elle compte exercer, au sein des uns et des autres, une action prépondérante. Si elle offre un don gratuit » pour parer aux besoins du moment, elle refuse d'être assujettie à la taille, impôt contraire aux droits et aux franchises de la noblesse » {2\ Nul regard sur la situation des deux autres ordres pas un mot des droits féodaux, des vices de l'organisation judiciaire, des souffrances du peuple, des questions sociales et économiques agitées par l'opinion. Confinée et comme emmurée dans son égoïsme de caste, la noblesse du Cotentin s'isole du reste de la nation ; l'intransigeance de ses commissaires, des Bonvouloir et des Sotteville, s'est retranchée dans cette hautaine déclaration comme dans une Bastille. Le cahier de la noblesse du bailliage de Caen a à la fois plus d'ampleur et de générosité. Sans doute celle-ci réclame, en s'appuyant sur des précédents historiques, le maintien des trois ordres et celui du vote par ordre. Sans doute elle sollicite, sur la proposition d'un de ses membres, la création d'une décoration spéciale, d'une sorte de Légion d'honneur à son usage exclusif 3 ; sans doute, elle glisse à la fin de son cahier, à l'adresse des futurs Etats généraux, une timide prière pour la conservation d'une 1 L'assemblée... a arrêté unanimement que l'obéissance provisoire qu'elle rend dans ce moment aux ordres du roi ne pouvait préjudiciel1 dans les réclamations et protestations qu'elle charge ses députés de faire aux Etats généraux sur l'at- teinte qu'on a portée au droit inaltérable d'une représentation égale et légale de chaque ordre. » Noblesse du bailliage de Cotentin, art. 2. 2 Ibid., art. 17. 3 Instructions relatives au Bien public, art. 18. Voir ci-dessus, chap. IX, p. 194, la proposition du baron de Wimpfen. 246 CE CAHIER DE LA NOBLESSE DE CÀEN franchisa quelconque » ''. Kllc veut qu'on la distingue, et croit indispensable au salul de l'Etat l'existence d'un ordre respec- table, intermédiaire entre le peuple et le souverain » rll Mais elle se glorifie d'être une noblesse citoyenne ». Elle jette les yeux hors de sa sphère ; elle s'intéresse aux graves problèmes du temps, réclame la liberté de la presse, la liberté des croyances, l'abolition de la vénalité des charges, la réforme des abus judi- ciaires. Parmi les commissaires rédacteurs ! , plus d'un apparte- nait à l'administration provinciale nouvellement créée, soit comme membre de l'Assemblée provinciale, soit comme admi- nistrateur de département ; plus d'un avait joué un rôle actif, fait montre de sentiments généreux et d'idées libérales dans les séances de ces commissions qui portaient le beau nom de Bu- reaux du Bien public » W. Sous cette rubrique, ils introduisirent pêle-mêle dans leur cahier une série de demandes très diverses, mais inspirées par un visible souci de l'intérêt général. Fondations de dépôts de mendicité, écoles de religion, de bonnes nncurs et de travail » 5 ; primes et encouragements à l'agriculture et sur tout à l'élevage, ressource essentielle du pays ,i^ ; réglementation delà question des biens communaux au gré des communautés '7 ; suppression des maisons religieuses inutiles et emploi de leurs richesses à la création d'hôpitaux et d'écoles gratuites pour les pauvres 8 ; en un mot, amélioration matérielle, intellectuelle et morale du peuple, tels étaient les principaux vœux formulés par la noblesse de Caen. Maint article de son cahier, qui n'eût pas été désavoué par le Tiers état, témoignait des tendances philan- thropiques de plusieurs de ses membres, et notamment de son rapporteur général, le comte d'Osseville. Les deux cahiers généraux du Tiers état pour les bailliages de Caen'J' et de Coufances1° sont le résultat d'une série de réduc- '1 Instructions relative- au Hini public, art. §5. 2 Mémoire de Wimpfen, lu à l'Assemblée de la noblesse, 26 mars 1789. 3 Voir ci-dessus, chap. X, p. 231, note 4. I Ibid., chap. IV, p. 73-7t cahiers sont conservés aux Archives départementales de la Manche i série B non classée huit cahiers ont été retrouvés dans les Archives communales au registre des délibérations, soit comme transcriptions contemporaines de l'original, à la date de février ou mars 1789, soil comme copies exécutées en 1S89 sur l'ordre du Préfet de la Manche, à l'occasion du centenaire de la Révolution française cahiers de Carne ville, Montebourg, ."Mont gardon, Ouetletot, Saint-Floxeh Sainte-Geneviève, Urville-près Valognes, Videcos ville; onze cahiers sonl empruntas à diverses publications, savoir cinq à Hippeau. oav. cité, t. VIII, p. 389. 414, 452 et 459 cahiers de Canteloup, Morsalines, Octeville- la- Venelle, Pierreville, Réville ; cinq dans Lecacheux, Documents pour servir à l'his- loirede Montebourg cahiers d'Hémevez, Ozeville, Saint Cyr, Saint Mailin-d'Andou- ville. Sainte-Marie-d'Andouville ; un dans Lecanelier, Mémoires de la Société archéologique de Valognes, t. VI, p. 'il cahier le Carteret. Pour le bailliage le Carentan, 3 cahiers pour 47 paroisses Carentan-ville et Cauquigny. Arch. dép., Manche, série B non classée ; La Haye-du-Puits, Arch. nal., IIV ,,is 10,231. Pour le bailliage de Saint-Lù, un projet de cahier, celui de Saint-Lô-ville imprimé, 1781» et un cahier, celui de Saint-Jean -d'Ai>neaux, Arch. nat., Ba 35, liasse 70. Pour le bail- liage de Saint-Sauveur-le-Viconite, 3 extraits des cahiers de Turqueville, Le Vastel Néville, \rch. nat., B1" 54. p. 70. Pour le bailliage de Saint-Sauveur Lendelin, 2 ca- hiers, Agon et Saint-Germain do la Campagne pour 19 paroisses ; pour celui de Tin chebrai, 4 cahiers de paroisses mixtes, Le Détroit, Durcet, Espins, Les Tourailles, pour !ti paroisses pour ceux d'Avranches. Cérences et Morlain, pas un muI cahier paroissial. — 4'ous les cahiers du bailliage de Cotentin l'ont l'objet d'une publication de M. Bridrey, en trois volumes. Deux volumes ont déjà paru c'est une édition excellente et définitive. 2 Voir ci-dessous, Appendice III. 3 Les 125 cahiers urbains ou paroissiaux du bailliage de Valognes. publiés par E. Bridrey, ouv. cilé, t. Il, proviennenl en très grande partie des Arch. dép., Manche, série B non classée 106 cahiers. La provenance des 19 autres cahiers 8 extraits de registres de délibérations communales, 5 transmis par Hippeau, 5 par Lecacheux et 1 par Le Canelier a été indiquée dans la note précédente. DISPARITION DE NOMBREUX CAHIERS PRIMAIRES 249 Coutances l, de Falaise 2, où les cahiers paroissiaux abondent, de Torigni W et de Vire 4, où il en existe un groupe assez notable. Or, par une coïncidence regrettable, les cahiers de ces cinq bail- liages n'ont influé que fort peu sur la rédaction du cahier général, soit à Caen, soit à Coutances. Au contraire, les bailliages parti- culiers dont les vœux ont passé presque en entier dans le cahier général, tels ceux de Caen 5 et de Bayeux pour le cahier de Caen, celui de Mortain 7 pour le cahier du Cotentin, n'offrent à nos recherches, les deux premiers qu'un nombre très insignifiant de cahiers primaires, et le troisième, pas un seul. Essayons cependant, dans la limite des moyens dont nous disposons, de refaire le trajet que les cahiers du Tiers état de li Les 117 cahiers primaires du bailliage de Coutances, publiés par Bridrey, ouv. cité, l. 1, p. 133-644, sont conservés aux archives du greffe lu tribunal de première instance de Coutances. Voir ci-dessus, p. 248, note 1. 2 Les 240 cahiers primaires du bailliage . Malgré le libéralisme de la législation électorale, qui permettait aux plus petits cotisés de l'aire entendre leur voix, il n'est pas prouvé que le prolétariat rural y ait assisté en masse. On le voit encore moins figurer dans les députa lions des paroisses 1 Sur 306 cahiers paroissiaux étudiés, j'en ai trouvé 185 ne présentant qu'une des lieux catégories de vœux, soit d'intérêt local 57, soil d'inlérèl général 128 ; les 121 autres cahiers renferment chacun les vœux des deux catégories, tantôt faisant l'objet de développements distincts, tantôt, et le plus souvent, exposés pêle-mêle. 2 Toutefois, quelques cahiers ruraux ont émis des vœux relatifs à l'industrie et au commerce. Le cahier de Villedieu esl rempli de détails typiques sur l'industrie du cuivre et sûr la fahrication des poêles et autres ustensiles de cuisine. Plusieurs paroisses du bailliage de Vire nous font connaître les industries locales les plus diverses toi lier S d'Aubusson, hacherons et charbonniers de la forêt de Ilalouze. ouvriers des forges de Saint-Clair cl de Danvou, etc.. La liberté du commerce est réclamée par une quinzaine de communautés des bailliages de Coutances et de Valo- gftés la suppression des maîtrises et jurandes esl demandée dans les cahiers de Camhernon, Brainville, llauteville-sur-Mer et Nicorps. ! Voir ci-dessus, chap. IX, p. 196-197. Cf. Jaurès, Histoire socialiste. I. I. p. 223-224 An lard, Histoire de la Rêvolitlion, p. 29 et suivantes. ENTRAVES A LA PROPRIÉTÉ RURALE 251 aux assemblées préliminaires de bailliages. Je n'ai trouvé que deux journaliers mentionnés comme députés ruraux, l'un à Grimesnil, dans le bailliage de Goutances, l'autre à Cagny, dans le bailliage de Caen. M. Bridrey croit qu'il s'est opéré, en contradiction du Règlement royal, une sélection spontanée, et qu'il y a en abdica- tion ou exclusion de toute nue partie de la population agricole la population ouvrière » r. Ge qui tendrait à lui donner raison, c'est le caractère même des revendications locales contenues dans ces cahiers elles révèlent des gens intéressés à défendre le sol, dont ils sont propriétaires ou fermiers, contre les charges nombreuses qui pèsent sur lui. Kmanciper la terre, l'affranchir de toutes les entraves qui l'asservissent, de foules les redevances qui absor- bent la plus grande partie de son rendement, voilà ce que veulent les paysans de Basse-Normandie, des grèves du Gouesnon aux falaises de la llague, et des marais de la Dives aux croupes gra- nitiques du Bocage. Ils se plaignent, tout d'abord, de n'en point posséder assez. La plus grande partie du sol, et la meilleure, appartient aux seigneurs et aux privilégiés de tout ordre, cj ni possèdent, tant en fonds qu'en revenus, la moitié, les deux tiers, parfois les trois quarts des paroisses. Le reste est divisé, par petites parcelles, entre les taillables i2. Encore ceux-ci n'en sont-ils, le plus souvent, que fieffataires ; leur propriété n'est pas franche, mais maculée » de lourdes rentes g. La paroisse possède-t-elle, de temps immé- morial, des biens communaux, landages ou bruyères, où va paître la vache du pauvre, où celui-ci va, l'hiver, ramasser un 1 Bridrey. La Représenlalion des Professions, p. 1070 et suivantes. 2 Cahiers d'Acque ville, Gatteville, Herqueville, Montfarville, Saint-Pierre-cTAl- lone, Surtainville, Tonneville et Vasteville bailliage de Vàlognes ; cahiers de La Beslière, de Coudeville, Chantelou, Courcy, Sainl-Martin-le-Vieux, Qucttreville, Dra- gueville, La Haye-Comtesse, Herenguerville, L'Orbehaye, Montaigu, Saint-Jean-des- Champs, Saint-Louet-sur-Sienne, Sainl-Martin-le-Vieux, Saint-Ursin bailliage de Coutances ; cahiers de Biéville, Clouai, Guilberville, SepLvents bailliage de Tori- gni ; cahier de Landelles-et-Coupigny bailliage de Vire. Voir Appendice IL n° 1. Je laisse systématiquement de côté les cahiers du bailliage de Falaise, la. presque totalité des paroisses de ce bailliage étant hors des limites de la généralité de Caen. 11 n'entre pas davantage dans mon plan d'analyser tous les cahiers ruraux conservés pour les paroisses de cette généralité, mais de signaler en note ceux qui contiennent les doléances les plus caractéristiques sur chacun des objets traités. 3 Cahiers de Picauville, Surtainville, Saint-Lô-d'Ourville Vàlognes ; Bréhal. Hugucville, Montaigu-les-Bois, Saint-Martin-le-Vieux, Tourville Coutances ; Mont- bertrand, Saint-Ebremond-de-Ia-Barre Torigni ; Landelles-el-Coupigny, Vaudi y Vire. Voir Appendice II, n° 2. 252 ENTRAVES AUX PROGRÈS DE L* AGRICULTURE peu de bois mort, le seigneur en dispute la propriété aux habi- tants et leur en interdit l'usage l. Pour devenir plus productif, ce sol sur l'infertilité duquel gémissent tant de communautés 2, aurait besoin d'être amendé ; mais les engrais sont très coûteux par suite de leur éloignement et des lourds frais de transport 3. Qu'il aille chercher la charrée à l'intérieur du pays, ou la tangue et le varech sur le rivage marin, le laboureur doit équiper de forts attelages et parcourir un long trajet. Et, à supposer qu'en dépit des ordonnances qui interdisent l'enlèvement de ces engrais de men'4, il ait pu s'en approvision- ner, combien le retour est pénible par ces chemins bourbeux et impraticables, où la charrette s'enlise dans les ornières profondes, où le chargement risque de verser à chaque pas ! L'agriculture ne manque pas seulement d'engrais et de routes ; elle manque de bras. La rareté et la cherté de la main-d'œuvre font l'objet de plaintes fréquentes les travaux de Cherbourg dépeuplent le Cotentin d'ouvriers agricoles, qui vont grossir la plèbe urbaine ^K La milice cause un double ravage elle enlève à la charrue de nombreux fils de laboureurs W ; d'autres, pour se il Cahiers d'Acqueville, Brix, Vasleville, etc. Le roi lui-même revendique la pro- priété des biens communaux pour son Domaine, et lève sur eux une redevance annuelle cahier du Ham. Voir Appendice 11. d° >. 2 Cahiers de Champrepus, La Colombe, La Baleine, Hyenville. Montagu, Saint Malo-de-la Lande, Montcuit, Sourdeval, Saint-Ursin, etc. Coutances ; Carneville, Fontena} en-Cotentin, Montgardon, Morsalines, Notre-Dame-d'Allonne, Banville la- Bigot, Senoville, Surtainville, Saint-Pierre-d'Allonne, etc. Valognes; Aubusson, Landelles-et-Coupigny, La Lande-Vaumont, Sainte-Marie-des-Monts, Saint-Maur- des-Bois Vire; Septvents, Montberlrand, Saint-Pierre-de-Semilly, etc. Torigni. Ibid., n° L 3 Cahiers de Lengronne, Trelly, La Colombe, Percy, Mesnil-Bonant, La llaye- Bellefond, etc. Coutancesj ; d'Acqueville, Aumeville-l'Estre, Pierreville, Quettetot, Rauville-la-Bigol Valognes ; Beuvrigny, Sallen, La F erri ère-Hareng Torigni ; Saint-Maur-des-Bois Vire. Ibid., u" 5. I Cahiers de Brainville, Caillebot-la-Salle, Monthuchon, Saint-Malo-de-la-Lande, etc. Coutances ; de Canville, Gonneville, Sainte-Geneviève, Le Vicel, etc. Valo- gnes de Rampan Torigni ; de Sâint-Denis-Maisoncelles, Saint-Martin-de-Chaulieu Vire. Ibid., n° 6. .r> Cahiers de La Colombe, Le Loreur, Mesnil-Aidierl, Régneville, Saint-Denis-le- Casl, Saint-Bomphaire, Trelly, Sourdeval, etc. Coutances de Fierville, Fontenaj cn-Cotentin, Hautmoitié, Les Perques, Saint-Pierre-d'Allonne, Le Theil, etc. Valo- gnes ; de Saint-Pierre-de-Semilly Torigni. Ibid.. n" 7. 6 Cahiers de Gatte ville, La Pernelle, Saint-Germain-le-Gaillard, Valcanville, Varouville, Montfarville, Carneville, Theurteville-au-Bocage, Ozeville. Saint Mar- tin-d'Audouville, Brettevi lie Valognes. Ibid., n" 8. 7 Cahiers d'Englesqueville-l'Estre, Alleaume, Anneville-en-Cères, Breuville, Bricquebec, Helle ville, Montfarville. Notre-Dame-d Allonne, Ozeville, La Pernelle, Réville, etc. Valognes. Les cahiers du bailliage; de Coutances contiennent surtout LES IMPOSITIONS ROYALES 253 soustraire à son joug, émigrent en masse vers les villes, recher- chant, au service des privilégiés, les emplois de domesticité qui les exempteront de cette charge 1. La grosse question, écrit M. Bridrey, celle sur laquelle revien- nent à tout instant les cahiers du Cotentin, ce sont les charges de la production » -. Acquittées en argent ou en nature, envers le roi ou les privilégiés, elles constituent un fardeau très onéreux pour la propriété roturière. La taille, tout d'abord, atteignait en Basse-Normandie la propriété, l'exploitation et l'industrie ; arbitrairement répartie, en l'absence d'un cadastre régulier 3, elle frappait en aveugle les fonds les moins fertiles et se détour- nait des meilleures cultures l>. La perception en était rigoureuse, vexatoire et vraiment ruineuse 5. La capitation, modelée sur la taille, en doublait le poids. L'imposition des vingtièmes, équi- table dans son principe, puis qu'elle atteignait tous les biens- fonds, ne l'était plus dans son application, en raison des évalua- tions arbitraires des contrôleurs et des complaisances coupables du fisc à l'égard des privilégiés ,r,. Ajoutez-y la prestation de la corvée, cette taille des chemins, dont trop de paroisses ne profi- taient jamais 7, l'imposition territoriale et celle des bâtiments des doléances sur la milice de terre ; ceux du bailliage de Valognes., région pénin- sulaire, mit la milice de mer ou garde-côte. Voir Appendice II, n° 9. I Cahiers d'Acqueyille, du Ham, Pierreville, Surtainville, Vasteville, Tonneville, Sauxemesnil, Hémevez, Saint-Germain-de-Tournebul Valognes Ibid., n° In. •> Bridrey, Recueil cité, t. I, Introduction, i». t;7. 3 Cahier d'Urville-près- Valognes, arl. 4. U Parmi les nombreux cahiers paroissiaux se plaignant de l'injuste répartition de la taille, citons ceux de Digosville, Surtainville. Acqueville, Flottemanville, Magneville, Biville, Gatteville, Saint-Martin-le-Gréard, Theurteville-au-Bocage Valognes; ; Gailiebot-la-Salle, Carantilly, Quettreville Coutances ; Landelles-et- Coupignv Vire. Voir Appendice II, n° 11. 5 Cahiers de Clitourps, Fresville, Gonneville, Mesnil-au-Val, La Pernelle, Saint- Christophe du-Foc, Saint-Lô-d'Ourville, Le Vretot Valognes ; de la Bloutière, Percy Coutances. Ibid., n° 12. 6 Les doléances relatives aux vingtièmes sont, dans la plupart des cahiers, associées à celles concernant la taille, capitation el accessoires; elles sont cepen- dant l'objet d'un développement spécial dans certains cahiers, notamment ceux de Digosville, Ilenneville, Pierreville, Saint-Denis-le-Vêtu, Saint-Martin-du-Mesnil, Yvelol Valognes. Ibid., n° 13. 7 Cahiers de Breuville, Digosville, Emondcville, Rauville-la-Bigot, Saint-Chris- tophe-du-Foc, Theurteville-au-Bocage, Hémevez, Urville-près- Valognes Valognes ; de Beaucoudray, Belval, Chantelou, Gavray-bourg et Gavray-village, Le Loreur, Mesnil-Aubert, Monlchalon, Ouville, Percy, Saint-Denis-le-Vêtu, Saint-Louet-sur- sieune Coutances ; Gouvets, Montîlly, Saint-Manvieu, Sainte-Marie-Outreleau \ ire ; Bures. Cuilherville, Rampan, Sallen, Septvents Torigni. Ibid., n° 14. '?."> 1 u;s \iii;s i;t gabelles de justice, surcharges écrasantes, dont le chef-lieu seul profitait W, Aussi n'y a-t-il qu'un cri parmi les populations rurales pour demander l'abolition de tous ces impôts, et leur remplacement par une taxe unique, indistinctement assise sur tous les possédant- fonds. Abolition de tous les privilèges pécuniaires, égalité et proportionnalité de l'impôt dans tous les ordres, simplification de son assiette et de sa perception, tels sont les vœux essentiels du Tiers état rural en matière fiscale 2, Les paysans étaient encore plus prévenus contre les impôts indirects qui frappaient les objets de consommation et les denrées de première nécessité, comme les aides et les gabelles. La multi- plicité des droits, qui mettaient les commis en contact incessant avec les populations, la dureté que ceux-ci apportaient dans leur mode de perception, la rigueur des châtiments infligés à la moin- dre faute rendaient ces impositions haïssables. Aussi la majorité des cahiers en demandaient-ils, non pas la réduction, mais la suppression totale et sans compensation, comme une des servi- tudes les plus vexatoires et les plus odieuses 3. Quand le laboureur avait payé sa dette au roi, il n'était point quitte envers l'homme d'église et le seigneur. Au premier, il devait d'abord le logement. La question de l'entretien et de la reconstruction des presbytères tient une grande place dans les doléances rurales ; toutes les paroisses demandent à être déchar- gées des lourdes dépenses qu'ils entraînent 4. Il lui devait surtout la dîme, sous ses diverses espèces grosses et menues dîmes, 1 Cahiers de La Bloutière, Brainville. Chantelou Coutances ;-àe Flotteraanville- près -Valognes Valognes ; de Rampas Toifigo,i. Voir Appendice II. n" 15. •2 Il faudrait, citer à peu près tous les cahiers paroissiaux. La plupart deman- dent un seul impôt, l'impôt foncier, ; c'esl une infinie minorité qui se prononce en laveur de deux impôts la subvention territoriale ou impôt réel, et la eapitation ou impôl personnel tels les cahiers de La Bloutière,, Bricipieville-la Blouette, Belval. 3 Sur ce point encore, les cahiers abondent; aussi, je n'en cite que Le Rozel, Saint-Martin-le-Gréard, Surtainvftle, Theur- teville-au-Bocage, etc. Valognes ; Aunoville-Tournoville, La Baleine, Briqueville- la-Blouette, Contrières, CoudeviHe, Courcy, La Haye-Bellefond, Mesnil-Aubert, Mcsnil-Villeinanl, Montinartin, Ouetlreville, Tourville, l rville Coutances ; Claire- fougère, Le DéserÉ, SainteMarie-Outréleau Vire. Voir Appendice 11, n° 18. 3 Les rentes seigneuriales étaient souvent fort lourdes. J'en ai donné quelques exemples à l'Appendice 11, n" 2. Il semble qu'à la fin de l'ancien régime le poids en avait augmenté par suite du renouvellement des terriers. Ces seigneurs aggravaient leurs exigences et doublaient parfois les redevances cahiers de Moyon, de Fourneaux, de Montbertrand. Ibid., n°I9. D'après la coutume de Normandie, les seigneurs bas- justiciers pouvaient réclamer jusqu'à trois années d'arrérages de rentes seigneu- riales, et les hauts-justiciers jusqu'à vingt-neuf années, ce qui rendait la situation des paysans incertaine et précaire cahiers de La Beslière, Montaigu-ïes-Bois, La Colombe. thM.\ n° 20. Enfin, les seigneurs refusaient de faire à leurs vassaux la déduction des vingtièmes sur ces rentes, ce qui provoqua de nombreuses plaintes cahiers de La BesKère, Suint Nicolas -de-Coutances, Contrières, Bangy, CarentiHy, Camprond, Le Loremr, Mroyon, etc., bairliage {. 3 Cahiers de Belval, Blainville, Bricqueville, Gratot, La Baleine, La Haye-Com- tesse, Lorbehaye, Muneville, Ouvillc, Savigny, Saint Malo-de-la-Lande, Saint- Pierre île Coutances, Saultchevreuil, Saint-Romphaire, Tourville Coutances ; de llelleville, Su rtai n ville . Le Vi'etol, Saint-Marcouf Valognes ; de Clinchamps, Gou- vets, La Çhapelle-aux-Moines Vire ; de Sallen, La Perrière-Hareng, Montbertrand, Fourneaux, Litteau, Saint Martin de la Besace Torigni. Yoii Appendice II, n° 2&. 4 Cahiers très nombreux, dont voici les plus typiques Brainville, Caillebot-la Salle, Camprond, Dangy, Longueville, Montcarville, Saussey, Saint-Aubin-des- Préaux, Saint-Planchers, Tourville Coutances ; Crasville, Biville, Equeurdreville, Joganville, Le Bozel, Martinvast, Sainl Germain-le-Gaillard, Pierreyille, Surtain- ville, Saint-Floxel, Sainte-Marie-d'Audouville, Saint-Germain-de-Tournebut, Saint- Vaast-la Hougue Valognes; Clouai, Litteau Torigni; Boucamp, Sainte Marie Outreleau Vire. Ibid., n° 2G. 5 Cahiers très nombreux, parmi lesquels ceux de Saint-Jean-des-Champs, Saint- Malo-de la-Lande, Tourville- Coutances ; d'Alleaume, Biville, Martinvast, Saint-Lô- d'Urville, Le VretoL, Hémevez, Saint-Marconi', Saint- Vaast-la-Hougue Valognes ; de La Lhapelle-aux-Moines, Daiivou, Montilly, La Selle, Saint-Clair-de-Ilalouze Aire. Dans de nombreuses paroisses du Bocage, les paysans, obligés de veiller la nuit sur leurs récoltes, demandent l'autorisation du port d'armes interdit en Nor- mandie depuis 17GG, pour tuer les animaux malfaisants qui, sortant des garennes el des forêts, dévastent leurs champs. Ibid., n" 27, et F. Mourlot, Lu Convocation des Etals généraux dans h- bailliage de Vire {Lu Révolution française. 1896, t. XXXI, p. 337339. tîj Voir le cahier de Héauville. Bridrey, ouv. cité, I. II, p. 32J. PROLÉTAIRES ET MENDIANTS RURAUX 257 prélèvements successifs sur les produits de la terre » !, nous renseignent-ils avec autant de précision sur les malheurs d'une classe plus misérable encore? En effet, au-dessous de ces labou- reurs possédant-fonds, petits propriétaires, fieffataires ou fer- miers, il y avait, dans les campagnes, des individus de condition plus précaire encore journaliers, manœuvres mercenaires, n'ayant que leur pelle et leur pioche, artisans de petits métiers, fileurs de coton, tisserands, colporteurs, etc..., tout un prolé- tariat rural, sans avoir et sans espérance 2. Au premier chômage, maladie ou vieillesse, ces malheureux allaient grossir l'armée des indigents pauvres domiciliés ou mendiants vagabonds. Toute cette plèbe rustique, qui devait composer bientôt la classe des citoyens passifs, put-elle faire entendre sa voix dans le concert des revendications paysannes? Probablement non, ou excep- tionnellement. Sans doute, plus d'un cahier rural renferme des vœux sur le soulagement des pauvres et sur l'extinction de la mendicité ; mais ces vœux ne peuvent-ils s'expliquer sans l'inter- vention directe de ceux qu'ils concernent? N'est-il pas naturel qu'ils aient été inspirés à ceux qui possédaient quelque chose par le souci de leur propre intérêt et par la crainte de dangers prochains? C'est, ne l'oublions pas, une minorité de cahiers qui pose les deux questions du paupérisme et de la mendicité 3. Si les paysans signalent, çà et là, le nombre des pauvres, des veuves et des orphelins, c'est peut-être moins pour s'apitoyer sur le dénuement de ces malheureux que pour faire ressortir le taux excessif des impositions dont on frappe leur paroisse W ; c'est pour flétrir l'avarice des gros décimateurs et la pratique abusive des déports, pour constater la charité impuissante des curés ; c'est pour déplorer la lourdeur de la charge qui retombe sur les pa- roisses rurales 5 ; c'est aussi pour réclamer l'admission, jusque-là 1 Bridrey, ouv. cité, t. I, p. 67. 2 Sur l'existence de ce prolétariat rural, voir Appendice II, n° 28, et Kowalewsky, La France économique et sociale à la veille de la Révolution les Campagnes, p. 190. — Voir surtout les Etats d'impositions de 1788, dressés par les municipalités des départements de Caen et de Vire. Arch. dép., Calvados, C 7817-8088, passim. 3 Dans le bailliage de Coutances, 25 cahiers, et dans celui de Valognes, 27 ca- hiers, c'est-à-dire moins du quart, s'occupent des pauvres, et presque tous à l'occa- sion de la mendicité, qu'on redoutait. 4 Cahiers de Blainville, Bréhal, Bricqueville-près-la-Mer, Saint-Malo-de-la- Lande, Les Planchers, etc. 5 Cahiers de Percy, Questreville, La Haye-Bellefond, Chantelou Coutances ; du Mesnil-au-Val, Biville, Emondeville, Le Rozel, Saint-Pierre-d'Allonne, Le Theil, Saulxemesnil Valognes. Voir Appendice II, n° 29. 17 "258 CAHIERS UURAUX, 1NTEHPRETES DES DETENTEURS DU SOL refusée, de leurs indigents malades ou infirmes jJansÂles hôpitaux des villes l. Quant à l'extinction de la mendicité, elle les préoc- cupe davantage ; les mendiants, en effet, qui promènent la terreur dans les campagnes, constituent à leurs yeux un danger public^. Ce que les cahiers demandent, ce n'est pas tant l'amélioration du sort des mendiants que des mesures de répression sévère et l'ap- plication rigoureuse des lois draconiennes que l'ancien régime a édictées {'SK Le partage des biens communaux, que l'on trouve demandé par plusieurs cahiers primaires, ne doit pas être envisagé comme une mesure philanthropique en faveur des prolétaires ruraux ce partage tendait plutôt à arrondir la possession du paysan déjà propriétaire qu'à créer celle de l'indigent 4. On peut, en somme, considérer les doléances locales du Tiers état rural de Basse-Normandie comme une dénonciation collec- tive des conditions économiques fâcheuses imposées à la propriété paysanne, dénonciation faite par des gens intéressés à voir celle-ci délivrée ou grandement allégée de toutes les charges qui pèsent sur elle. C'est un appel à l'émancipation de la terre, poussé par ceux qui la détiennent et l'exploitent, et Doniol trouvait la for- mule juste lorsqu'il écrivait, il y a plus de quarante ans ta Tous ceux à qui la possession du sol, sa culture, une participation quelconque à la production agricole donnaient un motif d'espé- rer un avantage dans les réformes qu'on entrevoyait, dressèrent le tableau de leur condition et de leurs griefs, l'exposé des obli- gations et de l'état économique que le régime de la féodalité leur faisait » 5. Ces doléances sont en général sincères et spontanées. Elles sont l'œuvre de paysans avisés, très clairvoyants sur leurs propres intérêts ; ils n'ont besoin ni de guide ni de modèle pour décrire lj Cahiers de Saussoy, d'Orval, de Saint-Ebremond-de-la-Barre. 2 Cahiers d'Annoville, Tourneville, Hocquigny Coutances ; Saint-Pierre-du- Fresne, Notre-Dame-du-Bois-d'Elles Torigni. Voir Appendice II, n° 30. 3 Cahiers de Gavray, Hocquigny, Saint-André-de-Valjouais, Rideauviille. lbid., n° 81. Voir F. Mourlot, La question de la Mendicité en Normandie au XVIIIe siècle, p. 16 et 38-41. 4 Cahiers de Blainville. Bricqueville-la-Blouette, La Haye-Bellefoud, Saint- Martin-le-Vieux, Saint-Pierre-de-Coutances Coutances ; de Fresville, Gonneville, Mesnil-au-Val, Valcanville, Varouville Valognes. Voir Appendice II, n° 32. — D'a- près la jurisprudence constante du Parlement de Bouen, le partage des communaux devait se faire non par feux, mais uniquement entre les possédant-fonds, et propor- tionnellement à leurs propriétés. Les prolétaires n'avaient, par conséquent, rien à y gagner ; aussi certains cahiers demandent-ils qu'on ait égard, dans le partage, aux pauvres habitants cahier du Vretot. 5 Doniol, Histoire des Classes rurales en France, p. 492. LEURS PRÉCÉDENTS. REQUÊTES A L'INTENDANCE 259 la rapacité des commis du fisc, l'avidité et la dureté des décima- teurs, les ravages des bêtes de la forêt voisine ou le pitoyable état de leurs routes. C'est leur angoisse et leur souffrance qui parlent tout haut, depuis qu'elles en ont le droit ll Aussi, pour toute cette partie des cahiers qui traite des questions rurales, ne faut-il chercher d'autre source d'inspiration que la situation des plai- gnants. Assez souvent, ceux-ci n'ont fait que reproduire des récla- mations anciennes, que renouveler des protestations demeurées sans effet. En feuilletant les dossiers cle l'Intendance et de la Commission intermédiaire provinciale de Caen, on peut retrouver maintes requêtes qui dormaient dans les cartons et dont les cahiers nous apportent l'écho 2. L'administration provinciale de Basse-Normandie avait elle-même indirectement facilité la rédaction de ces doléances locales en provoquant, l'année précé- dente, une vaste enquête, dans tous les départements de son ressort, sur l'état économique des paroisses rurales. Cette enquête devait aboutir à une plus équitable répartition de la taille. Chaque 1 Le pauvre oublie sa misère en franchissant l'intervalle immense entre la cabane et le trône. » Cahier de Gratot. — C'est le cri que le peuple pousse vers le roi du fond de sa misère. » Cahier de Saint-Jean- des-Champs. — Vive le Roi ! le père de la nation française, qui appelle ses enfants de toutes les classes auprès de lui pour entendre leurs voix plaintives et subvenir à leurs besoins. » Cahier de Rampan. 2 Le cahier de Pierreville déclare reproduire, à propos de la surcharge des ving- tièmes dans cette paroisse, des réclamations dont les bureaux de l'Intendance de Caen sont remplis et garnis ». En effet, l'on trouve, au fonds de l'Intendance, de nombreuses requêtes de Pierreville sur cet objet entre les années 1782 et 1788. Arch. dép., Calvados, C 5910. — Le cahier de la section de Montceaux, paroisse de ^uet- treville, reproduit une plainte adressée en mars 1788 au Rureau intermédiaire de Coutances, par 18 paroisses qui demandent le rétablissement d'un ancien pont sur la Sienne. Voir le procès-verbal de l'Assemblée du département, d'octobre 1788 Arch. dép , Calvados, C 7700, et ci-dessus, chap. VII, p. 146, note 1. — La recons- truction du pont de La Rocque, également sur la Sienne, a déjà fait l'objet de requêtes à l'intendant Ibid., C 4011, et d'un vœu à l'Assemblée de Coutances Ibid., C 7000, avant d'être réclamée par les cahiers de Montchaton, Hauteville, Heugue- ville, Regnéville et Urville. — Les vœux relatifs aux routes reproduisent très sou- vent d'anciennes requêtes à l'Intendance ou à l'Assemblée provinciale, comme à Nicorps mémoire de 5 paroisses à l'Assemblée de Coutances, Ibid., C 7000; à Saint- Romphaire mémoire de Montaure, signé par 30 municipalités et adressé à l'Assem- blée de Saint-Lè, Ibid., C 7712 ; à Moon requête de 13 paroisses au Rureau inter- médiaire de Rayeux, 18 mai 1788, Hippeau, ouv. cité, t. VIII, p. 358. — 11 en est de même pour les plaintes relatives aux reconstructions de presbytères ex. à Relval, à Montchaton, Arch. dép., Calvados, C 1340 ; aux retards du paiement des indemni- tés pour terrains expropriés ex. à Equeurdreville, Ibid., C 1711 ; à l'augmentation des jours de fabrication du sel ex. à Muneville, Ibid., C 7700. — Un article du cahier de Carantilly, relatif à la ruine des fabricants de toile, est inspiré par le récent krach d'une maison de Saint-Lô, qui a fait subir de grosses pertes à de nom- breux habitants Ibid., C 1477. 260 LES OBSERVATIONS GÉNÉRALES DES MUNICIPALITÉS assemblée municipale était invitée à dresser un état mentionnant le chiffre total des impositions levées sur la paroisse, taille, en principal et accessoires, vingtièmes et sols pour livre, capitation, taxe représentative de la corvée, impôt territorial et impôt des bâtiments de justice. Chaque état devait contenir le nom des taillables, avec le montant et la nature de leur taille de propriété, d'exploitation et d'industrie, le nom des privilégiés et taxés d'of- fice ; une large colonne y était réservée à des Observations générales » relatives aux ressources agricoles ou industrielles de la paroisse, aux charges qui pesaient sur elle, aux remèdes dont l'emploi semblerait nécessaire. L'Assemblée provinciale de Caen avait voulu, comme celle dont parle Tocqueville, apprendre des paysans eux-mêmes, dans le détail, tous les griefs dont ils pouvaient avoir à se plaindre » *>. Partout où elle fut obéie, dans les départements de Caen et de Vire notamment, les municipa- lités dressèrent le bilan de la vie économique des campagnes. Leurs Observations générales », rédigées en juillet-août 1788, dépassèrent souvent en longueur et en abondance d'information les cahiers de l'année suivante 2. Moins de six mois plus tard, lorsque ces paysans furent à nouveau consultés, ils n'eurent qu'à reproduire, in-extenso ou en abrégé, des plaintes qui résonnaient encore à leur oreille et dont le texte était peut-être resté sous leurs yeux. Il est permis de conclure que la valeur documentaire de ces cahiers, au point de vue économique et local, est à peu près incontestable 3. La preuve en a été faite dans certaines régions de la Basse-Normandie où l'on possédait les éléments nécessaires au contrôle de leurs allégations. M. Bridrey, après avoir rappro- ché les cahiers primaires du bailliage de Cotentin de leurs éléments de contrôle essentiels rôles de 1789, journaux de rentes, décla- rations de bénéfices, etc . . . , a pu déclarer, avec pleine assurance pour ceux du bailliage de Coutances, avec plus de réserve pour ceux du bailliage de Valognes, que leur véracité lui était 1 Tocqueville, L'Ancien régime el la Révolution, p. 272. 2 L'importance de ces Etats d'impositions Arch. dép., Calvados, C 7817-8088, déjà signalée par M. A. Bénet, qui les appelle la préface des cahiers de 1789 » et en forçant un peu la note, les cahiers de 1788 », n'a pas échappé à M. Aulard. Voir La Révolution française, t. XXXVIII, p. 81. 3 C'est la conclusion à laquelle sont arrivés M. Onou La valeur des Cahiers au point de vue économique et social, La Révolution française, t. XLIX, 1905, p. 409-416 et M. Sagnac Les Cahiers de 1789 et leur valeur, Revue d'Histoire moderne, t. VUI, 1907, p. 346. INFLUENCE DES MODÈLES GENERAUX DE CAHIERS 261 apparue éclatante et indéniable » et que l'ensemble était franc et loyal » W. Les vœux d'intérêt local ne forment qu'une partie des cahiers paroissiaux ; un très grand nombre de ceux-ci font, en outre, une place, parfois assez large, aux considérations d'intérêt général. Il n'y a rien d'étonnant à cela. Le mouvement d'opinion qui remuait le Tiers état des villes ne s'était pas arrêté au seuil de celles-ci il avait pénétré dans les campagnes. Les idées de réfor- mes y circulaient librement, colportées de village en village par des pamphlets, des brochures, des factums aux titres les plus variés. En même temps que la fameuse brochure de Sieyès inti- tulée Qu'est-ce que le Tiers état ? i2, beaucoup d'autres publi- cations, aujourd'hui oubliées, parurent à la fin de 1788 et au commencement de 1789 3. Dans ce concert de revendications, la Normandie ne resta pas muette, et l'on y vit éclore une série de manifestes politiques, avant-coureurs des cahiers de doléances Le Tiers état de Normandie éclairé ou ses droits justifiés M ; Prenez-y garde, ou avis à toutes les assemblées d'élection qui seront convoquées pour nommer les représentants des trois ordres aux Etats généraux 5 ; Réflexions toutes simples et toutes naturelles d'un Normand 6 ; Projet d'un cahier général par un gentilhomme de Normandie ami de la Nation ? ; Le seul intérêt de tous, par un gentilhomme de Normandie 8, et autres écrits de même nature s'évertuaient à éclairer l'opinion et à orienter les vœux du Tiers état. Deux de ces écrits surtout, dus à la plume de l'avocat Thouret, le futur député du bailliage de Rouen aux Etats généraux, dépassèrent tous les autres en reten- tissement et en influence. Ce sont L'Avis des bons Normands à leurs frères tous les bons Français de toutes les provinces sur 1 E. Bridrey, ouv. cité, t. I, Introduction, p. 70. Il constate, en d'assez nom- breux passages des cahiers du bailliage de Valognes, que les observations émises par ceux-ci sont localement sans portée » et sont les reproductions irraisonnées de doléances étrangères ». 2 Bibl. nat., Lb 39, n° 1086. 3 Sur les nombreux opuscules parus avant ou pendant la convocation dès Etats généraux, voir à la Bibliothèque nationale, série Lb 39, nos 493 à 908 année 1788 ; 909-2750 année 1789. J'y ai spécialement consulté les n°s 607, 675, 676, 677, 678, 681, 682, 706, 755, 758, 788, 792, 1086, 1187, 1249, 1250, 1378, 1379, 1387. 4 Publié par Hippeau, ouv. cité, etc., t. VI, p. 297-307. 5 Ioid., p. 307-316. 6 Ibid., p. 371-382. 7 Ibid., p. 382-402. 8 Ibid., p. 402-417. 262 INFLUENCE DES HOMMES DE LOI Venvoi des Lettres de convocation aux Etats généraux 0>, et sur- tout La suite de l'Avis des bons Normands, dédiée aux assem- blées des bailliages, sur la rédaction des cahiers des pouvoirs et instructions W; Thouret recommandait aux électeurs de sacrifier l'amas indigeste des doléances locales futiles et inté- ressées », à la perspective de l'intérêt universel », afin d'épar- gner à la future Assemblée nationale les embarras d'une docu- mentation trop touffue et trop confuse, où son activité réforma- trice risquerait de s'enliser. Rédigés à l'adresse des assemblées bailliagères, ces mémoires influèrent certainement sur la tenue des assemblées paroissiales ; ils dictèrent l'esprit et parfois la lettre de maints cahiers ruraux 3. A cette influence des écrits, il convient d'ajouter celle des personnes. J'ai montré plus haut, en étudiant la composition des assemblées municipales élues dans les campagnes en 1787-1788, de quelle considération y jouissaient les hommes de robe, magis- trats des diverses juridictions royales, avocats et notaires. J'ai relevé une liste très longue de syndics municipaux élus parmi eux 4. N'est-il pas naturel qu'ils aient joué un rôle prépondérant lors de la tenue des assemblées électorales de 1789, qu'ils aient occupé, dans leur paroisse, un des premiers rangs et parfois le premier, et que leur autorité se soit imposée en beaucoup d'en- droits sans rencontrer de résistance ? L'examen des procès- verbaux d'assemblées rurales confirme cette hypothèse 5. Dans de nombreuses localités, les hommes de loi sont les comparants les plus en vue ; souvent même ils président les séances. Ils y 1 Bibl. nat., L b 39, 1249 ; publié par Hippeau, ouv. cité, etc., t. VI, p. 265-285. 2 Ibid.% Lb 39, 1250; Hippeau, ouv. cité, p. 285-297. — Thouret avait joint à sa brochure un Essai d'un cahier de pouvoirs et instructions projeté pour une des assemblées dans l'ordre du Tiers état » le cahier de Thouret, qu'Hippeau n'a pas publié et que l'on trouve dans le Recueil des rapports et opinions de Thouret » à la Bibl. comm. de Rouen, U 3047 a. Cf. Le Parquier, Les Cahiers du bailliage de Colentin, Revue d'Eludés normandes, 1909, p. 401. 3 Les articles 2 à 8 du cahier de Dangy sont directement inspirés par le Projet d'un Cahier général dû au gentilhomme de Normandie ami de la nation ». Voir Bridrey, ouv. cité, t. I, p. 294, note, 1. On retrouve aussi, dans ce cahier, l'influence de Thouret, ainsi que dans ceux de Marigny et Tessy. Voir Le Parquier, Le Bailliage de Coulances en 17X9, Revue de Cherbourg et de la Basse-Normandie, 1905, p. 27. — Le long préambule qui précède chacun des cahiers du groupe du Mesnil-Opac a dû être emprunté à quelque factum de la région. Bridrey, ouv. cité, t. I, p. 147. 4 Voir ci-dessus, chap. V, p. 102-103. 5 Voir au chap. IX, p. 200 à 202 et notes y correspondant, l'énumération des gens de loi qui furent mêlés aux assemblées primaires rurales, comme présidents ou députés EXEMPLES PRÉCIS DE CETTE INFLUENCE '263 sont les conseillers les plus écoutés, les guides les plus influents ; ce sont eux qui suggèrent aux paysans les doléances d'intérêt général, qui en précisent la portée, qui en déterminent l'ordre, qui en rédigent la formule. Le cahier est en grande partie leur œuvre il est le reflet de leur culture juridico-politique W. Parfois, ils l'apportent tout fait, soit qu'ils en aient emprunté la teneur au cahier de la ville voisine, préalablement rédigé, tels les robins de Vire aux assemblées de Clinchamps et de Courson W, soit qu'ils l'aient tiré de leur propre cru. Le même personnage a pu influer sur la rédaction de plusieurs cahiers ruraux, parfois même d'un grand nombre. Un notaire de Caumont, Aveline, envoyant à Necker, le 7 février 1789, son Mémoire relatif au Bocage, l'in- forme qu'il l'a écrit dans l'esprit de son pays » et qu'il a un pouvoir signé de 18 municipalités de paroisses voisines pour les objets d'utilité publique qui peuvent les intéresser W. N'est-il pas probable qu'à la fin du même mois le texte de ce mémoire a circulé dans les assemblées de ces paroisses et servi de modèle à leurs revendications ? Il est arrivé parfois qu'un même homme, en sa qualité de juge, a présidé plusieurs assemblées. Heurtevent de la Haule guida, le 5 mars, les délibérations des habitants du Vicel et, le lendemain, celle des paroissiens de Valcanville, et nous avons la preuve qu'il abusa de sa situation dans la première de ces paroisses, pour dicter et rédiger lui-même, contre le consentement de l'assemblée », un premier cahier de doléances, annulé trois jours plus tard par cette même assemblée *. Housset de Janville, conseiller au bailliage de Caen, présida, dans la semaine du 22 février au 1er mars, cinq assemblées de paroisses 5. 1 Les exemples abondent dans le Cotentin. Le cahier de Bricqueville-la-Blouette a été rédigé par Lescaudey, substitut au bailliage de Contances ; celui de Montcha- ton a dû être inspiré par Desmarets de Montchaton. lieutenant général du bailliage, président de l'assemblée paroissiale ; celui de Gavray est l'œuvre probable de Gui- chard, avocat au Parlement. Le Tuilier, procureur du roi à l'élection de Coutances, est le rédacteur présumé du cahier de Hambye ; Estur, avocat, celui du cahier com- mun de La Haye-Bellefond et Maupertuis. C'est au notaire Chauvel qu'est dû vrai- semblablement le cahier de La Lande-d'Airou, et on attribue à Lhermitte, conseiller au bailliage de Coutances, la paternité du cahier d'Ouville. Voir Le Parquier, Le Cahier du bailliage de Cotentin, Revue d'Etudes normandes, 1909, p. 328 et suivantes. 2 Voir F. Mourlot, La Convocation des Etats généraux dans le bailliage de Vire La Révol. française, t. XXXI, p. 315. 3 Lettre d'Aveline à Necker, 7 février 1789, Arch. nat., Ba 27, 1. 15. Cl Voir Bridrey. oiw. cité, t. IL p. 691 et 712. 5 Celles des paroisses de Troarn, Janville. Bavent, Bernières et Courseulles. Il fut élu député de Janville. Arch. du greffe de la Cour d'appel de Caen, Registre des procès-verbaux des assemblées primaires du bailliage de Caen. 264 PRÉPONDÉRANCE DES QUESTIONS D'ORDRE GÉNÉRAL C'est Vincent Mariage, bailli de la haute justice de Bricquebec, qui semble tenir le record des présidences d'assemblées électo- rales. Son nom figure dans les procès-verbaux de 15 communau- tés du bailliage de Valognes 0-\ Sans doute, il ne put imposer à toutes sa façon de voir celle de Pierreville, notamment, opposa une vive résistance à ses procédés autoritaires et s'assembla, après son départ, pour rédiger de nouvelles doléances 2. Mais le bailli président dut se faire mieux écouter dans les autres paroisses, et l'air de parenté que leurs cahiers présentent atteste la part active que Mariage a prise à leur confection. Ainsi, influence des modèles généraux ou particuliers, qui offraient aux rédacteurs de cahiers primaires une matière déjà élaborée, et ingérence des hommes de loi dans la rédaction de ces cahiers, voilà deux raisons qui expliquent la place très large faite aux vœux d'ordre général dans les doléances des campagnes. En examinant la masse des cahiers ruraux conservés par les quatre bailliages particuliers de Coutances, Valognes, Torigni et Vire, c'est-à-dire plus de trois cents cahiers, voici quelles consta- tations j'ai pu faire. 56 cahiers seulement formulent exclusive- ment des griefs locaux 3 ; parmi les 250 autres, 122 mêlent à leurs plaintes particulières des vœux ayant trait à des questions d'ordre général 4; ; 128 ne font aucune place aux vœux locaux, 1 Celles de Bricquebec. Baubigny, Breuville, Magneville, Les Perques, Pierre- ville, Quettetot, Le Rozel, Sénoville, Sotteville, Surlainville, Saint-Germain-le-Gail- lard, Saint-Martin-le-Hébert, Saint-Paul des-Sablons, Le Vretôt. Voir Bridrey, ouô. cité, t. II, p. 129, note 2. 2 Les doléances [de la communauté] ne furent ni écoutées ni suivies par le dit sieur bailli ; il en dicta lui-même, de son autorité particulière et prépondérante, sans permettre aucune observation... C'est pourquoi la dite communauté s'est assem- blée de nouveau pour procéder à la juste rédaction de ses doléances... » Bridrey, ouv. cité, t. II, p. 450. 3 Cahiers de La Baleine, La Beslière, Bourey, Bréhal, Bricqueville-sur-Mer, Champrepus, Herenguerville, Hugueville, La Lande-d'Àirou, Montaigu-les-Bois, Moncuit, Quettreville, Saint Denis-le-Vêtu, Saint-Léger, Saint Louet-sur-Sienne, Saint-Malo-de-la-Lande, Saint-Martin-le-Vieux, Tourville, en totalité ; Hycnville, Saint-Ursin, Trelly, en grande partie b. de Coutances. — Brix, Crasville, Denneville, Haineville, La Haie-d'Ectot, Montfarville, Nouainville, Omonville-la-Bogue, Pierreville, Sideville, Sortosville-en-Beaumont, Saint-Georges- de-la-Rivière, Saint-Lô-d'Ouville, Saint-Pierre-d'Allonne, en totalité ; Carteret, Fon- tenay-en-Cotentin, Notre-Dame-d'Allonne, Saint-Germain-de-Tournebut, en grande partie b. de Valognes. — Biéville, Clouai, Guilberville, La Ferrière-Hareng, La Vaquerie, Montaigu, Montbertrand, Sallen, Sept- Vents, Sainl-Ebremond-de-la-Barre, Saint-Pierre-du-Fresne, Saint-Pierre-de-Semilly b. de Torigni. — Aubusson, Sainte- Marie-des-Monts, Saint-Maur-des-Bois, Saint-Pierre-du-Troncbet b. de Vire. 4 Dans quelques-uns de ces cahiers, les deux catégories de doléances, au lieu d'être exposées pêle-mêle, sont nettement séparées. Ex. à Blainville, Carantilly vœux d'ordre politique, administratif, judiciaire 265 ies assemblées ayant cru devoir mettre à l'écart toutes les plaintes et doléances personnelles qu'elles pourraient faire, pour ne s'occuper que des grands intérêts nationaux » ]. Ces 250 ca- hiers passent en revue les importantes questions d'ordre politique et administratif qui préoccupaient alors l'opinion publique Constitution 2, périodicité, composition et attributions des Etats généraux 3, dette nationale W, pensions 5, responsabilité minis- térielle 6, Etats provinciaux et Assemblées provinciales ? ; ils traitent aussi, et avec une certaine complaisance, qu'explique la compétence spéciale de la plupart de leurs rédacteurs, des ques- tions d'ordre juridique '8^ ; ils dénoncent les abus des tribunaux 9, b. de Coutances ; Quettetot, Réville, Le Rozel b. de Valognes ; Pierres, Roucamp b. dé Vire. 1 Cahiers de Rures, Rrectouville, Lamberville, Rousseville, Saint-Georges-d*Elle, Saint-Jean-des-Raisants b. de Torigni. — Le cahier de La Rloutière contient des remontrances, plaintes, doléances et avis sur l'administration et les affaires géné- rales du royaume ». — Les habitants de Gratot, simples matelots et pauvres labou- reurs, n'ont que des idées générales, qu'ils croient justes. — Clitourp consacre son cahier aux vices et abus des lois dn gouvernement actuel de la France dans plu- sieurs de ses parties ». 2 Les vœux multiples sur cet objet se ramènent à l'octroi, avant tout vote de subsides, d'une Constitution stable et appuyée sur des principes invariables ; ils contiennent en germe le serment du Jeu de Paume et la Déclaration des droits de l'homme. 3 La périodicité est fixée en général à cinq ans; quelques cahiers allongent le délai, dix ans à La Rloutière, douze ans à Cauville, quinze ans à firicqueville-la- Blouette, vingt ans à Rlainville ; d'autres le réduisent à trois ans Montaigu, Le Theil, Saint-Cyr. — Le vœu relatif au doublement du tiers et au vote par tête est unanime. — On demande, pour les Etats généraux, l'exercice du pouvoir législatif et, au premier rang, le vote de l'impôt. 4 Les cahiers en demandent la fixation et l'acquittement au prix des sacrifices jugés nécessaires ; quelques-uns indiquent, pour combler le déficit, la vente des biens du clergé régulier. 5 Vœu à peu près unanime pour la réduction des pensions actuelles et pour la concession des pensions futures au mérite seul. 6 On demande qu'ils rendent leurs comptes, soit à chaque tenue d'Etats géné- raux Anneville-en-Cères, Le Vretot, soit par la presse Négreville. 7 Les vœux relatifs à l'administration provinciale demandes de suppression des intendants et des subdélégués, du maintien éventuel des Assemblées provinciales, et surtout du rétablissement des Etats provinciaux font l'objet d'un développement spécial. Voir ci-dessous, chap. XI, p. 293-299. 8 Certains cahiers ressemblent à de véritables traités sur la réforme judiciaire, tels ceux de Rricqueville-la-Rlouette, de La Rloutière, de Montchaton, de Dangy. de Hambye, ceux du groupe de Mesnil-Opac, dans le bailliage de Coutances, et celui de Rricquebec, dans le bailliage de Valognes. La plupart des vœux qu'ils expri- ment s'inspirent des projets de réforme judiciaire de mai 1788. Sur l'importance des vœux d'ordre judiciaire dans les cahiers primaires du bailliage de Cotentin, voir Le Parquier, art. cité, Revue d'Etudes normandes, 1909, p. 329-334. 9 Tels les privilèges judiciaires, comme les committimus et autres droits d'évo- cation au civil et au criminel. ?'' voeux d'ordre social et économique la multiplicité des juridictions l, la vénalité des charges '2\ les formalités tortueuses de la procédure 3; ; dans l'ordre social et économique, ils abandonnent le point de vue étroit des intérêts de clocher pour s'élever à une conception plus large des intérêts régionaux et nationaux suppression de tous les privilèges . Parmi toutes leurs doléan- 1 Cahier de Caen, 3." partie Représentations particulières el doléances de lu ville de Caen, art. I à 27. 2 Cahier de Valognes, art. 27 et 20. 3 Cahier de Cherbourg, art. 58, 59 el Go. 4 Sur les cahiers des corporations de Bayeux, voir ci-dessus, chap. IX, p. 207, noie 1. 5 Vuhix des cafetiers et des tailleurs. 6 Cahier de Bayeux, au chapitre Commerce. 7 La formation du cahier de doléances de la ville de Caen, et la série des opé- rations qui aboutirent à ce résultat, ont donné lieu à une élude spéciale et détaillée de ma part, et font l'objet de ma thèse complémentaire, intitulée Le Cahier de doléances du Tiers étal de Caen en 17X9. 8 Cahiers des tanneurs, des serrurriers, des perruquiers, des cartiers-papetiers, des bouchers., des bonnetiers has-étamiers, des fabricants d'éloffes de soie. 18 274 ADOPTION DE CERTAINS VOEUX CORPORATIFS A CAEN ces, un nombre restreint seulement a pu se glisser dans le texte du cahier de Gaen. Les rédacteurs ont fait place à la requête des tanneurs sur la suppression de la marque des cuirs *, parce qu'elle était appuyée par les selliers, Jes cordonniers, les libraires, les parfumeurs, les chaudronniers, parce que le corps des négo- ciants s'y intéressait et parce que les juges-consuls la réclamaient avec insistance. Pour des raisons analogues, ils admettent les vœux des cartiers relatifs à la suppression des droits sur le pa- pier *2, ceux des épiciers, cuisiniers et brasseurs relatifs à la sup- pression du trop-bu 3, et, d'une façon générale, tous ceux que la juridiction consulaire, qui comptait trois de ses membres au sein de la commission de rédaction, avait pris sous son patronage. Ils empruntent h certains cahiers particuliers l'idée de réformes utiles à la cité a celui de l'amirauté, le projet d'un canal entre l'Orne et la Sarthe, destiné à faire de Caen l'entrepôt d'une vaste région agricole i} ; à celui des vinaigriers, une sévère critique du corps des ingénieurs, qui s'entêtaient à construire des ponts de bois dans un pays où les carrières abondaient, et qui, au lieu de faire aboutir le pont tournant du canal de l'Orne à la rue des Garnies, pour l'embellissement de la ville, l'avaient maladroite- ment placé en face du clocher d'une église voisine $ ; à celui des maçons, l'heureuse idée d'une école gratuite de dessin, capable de former de bons ouvriers W. Le cahier urbain est loin de refléter avec exactitude la pensée intime des corporations en ce qui concerne leur régime ; alors que presque toutes en demandent l'amélioration par la suppression de l'édit fiscal de 1779 C'\ il suppose la prolongation de ce régime, et se contente d'insérer deux vœux relatifs à l'hérédité des maîtrises pour les enfants des maîtres décédés, et à la survivance des droits de ceux-ci en faveur de leurs veuves S ; mais il omet les demandes de suppression des droits de marque et de visite, si impatiemment supportés par les artisans des divers métiers 9. 1 Cahier de Cacn, 3 partie, art. 18. 2 Ibid., art. 19. Ibid., art. 18. I Ibid., art. 5. 5 Ibid., art. 4. 6 Ibid., art. 13. 7 Cahiers des passementiers, des fabricants d'étoffes de soie, des tailleurs, des tapissiers, des merciers-drapiers, des épiciers, des cordonniers, des chaudronniers, des chapeliers., des bonnetiers bas-étamiers, des boulangers, des bouchers. 8 Cahier de Caen, 3 partie, art. 7. 9 Cahiers des fabricants d'étoffes de soie, des tailleurs-fripiers, des tapissiers, il» > serruriers, les selliers, des cartiers-papetiers, des maçons, des brasseurs de bière. RARETÉ DES VOEUX D'ORDRE AGRICOLE 275 De même que les vœux relatifs à l'industrie se rencontrent à l'état exceptionnel dans les cahiers ruraux, les vœux d'ordre agricole n'apparaissent que rarement et sous une forme concise dans les cahiers urbains ; ils s'y trouvent sacrifiés à d'autres intérêts. Çà et là, quelques plaintes sur les dommages que la milice cause à l'agriculture l ; quelques considérations sur les avantages que celle-ci retirerait du libre enlèvement des engrais de mer 2i ; quel- ques demandes d'ateliers de charité 3, de partage de marais et communes À> ; tout cela brièvement exposé, avec une réserve voisine de l'indifférence. Si le cahier de Bayeux consacre d'assez longs développements à la demande d'abrogation de nombreuses redevances et servitudes féodales rj, celui de Caen, qui compte cent articles, n'a pas trouvé de place pour les droits féodaux, alors que douze cahiers de corps et corporations en réclamaient l'abo- lition ou le rachat, en peignant avec vivacité les abus des banalités de fours, moulins et pressoirs, et les dégâts des colombiers 6l Les droits féodaux, a-t-on écrit, gênaient assez peu les habitants des villes pour qu'on ne crût pas utile d'adopter des articles en vue de leur disparition {7K On peut croire aussi que leur existence n'était pas pour déplaire à de riches roturiers, seigneurs de fiefs nobles, possesseurs de colombiers, de moulins et de pressoirs banaux. Ce qui est certain, c'est que les rédacteurs bourgeois du cahier de Caen restèrent sourds à l'appel des artisans, qui leur signalaient les maux des paysans et qu'une foule de questions intéressant le régime foncier furent systématiquement écartées. En somme, les cahiers urbains furent, en Basse-Normandie, l'expression des sentiments et des aspirations de l'élite du Tiers état des villes, magistrats, négociants, bourgeois, et exception- nellement des maîtres des corporations les plus importantes. Il ne paraît pas que le prolétariat urbain compagnons des commu- nautés ou travailleurs libres y ait participé ; ses doléances, s'il en exprima, n'eurent aucun écho. 1 Cahiers de Vire ait. 13, de Granville art. 21, de Carentan art 2i 2 Cahiers de Vire art. 15, de Coutances art. 53. 3 Cahier de Vire art. 9. 4 Cahiers de Carentan art. 31, de Valognes art. 35. 5 Cahier de Bayeux, au chapitre Droits féodaux, neuf alinéas 6 Cahiers des pharmaciens, des officiers du dépôt des sels art. 5, 6, 12, des négociants et armateurs art. 21 à 23, des couteliers art. 36 à 39, des chapeliers art. 14;, des vinaigriers art. 9. des maréchaux art. 7, des parfumeurs art. 9, des épiciers. 7 E. Champion, La France d'après les Cahiers de 17S9, p. 95. 27b CAHIERS D ASSEMBLEES PRELIMINAIRES A COUTANCES Quand les députés des paroisses urbaines et rurales eurent déposé aux quinze sièges d'assemblées préliminaires du Tiers état, réunies dans les deux ressorts judiciaires de Caen et de Coutances, les cahiers dont ils étaient porteurs, ceux-ci furent soumis à une opération nouvelle. Chacune de ces assemblées préliminaires devait rédiger un seul cahier ; ce travail fut confié à des commis- sions restreintes, élues dans leur sein ; à en juger d'après les procès-verbaux, les membres de ces commissions étaient, en majorité, des citadins. Aussi ne doit-on pas s'étonner que, d'une façon générale, la prépondérance ait été assurée aux vœux expri- més par les villes. Pour six cahiers d'assemblées préliminaires du Cotentin, ceux d'Avranches, de Cérences, de Mortain, de Péri ers, de wSaint- Sauveur-le-Vicomte et de Tinchebrai, on ne peut rien affirmer de certain ; en l'absence des cahiers de ces six villes, nulle compa- raison, nulle conclusion n'est permise. Mais pour les quatre autres assemblées préliminaires réunies dans le même ressort, il est de toute évidence que le cahier de la ville chef-lieu a été pris pour base de la discussion et que son texte, peu sensiblement modifié, et augmenté de quelques articles empruntés aux cahiers ruraux, est devenu la formule des revendications de l'assemblée. Le cahier de l'assemblée préliminaire du Tiers état du ressort propre du bailliage de Coutances, qui comprend 60 articlesn, est, en très grande partie, formé par les apports des deux villes principa- les du ressort Coutances et Granviller2\ Bonté représentait la pre- mière et Perrée-Duhamel la seconde au sein de la commission ; un autre commissaire, l'avocat Havin, du Mesnil-Opac, dut inspirer le préambule. Les commissaires firent, en outre, quelques em- prunts aux importants cahiers de Bricqueville-la-Blouette et de Montchaton , et, émus par la précision poignante des doléances de Villedieu sur la ruine de son industrie ouvrière, donnèrent à celles-ci une place particulière dans le cahier 4 . 'Il Publié par Bridrey, ouv. cité, t. I, p. G61-67S. 2 Le caliicr le Coutances a inspiré, en très grande partie, les articles 1, % 3, 4, relatifs à la Constitution, aux impositions, à l'administration et à la justice. — Celui de Granville, les alinéas 7 à lu de l'article l,r, quelques vœux judiciaires alinéas l et 1S de l'article 4, et presque tout l'article G, relatif au commerce alinéas 1 à 4. \ oir Bridrey, ouv. cilc. t. I, p. 664, note 2. 3 Bricquevillè-la-Blouette parait avoir fourni les alinéas 5 et 6 de l'art. 2 et l'ali- néa l!i de l'art. 4 Montchaton. le vomi relatif aux non-catholiques alinéa 13 de l'art. 1. 4 L'alinéa 5 de l'art. 4 résume brièvement les vœux de Villedieu relatifs aux droits sur les cuivres. Les vaux relatifs aux pailles des dîmes, aux colombiers et A VALOGNES, CARENTAN, SAINT-LÔ 277 A Valognes, sur douze commissaires rédacteurs, quatre habi- taient la ville l ; c'est à leur influence qu'est due l'insertion de 38 articles du cahier urbain au cahier de l'assemblée du Tiers état du bailliage, qui n'en compte que 45 2. Les six derniers vœux, d'un caractère rural, résument trop brièvement les plaintes des nombreuses communautés agricoles, dont les commissaires laboureurs purent obtenir l'adjonction \ La ville de Cherbourg avait formulé des exigences inadmissibles, en prétendant imposer, par un mandat impératif donné à ses députés, l'insertion intégrale de ses doléances particulières dans le cahier de l'assem- blée préliminaire du bailliage. La commission, dans laquelle ne figurait aucun habitant de Cherbourg, exclut systématiquement ces vœux ; elle essaya de donner de mauvaises raisons de cet ostracisme rigoureux r, dont le véritable motif était la vieille jalousie qui divisait les deux villes. A Carentan, où, sur les douze rédacteurs, il y avait quatre commissaires urbains, le cahier de la ville inspira plus ou moins directement la plupart des cinquante-six articles du cahier soumis à l'acceptation de l'assemblée préliminaire 5 ; celle-ci se contenta d'y ajouter quelques vœux relatifs à l'élevage des che- vaux et des moutons, principale source de richesse de la contrée. A Saint-Lô, la commission de rédaction comprenait vingt membres ; elle se confondait avec la députation du quart réduit. Sur ce nombre, il y avait douze hommes de loi, dont six habitants de Saint-Lô, ceux-là même qui avaient rédigé le projet de cahier sou- mis à l'assemblée de la villef6. Le cahier urbain, qui était leur œuvre, banalités diverses et à la pèche du lançon, semblent inspirés par les cahiers de cer- taines paroisses rurales ou côtiereS, notamment Belval, Ouville et Hauteville-sur-Mer. 1 Besnard-Duchesne, Courtaux, Lambert et Baudoin. 2 Les articles 1 à 38 du cahier de l'assemblée préliminaire du Tiers état du bail- liage de Valognes sont la reproduction textuelle du cahier de la ville ; le préambule a été abrégé, les articles 17 à 19 ont été un peu remaniés. Voir Bridrey, ouv. cilé, t. Il, p. 757, note 1. 3 L'un de ces vœux, relatif à l'interdiction de brûler le varech sur les côtes art. 41, a très probablement été ajouté en séance, sur la réclamation des paroisses maritimes. Voir Bridrey, Ibid., I. II, p. 777, note 1. 11 semble bien pie cette addition des vœux ruraux soil comme une concession tardive arrachée aux rédacteurs, et il est utile de remarquer que la question des banalités et des rentes seigneuriales, si sou veut abordée par les cahiers ruraux, n'a pas même été effleurée par le cahier de l'assemblée préliminaire. 4 Voir l'art. 45 du cahier de l'assemblée préliminaire et la note de M. Bridrey y relative, ouv. cité, t. IL p. 778, note 1. 5 Voir Bridrey, ouv. cilé. I. I, p. 765, note 1. 6 Voir ci-dessus, p. -270. noie 2, et 271, note 4. Ces six commis-aires étaient Le Menuet de la .luiiannière, Vieillard lils, Lemonnier, Bernard, Vieillard de Buismartiu el Vieillard père. 278 cahiers d'assemblées préliminaires a vire et bayeux fut, grâce à leur influence, adopté en entier par l'assemblée préliminaire du bailliage. Les commissaires ruraux se bornèrent très probablement à demander l'intercalation de vœux d'ordre agricole part des pauvres dans le partage des biens com- munaux, mesures contre la disette des bois, rachat des bana- lités et corvées, réforme de la jurisprudence des dîmes insolites 1. Mêmes constatations pour les cahiers des assemblées prélimi- naires des bailliages du ressort de Caen, où le contrôle est pos- sible, c'est-à-dire pour Vire, Bayeux et Caen . Dans ce dernier article, on entassa pêle-mêle des doléances d'un caractère agri- cole, dont la plupart figuraient déjà au cahier de Vire demandes relatives à la liberté d'usage des engrais de mer, à la destruction des bêtes fauves, à une meilleure répartition des ateliers de cha- rité. Une seule, concernant l'obligation de la vente des pailles à un prix modéré, par les curés décimateurs à leurs paroissiens, apparaît comme étant d'une origine exclusivement rurale W. A Bayeux, le cahier de l'assemblée préliminaire fut l'œuvre de vingt-huit commissaires, parmi lesquels figurent une douzaine au moins d'hommes de loi domiciliés dans cette ville 5. 11 s'ins- 1 Article 6, paragraphes 4 el > ; art. 8, paragraphe 1 ; art. 9, paragraphe 4 du cahier de l'assemblée préliminaire du Tiers état. Il est impossible de dire, en l'ab- sence lu cahier original de la ville de Saint-Lô, si ces vœux d'ordre agricole ont été ajoutés sur la demande des habitants de dans l'assemblée du Tiers état de la ville, du mars 1789. 2 Le cahier de la ville de Torigni n'a pas été retrouvé. Hippeau a commis une grave erreur en publiant, parmi les paroisses du bailliage de Yalogne? ouv. cité, t. V1I1, p. 502, un cahier de la paroisse de Torigni, qui n'est autre pic le cahier de l'assemblée préliminaire du bailliage de ce nom, déjà publié par le même éditeur au commencemenl du même tome {Ibid., p. 82. 3 F. Mourlot, La Convocation des Etais généraux dans le bailliage de Vire, La Révolution française, 189G, t. 31, p. 318. I C'est la reproduction de l'art. 5 du cahier de Lamlelles et-Coupigny. Sur la question des pailles dans le Bocage normand, voir F. Mourlot, Ibid., p. 420-122. 5 L'avocat Tanqueray, à qui l'on attribue la paternité du cahier de la ville de LE CAHIER DE l\\SSEMBLÉE PRELIMINAIRE DE CAEN 279 pire du cahier urbain en ce qui concerne l'ordre et les titres des chapitres successivement traités. Dans chacun d'eux, il est vrai, la matière a été remaniée. Des développements prolixes, où les considérants s'étalent avec trop de complaisance, ont été rame- nés à de courts alinéas, qui en ont condensé la substance ; en sens contraire, des lacunes du cahier urbain ont été comblées par des apports étrangers à la ville, dont l'origine ne peut être établie, vu la disparition presque totale des cahiers primaires du bailliage. Sur quelques points même, on saisit une contradiction flagrante entre le vœu de la ville et celui de l'assemblée préliminaire par exemple, sur la question de l'existence d'une Commission inter- médiaire au sein des Etats généraux et sur celle du maintien des privilèges de la Normandie CD. Toutefois, à le considérer dans l'ensemble, le cahier de l'assemblée a recueilli, sous une forme plus brève et plus châtiée, la plupart des doléances bayeusaines et la contribution que les campagnes lui ont apportée paraît presque insignifiante. Le cahier de l'assemblée préliminaire du Tiers état du bailliage de Caen fut arrêté, le 11 mars 1789, par vingt-deux des vingt- quatre commissaires que l'assemblée du 6 mars avait élus ; six d'entre eux étaient des députés de Caen, trois autres, bien que députés ruraux, étaient des hommes de loi qui résidaient dans cette ville {'2 '. Là encore, l'influence urbaine prédomina. Des 123 articles que contient ce cahier, 100 articles sont la reproduction à peu près littérale du cahier de Caen. Tous deux comprennent trois parties désignées sous les mêmes rubriques. La première partie est consacrée aux Articles préliminaires à arrêter aux Etats généraux » ; les 12 articles du cahier urbain se retrouvent dans celui de l'assemblée préliminaire du bailliage, avec deux articles nouveaux a. La seconde partie, intitulée Propositions générales à faire aux Etats généraux », comprend, dans le cahier issu de l'assemblée du 4 mars, 61 articles le cahier de l'assemblée Bayeux ; l'avocat Delauney, procureur-syndic du département ; Lareherdelà Londë, maire de Bayeux ; Delleville, lieutenanl général de l'amirauté, étaient parmi le> plus notables. 1 Les art. 9 et 21 du chap. I du cahier de l'assemblée préliminaire du bailliage renferment, sur ces deux questions, des vues entièrement opposées à celles qu'ex- prime le cahier urbain. 2 Les six commissaires de la ville de Caen étaient ; Delarue, Delafosse-Çhatry l'aîné, de Prébois, Saffray, Chibourg et de Cussy parmi les commissaires députés des paroisses rurales, Moisant, Daigremont et Signard d'Ouffières résidaient, à Caen. 3 Sur les 14 articles de ce chapitre, ces additions forment les numéros 2 et 11. 280 ÉLIMINATION l RÉDUCTION DES VOEUX RURAUX des 12-14 mars les reproduit et y mêle 33 articles nouveaux. Cet apport considérable, qui enfle le cahier jusqu'au chiffre de 94 ar- ticles, provient de deux sources 12 articles, qui, bien qu'em- pruntés aux doléances particulières de Caen, ont pu être rangés parmi ceux qui traitaient de questions d'intérêt général lj ; 21 autres, relatifs à des questions rurales, et fort probablement inspirés par les cahiers des assemblées paroissiales de la cam- pagne 2J ; il est impossible, en l'absence de textes, d'en préci- ser l'origine. Quant à la troisième partie, elle se compose, au cahier de l'assemblée préliminaire, des 15 articles des Représen- tations particulières de la ville de Caen», qui n'avaient pu trouver place dans la section précédente, en raison du caractère stricte- ment local de leurs vœux. Exclusion, ou tout au moins condensation des vœux ruraux au profit des doléances urbaines, telle avait été la règle à peu près généralement suivie par les commissaires rédacteurs. En plus d'un endroit, ceux-ci se crurent obligés de justifier un tel ostra- cisme. Si quelques articles particuliers n'ont pas été employés dans le cahier, les commissaires rédacteurs Ide Valognes] observent qu'en suivant les mouvements de leur conscience dans l'honorable commission qui leur a été confiée, et considé- rant que le but de ces remontrances est de faire connaître au prince les maux communs qui nous affligent et les remèdes qu'il convient d'y apporter, ils n'ont pas cru devoir y com- prendre certaines demandes déterminées par un intérêt parti- culier des premières assemblées de ce ressort et contredites par les autres, les objets controversés ou litigieux ne pouvant trouver place dans un ouvrage fait pour réunir les vœux parti- culiers en un seul. Il en est de même, pour quelques autres demandes, qui sont du ressort des Etats provinciaux ou des divers départements » 3. Les commissaires de Coutances tinrent à déclarer que leur tâche avait présenté un travail pénible et des difficultés fréquentes, et que, malgré leur attention et leur 1 Ces douze vœux, qui formaient les art. 16 à Ti de [a troisième partie du cahier urbain, oui, été rangés à la lin de la deuxième partie du cahier le l'assemblée préli- minaire art. 82 à 94. 2 Ce sonl les art. s. 17, 23, 32, 33, 34, 15. 16, 57, 58, 72, 73. 71. 75, 7,. Pour la plupart de ces trente-quatre élus, ce n'était pas une fonction nouvelle, mais la prorogation, sur une nouvelle scène, d'un mandat à l'exercice duquel ils étaient déjà accoutumés. Tous venaient en effet, à l'exception de deux !^, de jouer un rôle actif dans la rédaction du cahier de l'assemblée préliminaire de leur bailliage, après avoir participé à la confection du cahier de leur cité. Fiers d'avoir pu assigner aux doléances de celle-ci une place prépondérante dans les revendications du bailliage parti- culier, ils allaient tenter, en vue du triomphe définitif de ces doléances, le dernier assaut qui leur permît de forcer l'entrée du cahier général. Mis en présence les uns des autres par la réunion des commissaires qui les avaient apportés de leurs circonscrip- tions respectives, les cahiers des assemblées préliminaires devaient se trouver, non pas en conflit, car ils étaient animés d'un même souffle réformateur, mais en rivalité d'influences, t. 'élément rural étant depuis longtemps éliminé, ce furent les villes qui, par l'in- termédiaire de leurs plus notables représentants, se disputèrent l'honneur d'exprimer, sous leur formule dernière, les aspirations et les volontés du Tiers état. A Cou tances, Desplanques-Dumesnil fut, en raison de son âge, le président de la commission; mais le plus actif des quinze commis- saires semble avoir été un avocat de Mortain, LeSacher de la Pal- lière. 11 était le plus en vue de ses collègues, puisqu'il fut le premier élu comme député du Tiers état du bailliage 4. Il eut surtout l'habileté de faire adopter en bloc le cahier du bailliage de Mortain, dont il était porteur. En effet, sur les 106 articles du cahier géné- ral du bailliage de Cotentin, le cahier du bailliage de Mortain en a inspiré 53 littéralement et 12 en très grande partie, soit plus de la moitié r,. C'est à la concision de sa teneur qu'il dut d'être préféré aux cahiers prolixes des autres bailliages particuliers. Ces der- niers ont cependant influé, mais à un moindre degré, sur la con- fection des doléances générales, en contribuant à la rédaction de 1 Voir ci-dessus, chap. X, p. 234. 2 Ibid., p. 236. '' Duhamel, lieutenant général de police, pour le bailliage de Coutances, et Laîné-Deshayes, avocat; pour celui de Tin-chebrai, étaient, ru qualité de commis- saires rédacteurs, deux hommes nouveaux. l l Voir ci-dessus, chap. X, p. 237. 5 Voir Appendice III. LEURS APPORTS RESPECTIFS PRÉPONDÉRANCE DE MORTAIN 285 39 articles relatifs à des objets négligés par le cahier du bailliage de Mortain. Celui-ci avait, dans un style lapidaire, traité les ques- tions qui concernaient la Constitution, l'organisation des Etats généraux et provinciaux, l'égalité des impôts et charges publi- ques, la suppression et la réforme des impôts vicieux et arbi- traires, l'administration de la justice, les matières ecclésiastiques ». Les commissaires de Coûtâmes, Duhamel et Le Tuilier, ont pu y ajouter 12 articles de leur cahier, qui touchaient aux objets suivants remèdes contre l'abus des pensions et suppression des charges inutiles ; liberté des élections municipales ; législation des biens des non-catholiques ; réduction des droits de sceau et de greffe ; obligation de résidence imposée aux bénéficiers ; régle- mentation générale des dîmes ; augmentation des portions congrues des curés ; suppression des maîtrises d'arts et métiers ; révocation des privilèges de Bayonne en matière d'entrée des morues et huîtres de pêches étrangères ; suppression des droits sur le poisson ; modération des droits sur les cuivres bruts ; liberté de l'usage des engrais de mer fl!. Ces additions représentent la part de Cou tances, de Gran ville, de Villedieu et de quelques paroisses côtières dans la formation du cahier général. Des- planques-Dumesnil et Caillemer, commissaires de Carentan, firent adopter quatre articles de leur cahier, relatifs à la suppres- sion de la mainmorte, à l'unité des poids et mesures, au partage des landes, marais et biens communaux, à la suppression des colombiers et garennes '-'. Lemenuet de la Jugannière et Vieillard, commissaires de Saint-Lô, purent introduire les vœux de leur bailliage qui concernaient l'aliénation des domaines, à l'exception des forêts, la suppression des abbayes en commande, des corvées et des banalités, la révision du traité de commerce avec l'Angle- terre et P abrogation de l'arrêt du Conseil de 1784 sur le commerce des colonies !. Pouret-Koquerie et Euvremer, commissaires de Périers,, demandèrent un règlement qui autorisât le prêt à intérêt et obtinrent l'insertion de ce vœu l. Les commissaires d'Avran- ches, Tesnière deBrémesnil et Morin, se bornèrent à faire ajouter à l'article de la gabelle la demande d'une indemnité pour les pays de quart-bouillon, dans le cas d'abolition de cet impôt ^ ; ils 1 Articles 17, 38, 4o. ru, 81, 85, 87 cm partie, 89, 92, 93, 91. 98 lu cahier général. 2 Cahier général du Tiers état du bailliage de Coutances. ail. 77, 90, 97 el 99. 3J Ibid., art. 41,82, 91. 4 Ibid., art. 96. 5 Ibid., art. 51. 28 LE CAHIER Dl BAILLIAGE ni COUTANCES VUE D'ENSEMBLE joignirent aussi leurs efforts à ceux de leurs collègues de Valognes pour faire insérer la réclamation d'un député par district lors des prochaines élections aux Etats généraux *. Lelièvre de la Provôtière et Laîné-Deshayes, délégués du bailliage de Tinchebrai, suggérèrent à l'assemblée la rédaction d'un vœu contre le céré- monial humiliant imposé jusque là au Tiers état à l'occasion delà présentation du cahier et de la harangue faite au roi, et celle d'un autre vœu sur la nécessité d'une rupture complète avec la chan- cellerie romaine en matière de dispenses, grâces et provisions. Ils introduisirent, en même temps, une réclamation d'ordre moins général, mais d'un intérêt tout aussi considérable pour les paysans de Basse-Normandie, en demandant que l'entretien et la répa- ration des chemins vicinaux fussent désonnais à la charge des paroisses lK Ce furent Ango et Glatigny, au nom du bailliage de Saint-Sauveur-le-Vicomte, qui dotèrent le cahier général de son dernier article, en préconisant l'adoption de mesures favo- rables au développement des écoles de charité 3. Après trois jours et demi de laborieuses séances, les commis- saires s'étant mis d'accord sur le texte du cahier, le soumirent à l'assemblée générale, qui le discuta très sérieusement, article par article, et consacra trois jours pleins et quatre séances entières à son examen. C'est un document des plus importants, par la variété des objets qu'il embrasse, l'ordonnance logique des ma- tières et la substantielle concision de sa teneur. Bien que ses 106 articles n'aient point été affectés d'une numérotation spéciale, on peut le diviser en sept parties distinctes, ce qui permet d'en saisir d'un coup d'œil tout le contenu. I. Doléances relatives à la Constitution, aux Etats généraux, à l'administration des provinces et des villes article 1 à 38. IL à des questions d'ordre social disci- pline militaire, non catholiques, éga- lité civique article 39 à 44. III. — aux impositions article 44 à 54. IV. — à la justice article 55 à 72. V. — aux libertés privées et publiques ar- ticle 73 à 77. 1 Cahier général, ait. S fin. 2 Ibid., art. 5, 7S et lui. 3 Ibid., art. 106. COMMISSAIRES RÉDACTEURS DU CAHIER GENERAL, A CAEN 287 VI. Doléances relatives aux affaires ecclésiastiques article 78 à 88. VIL à des objets divers vœux d'ordre éco- nomique agriculture, industrie, com- merce ou d'ordre moral réforme des mœurs et éducation publique, ar- ticle 89 à 106. Dans le bailliage de Cotentin, le cahier général du Tiers état nous apparaît comme le fruit d'une entente raisonnable et de concessions réciproques entre les mandataires des divers ressorts électoraux. Nul incident fâcheux ne se produisit au cours des opérations, s'il faut en croire le procès-verbal de l'assemblée, et nulle protestation ne les suivit. Il n'en fut pas de même dans le bailliage de Caen, où d'assez vives discussions éclatèrent entre les députés à l'occasion de la rédaction du cahier général. Cette rédaction avait été confiée à quinze commissaires, élus, à raison de cinq par bailliage secondaire, dans une assemblée tenue le 17 mars, à l'église Saint-Etienne, sous la présidence de Duperré de Lisle, lieutenant général du bailliage. Ceux-ci y tra- vaillèrent du 17 au 21, jour où l'on commença, en présence de tous les députés, la lecture du projet de cahier définitif. Il fut, semble-t-il, arrêté et signé » séance tenante l. Quelques jours plus tard, il devenait l'objet d'assez vives attaques. Le procès- verbal officiel n'y fait qu'une très discrète allusion ; on y trouve, à la date du 21 mars, la mention suivante, d'une obscure brièveté après différents changements faits au dit cahier » 2 ; il signale aussi, le 26 mars, plusieurs déclarations et protestations de divers membres contre le cahier général » ainsi que l'intervention conciliante de Delauney, récemment élu député du bailliage. D'autres documents, qui complètent ces renseignements par trop 1 Le procès-verbal de l'assemblée du 21 mars, dans laquelle fut arrêté le cahier général, est suivi de 233 signatures. Arch. nat., C 17, 38, et Arcb. greffe de la Cour d'appel de Caen, Reg. n° 2. 2 Ces changements furent soit des additions au texte proposé, art. 15, 19, 23, 28, 41, 48, 55, soit l'intercalation d'un article nouveau, art. 61, et assez rarement des remaniements profonds du texte primitif, art. 20, 61 et 62. A la fin du cahier furent ajoutés deux vœux, sur l'opposition de l'assemblée à toute création de commission intermédiaire au sein des Etats généraux, et sur la suppression de tous les tribunaux d'exception. — Un député du Tiers état caennais, Gouy le jeune, crut devoir accompa- gner sa signature d'une réserve au sujet du mutisme observé par le cahier à l'égard de l'anéantissement des fabriques ». 288 PROTESTATIONS LE CANU ET LAURENT sommaires, révèlent la trace de divergences profondes au sein de l'assemblée ce son! les Observations de Le Garni et Laurent, formulées à la séance du 23 mars, et la protestation de Michel LeTellier, qui se produisit à celle du 26 mars. Ces deux documents figurent comme pièces annexes au procès-verbal. Le Canu, médecin, professeur à l'Université de Caen, avait présenté, le 1er mars 1789, des Réflexions relatives aux cahiers de doléances arrêtés par MM. les Maire et Echevins de la ville de Caen cl lus dans rassemblée du 28 février 1k Ce mémoire était divisé en six chapitres. L'auteur y approuvait les vœux urbains relatifs a la levée d'un double impôt, réel et personnel, à la création de juges de paix, à la mise à la charge des propriétaires des chemins ruraux ; mais il y protestait contre le vœu relatif à la suppression des cinq grosses fermes, le considérant comme préma- turé, dangereux et gros de conséquences funestes. L'assemblée préliminaire du bailliage de Caen ayant écarté sa protestation, Le Canu la renouvela dans l'assemblée générale du bailliage prin- cipal, où il assistait comme député de Caen ; un avocat caennais, Laurent, député de la paroisse de Cheux, s'associa à ses vues et leurs Observations furent lues dans la séance du 23 mars 2. Tout en convenant qu'il existait des abus innombrables dans toutes les parties de l'administration », Le Canu et Laurent déclaraient qu'il serait mal avisé et dangereux de tenter, sur le champ, une réforme générale». Ils présentaient un projet de cahier en douze articles bornés aux principes de la Constitution et aux moyens de vérifier et d'acquitter la dette nationale ». Alléguant que le bien doit se faire lentement, qu'on doit se garder de le précipiter, que le temps n'avait pas permis à l'assemblée de mûrir ses idées, et qu'il était impossible, en quinze jours, de dresser un plan général de législation, ils invitaient le Tiers état du bailliage de Caen à écarter de son cahier tout ce qui ne touchait pas au grand objet de la Constitution, le seul qu'il fût urgent de fixer, et à ajourner à une seconde session d'Etats généraux, demandée pour 1791, le soin de remanie- plus profondément l'état politique lj L'original manuscrit de ces Réflexions esl conservé aux Arch. connu., Caen, ancien carton 20. {2 Arch. du greffe delà Cour d'appel de Caen, Registre. Ces Observations ont été publiées par Hippeau, aiw. cité, l. Y] II. p. 160-17i. Il n'est pas question de cette lecture dans le procès verbal de rassemblée à la date du 23 mars, mais le mémoire de Le Canu et Laurent contient, en souscription; l'indication suivante, qui est for- melle- Lu et, déposé m rassemblée générale du Tiers état des cinq bailliages réu- nis, etc.. par les soussignés, ce 23 mars 1789. » PROTESTATION LE TELLIER 289 et administratif du pays. Ils traitaient de mesure inopportune et malfaisante, non seulement l'abolition des cinq grosses fermes, mais celle de la vénalité des charges et ils désavouaient formelle- ment l'article du cahier relatif au vote par tête dans le sein de la fui ure assemblée nationale, cette forme nouvelle étant absolu- ment contraire aux anciennes lois ». L'assemblée prit acte de ces observations et ordonna leur annexion à la suite de son procès- verbal, mais elie n'en tint aucun compte. Une autre protestation, qui eut des conséquences plus sérieuses, fut déposée, le 26 mars, sur le bureau de l'assemblée par Le Tellier, avocat de Bayeux, un des soixante-quatorze députés ruraux du quart réduit envoyé par le bailliage de Bayeux l]l Le Tellier demandait à ses collègues de réviser l'œuvre des commissaires. Il reprochait à ceux-ci d'avoir négligé une foule de particula- rités » et réclamait la suppression de certains articles qu'il croyait propres à semer la division entre les ordres. En tête de ceux-là, il plaçait l'article 6 du cahier, qui, conformément au vœu le plus général », sollicitait le vote par tête. Imbu des mêmes craintes que Le Canu et Laurent, Le Tellier pensait qu'un tel mode de délibé- ration, avantageux aux administrations provinciales, offrirait les plus grands dangers aux Etats généraux. Il eût voulu qu'on le proscrivît comme contraire à la Constitution nationale, dont la forme antique de délibérer par ordre garantissait la liberté de toute atteinte du pouvoir arbitraire, de l'obsession et de la subor- dination ». Le Tellier conjurait aussi l'assemblée d'approfondir la question délicate de l'impôt avant de prendre une résolution radicale à son endroit. Il combattait le vœu relatif à l'aliénation des grands domaines et défendait à nouveau la motion qu'il avait probablement fait triompher à l'assemblée préliminaire de Bayeux en faveur de leur conservation et de l'amélioration de leur régie. Enfin, il s'élevait contre la rédaction du dernier paragraphe, par lequel on déclarait approuver tacitement les cinq cahiers particuliers, quoique plusieurs positions d'entre eux ayant révolté l'assemblée à la simple lecture ». Delauney, de Bayeux, le premier élu des six députés du bailliage aux Etats généraux, et l'un des commissaires rédacteurs les plus influents, défendit habilement son œuvre et celle de ses collègues. Il rendit hommage à leur zèle, montra les difficultés de leur tâche, la nécessité où ils 1 Le Tellier élait député de l'assemblée primaire de Saint-Laurent- sur-Mer. Sa protestation es! conservée aux Arch. du greffe de la Cour d'appel de Caen, Registre 2, el aux Arch. dép., Calvados, série B, non inventoriée. 19 290 DÉFENSE Dl CAHIER PAU DELAUNEY s'étaient trouvés, après avoir tout mûrement pesé, d'élaguer l'ac- cessoire pour ne formuler que le vœu générale . Il invita l'assemblée à accepter le cahier tel quel, en lui adjoignant les cinq cahiers des bailliages particuliers, et il lui donna l'assurance que les députés du Tiers état porteraient également » aux Etats généraux les sages réflexions des villes comme les doléances des campagnes vexées et sensibles ». Ses explications furent acceptées par une grande partie de l'assemblée, formée de députés de la campagne, pressés de retourner à leurs travaux. Mais de nombreux mécon- tents, refusant d'approuver le cahier, s'étaient inscrits à la suite de In protestation de Le Tellier. Celle-ci ne compte pas moins de quatre-vingt-neuf signataires, parmi lesquels figurent cinquante députés du bailliage de Caen, et dix du bailliage de Vire. Deux des commissaires virois, Brenet et Flaust, ce dernier élu député aux Etats généraux, déclarent n'avoir signé le cahier général, quoique rédacteurs, que par respect pour l'assemblée et sans approuver le dit cahier ». Louis Lamy, commissaire de Caen, et Pain, commissaire de Torigni, tous deux aussi députés aux Etats généraux, adhérèrent à leur tour aux protestations dirigées contre ce cahier dont ils avaient reçu mission de défendre les vœux à l'Assemblée nationale. Une telle constatation ne manque pas de piquant 2. Le cahier général du Tiers état du bailliage de Caen contient 90 articles, répartis en huit chapitres ainsi intitulés I. Constitution article 1 à 27 ; IL Subsides et perception article 28 à 33 ; III. Domaines article 34 à 39 ; IV. Droits féodaux et polices de chasse article 40 à 45 ; V. Commerce article 46 à 56 ; VI. Affaires bénéficiais article 57 à 70 ; VIL Justice article 71 à 84 ; VIII. Ouvrages publics article 85 à 89. 1 Chaque classe, disait Delauney, a ses intérêts particuliers... Les municipali- tés Mit été exigeantes, les villes ne l'ont pas moins été et de là ces énormes suppres- sions demandées et dont l'imagination s'effraie. Ce qui a paru fort simple dans un village et successivement grossi du vomi d'une demi-douzaine de villes et de huit cents paroisses, a, à la dernière analyse, offert un résultat dont les commissaires eux-mêmes ont été môriifiés d'être obligés de développer toute l'étendue. » 2 Le procès-verbal de l'assemblée du 21 mars 1789, portait 233 signatures ; la pro- testation de Le Tellier se couvrit, dès le 23 mars, de 89 signature*; le procès-verbal de l'assemblée du 26 mars contient 109 signatures. APPORTS DES DIVERS BAILLIAGES AU CAHIER GÉNÉRAL 291 Ce cahier est le produit de la fusion des cinq cahiers des assemblées préliminaires des bailliages de Caen, Bayeux, Falaise, Torigni et Vire 1;. Au premier coup d'œil, il est évident que ceux- ci n'ont pas également influé sur sa composition. C'est au cahier de Bayeux que la disposition des matières et la plupart des titres eux-mêmes semblent avoir été empruntés. Des formules littérale- ment extraites des cahiers de Caen et de Bayeux alternent en groupes sensiblement égaux dans les chapitres relatifs à la Consti- tution, aux subsides, à la justice. Le cahier de Caen a prêté davan- tage au chapitre des droits féodaux -' ; le cahier de Bayeux, à celui des ouvrages publics ft. En matière commerciale et ecclé- siastique, Caen est presque seul porte-parole ''.. L'influence des rédacteurs caennais et bayeusains, très visiblement, a été prépon- dérante au sein de la commission. Ceux des autres bailliages, moins audacieux ou moins heureux, ont marqué moins fortement leur empreinte. Les commissaires virois ont pu cependant faire adopter les doléances de leur cahier sur la liberté des élections aux Etats généraux, la suppression des déports et de la vénalité des charges, la gratuité de la justice, l'aliénation des domaines r> . C'est à l'instigation de Falaise que le cahier général condamne les abus de la caisse de Poissy, demande la suppression des droits de roulage et de messageries et l'établissement d'une tutelle vraiment protectrice pour les pauvres des campagnes G>. Torigni ne fournit guère en propre, au même cahier, qu'un vœu sur la gratuité des dispenses ecclésiastiques ~, et se contente d'insinuer discrètement, çà et là, quelques tournures plus heureuses dans la rédaction d'un bailliage voisin. Un examen plus détaillé du cahier, article par article, amène aux conclusions suivantes. Le cahier de l'assemblée préliminaire du bailliage de Caen a donné 38 articles et contribué à la rédaction de 6 autres il a donc inspiré à peu près la moitié du cahier général. Le cahier de l'assemblée préliminaire de Bayeux a fait adopter 19 articles et influé sur la formation de 10 autres ; il entre donc pour un tiers environ dans la confection de l'ensemble. Reste un sixième d'influence à répar- l Voir Appendice III. •> 4 articles sur 6 art. 40, 41, 44 et 45. 3 3 articles sur 5 art. 85, 80, 87. 4 9 articles sur 11 en matière commerciale art. 40 à 53 et art. T>0 8 articles sur 14 en matière ecclésiastique art. 58, 03 à OS, et 70. 5 Art. 4, 0, 24, 25, 35, 57, 00 et 71. 0 Art. 54, 55, 09 et 83. 7 Art. 59. 292 MISE \l POINT DE LEURS VOEUX tir entre les autres cahiers d'assemblées préliminaires, et qu'il faudrait attribuer, dans un ordre décroissant, à Vire, Falaise et Torigni. De telles conclusions, dans leur rigueur mathématique, ne rendraient pas un compte exact de l'influence réellement exercée par chaque bailliage. Tous les vœux, en effet, n'ont pas même importance, et la contribution d'un bailliage, pour n'être pas très étendue, peut avoir été riche de conséquences h. 11 est aussi arrivé souvent que, sans être directement manifeste, l'in- fluence d'un cahier particulier ne s'en est pas moins exercée sur le cahier général. Tel vœu ne peut point être considéré à priori comme éliminé parce qu'on ne le retrouve pas au cahier définitif avec une physionomie rigoureusement semblable à celle qu'il avait dans le cahier originel. Si la lettre s'est évanouie, l'esprit demeure. Obligés, par la brièveté du temps » et par l'exiguïté du cadre dont ils disposaient, à faire œuvre à la fois prompte et concise, les commissaires rédacteurs du bailliage principal de Caen ont tenté la mise au point loyale des diverses opinions en présence. Pour 70 articles environ sur les 90 articles du cahier général, ils ont adopté intégralement, en l'empruntant aux divers cahiers particuliers, la formule qu'ils jugeaient la plus heureuse et la plus adéquate à la pensée générale. Les autres articles sont le résultat d'un patient travail de marqueterie, qui a consisté à détacher des divers cahiers particuliers, non plus le texte entier de leurs vœux, mais leurs fragments les plus expres- sifs pour les fondre en une formule générale qui demeurât l'inter- prète des aspirations communes. Ce cahier contenait d'ailleurs, dans son dernier alinéa, sa propre justification &. Les députés étaient invités à compléter ses indications générales par les indi- cations plus précises et plus détaillées renfermées clans les cinq cahiers des bailliages particuliers, sur tous les points qui ne lui seraient pas contraires ». Il apparaissait ainsi comme une construc- tion légère, aux voûtes élancées, aux frêles colonnes, mais flan- quée d'arc-boutants qui en assuraient la solidité sans en masquer l'élégante simplicité. \u premier rang des objets que le pouvoir central avait spécia- lement signalés à l'attention des populations consultées, figurait la question de la réforme administrative du royaume. Necker, 1 Telle a été, par exemple, la contribution du cahier de l'assemblée préliminaire du bailliage de Vire, en raison de l'importance économique et sociale des vœux qu'il a suggérés. 2 Article 90. VOEUX RELATIFS A L'ADMINISTRATION PROVINCIALE 293 on l'a vu plus haut1, avait prescrit aux sujets des trois ordres de donner à leurs députés une mission particulière pour dresser un plan de formation des Etats provinciaux ». Ce plan devait être discuté et débattu entre les députés intéressés, avant l'ouverture de l'Assemblée nationale. La Normandie, et en particulier la Basse-Normandie, ne resta pas sourde aux demandes du ministre. La question l'intéressait au plus haut point, et elle avait déjà fait l'objet d'une ardente campagne 2. Aussi assigne-t-elle une assez large place, parmi ses revendications si diverses, à celles qui concernent la future orga- nisation administrative de la province. Des 306 cahiers primaires que j'ai consultés pour les deux res- sorts judiciaires de Caen et de Coutances, 127 n'expriment aucun avis sur la forme d'administration préférée par leurs auteurs c'est un peu plus du tiers. Les deux autres tiers prennent assez nettement position, soit en faveur du maintien du régime créé par l'édit de 1787, c'est-à-dire des Assemblées provinciales, soit en faveur du rétablissement des Etats provinciaux. En général, il n'est guère fait mention des anciens administra- teurs, intendants et subdélégués. L'institution est depuis long- temps impopulaire ; toutefois le discrédit où elle est tombée n'a plus sa source dans la crainte, mais dans le mépris. La réforme de 1787 a dessaisi et désarmé les intendants ; elle les a blessés à mort, et c'est au milieu de l'indifférence publique qu'ils vont disparaître. Presque tous les cahiers sont muets à leur égard. Quelques-uns rappellent leurs anciens méfaits, les dangers de leur pouvoir d'autrefois, comme La Llaye-Bellefond 3 et Saint- Waast-la-Hougue 4, mais c'est leur inutilité bien plutôt que leur malfaisance qui se trouve mise en cause. On leur reproche d'être en surnombre et de faire double emploi {y>. Je n'ai trouvé qu'un exemple de cahier supposant que leur existence sera prolongée 1 Voir ci-dessus, chap. VIII, p. 168-169. 2 Ibid., chap. VIII, La Campagne en faveur des Etals provinciaux, p. 155-169. 3 Le despotisme des commissaires départis, auxquels l'administration de la généralité a été confiée ci-devant, les désordres l Celui de Carentan les annihile sans les mentionner, en demandant le transfert à d'autres pouvoirs de leurs dernières attributions en matière de contentieux financier et de tutelle administra- tive 4. Mortain, par le même procédé indirect, éteint leur com- pétence judiciaire ; Coutances 5', Péri ers 6 et Bayeux 7 envi- sagent formellement leur suppression comme une simplification des rouages administratifs et comme une mesure d'économie. Les deux cahiers généraux des bailliages de Caen et de Coutances enfin, usent de la même discrétion et les exécutent par préte- ntion 8. Les Assemblées provinciales comptent encore des partisans en Basse-Normandie. Dans une trentaine de cahiers primaires envi- ron, on voit demander leur continuation ». Les uns désirent leur fl Le cahier de La Bloutière, dans son art. 6, mentionne l'intervention future des subdélégués de l'intendant » dans les opérations du tirage de la milice. Bri- drey, Ibid., t. 1, p. 177. 2 Voir C. Bloch, La Révolution française, t. LVI, 1909, p. 557. Les tonneliers de Caen, les perruquiers et les selliers de Bayeux ont toutefois demandé la suppression des intendants, de leurs secrétaires et subdélégués. 3 Art. 11 Interdire aux commissaires départis, s'ils subsistent, la compétence des matières contentieuses de finances, et réduire leurs appointements. » 4 Art. 16 et 29. 5 Art. 1, paragraphe 8. Au précieux avantage de régénérer les provinces, les Etats particuliers joindront celui de faciliter la suppression des bureaux des inten- dants. » 6 Au chapitre des Etats provinciaux Inutile d'observer rpie chaque province, soumise à son régime particulier, n'aura plus besoin des ministres qui, sous le nom d'intendants ou commissaires départis, entraînent des dépenses que la nouvelle constitution rendra superflues. >i . 1 Cahier de l'assemblée préliminaire du bailliage de Saint-Sauveur-le-Yicomte, chap. Vénalité. 2 Voir ci dessus, chapr. VIII, La Campagne en faveur des Etats provinciaux. 3 Cahiers des assemblées préliminaires de Baveux art. 13. el, de Caienlan art. 6. 1 Exemples parmi les cahiers paroissiaux, Gantelou, Villedieu et quatorze paroisses bocagères du bailliage de Vire parmi les cahiers d'assemblées prélimi- •MAINTIEN DES ASSEMBLÉES MUNICIPALES 297 forme des futurs Etats ; aucun d'eux ne songe au rétablissement de la forme ancienne et désuète des Etats du moyen-âge ou du XVIIe siècle. Pour exprimer leurs exigences nouvelles, ils em- ploient une formule, qui, sous ses variantes légères, enferme un même désir. Les uns demandent le retour des Etats particuliers de Normandie dans la proportion adoptée au Résultat du Conseil » li, ou encore, dans la forme et proportion qui vient d'être adoptée pour les Etats généraux » '-. Les autres, plus nom- breux, réclament la restaura lion de ces mêmes Etats dans la forme du Dauphiné », à l'instar du Dauphiné » 3. Pour tous, cela signifié doublement du Tiers état et vote par tête au sein des Etats provinciaux. Un très petit nombre de cahiers s'attardent à l'étude détaillée de la future organisation administrative, comme celui de La Haye-Bellefond liK Quelques-uns prévoient l'existence d'une Commission intermédiaire provinciale unique ; d'autres pro- posent le maintien des trois Commissions intermédiaires déjà établies au chef-lieu de chacune des rois généralités normandes. Les assemblées de département, qui ont tenu deux sessions, en 1787 et en 1788, et qui, composées d'hommes intéressés à la prospérité du pays, ont pu faire apprécier leurs services, trouvent grâce devant l'opinion ; plus d\\n projet les encadre, dans l'ébau- che du nouveau régime administratif l5, entre les Etats provin- ciaux et les assemblées municipales /i, dont les bienfaits sont naires de bailliages, Carentan, Torigny, Vire. Toutefois, quelques paroisses du Cotentin hésitent entre Caeu et Lisieux Gonneville, Varouville, Le Mesnil-au-Val. Bretteville se prononce catégoriquement en faveur de Lisieux. 1 Cahier d'Acqueville. 2 Cahiers de Picauville, Montagu-la-Brisette, Clïtourps, Tonneville, Vasteville. 3 Quinze cahiers paroissiaux dans le bailliage de Valognes ceux de Fervaches, Saint-Romphaire. Mesnil-Rault, Troisgots, au bailliage de Coutances ; de Carvillé, au bailliage de Vire de Bures et de La Ferrière-au-Doyen, au bailliage de Torigni. I Sur le plan très détaillé de réorganisation des Assemblées provinciales, tel qu'il est exposé au cahier de La Haye-Bellefond, voir Bridrey, ouo. cité. t. I, p. 356- 358, et la note 1 de la page 356. 5 Cahiers de Montchaton, Chantelou, Tessy, Danvou, Gouvets, Herqueville. Le cahier d'IIerqueville caractérise ainsi leurs membres Ces messieurs, dit-il, n'é- tant ni de la classe des ingénieurs, ni de celle des adjudicataires, mais tous du lieu, distingués par leurs mérites, n'ayant d'autres motifs que l'amour de la justice el le bien de la pairie. » Bridrey, ouv. cité, t. Il, p. 344. G Cahiers de Béaucoudray, Caillebot-la-Salle, Chantelou, Le Chefresne, Gratot, Hudimesnil, Mesnil-Garnier. Mesnil-Villeman, Montchaton. Montabot, Montcuit, Nicorps, Saint-Louet-sur-Sienne, Sourdeval-les-Bois, Tessy b. de Coutances; de Breuville, Galteville, Gouberville, Rau ville, Saint-Christophe-du-Foc, Saint-Ger- main-le-Gaillard, Saint-Martin-le-Gaillard b de Valognes; de Gouvets, de Mantilly ?.S ASPIRATIONS PROPRES A CHACUN DES TROIS ORDRES vantés en maints cahiers, et dont le maintien et l'affermisse- ment » sont généralement demandés. Les vœux de la Basse-Normandie offraient, en somme, aux délibérations de la future Assemblée nationale un plan d'admi- nistration provinciale assez nettement ordonné. Les cahiers généraux des trois ordres, dans les deux bailliages de Caen et de Coutances, exprimaient clairement les sentiments et les aspi- rations propres à chacun de ces ordres. Ce que réclamait avant tout la noblesse, c'était le retour de son antique constitution, dans la province restaurée par la confirmation solennelle de ses privilèges, sous l'empire de la charte normande, intégralement exécutée lK Les deux cahiers du clergé, où la prépondérance des curés avait introduit un esprit moins exclusif, demandaient aussi le retour des Etats de Normandie, mais avec une organisation perfectionnée », et dans la forme des Etats généraux » 2\ Mais les vœux du clergé, pas plus que ceux de la noblesse, ne dépas- saient l'horizon normand. Le Tiers état vit plus loin et de plus haut. A Caen, il sollicita le rétablissement des Etats provin- ciaux dans les provinces qui en avaient et leur établissement dans celles qui n'en avaient pas » {^K Plus sobrement, mais avec autant de netteté, il demanda à Coutances, que l'ensemble de la Consti- tution nationale fût complété par l'établissement d'Etats pro- vinciaux dans toutes les provinces du royaume » f4\ Ce sentiment de fraternelle générosité, tout à l'honneur du Tiers état normand, et qui le guidait au-delà de sa frontière provinciale pour le hausser à la conception de la Nation française, corrigeait ce qu'il y avait eu d'étroit et d'égoïste dans les revendications antérieures de la Normandie en faveur de ses Etats particuliers. Au lieu d'un entêtement irraisonné à la poursuite de chimères mortes, il annonçait une sagesse politique d'heureux augure. Tout en expri- mant leurs préférences pour leurs Etats, suspendus et non anéan- b. rie Vire. Le cahier d'Hudimesnil s'exprime ainsi Rien ne paraît plus juste el plus avantageux pour le peuple que l'institution des assemblées municipales, à cause du bon ordre qui nous y parait établi ». Bridrey, ouv cilé, t. 1. p. 378. 1 Cahier de la noblesse du bailliage de Coutances, art. 18 à 20 de Caen, Contrat art. 10, 18. 19;, Magistrature art. 3, Bien public art. 5 et 22. 2 Cahier du clergé du bailliage de Coutances, Législation, art. 3; de Caen, cha- pitre Constitution particulière de la Normandie. Le clergé de Caen désirait que toutes les classes de son ordre, et notamment celle des curés, fussent davantage intéressés à la formation de ces Etats. M Cahier général du Tiers étal du bailliage de Caen, art. 7. 1 ahier général du Tiers étal du bailliage de Coutances, alinéa -27. HAUTEUR DES VUES DU TIERS ETAT 299 tis, sur lesquels ils avaient soin de réserver tous leurs droits, les citoyens du Tiers état de Basse-Normandie laissaient à leurs mandataires la liberté de se concerter avec les autres députés de la France sur les moyens de s'assortir au régime d'adminis- tration générale qui serait jugé par l'Assemblée Nationale comme plus convenable au bien commun de tout le royaume » tl. Ils consentaient à lier les intérêts de la province à ceux du reste du royaume », afin de faciliter la régénération générale par l'uni- formité de principes et de gouvernement ». En un mot, ils don- naient leur consentement anticipé à la fusion de l'individualité normande dans la Nation française. L'unité nationale de la France était en germe dans les cahiers du Tiers état de Basse-Normandie. il Cotte heureuse formule, ainsi que celles qui suivent, était due à la plume des commissaires de Saint-Lô, dont l'un. Vieillard fils, fillait représenter, comme député du Tiers état, le bailliage de Cotentin aux Etats généraux. 300 PAROLES D'ESPÉRANCE CHAPITRE XII les troubles publics et l'anarchie administrative mars-juillet 1789 Rôle joué par les députés des trois ordres des bailliages de GaBïi et de Goutances au début de la session des Etals généraux*. Adhésions pro- gressives du clergé, puis de la noblesse aux vues du Tiers état. Enthousiasme causé en Basse-Normandie par la réunion des ordres et la prise de la Bastille. Les adresses des villes. La fermentation générale ses causes économiques et sociales. La disette des grains les émeutes de Saint-Lô, Caen, Cherbourg. Les retards dans la perception des impositions résistances et révoltes dans les villes, à Caen, Cherbourg, Vire. Soulèvement des campagnes contre les droits féodaux destruction des colombiers el chartriers ; actes de renonciation des seigneurs. La Grande Peur en Basse-Normandie à Vire, Carentan, Cherbourg, Caen, Torigni, Bayeux. Arrestation du duc de Coigny et de Delleville. Conséquences de la Grande Peur. Impuissance de la Commission intermédiaire provinciale et de l'inten- dant, accrue par leur antagonisme. Conflit relatif à la prestation de la corvée. Tentative d'indépendance des pouvoirs locaux. Impopularité et découragement des subdélégués. Départ de l'intendant anarchie administrative. Annulation, à la veille du 4 août 1789, par les nobles du Cotent in et du bailliage de Caen. des mandats impératifs donnés à leurs députés. — Organisation spontanée des pouvoirs révolution- naires nouveaux pour la défense de l'ordre public. Le 1er avril 1789, dans la séance de clôture de l'assemblée générale des trois ordres du bailliage de Cotentin, le lieutenant général, Desmarets de Montchaton, félicitait les nouveaux élus en ces termes C'est à vous qui par la réunion des qualités les plus estimables et les plus précieuses avez si justement mérité Mes suffrages de vos concitoyens, c'est à vous de remplir leur attente et de consommer le grand œuvre de la félicité nationale. Puissent tous les membres qui composeront avec vous l'Assem- blée y porter comme vous un zèle ardent pour le bien public et l'esprit de paix et de conciliation » 0. L'avant-veille, à Caen, 1 Abbé Pigeon, Le grand bailliage de MoHain en 1789. Mémoires de In Société -aca- démique du Cotentin} t. III, p. 532. •• ATTITUDE DES DÉPUTÉS DES TROIS ORDRES AUX ETATS GÉNÉRAUX 301 le lieutenant général du bailliage, Duperré de Lisle, avait adressé les mêmes éloges aux députés des trois ordres du bailliage princi- pal de Caen, et avait exprimé les mêmes espérances {X. Tous deux se faisaient illusion. Sans doute tous les députés bas-normands avaient reçu de leurs commettants des instructions communes sur plus d'un point. Ils avaient reçu le pouvoir général de proposer, rémontrer, aviser et consentir tout ce qui concer- nait les besoins de l'Etat, la prospérité du royaume et le bonheur, tant commun que particulier, de tous les citoyens ». On leur prescrivait, avant tout vote de subsides, l'établissement d'une Constitution, et tout spécialement la restauration des Etats provinciaux de Normandie. Mais sur d'autres objets essentiels il y avait entre les mandats respectifs dont ils étaient porteurs des divergences trop profondes pour que l'accord fût possible dès le début. La question du vote par ordre ou par tête, que le gouvernement n'avait pas tranchée, allait surtout les mettre en opposition. La représentation des deux bailliages de Caen et de Coutances fut, comme celle des autres bailliages du royaume, divisée en deux groupes. Les quatorze députés du Tiers état répondirent le 12 juin 1789 à l'appel des députations fait au sein de l'assemblée des communes et y remirent leurs pouvoirs W ; on les voit figurer dans la séance du 20 juin et prêter le serment du Jeu de Paume l3î. Des sept députés du clergé, trois seulement firent partie de la majorité qui consentit à la vérification des pouvoirs' en commun le 22 juin, et qui fit le 24 juin son entrée dans l'Assemblée nationale ce furent Talaru de Chalmazel, évêque de Coutances, Lefrançois, curé de Mutrécy, et Lévêque, curé de Tracy ; les quatre autres ne s'y rallièrent que le 27 juin, après les injonctions du roi *. Les sept députés de la noblesse appartinrent à la pluralité » des gentilshommes qui s'entêtèrent à réclamer la distinction des ordres et ne cédèrent qu'aux ordres royaux. Dès le 1er juin, Achard de Bonvouloir avait protesté au nom de la noblesse du Cotentin contre le doublement du Tiers et l'atteinte illégale portée aux droits des deux premiers ordres. ] Journal de la Basse-Normandie, n° 14, 5 avril 1789. 2' Procès-verbal des séancesde l'Assemblée nationale.. Arcli. nat., AD xvm 1, p. 11-15. 3 A. Brette, Le Serinent du Jeu de Paume, p. 9, 11 et 12. Ango, député de Saint- Sanveur-le Vicomte, absent lors de cette séance, signa le 23 juin. i Procès-verbal des séances de l'Assemblée nationale. Arch. nat., AD xvm 1, p. 12-16. Lefrançois, atteint de sciatique. donna le 12 octobre sa démission, acceptée le 22. Arch. nat., B'1' 40. Voir A. Brette, Les Constituants, chap. III 3, p. 280. 302 LÀ FUSION DKS ORDRES Quelques jours plus tard, un des députés du bailliage de Caen, le baron de Wimpfen, fit preuve d'une attitude moins intransi- geante. Le 19 juin, la chambre de la noblesse, effrayée par les hardiesses du Tiers qui, l'avant-veille, venait de se déclarer Assemblée nationale, avait rédigé une adresse au Roi pour pro- tester contre l'esprit d'innovation » qui menaçait la Constitution; invoquant les vrais principes, lois et usages de la monarchie »; elle s'élevait contre les prétentions du Tiers qui voulait s'attri- buer les droits réunis du Roi et des trois ordres ». Pour faire échec à cette adresse, votée par la majorité, le baron de Wimpfen en proposa une autre à la minorité. Cette protestation signée de quarante-trois membres déplorait l'inanité des efforts faits pour déterminer la chambre de la noblesse à se renfermer dans l'ex- pression de ses sentiments pour le Roi, et à écarter de ce discours tout ce qui pouvait rappeler l'idée d'une funeste division entre les ordres, présenter sur l'égalité des impôts des principes inad- missibles, et indiquer une dénonciation des démarches de l'un des ordres » f1'. Le 25 juin la plupart de ces signataires s'agrégeaient au Tiers état. Wimpfen ne fut pas de ce nombre. Il était lié comme ses collègues de Basse-Normandie par son mandat impératif, et le 27 juin, à son entrée dans la salle des séances, il déposa comme eux, sur le bureau de l'Assemblée, un acte de réserve et de pro- testation ?. A cette date, la fusion des trois ordres était consom- mée. Lorsque l'intendant de Caen, Cordier de Launay, reçut le 8 juillet des ministres Barentin et Villedeuil la Déclaration royale du 23 juin, celle-ci était déjà lettre morte et la volonté du roi était frappée d'impuissance »3. Un mois plus tard, Villedeuil et Barentin envoyaient à l'intendant le récit de la séance du 15 juillet et un nouveau discours du roi, de ton tout différent. Louis XVI, comme chef de la nation » venait témoigner sa confiance aux représentants de la nation », et implorer leur assistance pour 1 Mémoires, de Bailly, t. 1, p. 451. — Causes inconnues de la Révolution, par Robert, t. I, p. 313. Cf. Pezet, Bayeux à la fin du XVIIIe siècle, p. 110-111. 2 Les députés nobles de la Basse- Normandie, réfractaires à la fusion des ordres, devaient adhérer, à la lin de juillet 1789, sur l'invitation de leurs commettants, aux délibérations antérieures de l'Assemblée nationale et prendre ensuite une part effec- tive à ses travaux. Voir ci-dessous, chap. XII, p. 331. 3 Arch. dép., Calvados, C 6317. A Granville, Quinette de Cloisel, homme ardent et très démocrate », va le 14 juillet a la principale porte de la ville arracher le compte-rendu imprimé de la séance royale du 23 juin, affiché par le subdélégué Couraye sur les ordres de l'intendant. Ibid., C 6354. Cf. Arch. nat., D xxix, 8. l'enthousiasme a la prise de la bastille 303 assurer le salut de l'Etat lK Du 23 juin au 15 juillet, le pouvoir royal avait franchi une grande étape dans la voie de sa déchéance. Le 14 juillet la Bastille était tombée. La chute de cette forte- resse, qui symbolisait le despotisme de l'ancien Régime, causa une profonde impression de joie dans la Basse Normandie. La ville de Bayeux, prévenue par un de ses députés, le baron de Wimpfen, envoya, le 23 juillet, deux adresses enthousiastes à l'Assemblée nationale et à l'hôtel de ville de Paris '2/. Elle félicitait la première de ses lumières et de ses vertus patriotiques, des arrêts que la sagesse et l'honneur dictaient à cette réunion de héros citoyens, et qui étaient de sûrs garants à la liberté fran- çaise ». Elle remerciait les chefs de la municipalité parisienne, pères et libérateurs de la France, qui, au prix des plus grands périls, avaient scellé de leur sang la liberté du pays ». A Caen, des jeunes gens débarquent le 18 juillet par la diligence. Ils se disent députés de Rouen et portent au chapeau la cocarde natio- nale. Ils la font arborer à la jeunesse caennaise ; on va l'offrir ensuite aux échevins, au comte de Faudoas qui est très populaire, au duc d'Harcourt. Officiers et soldats du régiment d'Aunis s'en parent à leur tour ; une procession de gens décorés parcourt la ville musique en tête \ La cocarde devient un passe-port obli- gatoire, sans lequel on est insulté dans la rue *'. A Cherbourg, même fermentation. Le 21 juillet, les officiers municipaux, auxquels se joignent Dumouriez, maréchal de camp, comman- dant du Roi, le vicomte de la Bretonnière, brigadier, commandant en chef de la marine, et Deshayes, commissaire général des ports et arsenaux, se réunissent à l'hôtel de ville pour délibérer sur les moyens de rendre plus éclatante et plus authentique la joie que vient de verser dans tous les cœurs l'heureuse nouvelle du jour ». Une assemblée générale des citoyens, tenue le 21 juillet dans l'église Notre-Dame, décide qu'une grand'messe sera célé- brée le lendemain, qu'un Te Deum sera chanté le soir, qu'un feu de joie et des illuminations suivront. Une députa tion est envoyée à l'hôtel du gouvernement, où réside le duc de Beuvron ; elle lui 1 Arch. dép.. Calvados, C 6317. 2 Arch. comm., Bayeux. Registre de délibérations D i 13, et Arch. nat., C 88, 3 La musique du régiment de Bourbon a accompagné le peuple par compagnie malgré les officiers du régiment. » Dufour, Mémoires et remarques, t. I, p. 31. 4 Esnault, Mémoires de la ville de Caen. 1. 1. p. 7. — Cf. Arch. comm., Caen, carton 56. Lettre de Levallois, commis de l'intendance, à Levallois, entrepreneur à Cherbourg, 20 juillet 1789. , '! LES ADRESSES DES VILLES apporte La cocarde nationale rouge et bleue telle que le roi l'a reçue de AI. Bailly, prévôt des marchands, lors de son entrée à Paris ». Le duc l'arbore à son chapeau, ton les les personnes de sa suite l'imitent ; l'après-midi on la voit aux coiffures de tous les militaires et de tons les bourgeois 'l >. A Granville, sur l'initiative de la Chambre littéraire, des réjouissances publiques turent organisées. Les édifices publics furent illuminés, une garde d'honneur fut placée à la porte de Perrée Duhamel, député aux Etats généraux ; on distribua du froment et du riz aux pauvres. Deux adresses de remercîments furent envoyées, l'une à l'Assem- blée nationale et l'autre à la municipalité de Paris. Si nous avions tremblé pour nos pères adoptifs, disait la première, si nous avons frémi en apprenant que les enfants de la patrie étaient massacrés par des cohortes étrangères, si nous versons des pleurs sur nos o frères de Paris qui ont cimenté de leur sang la liberté, leurs mânes s'indignent de nos larmes. L'étendard de la victoire u flotte sur les ruines du gouffre du despotisme ». — Vous avez sauvé le royaume de l'anarchie », écrivait-on aux Parisiens 2. Ces manifestations étaient absolument spontanées ; nul mot d'ordre officiel n'avait présidé à leur organisation, témoin cette lettre du subdélégué de Granville à l'intendant! Je n'ai jamais vu une plus belle joie, on célébra la paix et la liberté. Vous me direz sans doute paon aurait dû attendre des ordres pour se livrer aux fêtes et pour en faire la dépense ; mais il est des cir- constances impératives et pour ne pas voir commencer des mouvements de sédition, il faut avoir l'air d'aller au devant des vœux qu'il serait dangereux de contrarier » 3. Ces explosions fiévreuses de l'enthousiasme populaire n'étaient pas sans danger ; elles révélaient une agitation profonde des 1 Arch. comm., Cherbourg. Registre les délibérations, BB5, séance du 21 juillet 179. A Carentarij un Te Deum est chanté If -20 juillet pour célébrer la réunion le tous les ordres de lu nation ». Aïch. comm., Carenlan, Registre des délibérations. 2 Arch. comm., Granville. Registre des délibérations. 3 Arch. dé., Calvados, C 6351. Lettre de Couraye-Duparc à l'intendant, 21 juillet 1789. D'autres adresses, destinées à célébrer l'heureuse réunion des trois ordres, furent envoyées à l'Assemblée nationale, par le bailliage le Cérenees le G juillet, par les officiers municipaux de Coutances le 27 juillet, par les communes réunies du bailliage de Morlain sans date, par le bailliage el présidial de Coutances le 28 juil- let. Arch. nat., C 88, 89 et 90. — Le retour de Necker, le ministre-citoyen », le Sully du XVIIIe siècle », fut aussi l'objet d'adresses de félicitations de Saint-Sau- veur-lé- Vicomte 29 juillet, ïbîd., C K9. et des officiers municipaux d'Avranches 28 juillet, Ibid., C 9J. MISÈRE PUBLIQUE ET FERMENTATION GENERALE 365 classes pauvres, en proie à une grande misère, et pouvaient se changer brusquement en explosions de révolte. En plus d'un endroit l'affolement succéda à l'allégresse publique et les émeutes aux fêtes ; dans plus d'une ville les feux de joie dégénérèrent en incendies et les réjouissances en pillages. Le manque de travail était une des premières causes de la misère publique. Par esprit d'économie, l'Assemblée provinciale de Caen avait suspendu la construction coûteuse des grandes routes et parcimonieusement réglé la distribution des ateliers de charité. La lenteur du recouvrement de la corvée ne permettait pas la régularité des paiements. Les travaux du port de Cher- bourg, qui avaient attiré dans cette ville une plèbe remuante et dépeuplé le Cotentin de ses ouvriers agricoles, avaient été inter- rompus. Cet arrêt dans la vie économique du pays constituait un péril social. Il engendrait l'oisiveté, la mendicité ; il avivait les plus violentes passions au cœur des malheureux. Ouvriers sans travail, qui formaient des clubs en plein air sur leur ancien chan- tier, voyers aigris par les retards apportés à leur paiement aug- mentaient chaque jour la troupe d'oisifs et de mécontents, qui pouvait devenir un gibier d'émeute. La faim, mauvaise conseillère, sévissait alors cruellement. La récolte de 1788 avait été insuffisante. La dureté de la saison, une grêle désastreuse, la difficulté des charrois, l'inaction forcée des moulins avaient mis le comble à la misère sur les divers points de la généralité. Une terrible émeute avait éclaté à Caen le 5 janvier 1789, la veille du jour des Rois. La foule avait enfoncé les portes des boulangeries, pris le pain, brisé les tailles et déchiré les registres. La maison du lieutenant de police, tout naturelle- ment désignée à la fureur des mauvais sujets, avait été pillée de fond en comble *. A mesure qu'on avançait dans l'année, les effets de la mau- vaise récolte de 1788 se faisaient davantage sentir. Le prix des grains allait croissant de mois en mois sur tous les marchés ; un sac de blé se vendait à la halle de Caen 26 livres 16 sols 7 deniers en janvier, 40 livres 4 sols 10 deniers en juin. A la fin de ce mois, il monta jusqu'à 68 et même 72 livres 2. Ce renchérissement continu était dû aussi en grande partie à l'indécision des mesures 1 Arch. dép., Calvados, C 2665. On y vola un gigot de mouton à la broche, raconte Dufour dans ses Mémoires et remarques, t. I, p. 29. 2 Ibid., C 2756. 20 306 MESURES POUR L APPROVISIONNEMENT DES VILLES prises par le gouvernement pour l'approvisionnement des villes. Les ordres les plus contradictoires se succédaient depuis deux ans. La déclaration royale du 17 juin 1787 relative à la libre cir- culation des grains avait été abrogée par un arrêt du Conseil du 7 septembre 1788. Inquiet de la récolte insuffisante, le gouverne- ment suspendait l'exportation des grains à l'étranger, tout en maintenant le libre transit dans le royaume. Une restriction nouvelle fut apportée à cette liberté de circulation par l'arrêt du 23 novembre 1788. Cet arrêt interdisait les spéculations achats ou accaparements entreprises uniquement en vue de profiter de la hausse des prix. Il n'était permis de vendre ou d'acheter grains et farines que dans les halles et marchés ; les approvisionnements journaliers des consommateurs locaux devaient avoir lieu avant toute autre transaction. Des arrêts ultérieurs accordèrent des primes d'encouragement à l'impor- tation des blés d'Amérique ou d'Europe, de l'orge et des autres grains. Pour rassurer les esprits inquiets de la cherté croissante, le roi prit des mesures plus sévères encore. Par arrêt du 23 avril 1789, il autorisa les commissaires départis et les magistrats de police à user de leur pouvoir pour faire approvisionner les mar- chés à prix modérés par les possesseurs de grains, à s'informer de la contenance de leurs dépôts, et à s'assurer à cet effet du concours des municipalités ;l\ Necker essaie de justifier par les circonstances critiques la rigueur d'une telle mesure. La tran- quillité publique, écrit-il à Cordier de Launay, et la nécessité de procurer à chacun sa subsistance exigent que l'on s'écarte de l'application de tous les grands principes de liberté qui peuvent être très bons dans des temps de calme et d'abon- dance » $. Il était imprudent de confier aux intendants une aussi lourde mission. On leur prescrivait des recherches inquisitoriales dans les greniers des particuliers ; on les invitait à contraindre ceux-ci, au besoin manu militari à garnir les halles publiques. Mais était-on sûr qu'ils réussiraient? Pour appliquer avec succès une législation aussi draconienne, il eût fallu un gouvernement fort, 1 Arch. dép., Calvados, C 2692. Le texte des arrêts des 23 novembre 1788 et 23 avril 1789 a été publié par M. Caron, Commission de recherche et de publication des documents relatifs à la vie économique de la Révolution. Bulletin trimestriel, année 1906, tomes 2 et 3, pièces n° 2 et n° 3. 2 Lettre de Necker à l'intendant Cordier de Launay, 4 avril 1789. Arch. dép., Cal- vados, C 2675. SOUPÇONS INJUSTIFIÉS CONTRE r/lNTENDANT 307 servi par une administration toute puissante. De quelle efficacité pouvait être, en avril 1789, le concours de ces administrateurs dessaisis, désavoués par le gouvernement lui-même depuis l'insti- tution des Assemblées provinciales, discrédités dans l'opinion, et dont plus d'un cahier de doléances avait demandé la suppres- sion? Depuis que l'emploi des fonds libres de la capitation, les distributions de secours et les remises ou exemptions d'impôts étaient du domaine de la Commission intermédiaire provinciale, l'intendant n'était plus le dispensateur de la bienfaisance royale. Les fonctions charitables, qui lui attiraient la reconnaissance publique, lui avaient été dérobées ; celles qu'il- gardait, celles de haute police, n'étaient pas de nature à raviver sa popularité déchue. Dans ces temps troublés, l'opinion publique en efferves- cence faisait crédit aux pires soupçons. N'alla-t-on pas jusqu'à accuser Cordier de Launay et son secrétaire Guyard de spéculer sur les primes d'importation des grains et d'édifier leur fortune privée sur la famine?/1 Ils faisaient enlever, disait-on, les blés des marchés de la Basse-Normandie pour les faire expédier à nouveau de ports très éloignés et les ramener dans les ports normands >. C'était là pure calomnie. La correspondance très active que Cordier de Launay entretenait avec Necker, avec Montaran, l'intendant des finances, témoigne au contraire de sa vive solli- citude pour la généralité de Caen 3>. Il réclame avec insistance 1 Lettres de Lambert au Comité national de Caen 18 septembre 1789, et de Necker aux officiers municipaux de Caen 26 septembre 1789 pour recommander Guyard à toute leur protection. Arch. comm. de Caen, carton 56. 2 On trouve un écho de ces assertions dans les Mémoires de la ville de Caen, par Esnault, t. I, p. 5. — Perrot, secrétaire du duc de Beuvron, accuse l'intendant de Caen d'être un accapareur de grains ». Lettre à Clérisse, concierge du château d'Harcourt, 1er mai 1789. Dans une autre lettre au même, du 23 juin 1789, il lui dit v. Des blatiers revenant du marché d'Isigny sont surpris à Osmanville par des émeutiers accompa- gnés de soldats qui pactisent avec eux. On les ramène de force au bourg. Le siège de police reste indifférent ; sans jugement, un blatier est emprisonné et doit payer une forte amende au profit de la troupe 6 juillet 6. 1 Lettre de Chantereyne à l'intendant, 28 mars 1789. Arch. dép., Calvados, C 2679. Garantot et Chantereyne, également traités d'accapareurs, devaient voir leurs mai- sons incendiées et leurs vies menacées dans l'émeute du 21 juillet 1789. Voir ci-des- sous, chap. XII, p. 31^-314. 2 Lettre de Launay à Necker, 20 juin 1789. Arch dép., Calvados, C 2641. 3 Arch. comm., Carentan, Registre des délibérations de l'hôtel de ville, 24 juin 1789. 4 Esnault, Mémoires de la ville de Caen, p. 6. 5 Bibl. comm. de Vire, ms. Séguin, p. 8. 6 Lettre du duc de Beuvron au lieutenant de police d'Isigny, 6 juillet 1789. Arch. dép., Eure, E suppl. Chartrier du Champ de bataille marquisat du Neubourg non inventorié. — A Carentan, une populace séditieuse a mis lundi dernier un tonneau de cidre sur le grand chemin avec cette inscription C'est pour tous les bons enfants 310 TROUBLES A SAINT-LÔ, MAI 1789 L'agitation est entretenue et propagée, les souffrances aug- mentent, les passions s'exaspèrent, le moindre incident provoque une émeute. D'avril à juillet 1789, trois villes de la généralité de Caen sont le théâtre de soulèvements populaires qui présentent une certaine gravité Saint-Lô, Caen et Cherbourg. A Saint-Lô, l'effervescence commença le 26 mars ; le peuple excité par les enlèvements considérables de grains, pilla les voitures des blatiers. Un mois plus tard, deux mégères firent un nouvel appel à la révolte ; l'intendant les fit enlever de nuit et transférer à la maison de force de Beaulieu, près Caen. Le 2 mai, la halle est vide ; les bourgeois et les pauvres » souffrent de la même disette ; un attroupement de 400 personnes va demander au subdélégué Robillard, qui est en même temps lieutenant général de police, du grain ou la permission d'aller en chercher dans les campagnes voisines. La semaine suivante, mêmes pri- vations ; murmures du peuple, qui menace de faire un mauvais sort à un négociant, Fontaine, possesseur d'un magasin d'orge et de froment dans un des faubourgs de la ville '. L'impunité enhardit les séditieux. Robillard attend des ordres pour informer contre eux W, les juges sont à leur maison de campagne et la milice bourgeoise, divisée et sans chef, ne peut prendre les armes 3. Pour maintenir l'ordre, le duc de Beuvron envoie à Saint-Lô des troupes de renfort ; Dumouriez accourt avec un détachement de Cherbourg le 13 mai, réunit les officiers municipaux et ceux du bailliage, organise un comité d'approvisionnement et de sûreté publique *. Le calme semble rétabli, mais de nouvelles secousses se font sentir en juin, et la maréchaussée doit procéder à des arrestations 5. A Caen, l'insurrection fut plus violente et fit plus de ravages , Boutrais i'2, voient leurs maisons envahies, leurs vies menacées. Les hommes et les femmes des faubourgs et des campagnes voisines pénètrent, sans rencontrer aucune résistance de la part des troupes, dans les dépôts des grainetiers, dans les boutiques des boulangers, à l'abbaye aux Dames où se trouvent de fortes provisions. Le lendemain et le surlendemain le désordre augmente. Les grains sont semés dans les rues on en suit les traces depuis la rue Neuve jusqu'à l'abreuvoir de la rue de Bernières '3. Vainement Cordier de Launay remontre-t-il à une femme que ce gaspillage va priver les pauvres de subsistance. Tant mieux, lui répond la mégère ; plût à Dieu qu'il n'y eût ni marché ni magasin nulle part alors on s' entretuerait et il y aurait moins de monde à nourrir » 4. La fermentation devient telle que le duc de Beuvron, regrettant sa faiblesse des premiers jours, veut prendre de sévères mesures et fait dresser des potences. La foule s'en moque, y attache des chats avec des vases remplis de farine détrempée et un écriteau lettres de l'intendant de Launay au ministre, des 23, 24, 25 et 26 avril 1789, Arch. dép., Calvados, C 2G65 ; — une lettre de Perrot, secrétaire du duc de Beuvron, à Clérisse, concierge du château d'Harcourt, du 1er mai 1789, Arch. château d'Har- court, liasse 106 ; — les Mémoires de la ville de Caen, d'Esnault, t. 1, p. 6, et les Mémoires et remarques de Dufour, t. I, p. 30. 1 Bellissent, négociant de Caen, réclama à l'Assemblée nationale et obtint de celle-ci une indemnité de 12,494 livres pour le pillage de ses grains, effectué dans la journée du 23 avril 1789. Un dossier de dix-huit pièces, relatif à cette requête, est conservé dans le fonds du Comité de Liquidation, aux Arch. nat., D xi 2, 1. 9. — Cf. la lettre du Directoire du Calvados au ministre de Lessart, du 24 juillet 1791, sur le même objet, dans le fonds du Comité des Rapports, Arch. nat., D xxix 29, 1. 5 et 6. 2 Le 16 février 1791, Boutrais, marchand grainetier à Caen, adresse au Comité des finances de l'Assemblée nationale une requête tendant à obtenir une indemnité de 6,731 1. 14 s. pour compenser la perte de 10 à 12,000 livres de grains subie lors du pillage de ses greniers à Caen, dans l'émeute d'avril 1789. Arch. nat., D vi 24, 1. 317. 3 Déclaration de la femme Hunouf, 29 avril 1789. Arch. comm., Caen. Registre des délibérations, BB 93. 4 Lettre de Cordier de Launay à Necker, 23 avril, 10 heures du soir écrite pen- dant le pillage nocturne. Arch. dép., Calvados, C 2665. 312 NOUVELLE ÉMEUTE A CAEN, JUILLET 1789 couvert de cette inscription Bouillie pour les chats » 0. Toute- fois, quand l'émeute s'attaque aux magasins du roi, les troupes offrent une vive résistance. Gentilshommes et bourgeois s'arment aussi et forment une garde qui arrête à l'entrée de la ville les paysans prêts à l'envahir. La fureur de ceux-ci se retourne contre les fermiers de la banlieue qu'on soupçonne d'avoir conservé des grains. Dans une ville aussi frémissante, il était fatal que les événe- ments de Paris eussent leur répercussion. La prise de la Bastille à peine connue, le peuple s'assemble impatient de courage et d'amour pour la chose publique ». Le 20 juillet, il se rend à la halle aux blés et y fait abaisser le prix des grains *2. Il veut des armes a et se porte vers le château, où il est assuré d'en trouver. Les ponts sont levés ; le gouverneur, Saint Maclou, est sommé d'ouvrir sous peine de mort. Après un essai de résistance, il capi- tule pour éviter un assaut. La foule entre et pille les armes, em- porte fusils et cartouches, chasse du château le régiment de la Reine et y installe une forte garde. Comme le peuple parisien, le peuple caennais s'est armé par le force et a pris sa Bastille, mais sans effusion de sang. Pour compléter sa victoire, il se dirige vers les prisons, élargit six détenus et les escorte triomphalement ; il force les magasins de la gabelle, il enfonce les portes du bureau des aides >4, dont le directeur s'enfuit à grand peine, et enlève les registres. Pendant trois jours, la ville est le théâtre d'une véri- table révolution populaire 5. 1 Le dimanche 26 avril, le duc de Beuvron a fait planter quatre gibets en potence dans la ville de Caen, savoir une à Saint-Sauveur, une à Saint-Pierre, une à Saint-Nicolas, et la quatrième proche le pont de Vauchelles. On a pendu deux chats à celle de Saint-Sauveur, un blanc et un noir, et une affiche entre les deux chats. » Dufour, Mémoires et remarques, t. I, p. 30. 2 Le lundi 20 juillet, la populace a été à la halle et a pris du blé à 40 livres le sac qui coûtait 54 livres. » Dufour, Mémoires et remarques, t. I, p. 31. 3 D'après Dufour, le peuple, à l'issue d'une messe du Saint-Esprit célébrée le 21 juillet sur le Cours-la-Reine, serait allé demander des armes au comte de Faudoas. Celui-ci ayant voulu ajourner cette remise, un jeune homme lui aurait répondu Monseigneur, il y a assez longtemps qu'on nous engueuse ; aussi nous en voulons tous. » Faudoas adressa les réclamants à Dubus, distributeur des poudres et salpê- tres du roi, qui leur délivra des munitions. Dufour, Mémoires et remarques, t. I, p. 31. 4 Arch. comm., Caen, Registre BB 103 ; Esnault, Mémoires de la ville ae Caen, t. I, p. 7, 8. Dufour, Mémoires ei remarques, t. I, p. 31. — Dans une letlre au président de l'Assemblée nationale, du 31 juillet 17S9, Boyer, directeur des aides et octrois de Caen, raconte cette émeute du 20 juillet. La foule se précipita dans ses bureaux, enleva et dispersa ses registres, pilla ses effets et ses meubles. Arch. nal., D xxix 29, 1. 5 et 6. 5 Révolutions de Caen, capitale de la Basse-Normandie, ou récit exact de ce qui s'est passé dans cette capitale et particulièrement de la prise de la forteresse, juillet 1789. Pièce imprimée, in-12. L'ÉMEUTE DU 21 JUILLET 1789 A CHERBOURG 313 A Cherbourg, l'émeute fut terrible. Cette ville était plus que toute autre un foyer d'insurrection. Depuis longtemps, le subdé- légué avait signalé le danger à l'intendant. Le nombre infini de misérables que tous nos travaux ont attirés dans notre ville, dans ses environs et tout le long de la côte, et le défaut de res- sources où l'interruption de la plupart des travaux plonge tous ces individus, nous fait appréhender... » l\ D'avril à juillet, Necker avait pu envoyer à Cherbourg plusieurs cargaisons de blé f2 ; mais, à cette époque, hypnotisé par la question du ravi- taillement de Paris, il dut cesser ses envois. Dans la soirée du 21 juillet, à l'issue de l'assemblée tumultueuse qui s'est tenue dans l'église Notre-Dame pour l'organisation des réjouissances pu- bliques, un grand concours de peuple se porte vers l'hôtel de ville où se trouve Garantot, maire et subdélégué. On réclame l'ouverture du magasin à blé de l'Etat, la distribution de ce blé à 4 livres le boisseau au lieu de 6 livres 4 sols, et l'abaissement du prix du pain de 3 sols 5 deniers à 2 sols la livre. Garantot parlemente, traverse la place d'armes pour se rendre à l'hôtel de Caux où Beuvron et Dumouriez se sont déjà réunis. Après une courte délibération, le duc de Beuvron annonce la diminution du prix du blé et du pain. Il est trop tard la foule impatiente n'a pas attendu cette réponse et s'est déjà livrée à des excès 3; Depuis longtemps elle hait Garantot, qui doit la mairie à la nomination royale et non à l'élection populaire, et qui joint à cette charge les deux titres détestés de subdélégué et de lieutenant général de 1 Lettre de Garantot à Cordier de Launay, 25 avril 1789. Arch. dép., Calvados, C 2679. 2 Dans le fonds du Comité des Rapports, aux Archives nationales, se trouve un dossier de lettres de l'intendant Cordier de Launay et du subdélégué et maire de Cherbourg, Garantot, relatives à l'approvisionnement de cette ville de mars à juillet 1789. Arch. nat, D xxix 32. 3 Pour l'émeute de Cherbourg, j'ai consulté aux Arch. comm. de Cherbourg, le registre BB5 délibérations municipales, f°157à 160 ; le registre BB 11 de correspon- dance, f° 26 à 30 ; la liasse FF 22, relative au jugement prévotal du 31 juillet el au rôle de Dumouriez dans cette affaire ; en outre, à la Bibliothèque communale de Cherbourg, le ms. 321 intitulé Précis de ce qui s'est passé à Cherbourg depuis le 21 juil- let jusqu'au 2 août 17S0, avec le procès et le jugement des brigands séditieux qui ont porté la désolation et la terreur dans celte ville Cf. Arch. nat., D xxix 32 ; aux Arch. dép. de l'Eure chartrier du Champ de Bataille, une Relation de ce qui s'est passé à Cherbourg les 21 et 22 juillet, malheureusement incomplète; aux Arch. dép. du Calva- dos, C 6370, le rapport de l'intendant de Caen proposant à l'intendant des finances, Montaran, une indemnité en faveur de Chantereyne 28 mars 1790 ; enfin, aux Arch. du château d'Harcourt. liasse 106, une lettre de Perrot, secrétaire du duc de Beu- vron, à Clérisse, concierge du château d'Harcourt, écrite de Cherbourg et datée du 24 juillet 1789. 314 PILLAGE DES MAISONS DE GARANTOT ET GIIANTEREYNE police. Il a eu l'imprudence de consentir à la vente des grains du roi, et il est traité d'accapareur. Accapareur aussi, l'armateur Chantereyne, dont le seul crime a été de prêter ses magasins et son nom à cette entreprise. Aveuglée par la colère, la populace se rue d'abord à l'hôtel de Garantot elle enfonce les portes, brise les meubles, en jette les débris dans la cour, comble le puits, précipite la voiture dans le port. Le malheureux subdélégué, dont les jours sont menacés, a de la peine h quitter Cherbourg et à gagner Valognes, caché sous une botte de paille dans une mau- vaise charrette de paysan. La bande des pillards, enivrée de vin et enhardie par l'absence d'obstacles, va saccager ensuite la maison de Chantereyne bijoux, papiers, argenterie, livres d'argent monnayé, tout disparaît dans la bagarre. Chantereyne lui-même ne dut son salut qu'à la fuite, et il mourut peu de temps après, des suites de sa frayeur. La nuit tombée, c'est à la lueur des torches que les pillages continuent les bureaux de Boulabert, entrepreneur des travaux du roi, sont menacés, ainsi que ceux des aides ; celui de la Romaine est envahi et les papiers sont jetés dans le bassin. Les séditieux se dirigent ensuite vers la maison d'un négociant, Mauger, qu'ils dévastent de fond en comble. Surprise par la rapidité de l'émeute, la force armée n'avait pu lui opposer aussitôt une résistance victorieuse. La dispersion des détachements essaimes dans les casernes éloignées de la rade réduisait considérablement les troupes de la garnison ; les piquets de soldats, qu'on avait jugés suffisants au maintien de l'ordre dans une fête populaire, ne l'étaient plus pour contenir une révolte. La milice citoyenne, formée par acclamation le jour même, n'avait ni armes ni organisation, et Dumouriez, le chef qu'elle s'était donné, n'était plus malgré toute sa popularité le maître des circonstances f*. Lorsque, las de piller et gênés par la pointe du jour », les forcenés commencèrent à se débander, les patrouilles militaires, aidées des citoyens amis de l'ordre, leur firent la chasse dans les rues. 219 individus furent arrêtés 180 hommes et 39 femmes. On les emprisonna dans les écuries de Dumouriez, dans les caves d'un particulier, dans les cales de deux vaisseaux mouillés en rade. Leur procès fut rapidement fait. La cour prévôtale, composée du prévôt général de la maré- 1 Dumouriez fut accusé d'avoir été l'instigateur secret des troubles de Cherbourg. Sur ces accusations, voir de volumineux dossiers aux Arch. nat., F7 4688, 4689. — Quelques pièces en ont été publiées par Amiot, en supplément à son Inventaire des Archives de Cherbourg, p. 316-320. MESURES DE REPRESSION 315 chaussée auquel on avait adjoint douze avocats, prononça le 31 juillet la peine de mort contre deux des mutins, Nicolas Pic- quenot, du Vretot, et Bon Mesnil, de Valcanville. Ils furent pendus dans la soirée, sur la place de la Fontaine. Dix autres meneurs furent condamnés à des peines variables trois aux galères perpétuelles ; cinq, fouettés, marqués au fer rouge, subirent la peine du bannissement perpétuel ; un autre fut enfermé à perpétuité ; le dixième fut puni de dix ans de galères. Cinq fem- mes furent marquées sur l'épaule droite des lettres S. D., battues de verges par l'exécuteur des sentences criminelles, puis dirigées sur la maison de force deBeaulieu pour y tenir prison perpétuelle. Malgré la rigueur de cette répression, l'agitation avait été trop forte pour espérer de faire rentrer de sitôt dans les bornes de la raison un peuple qui ne l'entendait plus ». Pendant plus d'une semaine, la ville de Cherbourg fut en état de siège. Elle se vit aussi appliquer un régime onéreux qui greva les finances muni- cipales. Obligée d'ouvrir ses magasins et de livrer le blé à 4 livres le boisseau, la municipalité prit ses précautions pour que ces mesures ne profitassent qu'aux malheureux et pour éviter des abus. Elle créa un bureau où furent enregistrés les ménages indigents, donna des bons à raison d'une livre et demie de pain par jour et par individu ; sur ces bons, remis aux boulangers, il était fourni du pain à 2 sols la livre, et le boulanger qui les repré- sentait à l'hôtel de ville recevait le supplément de la taxe. Réso- lue à prévenir toute rumeur et à empêcher le retour de l'insur- rection, la municipalité fut contrainte à des dépenses énormes pour assurer la subsistance du peuple. Il fallut faire participer à la diminution du pain toute la population flottante qui s'était accrue dans les derniers temps matelots des chasse-marées employés au transport des pierres de la digue, soldats détachés pour les carrières, troupes de la garnison. Un tel effort devait épuiser pour longtemps les ressources de la ville. Quant au malheureux subdélégué, il dut rester exilé pendant plus d'une année de Cherbourg où se trouvaient ses affections et ses intérêts. Son impopularité n'avait pas diminué et sa présence dans cette ville y eût été une cause permanente de troubles l>. Les soulèvements populaires ne sont point dûs uniquement à l Lettre de Garantot à Lamy-Desvallées, 30 octobre 1789. Arch. dép., Calvados, C 2679. Garantot avait essayé de revenir à Cherbourg, mais il dut s'enfuir devant l'excitation populaire les tètes étant échauffées par les dîners que les capitaines de la milice nationale donnaient à leurs soldats ». 316 RÉSISTANCE OPPOSÉE A LA LEVÉE DES IMPOSITIONS la disette des grains. La dureté du fisc en a provoqué plus d'une. L'hostilité du paysan contre les impôts ne se traduit plus seule- ment en plaintes et en gémissements. Des doléances on passe aux actes, de la résignation aux violences. La perception des impôts directs éprouve de sérieux obstacles après juillet 1789. Les recettes diminuent de mois en mois dans une proportion effrayante. Le bruit a couru dans les campagnes que les impositions sont illégales, que le roi en a fait la remise ; les naïfs y croient et les malveillants accréditent ce bruit. On refuse de payer la taille et les collecteurs sont repoussés à coups de fourches ; un huissier des tailles manque d'être assommé ]. Condé, ville tarifiée, est divisée en deux partis l'un qui veut conserver le tarif et l'autre y substituer la taille. Cette division cause des troubles et en juillet 1789, dans une émeute, les registres du tarif sont incendiés P. Les impôts indirects surtout sont l'objet de l'exécration géné- rale. Tous les cahiers en ont demandé la suppression. En atten- dant que l'Assemblée nationale la vote, le peuple se fait justice. Il s'attaque aux commis des fermes, aux gabelous qu'il accuse de tous ses maux. Le 9 mai 1789, la brigade de Villers-Bocage est assaillie à Tournay-sur-Odon par une bande de paysans qui la poursuit à coups de bâtons et de faucilles H>. A Caen, les insur- gés du 18 juillet, après la délivrance de six contrebandiers, courent au magasin de la gabelle, en enfoncent les portes et font crier le sel à 6 sols la livre. Ils vont aussi au bureau des aides, forçant le directeur général, Boyer, à prendre la fuite ; ils s'emparent des registres qu'ils portent chez Faudoas 4. A Cherbourg, le 21 juil- let, les émeutiers n'oublient pas les bureaux de la Romaine ; ils s'emparent des papiers qu'ils y trouvent et en jettent une partie dans le bassin. La présence d'esprit et la conduite prudente de Mme Maudry, femme du receveur des aides les empêchent d'y commettre de plus graves excès &. A Vire, le 20 juillet, une dizaine d'individus vont proclamant dans les rues, au son du tambour, l'abolition des aides et de la gabelle. Il se forme des 1 Lettre du receveur des finances de Vire à la Commission intermédiaire provin- ciale, 10 mars 1790, rappelant les événements de juillet 1789. Arch. dép. Calvados, C 7788. 2 Arch. comm., Condé-sur-Noireau, BB 1 et BB 7. 3 Arch. dép.. Calvados; série B, grenier à sel non inventorié. 4 Esnault, Mémoires de la ville de Caen, t. I, p. 8. Révolutions de Caen, p. G. Voir ci-dessus, p. 31?. 5 Arch. comm., Cherbourg, BB 5. Begistre de correspondance, 21 .juillet 1789. SOULÈVEMENT DES CAMPAGNES CONTRE LES DROITS FÉODAUX 317 attroupements tumultueux aux cris de à bas les aides ». Quatre jours plus tard, le 24, l'insurrection éclate. Un nombreux rassem- blement se forme sur les deux heures de l'après-midi et se porte rue du Neubourg, où sont les bureaux du receveur des aides Lecoq. Les exaltés menacent de le chauffer », et déposent une gerbe de genêts à sa porte. Un peloton de troupes, envoyé pour les disperser, fraternise avec eux. Lecoq, pressentant l'émeute, a eu le temps de s'enfuir et la journée s'achève sans d'autre incident que le bris de nombreuses vitres ft. De tels désordres ne sont pas particuliers aux villes. Les habi- tants des campagnes se croient affranchis par la Révolution des rentes et redevances seigneuriales. Ils se refusent à acquitter les droits féodaux tout comme l'impôt royal. Pour en opérer plus vite la liquidation, ils courent aux châteaux de leurs seigneurs, coupent les arbres des avenues, tuent les pigeons, démolissent les colombiers, brûlent les chartriers qui contiennent les titres de leur servitude ?. La duchesse d'Harcourt abandonne son château pour venir à Caen ; après son départ, la foule l'envahit et brise dans le vestibule une statue colossale en marbre blanc qui repré- sente Louis XIV terrassant l'hérésie C3. Dans les environs de Bayeux, le seigneur de Vidouville est en butte aux violences de ses vassaux. L'un d'eux, Robert Guillemette, vient attaquer son château à la tête d'une bande de charbonniers et sabotiers du bois de la Bigne. Pour les exciter au pillage, il leur a distribué 200 livres de pain, 100 livres de lard et un tonneau de cidre. Le 4 août au point du jour, cette bande embusquée dans les bosquets voisins envahit le château. Le seigneur, en robe de chambre, est entouré d'hommes armés de fusils, de sabres, de pioches, de haches et de cordes. Guillemette lui met le pistolet sur la gorge en le sommant de lui remettre la clef de son colombier pour le détruire, celle de son chartrier pour brûler ses titres, et de son argent pour se rembourser des rentes seigneuriales qu'ils payaient 1 Bibl. comm., Vire. ras. Séguin, p. 9. 2 Le subdélégué de Vire fait allusion à ces pillages dans une lettre à l'intendant, du 16 août, où, lui accusant réception de l'ordonnance du roi sur les troubles, il ajoute Il eût été à désirer qu'elle fut venue un mois plus tôt. On aurait évité bien des événements et des arebives conservées sic. » Arch. dép., Calvados, C 2688. 3 Esnault, Mémoires de la ville de Caen, t. I, p. 9. — J'ai pu voir, au château d'Harcourt. les traces des coups de pique qui ont crevé les tableaux de la salle des Maréchaux, les couronnes ducales qui ornaient la rampe du grand escalier en fer forgé sont tordues ou arrachées ; quant à la statue du vestibule, elle a été réédifiée, mais en pierre. 318 DESTRUCTION DES COLOMBIERS ET CHARTRIERS SER1NEURIAUX depuis si longtemps injustement ». Je n'ai pas mes clefs sur moi, répond Durel de Vidouville. Laissez -moi rentrer et je vais vous satisfaire. » Pendant que la bande tue poules, pigeons et ca- nards et se rue à la destruction du colombier, le seigneur envoie ses domestiques pour sonner le tocsin dans la chapelle du château; le curé de Vidouville le fait sonner dans la paroisse. Des villageois se rassemblent, mais les insurgés résistent. Durel peut s'échapper à grand peine, en sautant par une fenêtre dans son jardin. A la nouvelle de sa fuite, les forcenés se retirent, l'injure et la menace à la bouche l]l. Les châteaux de Tilly, d'Amayé, d'Ecrammeville, de Hottot sont le théâtre de semblables dévastations C2'. Dans le Bocage, les seigneurs tremblent pour leurs propriétés et pour leur vie. Le marquis de Ségrie, qui par la rigueur de ses exactions a soulevé trop de haines, chassé de son château, doit se réfugier dans une caverne des rochers d'Oître. Rentré à Falaise, où la noblesse du pays est plus en sûreté, il renonce par acte notarié, le 22 juillet 1789, à ses droits féodaux sur les cinq pa- roisses de Ségrie-Fontaine, La Lande-Saint-Siméon, Rouvrou, Mesnil-Hubert et Mesnil-Villement 3. Deux jours plus tard, le marquis d'Oilliamson voyait ses vassaux des paroisses de Caligny, Montilly, La Bazoque et Athis s'attrouper au nombre de trois à quatre cents, auxquels se joi- gnirent une infinité de brigands. Cette troupe de furieux, écrit-il, après avoir sonné le tocsin dans plusieurs paroisses des environs, a fondu sur ma maison de Caligny, a foncé les portes, vidé les caves et brûlé en entier mon chartrier » 4. La colère des foules était déchaînée et frappait parfois en aveugle. Une lettre du comte de Vassy, adressée au président de l'Assemblée nationale, fait saisir sur le vif, avec l'âpreté des revendications paysannes, l'impopularité dont furent victimes les seigneurs jusqu'alors les plus respectés 5. Vassy était un des gentilshommes les mieux estimés de la Basse-Normandie. Il avait joué, on l'a vu plus haut, un rôle considérable dans l'administration provinciale et s'y était 1 Arcli. coinm., Bayeux, Di 12, Registre des délibérations de l'Hôtel de ville. 2 Pezet, Bayeux à là fin du XVI II" siècle, p. 129. 3 La Sicotière, Léon de Frotté, 1. I, p. 149. — Lelièvre, Abandon de droits féodaux avant la nuit du 4 août, dans La Révolution française, 1905, p. 419-420. 41 Lettre du marquis d'Oilliamson au président de l'Assemblée nationale, 4 août 1789. Arch. nat., D xxix 29. 5 Lettre du comte de Vassy au président de l'Assemblée nationale. 27 juillet 1789. Ibid. PILLAGE DES CHATEAUX DU COMTE DE VASSY 319 révélé comme l'un des organisateurs du Bien public » *. La noblesse du bailliage de Caen l'avait élu comme second député de son ordre aux Etats généraux 2. Vassy possédait, en Norman- die, des fiefs assez importants il était seigneur patron de Brécé, de la Forêt-Auvray ^ près Falaise et de La Landelle-en-Clécy dans le Bocage virois [\ Le 16 juillet au soir, son homme d'af- faires l'avertit que, depuis cinq à six jours, une grande fermen- tation existe dans les campagnes des environs de Falaise et de Condé-sur-Noireau », où est située une grande partie de ses biens. Beaucoup d'habitants y annoncent que des ordres d'en haut leur enjoignent de brûler tous. les titres et papiers des seigneurs, l'Assemblée nationale ayant aboli tous cens, rentes seigneuriales, redevances et banalités des moulins. Alarmé par cette nouvelle, Vassy quitte Versailles et se rend, en toute hâte en Normandie 5. Le 19 juillet, il se trouve, non loin de Falaise, dans une de ses terres, qu'il vient de vendre ; il est à table, lorsque plus de trois cents personnes, les unes armées, les autres avec des bâtons, arrivent pour brûler les papiers et mettre, en cas de refus, le feu au château ». N'ayant aucun droit pour leur remettre des titres qui ne lui appartiennent plus, Vassy se sauve à pied, avec sa femme et ses enfants, tandis que les paysans, parvenus aux portes du château, les enfoncent à coups de haches et, après avoir vidé le chartrier, font dans la cour un autodafé d'archives seigneuriales. Réfugié dans sa terre de La Landelle, paroisse de Clécy, Vassy y subit d'autres assauts. Le mercredi 22 juillet au soir, cent à cent cinquante habitants de Clécy viennent le sommer de leur remettre ses titres. Ils s'excusent de lui faire de la peine, n'ayant jamais reçu, depuis dix-neuf ans qu'il possède cette terre, que de bons traitements de sa part; mais ils sont obligés d'exécuter des 1 Voir ci-dessus, chap. IV, p. 75. 2 Ibid., chap. X, p. 266. 3 Le comte de Vassy, seigneur de La Forêt-Auvray, ligure, à ce titre, dans le rôle des impositions de cetle paroisse, en 1790, pour 55S livres. L. Du val. La petite Pro- priété dans l'Orne en 1789, p. 15. 4 La terre de La Landelle produisait 120 livres de rentes seigneuriales, plus 80 livres de lods et ventes, 75 et 50 livres pour les foires et les marchés de Clécy, d'après la déclaration faite en 1781, au contrôle des vingtièmes, par le comte Louis de Vassy. Arch. dép., Calvados, C 5801. 5 Vassy justifie en ces termes l'intérêt qu'il avait à se déplacer d'urgence Dans le pays où est situé mon bien, le sol étant généralement mauvais et d'une culture difficile, les seigneurs propriétaires de terres ont, de tous temps, inféodé des por- tions plus ou moins considérables pour des redevances en grains, soit en froment, seigle ou avoine, et c'est le principal revenu d'une partie de ces terres. » Arch. nat., D xxix 29. 320 RENONCIATION DE VASSY A SES DROITS FÉODAUX ordres venus d'en haut, des ordres du roi ». Vassy leur promet un acte d'affranchissement de tous droits seigneuriaux, à condi- tion de garder ses titres et, après quatre heures de discussion, les plaignants, qui paraissent satisfaits, se retirent. Le lende- main, dans la matinée, nouvelle irruption d'une troupe plus nombreuse, composée de trois à quatre cents personnes, armées de fusils, haches et bâtons, menaçant de mettre le feu au château, si le comte ne leur livre pas ses papiers. Je leur remis les clefs, ajoute ce dernier ; ils pillèrent tout, mais voulant avoir chacun ce qui les intéressait, le plus grand nombre ne sachant pas lire et toutes les étiquettes ayant été confondues par eux, ils m'ac- cusèrent alors de les avoir soustraits ; à chaque instant, il en arrivait d'autres, presque tous ivres et armés, tous menaçant de brûler ma maison et de se porter aux dernières extrémités si je ne retrouvais pas leurs papiers, dont ils avaient à mesure brûlé la plus grande partie. » Vassy passa une fort vilaine jour- née et assista, impuissant, au pillage de sa maison, qui dura jusqu'à la nuit tombante. Sa personne fut toutefois respectée et il dut son salut au souvenir des bienfaits qu'il avait répandus dans ce canton, soulevé par la haine de longs siècles de tyrannie féodale l. Il fut d'ailleurs obligé, comme Ségrie, Oilliamson et d'autres seigneurs normands, de renoncer à ses droits, le 25 juillet, par acte notarié, dont lecture publique fut donnée à l'audience de sa haute justice et dont des expéditions furent délivrées, à ses frais, aux cinq paroisses dépendant de la seigneurie '2. C'était une perte de cent mille livres et la menace d'une ruine prochaine^1. Pendant la seconde moitié de juillet et la première quinzaine d'août, la crainte d'une nouvelle Jacquerie terrorise la Basse- Normandie. L'affolement gagne villes et campagnes. Des bruits sinistres y circulent. Une troupe de brigands approche, dit-on, et va tout saccager. L'opinion accueille sans contrôle les nou- 1 Je n'ai peut-être dû la vie, écrit-il, qu'à ce qu'au milieu de leur fureur, rap- pelant aux moins emportés ce que j'avais toujours t'ait pour eux, ils répétaient Oui, nous ne vous ferons pas de mal, car vous avez toujours secouru les pauvres, vous nous avez toujours fait soigner dans nos maladies et jamais vous ne nous avez fait de procès. » Arch. nat., D xxix 29. 2 Ces cinq paroisses étaient Saint-Lambert, La Villette, Saint-Marc-d'Ouilly, Sallen et Saint-Bénin. 3 Lettre du comte de Vassy au président de l'Assemblée nationale, D xxix 29. — A Balleroy, le ebartrier du château fut aussi brûlé sur la place publique. On avait joint au monceau de papiers entassés, tous les titres de droits seigneuriaux qu'on avait trouvés chez le notaire de la localité, Jean Dezert. Bidot, Histoire de Balleroy, p. 295. LA GRANDE PEUR DANS LE BESSIN ET LE GOTENTIN 321 velles les plus fantaisistes et une étrange panique, la peur des brigands, la Grande peur » se déchaîne sur le pays. Nous pouvons en suivre les traces sur les divers points de la généralité de Caen. Le 24 juillet, un habitant de Bayeux, Léonard de Rampan, apporte à Caen la nouvelle que des vagabonds affligent les campagnes et brûlent les chartriers ». On décide d'organiser une troupe de volontaires nationaux pour les combattre et d'inviter les villes de Bayeux et de Saint-Lô à suivre cet exemple, afin de former une chaîne qui puisse servir de barrière à l'insurrection de ces hommes dangereux » lK Le même jour, les nobles du bailliage de Vire, réunis dans cette ville, parlent des alarmes répandues dans le pays par les incursions dont leurs propriétés et leurs personnes sont menacées » 2. Le 26 juillet, le lieutenant général du bailliage de Caen, Duperré de Lisle, écrit à M. de LiancourL Les maux dont nous sommes menacés sont affreux ; des bandits se répandent de toutes parts ; on brûle, on pille et on enlève les papiers dans tous les chartriers ; on arrête et on suspend la perception des dîmes du roi » 3. A Carentan, l'in- quiétude règne du 26 au 30 juillet, Le 26, le corps municipal annonce à la bourgeoisie assemblée sur les remparts qu'il existe dans la province une troupe de bandits qui, profitant des trou- bles et des malheurs des temps, se portent dans les châteaux et autres maisons réputées riches et y commettent les excès les plus terribles ». Le même jour, il reçoit de Dumouriez, qui est à Cherbourg, une lettre sur le même objet On m'a fait entendre, écrit Dumouriez, qu'il y a une troupe de bandits qui rôdent autour de Bayeux. Je vous prie, s'il se présentait une troupe quelconque soit par les Veys, soit par la route de Saint-Lô, de m'en avertir sur le champ et de prendre garde à votre ville. Concertez-vous pour les moyens de votre sûreté avec M. de Versamy et amalgamez votre milice avec la troupe militaire comme cela se fait à Cherbourg et à Valognes. . . Il faut qu'au moins nous assurions la tranquillité de la presqu'île. » Suivant ces conseils, Carentan organise sa milice. Le 27 juillet une com- pagnie va au château de Franquetot et en ramène huit pièces de canon, appartenant au duc de Coigny. Le 29, le corps municipal ! Arch. comm., Caen, Bli 93. Registre des délibérations, séance du 24 juillet. 2 Arch. connu., Vire, ms. Seguin. 3 Lettre de Duperré de Lisle à M. de Liancourt, 26 juillet 1789. Arch. nat.. Ba27, 1. 45. 21 3Î2 LA '-MANDE PEU'R DANS LE BOCAGE ET LA CAMPAGNE DE CAEN confirme ses renseignements précédents, annonce qu'il existe aux environs d'Aunay et dans le canton appelé Bocage une troupe de bandits que quelques-uns font monter à 12 à 1,500 hom- mes, qui attaquent les châteaux, brisent les meubles, brûlent les char tri ers et se portent aux excès les plus terribles », et il prend de sévères mesures pour assurer l'ordre dans la ville l. Le 27 juil- let, sur les dix heures du matin, une fausse alerte se produit à Cherbourg. Le bruit court qu'une troupe de bandits se dirige vers la ville pour la piller. On bat la générale. La milice nationale en armes se porte sur la route de Tourlaville pour guetter l'arrivée de l'ennemi qui, dit-on, doit venir de Valognes. Elle en est quitte pour la peur et, par des nouvelles rassurantes, revient dissiper une alarme sans objet comme sans vraisem- blance » W. A Cairon, village voisin de Caen, les paysans orga- nisent des patrouilles de nuit pour voir si contre toute attente les brigands viendront du Bocage dans la plaine » >>. A Caen, on parle d'attroupements qui se forment dans le voisinage, de gens malintentionnés qui veulent démolir la petite boucherie sise au bourg l'Abbé l. Le directeur de la mine de Littry écrit à la date du 4 août La forêt de Cerisy et les bois des environs sont farcis de brigands auxquels on fait la chasse nuit et jour. Des détaehe- ments de gens armés à cheval, tant de Bayeux que de Balleroy, font des rondes et battent la forêt. » Une semaine plus tard il ajoute Depuis les patrouilles qui se font ici on n'a plus entendu parler des brigands. On n'en a pas encore vu et tant mieux, car nos paysans se fatiguent » i7>. Le péril est imaginaire, tout au moins fort exagéré par la rumeur publique. Le moindre inci- dent a une répercussion intense. Apprend-on à Caen qu'une troupe de séditieux vient de détruire le colombier de la ferme d'Ajon, le 7 août, vite on croit à une nouvelle invasion de bri- gands °. Un homme est arrêté aux landes de Montbrocq, près de Villers-Bocage ; on le trouve armé de pistolets. Il raconte que 1 Arch. eoram., Carentan. Registre des délibérations, séances des 26. 27 et 29 juil- let. A la suite de celle 1 1 1 26, transcription de la lettre de Dumouriez. 2 Arch. connu., Cherbourg, BB5, loi. 152. Registre des délibérations, 27 juillet 1789. Sur cette fausse alarme, voir une lettre de Dumouriez au président de l'Assem- blée nationale, du là octobre 1790. Arch nal., V 4691. 3 Arch. comm., Caen, BB 93. Registre des délibérations, 28 juillet 1789. 4 Ibid., 30 juillet 17». 5 dép., Calvados, Registre non inventorié. Copie île lettres du directeur de la mine de 1786 an II. 6} \rch. connu, Caen, Registre des délibérations, 7 août 1789. l'arrestation du duc de coigny 323 hommes le suivent, prêts à mettre le pays à feu et à sang. La nouvelle se propage, amplifiée par les commentaires; elle arrive à Torigni qui envoie des messagers à la recherche d'informations plus précises et qui, dans la crainte d'un pillage, organise des pa- trouilles et fait allumer la nuit des chandelles à toutes les croi- sées». f1 Un des épisodes les plus dramatiques de la Grande peur» en Basse-Normandie fut l'arrestation du duc de Coigny 2. Le 24 juil- let 1789, pendant que les citoyens de Bayeux procédaient à la formation de leur garde nationale, une étrange nouvelle tomba à l'improviste dans la ville. Des gardes-pêche de Ver venaient d'arrêter deux individus sans passeports, qui demandaient à être embarqués pour les îles anglaises et offraient aux matelots une bourse pleine d'or longue d'une aune ». Inquiétude et défiance immédiates, vive émotion populaire il faut s'assurer de la personne des fugitifs, qui sont de prime abord suspects. Le lieutenant général de l'amirauté, Philippe Delleville, magistrat très populaire à Bayeux, et commandant provisoire de la milice en formation, part en voiture de poste vers la mer. Arrivé à la descente de Pierre-Solain, à deux heures de Bayeux, il rencontre une voiture attelée de quatre chevaux, entourée d'une escorte de paysans armés. Il reconnaît aussitôt les deux voyageurs qu'elle renferme ce sont le duc de Coigny, député de la noblesse de Caen aux Etats généraux, et son secrétaire. Le duc explique sa situation. Parti de Versailles quelques jours auparavant pour régler des affaires personnelles à son château de Franquetot, dans le Cotentin, il a pris le chemin du retour vers l'Assemblée nationale. A son passage par Bayeux, il a été informé des troubles de Caen et des menaces proférées contre sa personne. Désireux d'éviter la traversée de cette ville, il a cru prudent de gagner la côte, de fréter une embarcation qui le mènerait à Honfleur ou au Havre, et lui permettrait de regagner Versailles. Arrêté par des pêcheurs, il demande à être mené chez le maire de Bayeux pour s'y justifier de toute accusation. Delleville use de son autorité de magistrat pour renvoyer l'escorte, en lui promettant de garder les prisonniers. Mais, ] Arch. comm., Torigni, D 36. Registre des délibérations, 6, 12 et 15 août 1789. 2 Sur l'arrestation du duc de Coigny, voir Arch. comm., Bayeux, D 12. Registre des délibérations, 21 juillet 1789 et jours suivants. Ce document a été utilisé succes- sivement par Pezet, Essais sur l 'Administration de la Justice dans le Bessin,p. 184 sqq., et Bayeux à lu fin du XVIIIe siècle, p. 118 sqq., et par Anquetil, Une Page d'Histoire bayeusaine, Philippe Delleville. Bayeux, 1877. 3?4 conséquences de la grande peur convaincu de la sincérité des déclarations du duc et craignant que son arrivée à Bayeux n'y soit le prétexte d'une insurrection, il lui fait reprendre la route de Ver et protège son embarquement. De retour à Bayeux, Delleville devient l'objet des pires soupçons. Les exaltés l'accusent d'avoir favorisé l'émigration d'un prince. Sur le rapport de deux avocats, Duhamel de Vailly et Gandin de Villers, qui lui reprochent d'avoir violé ses engagements et sur les dénonciations d'un domestique de Chouains, il est arrêté et emprisonné. Un Comité général improvisé dans ces circonstances critiques nomme une commission spéciale, qui fait subir au prisonnier de longs interrogatoires. Son procès dure depuis quatre jours. L'émotion populaire croissant, Delleville est menacé d'un vilain parti, lorsqu'arrive dans la riuit du 30 juillet un courrier de cabinet extraordinairement envoyé de Versailles. Necker annonce aux officiers municipaux le retour de Coigny aux Etats généraux et les invite à contribuer efficacement à faire rendre la liberté à Delleville ». De son côté le duc de Coigny expose au maire de Bayeux, dans une lettre attristée, son étonne- ment et ses regrets. J'avoue, dit-il, que je me croyais fort à l'abri que mes démarches, en aucun pays et surtout en Nor- mandie, pussent être suspectes, ne m'étant jamais mêlé d'in- trigues, ni même de tracasseries, faisant le bien quand je l'ai pu ; j'ai toujours vécu, du moins je le croyais, avec une répu- tation intacte. Jugez avec quel chagrin j'ai appris que j'avais compromis aussi cruellement M. Delleville. Il me connaissait bien et savait que, sans avoir l'honneur même d'être député, j'étais incapable d'abandonner mon pays. Il faut être ou cou- pable ou bien faible. Ce n'est pas à cinquante-sept ans qu'on devient ni l'un ni l'autre. . . » Pour calmer l'effervescence populaire, la municipalité lait imprimer et afficher ces lettres. Delleville est mis en liberté. Un arrêté du Comité général proclame son innocence et déclare qu'il a toujours été un citoyen sans reproche. La tranquillité renaît subitement, la défiance fait place à un enthousiasme sans bornes. Les sentiments les plus extrêmes se succèdent dans l'affolement général de tout un peuple. Cette terreur contagieuse, née de périls imaginaires, eut de graves conséquences. Elle rendit le peuple inquiet et soupçonneux. Il serait excessif de dire avec Beugnot que la peur des brigands enfanta le brigandage » *. Elle devait au contraire faire surgir 1 Beugnot, Mémoires, t 1, p. 47?. Kropotkiue me parait avoir mieux compris le RIVALITÉ DE LA COMMISSION INTERMÉDIAIRE ET DE L INTENDANT 325 les mesures d'ordre, les milices citoyennes et les Comités natio- naux. Mais comme elle avait profondément remué les masses, comme elle les avait armées avant toute organisation, comme elle avait entretenu chez elles la défiance et souvent la haine, elle créa un malaise politique et social d'une certaine durée, qui accrut l'anarchie dans le pays. En face de cette anarchie, que pouvait le gouvernement et que pouvait l'administration? Quand l'intendant de Caen reçut l'ordonnance du 9 août sur la prévention et la répression des troubles d\ possédait-il l'autorité nécessaire pour l'exécuter? Il n'avait plus, dans sa généralité, qu'une part restreinte de pouvoir ; l'autre était possédée par la Commission intermédiaire provinciale. Or la rivalité continue de ces deux administrations paralysait leur action respective. Pendant cette période, la Commission intermédiaire, secondée par les bureaux intermédiaires de département, se borna à répar- tir l'impôt et à surveiller les travaux des routes. wSa gestion administrative entravée, comme nous l'avons vu, par de nom- breux obstacles 2, n'eut pas de très heureux résultats. Préoccu- pée surtout de réaliser des économies, acculée à une situation financière plutôt désastreuse, elle contribua indirectement à la misère publique en supprimant des travaux qu'elle considérait comme ruineux. Elle augmenta la classe des indigents sans pou- voir leur donner aucune compensation. Bien que le souci du Bien public » fût au premier rang de ses devoirs, elle sembla négliger la question des approvisionnements. Necker témoigne à l'intendant, le 15 janvier 1789, sa surprise de ce que la Commission intermédiaire ne lui ait pas écrit un mot sur la grande émeute de Caen, du 5 janvier 3. Cordier de Launay, dans sa réponse, lui réitère ses plaintes contre l'indifférence de caractère de ce mouvement lorsqu'il écrit Ce qu'on nomma alors la grande peur o saisi! en effet un bon nombre le villes dans les régionr. de soulèvements. » Les événements de Carentan, de Cherbourg et de Baveux racontés dans ce chapitre viennent donner raison à sa thèse. Mais Kropotkine pousse celle-ci 1res loin quand il affirme que la bourgeoisie, non contente de s'armer pour repousser les brigands, inverto quelquefois ceux-ci pour trouver prétexte à s'armer. Kropotkine, La Grande Révolution, p. 152-153. 1 Ordonnance du roi, enjoignant de prévenir les délits commis par des troupes de brigands répandues dans le royaume, qui s'attachent à tromper les habitants de plusieurs communautés, etc. 9 août 1789. Arch. dép., Calvados, C 2685. 2 Voir ci-dessus, chap. VI, p. 122-129. 3 Lettre de Necker à l'intendant Cordier de Launay. 15 janvier 1789. Arch. dép.. Calvados, C 2665. 326 CONFLIT Al SUJET Dj; LA CORVÉE cette Commission. Il n'y a, dit-il, que le lieutenant de police, les officiers du bailliage et moi qui, agissant de concert, aient pris des mesures relatives à l'approvisionnement de la ville et au rétablissement de l'ordre ». Mêmes récriminations quelques mois plus tard J'ai enfin déterminé, écrit-il à l'intendant Montaran, l'Assemblée provinciale, qui consomme presque tous les fonds ci-devant employés en bienfaisance et en au- mônes, à venir un peu au secours d'une détresse que la nature a développée plus tôt qu'on ne pouvait s'y attendre, mais qui vient en partie dans notre généralité des suites de l'établisse- ment des Assemblées provinciales et de la suppression de la Compagnie des vivres. Le défaut des aumônes, en effet, a coûté la vie cet hiver à des milliers de citoyens ; la suppression de presque tous les travaux publics et le défaut de paiement a des entrepreneurs et par suite de leurs ouvriers produisent partout des essaims d'oisifs et de pauvres. J'en ai cinquante sur les bras depuis cinq mois. Chacun s'épuise. . . La misère tient plus à la désorganisation de l'administration . . . qu'au manque d'espèces » *. L'intendant se décourage. Son activité se dépense vainement en ordres discutés et mal obéis. Son administration est une lutte de tous les instants contre les pouvoirs officiels ou spontanés, qui *o nt surgi auprès du sien. Ses relations avec la Commission intermédiaire sont toujours tendues ; un véritable conflit, qui éclate à propos de la corvée, retarde pendant plus de six mois le recouvrement de cet impôt et aggrave une situation déjà très compromise *; Les rôles de la taxe représentative de la corvée avaient été dressés dans le courant d'octobre 1788 par les assem- blées municipales. L'intendant devait les rendre exécutoires ; il s'appuya, pour ajourner son visa, sur deux arrêts du Parlement et de la Cour des Aides de Rouen. A la demande de la Commis- sion intermédiaire, le roi avait, par ses lettres patentes du 27 jan- vier 1789,£levé l'opposition des deux cours normandes. Ces lettres 1 Arch. dép., Calvados, C 2639. — La Commission intermédiaire, sur laquelle l'intendant rejetait ainsi une partie de la responsabilité, avait cependant distribué, en 1789, 35,000 livres environ en secours aux indigents, sinistres, aveugles, pères de nombreuses familles, etc., comme le prouve le Compte-rendu de sa gestion publié en 1790, p. 87 et 97. 2 Ibid., C 8256. — Cf. F. Mourlot, Rapports d'une Assemblée provinciale et de sa Commission intermédiaire avec l'Intendant, 1787-1790, p. 17-18. Extrait du Bulletin des Sciences économiques et sociales du Comité des Travaux historiques et scientifiques, année 1902. RÉSISTANCE PROLONGÉE UE L INTENDANT 327 furent enregistrées, mais avec des modifications qui permirent à Cordier de Launay de faire de nouvelles objections au sujet du visa des rôles. Par ses démarches personnelles et réitérées, le président de l'Assemblée provinciale de Caen, le duc de Coigny, obtint un arrêt du Conseil le 7 mai 1789, qui, sans tenir compte des modifications insérées par le Parlement et la Cour des Aides de Rouen dans leur arrêt, ordonnait l'exécution immédiate des ordres du 24 janvier. Necker invitait l'intendant à faire mettre au plus tôt en recouvrement les rôles de la corvée. Enfin, écrvit Coigny à la Commission intermédiaire, nous pourrons bientôt faire honnneur aux engagements de l'administration provin- ce ciale ». Il avait compté sans la résistance de Cordier de Launay. Celui-ci exigea la rédaction par la Commission intermédiaire d'un arrêté nouveau qui fût conforme aux dispositions de l'arrêt du 7 mai. La loi qui m'est imposée, écrit-il, émane de la volonté du Roi ; il ne m'appartient pas d'y porter atteinte, ni d'auto- riser de mon chef aucun acte qui y déroge. Il m'est impossible pour cette raison de rendre exécutoires ces rôles. J'ai présenté cette difficulté au ministre et j'attendrai ses ordres. Si sa déci- sion porte que la somme entière mentionnée dans chaque rôle sera acquittée par les contribuables, je citerai son ordre en tête de mon ordonnance, et je ne paraîtrai pas aux yeux des habi- tants de la province le seul agent immédiat d'un surcroît d'im- pôt dont vous leur avez donné l'espoir d'être soulagés ». Sa résistance dura jusqu'au mois d'août, où Necker, revenu au pouvoir, lui donna de façon ferme l'ordre de rendre immédiate- ment exécutoires les rôles de la prestation des chemins. Ce trop long débat, qui avait retardé la levée des deniers nécessaires aux travaux des routes et jeté le plus grand désarroi dans la vie des entrepreneurs et ouvriers employés à ces travaux, s'était en somme terminé à la confusion de l'intendant. De jour en jour, Cordier de Launay se rendait compte davan- tage du peu d'importance que le gouvernement attachait à son concours. Il en avait déjà manifesté sa surprise, non sans amer- tume. Vous conviendrez sans doute, écrivait-il à Montaran, le 18 avril 1789, qu'il est bien singulier qu'un intendant de pro- vince soit le dernier instruit de ce qui intéresse si essentielle- ment les sujets du Roi et qu'il se trouve réduit à apprendre d'un simple négociant quelles ont été les décisions du Conseil sur un objet confié à son administration immédiate et qu'il est de son devoir de surveiller. » Il se plaint de ce qu' on affecte de ne plus avoir de correspondance avec lui... Ce 328 DÉCOURAGEMENT DE L'INTENDANT défaut d'égards est décourageant et fait perdre dans l'esprit public la considération nécessaire pour le bien du Roi » {lK Déjà entamée par la rivalité de la Commission intermédiaire provinciale, l'autorité de l'intendant va souffrir davantage encore des empiétements des pouvoirs révolutionnaires nouvellement surgis. Dumouriez, qui joue un rôle des plus actifs, comme commandant du port de Cherbourg, fait partir trois cents sacs de blé pour Saint-Lô et Isigny et charge de cet envoi le subdé- légué Garantot à l'insu de Cordier de Launay, qui proteste contre de tels ordres '-l A Saint-Lô, un comité d'approvisionnement, établi dans la ville, en juin 1789, par le duc de Beuvron, discute et arrête en toute souveraineté, sans avoir égard aux instructions ministérielles, tout ce qui a trait à la police des grains ?. Cordier de Launay méconnaît ces tentatives d'émancipation locale. Il veut les ignorer, au moment même où il les condamne. On s'isole, on contrevient aux règlements, écrit-il à son subdê- légué de Saint-Lô. . . Je ne sais ce que c'est que le comité dont vous me parlez. Tout ce que je sais, c'est que le pouvoir judi- claire, c'est-à-dire le bailliage et la police qui en fait partie, doivent s'occuper de la police du marché, de la proportion du pain avec le blé et du jugement des coupables ; que le pouvoir '-militaire doit prêter main forte pour l'exécution des règlements et lois et non autrement ; qu'enfin le pouvoir d'administration civile, dont vous êtes membre en qualité de subdélégué, doit agir pour ce qui le concerne. Tous ces pouvoirs se meuvent séparément et ne se concertent que pour concourir au même but. Tout le reste est chaos et incompétence » W. Il est obligé de constater que sa puissance s'affaiblit de jour en jour. Ses subordonnés immédiats, les subdélégués, ne sont plus que des collaborateurs impuissants, découragés. Ils sont, écrit-il dès le 9 avril, sans appointements et n'ont pour l'exercice de leurs fonctions pénibles aucun traitement particulier. On leur a enlevé leur crédit et la considération dont ils jouissaient. . . Ils n'ont ni un homme ni un écu à leur disposition pour envoyer 1 Lettre de l'intendant Cordier de Launay à Monta ran, 18 avril 1789. Arch. dép., Calvados, C 2639. 2 Lettre du même à Garanlot, 22 juin 1789. Ibid., C 2679. . 1 Arch. dép., Calvados, C 2639. 2 Lettre de Robillard, 11 mai 1789. ïbid., C 2675. 3 Lettre de Launay à son secrétaire, 22 août 1789. -Arch. dép., Calvados, C 2610. Il lui envoie la circulaire que celui-ci doit adresser aux subdélégués pour demander les renseignements d'usage sur le produit des récoltes. Il ajoute en post- scriptum à la lettre destinée au subdélégué de Coutances M. Duparc m'ayanl l'ait la remise de sa commission, vous voudrez bien vous occuper des détails relatifs aux paroisses de sa subdélégation. Couraye avait démissionné le 10 août. 4 Arch. comrn., Granville, Registre des délibérations de l'hôtel de ville, séance du 10 août 1789. 5 Lettre de Necker à Launay, 14 janvier 1789. Arch. dép., Calvados. C 2665. 6 Lettre de Garantot à Lamy- Desvallées. 30 octobre 1789. Ibid., C 2679. 7 Cordier de Launay, écrivant, de Versailles le 2 août 1789 au Comité national de 330 l'anarchie Le secrétaire de L'intendance dirige les bureaux et expédie les affaires courantes, en attendant l'heure prochaine de la liqui- dation tt. La desorganisation administrative est complète et le lieutenant général du bailliage de Caen peut écrire Chaque jour est témoin d'actes de violence multipliés. La force a pris la place de la loi. Le pouvoir exécutif est sans activité et le pouvoir judiciaire ne peut s'exercer. Daigne l'Assemblée nationale mettre fin à une anarchie qui tend à bouleverser tout le royaume » 3. Tous les a citoyens honnêtes, de quelque ordre que ce soit, ajoutait-il, se réunissent pour conjurer l'Assemblée de s'occuper sans délai, de concert avec le Roi, des moyens de rétablir l'ordre et la tran- quillité. » Pour réaliser ce vœu il fallait permettre à tous les députés de prendre une part effective aux séances de l' Assemblée. Or les députés nobles des deux bailliages de Caen et de Cotentin, liés par leurs mandats impératifs, avaient dû se tenir à l'écart des délibérations importantes. Une telle abstention ne pouvait qu'aggraver le malentendu entre les paysans et la noblesse, et augmenter les suspicions contre celle-ci. Effrayés par la Jacquerie naissante, les gentilshommes du bailliage de Caen résolurent de se rassembler pour prendre une délibération convenable aux circonstances et faire accorder à leurs députés des pouvoirs généraux et sans limitation ». La réunion, fixée au 25 juillet, ne put avoir lieu à cause des troubles qui agitaient Caen à cette époque 3. Mais le duc de Coigny, pendant le court voyage de Normandie qui s'était terminé par l'incident dramatique de Bayeux, avait pu voir nombre de ses commettants. Ils lui expri- mèrent leur intention de voir annuler tout pouvoir impératif et Caen, annonce que Necker . Le duc de Coigny put déclarer le 27 juillet à l'Assemblée nationale que les députés nobles de Caen étaient autorisés à concourir au bien qu'elle opérerait, qu'ils prenaient donc voix délibérative et adhéraient à tout ce qui pouvait avoir été fait en leur absence » 2. La noblesse du Cotentin, poussée par les mêmes mobiles, s'était réunie à Coutances autour d'Achard de Bonvouloir. La majorité, désireuse du bien général, consentit sans aucune restric- tion à l'égalité des impôts sans distinction d'ordres \t->. Le Comité de Granville naquit d'une situation des plus trou- blées. Couraye-Duparc, que ses triples fonctions de subdélégué, de vicomte et de maire par brevet royal prédisposaient à l'impo- pularité, avait été chargé par l'administration de la vente de sacs de blé destinés à l'approvisionnement de Granville. Un envoi de 575 sacs, pris sur cette masse, à la municipalité de Saint-Servan, le fit accuser de malversations. Un mécontent, Quinette de Cloizel, le dénonça dans les cabarets et au bas de Mauduit, ancien maire de Vire et conseiller au bailliage, à l'intendant. 9 sep- tembre; 1789, Arch. dép., Calvados, C 2688. I Arcb. comm., Tinchebrai. Registre les délibérations, 30 juillet 1789. i-2 Ihid., Torigni, D 36. Registre des arrêtés et des délibérations du Comité natio- nal de Torigni, 4 août 1789. — Dans une délibération de décembre 1789, il est l'ait mention de la lecture des délibérations constitutionnelles en comité des mois de juillet et août derniers ». 3 Arch. comm., Périers, Registre des délibérations, 23 août 1789. — Cf. Lerosay, Histoire de Périers, p. 109-110. LE COMITÉ DE GRANVILLE 339 peuple » euninie un accapareur de grains qu'il serait bon de pendre ». On accusa aussi Couraye-Duparc de tramer un complot avec le commandant de la place pour le massacre des habitants. Dans la nuit du 1er août, un placard incendiaire fut affiché à sa porte. Le lendemain, deux citoyens déposent une pétition des notables demandant la réunion d'une assemblée générale des habitants, afin d'aviser à la sûreté publique. Cette assemblée se tient le soir même, à 5 heures, dans l'auditoire de la ville. Qui- nette y dénonce les fréquentes absences du maire, l'infirmité d'un officier municipal, et demande l'adjonction de quatre conseillers au corps municipal, avec droit de participation aux séances et aux délibérations. Sa motion est repoussée *;. Quelques jours plus tard, le 6 août, éclate une émeute amenée par la cherté du pain. La foule va briser les vitres d'un apothicaire. La muni- cipalité est obligée d'abaisser la taxe du pain et de voter une indemnité aux boulangers. Le commandant du roi à Granville, de Préfort, s'est rendu suspect par ses tendances aristocrates. Ses vexations et ses abus de pouvoir le désignent à la vindicte publique ; on lui reproche surtout de se prêter avec indifférence à la défense de la ville. Le Conseil général de la commune arrête sa déchéance le 10 août et lui redemande les clefs de Granville. Saisi de crainte, Préfort les abandonne et demande un passe- port. Le jour même où le départ du commandant rompt les liens d'obéissance qui attachaient Granville au représentant militaire du pouvoir central, Couraye-Duparc donne au Conseil général sa démission de subdélégué il cesse d'être un agent du roi pour rester maire de Granville et se consacrer tout entier au service de ses concitoyens. Le lendemain 11 août, dans une nouvelle séance du Conseil général, il expose la gravité de la situation. Dans presque toutes les villes, ajoute-t-il, la liberté des citoyens et la sûreté publique sont remises- aux soins des habitants par les officiers qu'ils se sont choisis, et qu'ils ont formés en Comité national ; il pourrait y avoir lieu d'en établir un à Granville, afin d'assurer l'activité du service public. Le Conseil général décide la formation d'un Comité de vingt-cinq membres et procède à sa constitution immédiate. Il comprend en premier lieu les cinq membres du Conseil municipal, député-né du Comité national ». I Arch. coinm., Granville, Registre des délibérations, 2 août 178'J. Cf. une lettre de Couraye-Duparc à l'Assemblée nationale, du 7 septembre 1789. Ou fiL. écrit Duparc, la motion de donner des conseillers au conseil municipal. » Arch. nat., D xxix 40. 340 LES COMITÉS DEHANCHES ET DE MORTAIN Restent vingt membres à nommer ; l'assemblée en désigne {lia Ire par acclamation, le chevalier de Léglize, commandant de la garnison, de Massely, chef des classes, Manduit, commis- saire aux classes de la marine, de Belprey, chef du corps royal du génie, et élit les seize autres au scrutin. Le nouveau Comité est spécialement investi de l'autorité nécessaie pour assurer la liberté des citoyens, la sûreté et la tranquillité publiques fl. A Avranches, le Comité général et national met trois jours à se constituer, du 22 au 25 août 1789. Les neuf compagnies de volontaires Avranchins, assemblées au bois des Capucins, nom- ment quarante-cinq électeurs, six par compagnie, qui le 24 août désignent les vingt-cinq membres du Comité. On y relève les noms des principaux notables Tesnière de Brémesnil, Bacilly, maire, lieutenant général du bailliage, Payen de Chavoy, Vivien, membres du bureau intermédiaire de département, Blondel, procureur-syndic. Ces vingt-cinq députés élisent Brémesnil comme président et se divisent en six bureaux de quatre mem- bres. Le Comité national d'Avranches se déclare en permanence, s'adjoint le commandant et le major de la milice nationale. Il se donne pour mission de correspondre avec les députés aux Etats généraux, de veiller à la sécurité publique, aux subsistances ; il prétend au droit de réquisition sur tous les dépositaires de la puissance judiciaire 2l Même révolution municipale à Mortain, qui, formée de trois communautés séparées, avait trois municipalités en vertu de l'édit de 1787, et qui y substitua une municipalité unique, véri- table Comité national, en arrêtant les bases d'une administration nouvelle 3. A Coutances, Saint-Lô, Valognes, mêmes formations sponta- nées que nous pouvons constater malgré les lacunes de l'histoire municipale 4J. Des villes de moindre importance, comme Condé- 1 Arch. comm., Granville, Registre des délibérations, 10 et 11 août 1789. 2 Jhi41 sur-Noireau l , Isigny 2, Sain t-Sauveur-le- Vicomte I3, Saint- Sauveur-Lendelin 4, des bourgs comme Villedieu 5, Monte- bourg es membres, le citoyen de la Rue, ancien premier capi- taine de la garde nationale. 18 frimaire an XI Bibl. nat.. nouv. acq. fr. ms. 4401 ; de la Rue raconte le rôle qu'il joua dans l'affaire Belzunce ; — 3° Les journaux de l'époque Le Journal des Révolutions de Paris. n° du 22 août ; Le Moniteur, année 1789, n° 30 ; Le Mercure de France, n0' des 22 août et 12 septembre 1789. — Voir aussi Dumouriez. Mémoires, éd. Berville. t. II, p. 52-51; Chateaubriand, Mémoires d outre- tombe éd. Biréi, t. II, p. 17 F. Vaultier. Souvenirs de l'Insurrection normande. Appendice, p. 299-303 ; et E. de Beaurepaire. L'Assassinat du major de Belzunce. Revue de la Révo- lution. 1884, I. III, p. 109-129, et t. IV. p. 26-17. 1 Sur cite fête du 29 juin 1789 et les inscriptions qui ornaient la pyramide, voir d'intéressants détails dans le ms, de Dufour, Mémoires el Remarques, I. I, p. 30. l'émeute du 11 août 1789 345 allant jusqu'à tirer sur un citoyen un coup de pistolet dont heu- reusement l'amorce ne partit pas. Cette aventure lui avait valu plusieurs jours d'arrêt et le redoublement de la haine publique. Il ne pouvait souffrir que la garde nationale se fût emparée du château et se vantait de le reprendre bientôt. Des bruits étranges couraient sur ses projets son insistance à coucher à la caserne depuis plusieurs nuits, le sens énigmatique d'un serment qu'il avait fait prêter à ses troupes, le rassemblement présumé de cartouches et de munitions de guerre, tout le rendait suspect au peuple l. De telles imprudences avaient déterminé le Comité national à solliciter du duc d'Harcourt l'éloignement deBelzunce ; il refusa de partir. Le moindre incident pouvait déchaîner l'é- meute. Le 11 août, deux soldats du régiment d'Artois, se trouvant de passage à Caen, s'attablaient au cabaret avec deux soldats du régiment de Bourbon. Ils portaient à la boutonnière une mé- daille à l'effigie de Necker dont la municipalité de Rennes les avait décorés. Une rixe éclata bientôt, leurs décorations furent arrachées. Ils allèrent se plaindre au Comité général, qui en référa au duc d'Harcourt. On leur rendit leurs médailles et leurs agres- seurs furent punis. L'affaire paraissait réglée. Il était une heure de l'après-midi. Sur les trois heures, un autre soldat du régiment d'Artois, caché à Vaucelles, se plaint d'avoir été menacé et maltraité par le major du régiment de Bourbon. La fermentation augmente. La foule s'assemble rue Saint-Jean et place Saint-Pierre ; elle demande à grands cris le départ deBelzunce. A dix heures du soir, un coup de fusil donne le signal de l'émeute. Une sentinelle de la garde bourgeoise l'a tiré au pont de Vaucelles sur un officier du régiment de Bourbon qui s'obstine à passer malgré la consigne et qui joint les menaces à la résistance. Cet officier est tué. Le tocsin sonne aussitôt, l'alarme se répand. Le peuple court à la citadelle, y enlève de force des armes, des munitions, en déloge les canons. Il envahit la salle du Comité 1 Peu après la mort de Belzunce, parut un libelle intitulé Les nouveaux pro jets de la cabale dévoilés, ou Lettre du prince de Lambesc au marquis de Belzunce. interceptée trois jours après la mort de ce dernier, pièce imprimée, in-16, 15 p., de l'imprimerie de la municipalité de Caen, Bibl. nat., Lb 39 2280. Cette lettre, censée écrite de Vienne le 30 juillet par Lambesc, mettait Belzunce au courant des efforts des alliés pour envahir la France et chauffer les culottes aux impudents qui les ont contraints de reculer ». L'origine de ce document, surpris au chef d'une troupe ambulante de chanteurs étrangers », me paraît très suspecte. o46 LE MEURTRE DE BELZUNCE national, alors en séance de nuit. Bientôt arrive Belzunce qu'on vient d'arrêter aux casernes, et qu'escorte un détachement de la garde nationale. On le met en accusation pins de cent voix le somment de mettre bas ses armes. 11 tombe sur une chaise, la tête clans les deux mains, comme un homme affaissé de fatigue ». Dans le vestibule, dans la cour de l'hôtel de ville, au dehors le peuple impatient gronde il veut briser portes et fenê- tres, envahir la salle des séances, arracher Belzunce au Comité qu'il accuse de trahison. La résistance vigoureuse des volon- taires nationaux l'écarté et la refoule sur la place Saint-Pierre. Le Comité décide que Belzunce, gardé comme otage, sera conduit au château sous bonne escorte ; il arrête aussi le départ du régi- ment de Bourbon, par trop impopulaire. Le matin du 12 août celui-ci quitte la ville, ne laissant aux casernes de Vaucelles que les deux soldats enfermés pour l'affaire des médailles. Une bande de furieux les en arrache pour les amener au château, où on les confronte avec Belzunce l. On s'empare de sa personne, malgré la résistance de la garde 2>, on le traîne jusqu'à la place Saint-Pierre. Il y est bientôt massacré par une foule en délire, qui le lapide à coups de crosse de fusils et tire à bout portant de nombreuses balles, dont plusieurs blessent les spectateurs. Ses assassins s'acharnent sur son cadavre et déchargent sur celui-ci plus de cent cinquante coups de fusil. Sa tête est séparée du tronc et promenée en triomphe au bout d'une pique ** ; on le mutile et on se dispute ses dépouilles sanglantes {]\ 1 Belzunce Hait accusé par la rumeur publique d'avoir donné l'ordre à ses sol- dats d'arracher ces médailles. 2 Dans son rapport du 12 août, Etienne, commandant du poste, déclare qu'il n'a cédé que devant la force et sous la menace de la foule armée qui voulait massacrer la garde entière au cas de plus longue résistance. 3 Mon bataillon, écrit Renée, arrivait dans ce moment-là même sur la place Saint-Pierre. Il me semble voir encore les pieds et les mains de M. de Belzunce pro- menés au bout des baïonnettes de fusils, surtout cette belle et jeune tète, aux che- veux poudrés, dont les traits conservaient encore, malgré la mort, un air de noblesse et de fierté. » Pour préciser ses souvenirs, il ajoute J'ai vu, de mes deux yeux vu, le cœur de M. de Belzunce entre les mains d'un jeune homme de 18 ans environ, nommé D..., plâtrier de son état. Ce jeune homme, d'un teint blême, les cheveux et les sourcils d'un blond filasse, était en chemise, la tête et le cou nus ; il avait les bras retroussés, ensanglantés jusqu'au coude, et faisait sauter le cœur dans ses mains comme une balle, avec une joie féroce. » Mes Souvenirs, p. 8 et 9. 4 Arch. comm., Caen, BB 93. Registre des délibérations, 12 août 1789. — On lit dans les Mémoires d'Oulre-tombe, de Chateaubriand, t. II, p. 17 A Caen, on se rassasia de massacres et l'on mangea le cœur de M. de Belzunce. » On a prétendu que 'tic accusation était fausse. Il est certain que des atrocités sans nom furent commises sur le cadavre de Belzunce. Une sage-femme de Caen, Joséphine Sosson, DEMISSION DU COMITE DE CAEN 347 Le crime est consommé sans que le Comité national, trop tardivement informé, ait pu s'opposer à son exécution. Consterné, il rend l'arrêté suivant Considérant que l'attentat porté à la vie de M. de Belzunce est une violation de la sûreté publique, sous laquelle il avait été confié à la garde du poste du château, qu'un pareil attentat est aux yeux de tous les citoyens un acte de férocité qui emporte l'exécration publique envers tous ceux qui en seraient coupables, a arrêté de faire faire les informations qui seront à sa disposition sur tous les faits qui ont précédé, accompagné et suivi cette fatale journée » M. Cette protestation, la seule que les circonstances permet- taient au Comité d'élever contre un pareil forfait, fut suivie le lendemain par la démission de tous ses membres. Abandonnant volontiers toute espèce d'autorité qu'on leur avait confiée », ceux-ci laissaient les citoyens libres de procéder à une nouvelle nomination et se bornaient à faire des vœux pour l'union, le calme et la tranquillité publique ». Un nouveau Comité, élu le 14 août par les députés des paroisses *, nomma Chatry-Lafosse l'aîné comme président et Costy comme vice-président ; il com- prit, outre les officiers municipaux, 24 députés choisis par les paroisses. Le 15 août, il adopta un règlement de police intérieure en 22 articles, qui dictait les précautions les plus minutieuses pour assurer le calme des séances, le bon ordre et la tranquillité des discussions. Le Comité du 14 août ne vécut pas deux mois le 6 octobre, Chatry-Lafosse démissionnait ; on décida de soumettre la prési- dence et la vice-présidence à une élection bimensuelle. On se lassait de voir constamment les mêmes personnes au pouvoir l'inquiétude publique exigeait de fréquentes consultations élec- mit en bocal un débris pantelant, de ce cadavre. Un maçon ivre, Hébert, de Maltot, découpa un quarteron » de chair sur la cuisse du malheureux officier, le lit griller et le mangea dans une auberge de la rue de Baveux en buvant une chopine de cidre. — Ces faits sont racontés tout au long dans un dossier de procédure contenant 23 pièces, alors adressées au garde des sceaux et conservées aujourd'hui dans le fonds du Comité des recherches, aux Arch. nat, D \xixbis 4, — Le jardinier caennais Dufour ajoute un détail horrible à cette série déjà longue d'atrocités On lui a coupé la tête, écrit-il, et on a promené sa tète par toute la ville au bout d'une fourche. Quand ils ont été à Vaucelles, on l'a fait entrer chez un perruquier pour la faire friser et arranger proprement. » Dufour, Mémoires et Remarques, t. I, p. 36. 1 Arch. comm., Caen BB93, fol. 72-73. Begistre des délibérations, 12 août 1789.— Cf. ms. Pépin. Bibl. nat. nouv. acq. françaises, 4401. 2 Les 180 députés élus par les 12 paroisses de Caen 15 par paroisse n'avaient pu se réunir le 13 août à l'hôtel de ville, à cause du tumulte de la place Saint- Pierre. 348 INSTABILITÉ DES COMITÉS PERMANENTS fondes. D'autre pari, les membres des Comités et des bureaux trouvaient trop lourdes les obligations qu'entraînait la perma- nence de ceux-ci ; les uns s'absentaient de Caen, d'autres s'ac- quittaient négligemment de leurs fonctions. Le bureau des subsistances, un instant déserté, faillit suspendre ses séances. Le 12 octobre, le Comité national donna sa démission collective. Il y eut de nouvelles élections le lendemain et d'autres encore le 3 novembre". Dans un espace de temps très court, l'autorité s'était quatre fois déplacée. N'était-il pas fatal qu'à chacune de ses transmissions elle perdît de sa force et qu'on la vît fondre, pour ainsi dire, entre les mains des électeurs ? i2. Dans les autres villes de la généralité de Caen, mêmes fluctua- tions de la vie municipale. A Carentan, après la démission du Comité, de nouvelles élections ont lieu le 13 septembre 1789 »3. A Tinchebrai, le Comité du 19 juillet, discuté par plusieurs mécontents et réélu une première fois le 11 août, décide sa sup- pression le 27 septembre ; le lendemain, l'assemblée des habitants rétablit une municipalité de neuf membres un maire et huit échevins et y fait entrer les neuf démissionnaires 4. A Périers, où le nombre trop élevé des députés menace de rendre les délibé- rations tumultueuses, le Comité est réduit de 30 à 16 membres 5. 1 Aux élections du 13 octobre, Duclos le Goupil l'ut président du Comité, et Pil- le!, le jeune, vice-président; quinze jours plus tard, le 28 octobre, Signard d 'Ouf fi ères succéda au premier et Bougon-Longrais au second ; au renouvellement général du Comité du .'î novembre, de la Rue fut élu président ; sur son refus, la présidence fut donnée à l'abbé de Jumilly qui la conserva jusqu'en février 1790. Arcb. comm., Caen BB93, Registre des délibérations. 2 Le 13 octobre 1789, Duperré de Lisle écrivait au président de l'Assemblée natio- nale Un nouveau Comité qui a élé ordonné pour Caen a pensé à se former... Ce Comité est sans force. » Arch. nat., D xxix 29. — Dans une brochure spirituelle et mordante, publiée sous le voile de l'anonyme par un royaliste militant, Midy, l'au- torité du Comité caennais est bafouée en ces termes Tu sais ce qu'on entend par ce mot Comité » ? C'est un las de gens pris de tous côtés, qui se sont assemblés je ne r-ais comment, qui jugent je ne sais quoi, et qu'on obéit je ne sais quand. Le plus comique des Comités est bien celui de Gêna [Caen]. Ce Comité est une girouette donl nous sommes les vents. » Lettre de l'honorable .Jean Rablu. maître croebeteur et, caporal-major de la milice de Céna, à l'honorable Pierre Tulxeuf, garçon bouclier de Poissy. 17», in-8°. 3 \rch. comm., Carentan. Registre des délibérations, 13 septembre 1789. L'élec- tion des 28 membres eut lieu sur les remparts. 1 Hii'l.. Tinchebrai, Registre des délibérations, séances des 11, 12. 14 aoiU, 27 et 28 septembre 1789. Le 14 août, condamnation de trois perturbateurs du repos des citoyens, qui les excitent au renversement du Comité l'un d'eux, de la Filanchère, est expulsé de la ville. 5 Ibid., Périers, Registre des délibérations. 8 novembre 17S9 élection dans l'église de la ville. Lecaudey de Manneval resta président. DISSENSIONS A CHERBOURG 349 A Avranches, où il se renouvelle par tiers chaque mois, les élec- tions d'octobre en ouvrent l'accès aux ecclésiastiques qui en étaient jusqu'alors exclus M. Cherbourg ne fut pas exempt des agitations intérieures que provoquait l'état anarchique du royaume. Le corps municipal et national » de cette ville, organisé au lendemain de l'émeute du 21 juillet, ne tarda pas à voir battre en brèche son autorité. Dans sa séance du 4 septembre, il se plaignait des réclamations particulières de plusieurs habitants, trop répétées et trop nom- breuses pour ne pas blesser sa délicatesse et exciter î^es inquié- tudes » - . On lui reprochait d'être inconstitutionnel » et de n'avoir ni le crédit ni la confiance nécessaires pour conduire efficacement les affaires de la ville ». On faisait grief au maire et aux deux échevins d'avoir été maintenus dans leurs charges par l'autorité de l'intendant, contre le vœu général et la réclama lion légale de la ville, qui avait autrefois acheté ces charges munici- pales pour s'assurer de libres élections triennales. La nomination de ces magistrats par arrêt du Conseil était qualifiée d'abusive et d'illégale, contraire a la liberté des suffrages ». L'incorporation des électeurs que le corps municipal s'était adjoints par mesure de prudence n'avait pas désarmé l'opposition. Ces derniers n'avaient été désignés qu'en vue d'un objet spécial, l'élection des députés aux Etats généraux ; leur mandat était expiré et on leur niait toute compétence aux fonctions administratives. L'élection du chevalier de Gassé comme maire en comité secret, bien qu'elle fût provisoire, avait soulevé de nombreuses cri- tiques CI'. En présence de la fermentation régnante, le corps municipal résolut de se soumettre cà une consultation générale la question de sa légitimité. Il convoqua pour le 26 septembre une assemblée des députés de tous les corps et corporations. Du 7 au 25 septembre, chaque jour fut marqué par la réunion particulière de l'un ou l'autre de ces groupements 4'. Si la no- blesse, les diverses juridictions, bailliage, amirauté, traites foraines et quart bouillon, si l'ancienne milice bourgeoise convo- 1 Arch. conim., Avranches. Registre des délibérations, 24 octobre 1789. 2 Ibid., Cherbourg, BB 5. Registre des délibérations, 4 septembre 1789. 3 Mémoire sur la reconstitution du corps municipal de Cherbourg, imprimé, 10 p. s. d. n. 1.. Bibl. co-mm., Cherbourg. 4 Arch. comm., Cherbourg, AA 43. Délibérations des communautés, corps et cor- porations de la ville de Cherbourg, pour la nomination de députés chargés de déli- bérer sur le projet de règlement concernant la municipalité 34 délibérations, éche- lonnées du 7 au 2r> septembre L789. 350 RÉORGANISATION DU COMITÉ DE CHERBOURG juée pour la 'dernière fois, si les avocats, les greffiers, les notaires royaux, les herbageurs se prononcèrent pour la continuation pure et simple de la municipalité en attendant le règlement municipal promis par l'Assemblée nationale ; si le clergé et quelques corporations, manufacturiers en laines, apothicaires, chapeliers, tonneliers, aubergistes, maçons consentirent au main- tien du statu quo, avec l'adjonction de six ou douze membres élus, la plus grande partie des corporations se déclara pour la reconstitution, pour la régénération immédiate du corps muni- cipal et national. Aussi l'assemblée générale des 26 et 27 sep- tembre, où se produisirent plusieurs motions nettement révolu- tionnaires, se montra-t-elle absolument favorable à une organi- sation nouvelle de la municipalité et à la nomination de nou- veaux membres. Elle déclara par 41 voix contre une que le règle- ment de 1778 n'avait plus d'objet, que les circonstances actuelles nécessitaient quelques changements relatifs à la liberté indivi- duelle, spécialement en ce que la nomination des officiers devait être faite par tous les députés qui composaient la commune » *>. Six commissaires élus pour rédiger un projet de règlement le firent adopter à une nouvelle assemblée générale, tenue le 6 octo- bre. L'administration de Cherbourg fut confiée à un Comité national permanent placé sous le contrôle d'un corps municipal de 20 membres. Ce dernier, qui comprenait un maire, quatre échevins, un procureur-syndic, un greffier et quatorze notables renouvelés chaque dimanche dans l'ordre du tableau, siégeait tous les jours pour la gestion des affaires courantes. Pour certains actes de la vie publique, comme l'élection des officiers supérieurs de la milice, les députés des corporations devaient être appelés à l'assemblée générale. Ce régime nouveau, basé sur l'élection et qui intéressait un plus grand nombre de citoyens à l'administra- tion municipale, devait durer jusqu'en février 1790. Une assez grande variété existait, on le voit, dans l'organi- sation intérieure des Comités locaux le mode de leur recrutement put différer d'une ville à l'autre ; l'exercice de leur mandat ne fut point partout d'égale durée. Et cependant tous eurent un air de ressemblance et comme de parenté dû à la communauté de leur origine, à l'identité absolue des besoins qui leur donnèrent naissance, de la mission qu'ils s'imposèrent et des attributions qu'ils se conférèrent. Ce furent partout des Comités d'approvi- sionnement et de défense. 1 Àrcb. comm., Cherbourg, BB 5. Registre des délibérations, 26 et 27 sept. 1789. LES COMITÉS ET L'APPROVISIONNEMENT DES VILLES o51 En première ligne des Comités d'approvisionnement. C'est leur raison d'être originelle. Ils sont nés presque partout de la néces- sité de procurer du pain à bon marché aux habitants des villes. Leurs actes de fondation l'indiquent en termes exprès. L'orga- nisation même de leurs bureaux en est une preuve manifeste. A Caen, le premier bureau s'intitule bureau des subsistances ; il est chargé de ce qui concerne les boulangers, des distributions de grains et de farines, de la fixation du prix du pain, de la recherche des magasins et dépôts de blé pour en connaître la contenance ». Il a aussi pour mission d'expédier les permis et congés aux armes de la ville pour le transport au moulin des blés des boulangers destinés à rentrer en farine, et de surveiller les cinq bacs d'Athis, de Colombelles, de Fontenay, du Pont, du Coudray et les autres passages suspects ». Bayeux, Avranches Vire possèdent des bureaux investis d'attributions analogues. On voit le Comité de Caen présider aux achats et aux ventes de farines, prendre des arrangements avec les boulangers, fixer la taxe du pain et de la viande 0. Le 23 juillet, il arrête la fabri- cation du pain à 2 sols 6 deniers la livre pour les pauvres. Le 24 juillet, il fait vérifier les farines chez les boulangers ; le 28, il interdit la sortie de 800 sacs de seigle qui sont dans les magasins de Caen et que des blatiers voudraient emporter à la campagne. Préoccupé avant tout d'éviter des émeutes, il ne songe qu'à l'alimentation de la population urbaine. Il se montre dur à l'égard des voisins. Ses défenses d'exportation des grains se renouvellent le 6 et le 25 août, le 17 octobre, le 25 octobre. Au lieu de fournir des grains aux paysans, il leur en demande à maintes reprises. Il permet aux volontaires de la milice des perquisitions chez les fermiers et les propriétaires à Tilly-la- Campagne, à Saint-Aignan, à Bellengreville, à Cagny ; il ordonne à ces fermiers d'apporter leurs grains à la halle s, Il n'agit pas en tout ceci autrement que l'intendant, Comme lui 1 L'étude des mesures d'approvisionnement prises par le Comité permanent de Caen, a été faite d'après le registre des délibérations BB 93, conservé aux Arch. comm. de cette ville. 2 Lelièvre, fermier de Cagny, est condamné à un mois de prison pour résistance aux ordres du Comité, et malgré l'intervention de Ménage de Cagny, maire de Caen, dont il est le fermier, 27 août 1789. Arch. comm., Caen, Begistre des délibérations, BB93. 3 J'ai retrouvé deux pièces relatives au fonctionnement du bureau des subsis- tances du Comité de Caen 1° Tableau des Halles de Caen le lundi 10 août 17X9, placard imprimé arrêté au bureau des subsistances; 2° Procès des apprécies a la Halle de Caen, du 20 novembre 1789. Arch. comm., Caen ancien carton 9. 352 MESURES D'APPROVISIONNEMENT A CAEN encore, il demande directement des secours en nature au ministre. Le 18 août, peu de jours après le massacre de Belzunce, il réclame avec insistance sacs de blé et Necker effrayé les lui accorde. Le 4 octobre il députe à Versailles deux de ses membres, Saffrey et Charfier, pour obtenir de nouveaux secours. Il surveille rigoureusement les boulangers, les marchands de grains, les amidonniers et réprime avec sévérité les moindres infractions. Pour avoir refusé de cuire du pain, un boulanger est condamné, le 26 août, à huit jours de prison ; un autre, à 12 livres d'amende pour avoir vendu du pain à 36 sols la tourte de 12 livres au lieu de 30 sols. Il réprimande par voie d'ordonnance les boulangers qui ont cessé leur métier si utile à l'humanité pour cuire galettes de pain au lait, torquettes et brioches à l'usage des riches » et leur enjoint de fabriquer du pain sous peine de 50 livres d'amende et d'emprisonnement. Un marchand amidonnier de Caen, Bel- lissent, a commis aux yeux du Comité le crime d'employer à la fabrication de son amidon du blé et d'autres grains propres à faire du pain ; avec les résidus de ces grains, il engraisse quatorze porcs. Par arrêté du 3 août, le Comité le condamne à 600 livres d'amende et à un mois de prison l'amidon de ses magasins, ses quatorze porcs sont vendus et le produit de la vente est versé aux pauvres. Deux jours plus tard, on nomme des commissaires pour surveiller la fabrication des amidons. Le bureau des subsis- tances prépare le projet d'une boulangerie nationale, qui compte- rait trois dépôts à Caen et qui vendrait à prix fixe toute l'année le pain bis à 2 sols 6 deniers la livre, le pain mélangé d'orge et de seigle à 2 sols seulement ih. Les Comités nationaux permanents des autres villes de Basse- Normandie veillent avec autant de soin que celui de Caen à l'approvisionnement des citoyens. A Avranches, pour décharger les membres du Comité national d'un service très lourd, un comité spécial des subsistances se forme à l'instigation du lieute- nant général de police Bacilly ; il a pour mission de veiller au prix des divers comestibles, surtout au prix du pain et de la viande, et de surveiller la fraude commise par les bouchers de 1 Arch. comm., Caen, Registre des délibérations, passim. A Saint-Lô, c'est le bailliage qui, sur la dénonciation du Comité, condamne à G00 livres d'amende un amidonneur, de Çmibou, accusé de convertir chaque année; plus de 5,000 boisseaux de blé en amidon. Mais le Comité, prenant en main les intérêts de la ville, qui doit recueillir les deux tiers de l'amende au profit de ses pauvres, adresse une re-juête à l'Assemblée nationale pour obtenir que toute liberté soit laissée aux juges des con- traventions de grains. Arch. nat.. D xxix 29. MESURES D'APPROVISIONNEMENT A CHERBOURG 353 campagne qui apportent leurs viandes en ville sans acquitter les droits » {>. Le Comité de Cherbourg, à peine formé, met au premier rang de ses préoccupations la question des subsistances de cette ville 2, L'ancienne municipalité, d'ailleurs, en avait eu un égal souci. Lors de l'émeute du 21 juillet, elle avait ouvert au peuple les magasins à blé de l'Etat, établi un bureau des pauvres qui fournissait à chaque indigent un bon d'une livre et demie de pain par jour et promis aux boulangers, qui délivraient ce pain à un prix très réduit, de leur rembourser leurs pertes rA>. Elle avait pris une série de mesures relatives à l'approvisionnement des halles, envoyé par deux fois un député au Havre pour y acheter du blé et, à défaut de celui-ci, une cargaison de boisseaux d'orge à 4 livres le boisseau, revendus à 3 livres *. Après sa réor- ganisation, elle redouble d'activité. Les décrets » et les mani- festes » du Comité permanent se succèdent assez nombreux et accusent ses efforts incessants pour déconcerter dans les marchés de la ville, par une surveillance active, toutes les manœuvres illicites, frauduleuses, ou propres à exciter l'inquiétude du peu- ple » 5. Il interdit aux paysans d'accrocher au passage les blés destinés à l'approvisionnement de Cherbourg, et par contre autorise les perquisitions dans les campagnes. Il fait fouiller les greniers du meunier de Sideville, soupçonné de tenir un dépôt clandestin de grains fi ; il ordonne l'arrestation de ceux qui en font un transport frauduleux 7. Il essaie surtout d'empêcher le commerce criminel », qui, faisant passer les blés du Cotentin dans les îles anglaises voisines d'Aurigny, Guernesey et Jersey, augmente la cherté des grains au lendemain d'une riche récolte. Le Comité de Tinchebrai procède, lui aussi, à des perquisitions dans les paroisses voisines, recense les grains des propriétaires, fermiers, ou décimât eurs et leur enjoint d'en amener une partie a 1 Arch. comm., Avranches. Registre des délibérations, 27 octobre 1789. 2 Décret du 13 octobre 1789 sur l'approvisionnement des marchés Le corps municipal cl national, considérant tpie de tous les objets d'administration qui lui sont confiés il n'en est point qui mérite plus d'attention que ce qui a trait à la sub- sistance de cette ville, etc. » Ibid., Cherbourg, BB5, Registre des délibérations. 3 Ibid. Avis aux citoyens de Cherbourg de l'ouverture d'un bureau de bienfai- sance, 4 août 1789. 1 Ibid. Envoi de Morqueron au Havre, 27 juillet 1789. 5. Ibid. Décret du 13 octobre 1789. G Ibid., BB 11. Registre de correspondance, 17 octobre 1789. 7 Ibid. Arrestalion de La Grandie, paysan de Benoitville, 10 octobre 1789. 23 354 ENTENTE DES COMITÉS Al' SUJET DES SUBSISTANCES la halle de la ville. Il menace d'emprisonnement le curé de Pier- nières-le-Patry, qui résiste à son arrêté'1. A Torigni, le Comité défend aux boulangers de faire gâteaux, moulinets et autres pains amendés 2, envoie ses délégués pour visiter leurs boutiques, fait forcer par un serrurier la porte des récalcitrants W. Au len- demain de l'émeute du 6 août 1789, le Co'mité de Granville abaisse le prix du pain et décide que des gratifications seront accordées aux boulangers pour les indemniser des pertes qu'ils vont subir le montant s'en élève à livres4'. Le Comité de Bayeux, dans une série de délibérations prises du 5 au 12 août 1789, s'occupe sans relâche du salut du peuple » et arrête les mesures relatives aux approvisionnements. Il règle à maintes reprises la taxe du pain . Après la Commission intermé- diaire provinciale de Rouen $, celle de Caen signalait la gravité du mal et, dans son impuissance à faire rentrer l'impôt, adjurait les municipalités, en leur transmettant le décret du 26 septembre relatif a cet objet, de lui prêter main-forte 10. Bien avant cette date, les Comités locaux s'étaient préoccupés de ce soin. Dès le 30 juillet, le Comité de Caen rappelait les citoyens de la ville au respect des anciennes lois fiscales, dont plusieurs voulaient se 1 Arch. comm., Caen. Registre des délibérations, BB 93, 16 août 1789. 2 Ibid., Avranches. Registre des délibérations, 17 octobre 1789. 3 Delleville à Bayeux, Belzunce à Caen furent traduits à la barre des Comités nationaux de ces deux villes. Ceux-ci devaient correspondre avec le Comité des rap- ports de l'Assemblée nationale pour toutes les affaires de ce genre, d'après une lettre du secrétaire d'Etat de la guerre d/u 14 août 1789. Ibid., Caen, carton 56. 4 Le duc d'Harcourt, appelé à Paris pour le service du roi, demande un passe- port au Comité de Caen le 20 août 1789. Ibid., Caen, carton 56. — Celui-ci fait impri- mer et afficher Tordre du roi qui rappelle le duc, afin que le peuple connaisse les causes de son départ. Ibid., BB 93. 5 Les tètes sont tellement fermentées qu'on se refuse même au paiement des impôts les plus légitimes, sous prétexte qu'ils sont tous illégalement établis. » Lettre du bureau intermédiaire de Mortain à la Commission intermédiaire provinciale de Caen, 2 septembre 1789. Arch. dép., Calvados, C 8267. 6 Comple-rendu de la Commission intermédiaire provinciale de Caen, p. 14-15. 7 Lettres de Crespin, receveur des finances de l'élection de Vire. 8 En septembre 1789, des paroisses des élections de Saint-Lô et de Bayeux refu- sent de payer la prestation de la corvée aux collecteurs, parce que les rôles ne por- tent pas la signature du roi. Arch. dép., Calvados, C 7743. 9 Lettre de la Commission intermédiaire provinciale de Bouen à celle de Caen, 3 septembre 1789. Ibid,, C 7628. Nous croyons, écrivait-elle, que vous éprouvez des malheurs pareils aux nôtres, et que vous voyez avec regret que de toutes parts la chaîne de l'administration se brise. » 10 Instruction de la Commission intermédiaire aux municipalités, 17 octobre 1789. ibid., C 7775. 358 PROTECTION DE LA PERCEPTION DES IMPOTS INDIRECTS dispenser sous le prétexte des réformes projetées i. Le 31 août, le président du Comité d'Avranches, Brémesnil, exhortait ses concitoyens à acquitter comme par le passé tous les droits et impôts sous quelque dénomination qu'ils soient perçus et jusqu'à nouvel ordre ; le même Comité promettait secours et protection à tous les préposés et enjoignait aux municipalités des villes et campagnes de l'Avranchin de leur prêter main-forte 2. Le 13 sep- tembre, les officiers municipaux de Mortain prenaient de concert la résolution de maintenir et protéger par les mesures les plus fermes la perception des impositions, droits et taxes publics 3>. En dépit de tous ces efforts, les impôts directs rentraient trop lentement et à la fin de 1789, sur les livres que devait la généralité de Caen, le Trésor avait encore à percevoir une somme de livres, c'est-à-dire la moitié *4. Si le peuple ne consentait à acquitter qu'avec peine les impôts directs, il se refusait au paiement des impôts indirects. Ceux-ci étaient impopulaires au dernier point ; la plainte unanime des cahiers les avait condamnés en mars 1789. Pendant les émeutes de juillet dont Caen, Condé, Cherbourg et Vire avaient été le théâ- tre, les bureaux des aides, les greniers à sel avaient été envahis et pillés, les registres brûlés, déchirés ou jetés à l'eau 5. De juillet 1789 à janvier 1790, la perception de ces impôts rencontra des résistances de plus en plus vives. Les Comités locaux tentèrent, le plus souvent en vain, d'y mettre fin. Celui de Caen, dès le début d'août, était obligé d'approuver la suspension des droits de quatrième que l'inspecteur de la régie avait cru devoir cesser de lever sur les traiteurs, cabaretiers, aubergistes dans la crainte d'une insurrection 6>. Le Comité national et municipal de Cher- bourg, en septembre et en novembre, publia des manifestes » pour engager le public à acquitter les droits aux divers bureaux des fermes il gourmanda l'inertie et la lâcheté des préposés aux recouvrements, que la terreur paralysait et rendait trop accom- modants 7. Des troubles avaient éclaté dans la paroisse des 1 Arch. comm, Caen, BR 93, 30 juillet 1789. 2 Ibid., Avranches. Registre des délibérations. — Cf. Arch. nul., C 92, 78. 3 Arch. dép., Calvados, C 2688. 4 Ibid., C 7778. 5 Voir ci-dessus, chap. XII, p. 312, 314 et 316. 6 Arch. comm., Caen, RB 93. 7 Manifeste pour la protection des droits lus aux bureaux des finances, 2 sep- tembre 1789. Ibid., Cherbourg, BB 5. — Manifeste pour assurer la perception de tous droits établis, 6 novembre 1789. Ibid. — Cf. Arch. nat., C 111. MESURES CONTRE LA CONTREBANDE 359 Loges-Marchis, près d'Avranclies, dont les habitants exercèrent des voies de fait contre les employés des fermes. Le Comité d'A- vranclies prit le 1er octobre un arrêté contre les séditieux, plaça les employés sous la sauvegarde des lois, et délégua trois de ses membres pour rétablir l'ordre dans cette paroisse. Deux mois plus tard, deux commis de la brigade de Courtils se virent insultés et menacés de violence nouvelle intervention du Comité, nou- velle enquête * Malgré l'abaissement du prix du sel, la contre- bande se pratiquait sur une grande échelle, sous les yeux des gardes impuissants et découragés, et avec la complicité des populations. Les mesures d'ordre prises par un Comité étaient compromises par l'inertie du Comité voisin. Celui de Cherbourg demandait instamment la création de corvettes armées pour empêcher la fraude qui s'exerçait sur les côtes de la Hague, et d'un tribunal pour juger les coupables. Dans la nuit du 7 décem- bre 1789, neuf contrebandiers avaient été saisis déchargeant du faux sel dans le port de commerce. On les conduisait à Valo- gnes pour y être jugés, quand une émeute populaire les délivra aux portes de cette ville sous les yeux du Comité impassible 2. A Bayeux, le peuple excité contre Fleury, directeur des aides, se rua sur sa maison, l'en arracha et faillit lui faire un mauvais sort. Il eut grand peine à s'échapper de la ville en promettant de n'y rentrer jamais. Les paroisses furent convoquées par le Comité pour aviser au rétablissement des droits d'aides ; leurs assemblées s'opposèrent au retour des commis et demandèrent que les droits, perçus aux portes de la ville par le receveur du tarif, fussent dorénavant versés dans la caisse municipale W. Les droits de coutume que les villes percevaient dans les halles et marchés avaient le même sort que les impôts royaux ; depuis le 4 août, les paysans n'en voulaient plus entendre parler. A la foire Sainte-Catherine, à Vire, en novembre 1789, des marchands de bœufs des environs de Condé refusèrent le terrage » ou droit de coutume pour les bestiaux qu'ils exposaient au marché. Une rixe violente s'engagea entre eux et les préposés à la recette. La maréchaussée intervint, mais fut obligée de déguerpir devant la force numérique des récalcitrants, qui restèrent les maîtres du 1 Arcli. cornm., Avranches. Registre des délibérations, 1er octobre 1789. i Ibid., Cherbourg, BB 11. Registre de correspondance. Cf. Arch. nat., D xxix 81. » Ibid., Baveux, D i13 ,ls. Registre des opérations du comité national, 30 novembre au 3 décembre 1789. — Délibérations des paroisses de Bayeux, 3 décembre 1789. Ibid. non inventorié. 360 PROTECTION DES DROITS FÉODAUX champ de bataille 1. A la foire de Mortain, le 5 décembre, des individus de Romagny et de Chérencé-le-Roussel essayèrent aussi d'entraver la perception des droits de coutume. La garde nationale les saisit et les incarcéra dans la prison du bailliage . Le 24 juillet, les échevins et notables de Caren- tan s'assemblent pour établir sur une nouvelle constitution une milice volontaire, sous le nom de milice nationale ». Cette troupe nouvelle, différente de l'ancienne milice bourgeoise, n'aura que des chefs à son gré que la bourgeoisie est appelée à élire *. A Vire, la milice bourgeoise refuse le 25 juillet, malgré les ordres réitérés de la municipalité, d'assurer le service de la ville. Une émeute populaire, qui éclate le 28 juillet, détermine les bourgeois à envoyer des députés à Caen pour réclamer des armes et des munitions ; ceux-ci reviennent avec des fusils, un baril de poudre et un poste de garde est aussitôt établi 5. A Granville, la milice bourgeoise apparaît aux réjouissances célébrées en l'honneur 1 Arch. connu. . Cherbourg, BB 5. Registre des délibérations. 2 Ihid.. Caen, BB 9* Registre des délibérations. 3 ibid., Baveux, Dl12. Registre des délibérations. 1 Ibid., Carentan. Registre des délibérations, 24 juillet 1789. 5J Ibid., Vire. Registre des délibérations, 24 juillet 1789. — Cf. ins. Séguin, p. H>. VARIÉTÉ DE LEUR ORGANISATION 363 du 14 juillet ; elle s'organise en corps subsistant » le 2 août, pour assurer le service de garde au port, au faubourg et dans la ville, et veiller à la sûreté publique . Registre des délibérations, 7 et 9 août 1789. Ce fut peut- être un moyen d'enrôler dans une organisation bien disciplinée les nombreux étran- gers employés aux travaux du port. Boulabert et Noël, entrepreneurs des travaux du roi, y enrégimentent leurs ouvriers. 6 Ibid., Granville. Registre des délibérations, 23 février 1790. 7 Ce ne fut qu'en juillet 1790 que les volontaires nationaux de Granville firent la remise solennelle de leur drapeau, et repassèrent dans les rangs de la garde nationale. 8 Ibid., Caen, BB 93, Registre des délibérations. Le 26 août 1789. le Comité, pour apaiser les plaintes des paroissiens de Notre-Dame contre cette conscription, leur rappelle qu'elle est une nécessité, que les circonslances l'imposent et qu'elle cessera avec les causes qui l'ont fait naître. ARMEMENT ET ÉQUIPEMENT DES GARDES NATIONALES 365 toutefois des exceptions. A Caen, on exempte de la garde les membres du Comité national et de ses bureaux, ceux des comités particuliers des paroisses ', les officiers des troupes royales, les ecclésiastiques, les indigents 2>. La milice de Carentan n'enrôle que les citoyens actifs domiciliés depuis un an ' ; celle de Cher- bourg exclut les ouvriers du port, qui forment une population flottante W. Les milices nationales furent armées de fusils, de baïonnettes et de piques. Les magasins d'artillerie de Caen, Carentan, Saint - Lô, Cherbourg étaient remplis d'armes que les commissaires des guerres n'avaient point vendues. On avait craint de les voir tomber entre les mains des vagabonds et des braconniers et de contribuer à la renaissance du brigandage qui avait désolé la Normandie avant son désarmement r>l. Sur la demande des Comités locaux, les ducs d'Harcourt et de Beuvron firent expé- dier aux milices urbaines des armes tirées de ces divers dépôts G'. En peu de temps, toute la Normandie, désarmée depuis 1766, se retrouva en armes. Dans les villes comme Caen, Cherbourg, les miliciens eurent des fusils, des baïonnettes et des piques. On répara les vieilles armes qui étaient déposées au château de Caen avant de les donner aux gardes nationaux. Ceux de Cherbourg, trouvant leurs fusils trop lourds, en firent raccourcir les canons de quatre pouces. Les officiers portaient l'épée ; les sergents le mousqueton et le sabre en beaudrier. Dans les campagnes, les gardes nationales s'armaient comme elles le pouvaient ; les fourches se mêlaient aux fusils dans leurs rangs et leur donnaient parfois le caractère de bandes farouches > A la tête des compagnies et de leurs officiers, l'état-major était investi du commandement suprême. Celui de Caen compre- nait un colonel, un colonel en second, un major, deux aides- majors, deux sous-aides-majors et trois porte-drapeau, quatre adjudants, un tambour-major, un chirurgien-major et un aumô- nier. Partout ailleurs, il était à peu près composé de la même façon. Carentan eut un secrétaire de l'état-major ; Péri ers un trésorier quartier-maître. Les officiers d'état-major, au lieu d'être nommés par le roi ou les officiers municipaux, comme l'étaient les officiers supérieurs des anciennes milices bourgeoises, durent leur pouvoir à l'élection. Le corps municipal de Carentan abdiqua son droit de nomination pour soumettre la composition de l'état-major au choix de la bourgeoisie ;î. A Cherbourg, tandis que les officiers des compagnies étaient élus au scrutin par les gardes nationaux de leur quartier, en présence des offi- ciersmunicipaux qui leur délivraient un brevet spécial M, ceux de l'état-major furent élus dans la même forme que les officiers municipaux, par l'assemblée générale des députés des corps et corporations 5. fourches à gerbes > et demande quelques armes à feu pour ceux qui sauront s'en servir le plus habilement. 1 Règlement concernant la milice nationale, titre IV, 1 novembre 17S1*. Arch. comm., Cherbourg, BBf>. 2 Etat constitutionnel de la milice nationale, 7 août 1781. Ibi> 5 Règlement du 4 novembre 1789, titre II. Ibid., BBS. — A Baveux, en tolérant LES GRANDS CHEFS DE CET ÉTAT-MAJOR 367 Partout le choix des électeurs se porta sur des gens en vue, anciens officiers et chevaliers de Saint-Louis, magistrats des juridictions royales, gens de loi. Granville conserva l'ancien colonel de la milice bourgeoise, Destouches ; Condé-sur-Noireau déféra le commandement des quatre compagnies à Bourdon de Pierreville ; Torigni à Le Chartier de la Varinière. Deux anciens capitaines d'infanterie, Bouquet de Granval et Duprey-Désilles celui-ci déjà membre du bureau intermédiaire de département, furent colonel et major de la garde nationale de Carentan. A Périers, le chef de la garde nationale fut un écuyer, Leclerc de Beauvais, chevalier de Saint-Louis, brigadier des gardes du corps du roi ; le major fut un conseiller honoraire au bailliage. Ce fut un noble qui commanda la milice nationale de Mortain, La Chambre de Vauborel. A Vire, les citoyens choisirent pour colonel Drudes de Campagnolles, qui devait être un des chefs de la chouannerie normande. Les électeurs de Caen avaient nommé, par acclamation, pour colonel le comte de Faudoas et pour lieute- nant-colonel le comte d'Osseville, tous deux anciens officiers. Plusieurs villes créèrent des commandements généraux de leur garde nationale en faveur de concitoyens illustres. Le Comité permanent deBayeux, pour déférer au vœu unanime des citoyens, avait proclamé colonel général des volontaires nationaux de cette ville le baron de Wimpfen, maréchal de camp et député aux Etats généraux, en raison de ses hautes qualités morales, de sa grande capacité pour le service militaire, de son affection pour tout ce qui concernait le bonheur et la gloire de la nation, du Roi et de la ville» *. L'assemblée des citoyens de Cherbourg, tout en maintenant comme colonel Frigoult de la Croix, l'ancien chef de la milice bourgeoise, avait décerné à Dumouriez, maré- chal de camp et commandant de la place le titre de commandant général de la milice nationale 2>. Ces titres furent d'ailleurs pure- ment honorifiques Wimpfen était retenu à Paris par son mandat et Dumouriez quitta Cherbourg en novembre 1789. Il en fut de même des grades que les citoyens de Tinchebrai conférèrent à de puissants princes et à leurs agents, pour se concilier leur pro- tection. Le 9 novembre 1789, la milice en armes proclama le duc que les citoyens qui s'étaient volontairement armés choisissent leurs officiers, la municipalité se réserva la libre élection de l'état-major », d'où un conflil ultérieur avec la garde nationale. Voir ci-dessous, p. 369. 1 Areh. ciiimii., Bayeux, Di . Registre des délibérations, 16 août 1789. 2 Ibid., Cherbourg. EE70 et BB 5. 9 août 1789. 368 PRESTATION DE SERMENT DES GARDES NATIONALES d'Orléans généralissime, le comte de Beaujolais, son jeune fils, général, le comte de La Touche, son chancelier et surintendant, premier colonel d'honneur et de Limon, son contrôleur général, colonel d'honneur en second ' . Formées par le seul effet de la bonne volonté des citoyens », les gardes nationales s'étaient 'donné pour mission de veiller au maintien de la constitution, à la perception des impôts et à la sûreté publique et individuelle. Elles furent le bras du nouveau corps politique dont les Comités permanents étaient la tête. Conformément au décret du 10 août, elles avaient prêté, avec les troupes de garnison et la maréchaussée, le serment d'obéissance aux lois, de fidélité à la nation et au roi. Le 23 août, à Vire, la place du Château avait été le rendez-vous des troupes. Le même jour, à Cherbourg, dans la plaine située entre l'arrière-bassin et le Cauchin, avait été dressé un autel de la Patrie. A Caen, la place Royale avait servi de cadre à la cérémonie. Carentan le 6 septem- bre, Avranehes le 11 octobre, Périers le 22 novembre avaient rempli avec le même éclat les mêmes formalités. Partout la prestation de serment avait été solennelle et avait donné lieu à des fêtes civiles et militaires, véritables prémices des fêtes de la Fédération. Le serment était prêté par ces troupes en présence des oificiers municipaux et des Comités locaux c'était comme un hommage lige des défenseurs armés du pays aux autorités civiles. Ce furent en général des rapports de subordination qui unirent les gardes nationales aux Comités ; les chefs des premières étaient presque partout membres des seconds et associés à l'administration muni- cipale. Deux villes cependant furent le théâtre d'assez graves dissentiments entre milices et Comités. A Cherbourg, où le Comité municipal et national voulait exclure de son sein les officiers de la garde nationale, la milice exhala son mécontentement dans un mémoire d'allure révolutionnaire ; elle y revendiqua le droit de prendre part à la gestion des affaires, se déclara le seul corps constitutionnellement établi » dans la ville et proféra des menaces à l'adresse du Comité f. Le règlement du 6 octobre 1789 ne lui 1 Arch. comm., Tinchchrai. Registre des délibérations, 8 et 9 novembre 1789. 2 Mémoire sur la reconstitution du Corps municipal de Cherbourg, imprimé, 10 p., s. 1. n. d. Bibl. comm., Cherbourg. La milice nationale, qui est la nation, ne peut être exclue d'un corps municipal... Elle se confond dans les corporations et c'est le seul motif qui la dispense de demander une représenlation particulière. Mais s'il arrivait, un jour que, par la difficulté d'assembler les corporations, l'aristocratie menaçai de s'établir dans le corps municipal, alors, comme elle veille sans cesse ACTES D'INSUBORDINATION DES GARDES NATIONALES 369 donna satisfaction qu'en partie, en appelant à l'assemblée géné- rale de l'hôtel de ville, dans les circonstances graves, les citoyens de toutes les corporations encadrés dans les compagnies de la garde D. A Bayeux, le conflit fut plus sérieux. Le Comité repro- chait à la milice nationale d'empiéter sur ses pouvoirs 2 ; un bureau militaire, formé sans son assentiment, multipliait ses exigences. Sans convocation, les compagnies s'étaient assem- blées pour nommer un colonel, au mépris des droits que le Comité prétendait avoir à cette désignation. Blessé d'un tel manque d'égards, celui-ci refusa de ratifier l'élection et, par esprit de conciliation, proposa d'appliquer à Bayeux l'acte constitutionnel de la garde nationale de Rouen, approuvé par décret du 21 octo- bre. Le bureau militaire, passant outre à ce refus, installa ses officiers le 15 novembre. Quelques jours après devait avoir lieu, dans la cathédrale, la bénédiction des drapeaux de la garde nationale. Le Comité décida qu'il assisterait à la cérémonie sans vouloir reconnaître, par cette démarche fraternelle, l'Etat-ma- jor » illégalement formé. Le 22 novembre, quand ses membres se présentèrent à la porte principale de l'église, ils la trouvèrent barrée par le corps des volontaires nationaux, qui les avaient précédés. Ils durent entrer par la porte latérale et, arrivés près du chœur, ne trouvèrent pas de chaises pour s'asseoir. Indignés du procédé, ils se retirèrent sans attendre la cérémonie et, de retour à l'hôtel de ville, rédigèrent un procès-verbal de protes- tation, suivi d'une adresse à leurs concitoyens, où ils offraient leur démission 3. L'intervention de Wimpfen et Delauney fut sur l'intérêt public, comme elle est seule légalement constituée et que c'est d'elle que dérivent tous les autres pouvoirs constitués, elle ressaisirait ses droits parce que c'est en elle que réside la sûreté publique, tant administrative qu'executive.» 1 Règlement pour la composition et l 'organisation de la municipalité de Cherbourg* arrêté par les représentants de la commune à l'hôtel de ville, le 6 octobre 1789. Gkt'i'- bourg, imp. Clamorgan, 1789. — Le 25 octobre 1789, un officier des volontaires itS^o- naux de Cherbourg écrivait qu'il faudrait mettre le corps municipal au beurre roux ». Arch. comm., Cherbourg, BB 11. 2 Arch. comm., Bayeux, Diu s. Registre des opérations du Comité général, etc' Avranches, avec Burdelot. 3 Voir ci-dessous, chap, XV, le détail de ces négociations. 374 LES COMITÉS PERMANENTS ET LES MUNICIPALITÉS D'une façon générale l'accord règne entre les municipalités et les Comités urbains. Celui deCaen admet dans son sein les officiers municipaux en exercice, les anciens maire et échevins. A Gran- ville, où le conseil général garde son existence indépendante, le Comité national ne se réunit à lui qu'exceptionnellement pour délibérer sur les mesures de défense et les officiers municipaux y sont députés-nés ». A Carentan, Bayeux, Avranches, la fusion est complète Comités et municipalité ne forment plus qu'un seul corps. Le maire de Bayeux reste le président perpétuel du Comité bayeusain ; celui d' Avranches l'est alternativement avec un membre élu du Comité. Le corps municipal et national » de Cherbourg n'est qu'une municipalité élargie, dans des circons- tances critiques, par l'adjonction des députés des corporations. La règle n'est pas toutefois sans exceptions. Dans certaines villes, on voit apparaître un réel antagonisme entre les deux corps, par exemple à Torigni T et surtout à Vire. Le Comité permanent de Vire, qui a refusé d'admettre les ecclésiastiques et les nobles, frappe du même ostracisme les officiers municipaux. Ses qua- rante-huit membres, qui tiennent leur pouvoir de l'investiture populaire, estiment que la désignation par brevet royal du maire et des échevins est entachée d'un caractère de réprobation » 8>. Ils se considèrent comme les seuls dépositaires de l'autorité, reçoivent seuls le serment de la milice nationale et du détache- ment du régiment d'Angoulême en garnison à Vire et menacent d'annihiler l'action de la municipalité v3. 1 Arch. comm., Torigni, D 36. Registre des arrêtés et délibérations du Comité national. 6 octobre et 1er décembre 1789. Protestation contre la formation de ce Comité par le syndic de la municipalité. — Parlant des troubles qui divisent la municipalité et la commune » de Torigni, les procureurs-syndics du département de Saint-Lô s'expriment ainsi, dans une lettre du 18 août 1789 Ce dernier corps a anéanti la municipalité légalement établie, pour former un comité auquel elle a attribué toutes les fonctions de la municipalité. » Arch. dép., Calvados, C 7715. 2 Lettre de Mauduit, maire de Vire, et des échevins à l'intendant, 9 septembre 1789. Ibid., C 2688. 3 Nos fonctions, écrit Mauduit, ont dû naturellement devenir très circonscrites mais nous avons considéré comme une trahison à la foi du serment que nous avons prêté de les remettre dans un moment d'agitation à S. M. de qui nous les tenons, et nous nous sommes fait un devoir sacré de conserver jusqu'à un nouvel ordre de choses celles qui ne pouvaient se faire que par nous-mêmes sans préjudice de la chose publique. Cette circonstance nous fait cependant naître des doutes et nous vous supplions, Monseigneur, de bien vouloir les mettre sous les yeux du ministre de la province. Ce comité a déjà piétendu devoir être exclusivement présent à la prestation du serment des troupes qui sont ici en garnison, et nous nous sommes bien gardés de vouloir nous y opposer. Nous n'avons pas même voulu y paraître alors, dans la crainte d'exciter quelque trouble ou de faire naître une division LES COMITÉS, LA MAGISTRATURE ET L'ARMEE 375 Les jugés royaux des diverses juridictions ne sont point tenus à l'écart par les Comités permanents, ils siègent à leurs assem- blées avec les avocats, les gens de loi et l'élite de la bourgeoisie. On y voit des lieutenants généraux de bailliage, comme Robillard à Saint-Lô, Lavalley de la Hogue à Carentan ; Brémesnil est président du Comité d'Avranches et Lescaudey de Manneval président de celui de Périers. Delleville, lieutenant général de l'amirauté de Bayeux, prend place le jour même de sa réhabili- tation dans le Comité de cette ville. Celui de Cherbourg s'associe Groult, procureur du roi de l'amirauté. Les circonstances cri- tiques, dans plus d'un chef-lieu de bailliage, amènent les officiers à partager de leur agrément », le droit de juridiction avec les Comités, parfois même à leur en laisser entièrement l'exercice. A Bayeux, par exemple, en présence de la déclaration des volon- taires nationaux, qui ne veulent accorder leur confiance qu'à un corps judiciaire issu de leurs suffrages, et pour déférer aux vœux exprès des officiers du bailliage, le Comité permanent consent à ne se démettre des fonctions de justice qu'après le rétablisse- ment le plus complet de l'ordre *. Presque partout, les Comités entretiennent d'excellents rap- ports avec les officiers commandant les troupes royales ils ont d'ailleurs tout intérêt à rechercher l'appui de ceux qui sont sincèrement dévoués à la Nation. Le meurtre deBelzunce, victime d'une foule en délire, n'est point imputable au Comité de Caen si le régiment de Bourbon est exécré dans cette ville, celui d'Ar- tois y compte les plus chaudes sympathies. Le Comité de Bayeux compte parmi ses membres le chevalier de Praslin et le chevalier de Buffon, colonel et lieutenant-colonel du régiment de Lorraine. De Versamy, chef du détachement du régiment d'Angoulême, en garnison à Carentan, est le premier élu des vingt-huit mem- bres du Comité aux élections du 13 septembre. Dumouriez, maréchal de camp et commandant pour le roi et la nation » à Cherbourg, est un des membres les plus actifs, peut-être même funeste. Cependant, Monseigneur, s'il allait désormais vouloir porter ses prétentions plus loin et sur des objets qui intéresseraient le service ou la gloire de S. M., quel parti devrions-nous prendre ?...» Arch. dép., Calvados, C 2688. Cf. Arch. comra., Vire. Registre des délibérations, 22 août 1789. La municipalité décide de ne pas se présenter le lendemain sur la place du château à la prestation du serment, pour éviter tout conflit. 1 Arch. comm., Bayeux, Di13biS. Registre des opérations du Comité [national, 18, 19 et 21 septembre 1789. — Le 2 septembre, le Comité de Caen, snr la motion du comte de Vendœuvre, prend un arrêté eu cinq articles, relatif à la protection des juges. IbitL, Caen, BB 93. 376 LES COMITÉS ET LE GOUVERNEUR DE NORMANDIE l'instigateur du Comité. Si le Comité de Granville chasse le com- mandant du roi, qu'il juge incapable de défendre la ville, il n'en offre pas moins un siège aux autres chefs de corps des troupes d'infanterie et d'artillerie. A plus forte raison, les Comités permanents n'essaient-ils point de dresser leur autorité contre celle du gouverneur de la province ou du commandant en chef de la Basse-Normandie. C'est le duc d'Harcourt qui a provoqué la création du Comité de Caen ; le 22 juillet, son hôtel a été le berceau de l'institution nouvelle ; le 23, il a reçu avec sensibilité » la cocarde nationale que lui pré- sentaient les délégués du Comité. Pendant les graves désordres qui suivent, on le conjure de demeurer à Caen, de continuer à se dévouer au salut de la ville». Quand le Comité s'est définitivement organisé, il invite le duc à venir le plus souvent possible partager ses travaux. Le 6 août, celui-ci vient y goûter le pain destiné aux indigents. Le 19 août, pour calmer l'effervescence excitée par l'émeute qui a coûté la vie à Belzunce, il vient, par une démarche personnelle, consolider publiquement la confiance qui doit toujours régner entre le gouvernement et le Comité» et pour donner une preuve éclatante de cette harmonie il invite solennellement et de la manière la plus pressante le Comité à envoyer chaque jour six de ses membres pour dîner à sa table » W. Après son départ pour Versailles, où il est rappelé par le service du roi, il correspond avec le Comité de Caen et lui continue ses bons offices 2. Son frère, le duc de Beuvron, vit dans les mêmes termes de sympathie avec le Comité de Cherbourg. Lui aussi arbore la cocarde à son chapeau, le 21 juillet. Le jour où la garde nationale s'organise, il offre à l'hôtel du gouvernement un grand dîner aux membres du corps municipal et national et aux officiers de la milice. Le duc et la duchesse reconduisent ensuite leurs invités jusqu'à l'hôtel de ville, au milieu des acclamations popu- laires 3. Pendant que les Comités permanents déployaient une grande activité, l'administration provinciale créée par l'édit de 1787 1 Arch. comm., Caen, BB93, 19 août 1789. 2 Lettre de rappel au duc d'Harcourt par le comte de Saint-Priest, 17 août 1789, et lettres postérieures du duc d'Harcourt au Comité de Caen, 20 et 31 août 1789. Ibid., carton 56. 3 Ibid., Cherbourg, BB 5. Registre des délibérations, 18 août 1789. Le duc de Beuvron retient à sa table un député du Comité permanent de Saint-Sauveur-le- Vicomte, qui est venu demander des munitions pour la milice nationale de cette ville. Ibid., BB 11, 15 octobre 1789. LES COMITÉS ET L'ADMINISTRATION PROVINCIALE 377 jouait un rôle de plus en plus effacé. Les assemblées de départe- ment avaient été réunies pour la dernière fois en 1788 ; la Com- mission intermédiaire provinciale de Caen et les neuf bureaux intermédiaires qui lui étaient subordonnés se bornaient à soute- nir, dans les parties d'administration qui leur étaient confiées, l'édifice chancelant de la chose publique ». Leurs opérations, assez restreintes, consistaient dans la confection des rôles, l'en- tretien des routes, la distribution des ateliers de charité ; encore furent-elles paralysées sur plus d'un point par la révolution municipale de juillet-août 1789. Les bureaux intermédiaires, obligés d'envoyer les mandements aux municipalités pour le département des impositions, ne savaient comment procéder dans les quelques villes où le Comité permanent n'avait pas lié son action à celle du corps municipal et où la jeune institution d'origine populaire disputait la gestion des intérêts locaux à l'ancienne administration municipale. Ce fut le cas pour Mortain^ et pour Torigni 2. Dans les autres villes de Basse-Normandie, où cet antagonisme n'existait pas, les bureaux intermédiaires vécurent en bons termes avec les Comités permanents, et plus d'un de leurs membres occupa une place prépondérante au sein de ces derniers 3l Quant à l'intendant et aux subdélégués, dont l'influence était agonisante, ils ne pouvaient reprocher aux Comités nationaux de leur avoir porté le coup mortel. Ceux-ci, en recueillant le 1 Mémoire de la ville de Mortain, 2 décembre 1789. Arch. dép., Calvados, C 7707. Placé entre la nouvelle municipalité organisée par la volonté du peuple » et les anciennes municipalités créées en 1787 dans les trois paroisses de cette ville, le bureau intermédiaire, après de longues hésitations, adresse les mandements des impositions aux trois syndics municipaux, d'où protestation du Comité qui envoie à la Commission intermédiaire une copie de son règlement et nomination pour prou- ver la publicité de son institution et de ses fonctions non interrompues, non par- tagées, non disputées par aucuns soi-disant municipaux ». 2 Lettre des procureurs-syndics de Saint-Lô aux procureurs-syndics provinciaux, relative à Torigni, 18 août 1789. Ibid., C 7715. La commune de Torigni a anéanti la municipalité légalement établie pour former son comité auquel elle a attribué toutes les fonctions de la municipalité. Il résulte de ces troubles que nous croyons ne devoir communiquer officiellement avec aucun de ces corps jusques après votre décision, que nous vous demandons très promptement, d'autant plus que le bien du service l'exige ». La Commission intermédiaire provinciale répondit le 19 décembre 1789, quand la question fut réglée par le décret de l'Assemblée uationale sur les municipalités. 3 Par exemple, Faudoas, Cagny et Costy à Caen ; Le Bret, Dozeville à Bayeux ; Hervieu de Pont-Louis, Lemaignen, Duprey-Désilles, Le Reculey de la Huberderie à Carentan ; Groult, de Cherbourg, à Valognes ; Fremin de Beaumont à Coutances ; Brémesnil à Avranches. 378 LES COMITÉS PERMANENTS ET L'INTENDANT pouvoir de leurs mains défaillantes, n'avaient fait qu'hériter d'une succession déjà ouverte. Parti de Caen au mois de juillet, Cordier de Launay entretint de la Cour, où il se tenait à portée de Necker l, puis de Paris une correspondance courtoise avec le Comité de cette ville. Conscient de son impuissance absolue, affaibli par la maladie ,2, il laissa libre carrière à l'activité des Comités locaux, négligea de pourvoir au remplacement des subdélégués démissionnaires W et rejeta la responsabilité de son inertie sur l'anarchie W. Une remarque intéressante à signaler, en guise de conclusion, c'est le parti pris d'ignorance systématique du pouvoir central à l'égard des Comités permanents. La déclaration royale du 14 août 1789, sur la répression des troubles publics, est adressée aux municipalités seules. Il en est de même de la loi martiale, et cependant les Comités fonctionnent et sont en pleine activité. C'est aux municipalités seules qu'est accordé le droit de réqui- sition sur les milices nationales, en vue de ramener tous les ci- toyens à l'obéissance due aux autorités légitimes 5. Dans la pensée du roi, étaient-ils légitimes ces groupements spontanément 1 Lettre de Cordier de Launay à MM. du Comité national, 2 aoiU 1789. Arch. comm., Caen, carton 5P. M. Necker m'a ordonné de rester à portée de lui et d'at- tendre les ordres que les circonstances le mettraient dans le cas de m'adresser ». 2 Les douleurs que me cause une incommodité que depuis trois mois je n'ai pu guérir... » Ibid. 3 Garantot, à Cherbourg, a laissé la charge de la subdélégation à son secrétaire Cabart ; celui-ci, déjà secrétaire du Comité permanent, se déclare accablé de tra- vail. L'intendant prie son secrétaire, Lamy-Desvallées, d'adresser dorénavant la correspondance administrative aux officiers municipaux de Cherbourg ; les commis- saires des guerres feront le surplus de la besogne. Lettre de Garantot à Lamy, 30 octobre 1789. Arch. dép., Calvados, C 2679. — A Granville, dès le 10 août 1789, après la démission de Couraye-Duparc, c'est le corps municipal qui se charge de dépouiller le courrier de la subdélégation. Arch. comm. Granville. Registre des délibérations, 10 août 1789. 4 Lettre de l'intendant à Montaran, octobre 1789. Arch. dép., Calvados, C2644. Vous savez, lui écrit-il, quel est actuellement le caractère des commissaires dépar- tis et combien leur influence a diminué. La formation des comités et les arrêtés qu'ils publient sont souvent en contradiction avec les décrets de l'Assemblée natio- nale. En vain les personnes qui avaient autrefois quelque autorité font-elles des efforts pour maintenir le respect dû à la loi. L'impulsion actuellement reçue s'op- pose à son exécution, et il sera long et difficile de rétablir l'ordre. » 5 Un décret du 15 oclobre 1789, qui fixait les attributions provisoires des Comités civils et de police établis dans les villes, et qui semblait donner à ces organisations spontanées un caractère officiel, se heurta au refus de sanction du roi. Il ne fut sanctionné que le 20 août 179'J, cinq mois après la disparition des Comités nationaux, à un moment où il n'avait plus guère sa raison d'être, les bureaux administratifs de poliee des villes étant des commissions formées d'officiers municipaux régulièrement élus. Coll. Rondonneau, t. L p. 37. LES COMITÉS PERMANENTS ET LE KOI 379 surgis en dehors de toute loi et de toute intervention gouverne- mentale, issus, au milieu des malheurs publics, de l'élection populaire et qui avaient imposé leur collaboration et leur appui aux représentants de son pouvoir affaibli ? C'est le 3 décembre 1789 qu'apparaît pour la première fois la reconnaissance officielle des Comités permanents, dans les lettres patentes accordant aux corps, bureaux et Comités qui ont été établis par les com- munes ou municipalités, pour administrer seuls ou conjointe- ment avec les officiers municipaux, le droit de continuer à exercer les fonctions dont ils sont en possession » *. Reconnaissance tardive et concession temporaire, car l'Assem- blée nationale allait décider leur suppression, en votant la loi municipale du 14 décembre 1789, 1 Lettres-patentes du 3 décembre 1789 sur décret du 2 décembre. Arch. dép., Calvados, C 10t9. Un décret postérieur, du 3 février 1790, invitait encore les Comi- tés librement élus par les communes à se joindre aux officiers municipaux dans les lieux où ils remplissaient les fonctions municipales conjointement avec les anciennes municipalités » art. 4 ; mais l'article 5 du même décret interdisait la continuation des fonctioas municipales à ces mêmes Comités après la formation des munici- palités. 380 ESPOIRS FONDÉS SUR RASSEMBLÉE NATIONALE CHAPITRE XIV l'organisation municipale des villes et des campagnes décembre 1789 -février 1790 Adresses des villes de Basse-Normandie demandant une Constitution à l'Assemblée nationale. — Décret du 14 décembre 1789 sur l'organisa- tion municipale du royaume. La révolution municipale de juillet 1789 endiguée suffrage censitaire et citoyens passifs. — Les élections dans les campagnes et dans les villes. Condition sociale des nou- veaux administrateurs municipaux ; élection de nombreux curés. Installation des municipalités et réjouissances locales. Adresses des municipalités nouvelles à l'Assemblée nationale. Au milieu de l'anarchie que n'avaient pu enrayer les pouvoirs révolutionnaires élevés sur les débris de l'ancien régime, l'Assem- blée nationale apparaissait à tous les citoyens comme le seul régulateur capable d'en corriger les excès ; dans la nuit profonde où sommeillaient les lois, elle demeurait le phare vers lequel se tournaient toutes les espérances. C'est d'elle qu'on attendait le remède et le salut. Chaque jour lui apportait la rumeur inquiète des cités avides de repos, impatientes d'une Constitution qui viendrait fonder l'ordre dans la liberté. Deux adresses, parties de la Basse-Normandie traduisent fidèlement, entre beaucoup d'autres, les désirs de ses habitants. Les députés de l'ancienne assemblée municipale de Torigni, évincés par le Comité de juil- let 1789, écrivaient à l'Assemblée nationale Très affligés du désordre qui règne dans le royaume et particulièrement dans notre ville et ses environs, où le tribunal ordinaire de la justice est devenu sans fonctions, où les deniers de l'Etat ne se per- çoivent presque plus, où le vertige, la force, l'injustice prennent la place de l'ordre, très vivement alarmés des malheurs qui peuvent résulter de ce désordre, nous avons, Messeigneurs, recours à vos hautes puissances pour apporter secours et remède à ces maux. La Constitution du royaume, l'organisation, le régime, les fonctions et pouvoirs des assemblées municipales sont des REQUÊTES DES VILLES A L'ASSEMBLEE NATIONALE 381 objets dont vous vous occupez sans relâche, nous le savons, Messeigneurs ; mais le mal est si grand et l'anarchie fait de tels progrès que, si une loi consolatrice ne rétablit pas bientôt l'ordre public, les sollicitudes paternelles du roi, les résultats de vos augustes fonctions auront peine à se faire respecter de la classe la plus pauvre de la société qui a pris et prend à chaque instant un ascendant si funeste que les meilleurs citoyens voient leurs propriétés et leurs vies même en danger » *. Si cette plainte était unique, on pourrait y voir l'amère boutade de gens maltraités par les circonstances et que leur brusque déchéance incline au pessimisme ; mais elle se fait entendre de toutes parts; elle est l'indice certain d'un malaise général. On la retrouve dans l'adresse que le Comité permanent de Caen rédigea le 31 août 1789, dans la plénitude de ses fonctions, entouré des membres de tous les ordres et des électeurs de la ville aux fins d'avoir les avis sans distinction » 2. Il y montrait tous les liens de la société rompus, les lois et leurs ministres sans force », les tribunaux déserts et les juges exposés à la vindicte populaire, la liberté défiant tout frein et toute règle, la mendicité croissant et avec elle l'esprit de brigandage ; il déplorait la décadence de l'industrie, la cessation des travaux publics, les difficultés de perception de l'impôt et l'accroissement du déficit. Il invitait l'Assemblée nationale à s'occuper sans interruption de la Consti- tution du royaume et particulièrement de l'organisation, du régime, des fonctions et pouvoirs des assemblées municipales et Etats provinciaux». C'est, ajoutait-il, la sanction seule de l'As- semblée nationale et du roi qui peut imprimer à ces différents corps le respect, la permanence et l'autorité nécessaire pour rétablir l'ordre». L'Assemblée nationale, de son côté, sentait l'urgence de cette réforme. Par la voix de Gaultier de Biauzat, elle avait proclamé, le 14 octobre 1789, la nécessité d'organiser au plus tôt le régime municipal pour assurer la perception de l'impôt et l'obéissance à la loi 3. Le 12 novembre, elle décida qu'il y aurait une munici- 1 Très humble adresse de la municipalité de la ville et bailliage de Toriyni en la généralité de Caen, à nos seigneurs les députés de la nation aux Etats généraux à Ver- sailles, 9 septembre 1789. Arch. nat., D ivbls 5. 2 Arch. comm., Caen, BB 93, 31 août 1789. — Envoyée aux députés du bailliage de Caen, cette adresse fut lue à l'Assemblée le 24 septembre. Arcb. nat., C92. Le Comité la fit imprimer et envoyer aux différentes villes de la province et aux Comités des principales villes du royaume. 3 Procès verbal des séances de l'Assemblée nationale, 14 octobre 1789. Arch. nat., 382 LE DÉCHET DU 14 DÉCEMBRE 1789 palité dans chaque ville, bourg, paroisse et communauté de campagne v>. Le 24 novembre, elle votait la suppression éven- tuelle des municipalités existantes 2. Enfin un décret du 14 dé- cembre, en 62 articles, accompagné d'une instruction détaillée, régla le mode électoral, la composition et les fonctions des muni- cipalités nouvelles 3. Tous les habitants de la généralité de Caen, Français ou natu- ralisés, majeurs de 25 ans, domiciliés de fait depuis un an dans la commune, qui payaient une contribution directe de la valeur locale de trois journées de travail, qui n'étaient ni domestiques, ni banqueroutiers, faillis ou débiteurs insolvables, formaient la classe des citoyens actifs et devaient concourir, dans les assem- blées primaires, à l'élection des administrateurs municipaux. Pour être éligible, il fallait payer une contribution directe de la valeur locale de dix journées de travail. Le corps municipal se composait des officiers municipaux en nombre variable, de trois à vingt et un, présidés par le maire élu directement comme eux, chargés des détails de l'administration, et d'un procureur de la commune sans voix délibérative, sorte d'avocat d'office de la communauté ; dans les villes importantes, comme Caen et Cher- bourg, ce procureur était assisté d'un substitut. Des notables, élus en nombre double des officiers municipaux, venaient s'ad- joindre au corps municipal pour former le Conseil général de la commune. Celui-ci avait seul autorité pour délibérer sur les acquisitions ou aliénations d'immeubles, sur les impositions extraordinaires pour dépenses locales, sur les emprunts, les travaux à entreprendre, les procès à intenter, etc . . . et ne se réunissait que fort rarement. Le corps municipal comprenait un Conseil, siégeant une fois par mois et un bureau permanent. Ses fonctions étaient doubles les unes propres au pouvoir muni- cipal, comme la régie des biens et revenus communaux, le règle- ment et l'acquit des dépenses locales payées des deniers communs, la direction des travaux publics mis à la charge de la communauté, l'administration des établissements publics entretenus aux frais ADxvih B11, n° 100. Volncy dès le 14 août, Bouche et Bureaux de Pu/y le 28 août, ftahaud-Saint-Etienne le -21 septembre, avaient déjà soulevé la question, mais la discussion suivie sur la formation des municipalités ne commença ; que 10 livres au lieu de 30 livres, pour l'éligibilité. Ce fléchissement du cens ouvrait l'accès des futures assemblées primaires à de nombreux citoyens que l'insuffisance de leurs ressources avait exclus des assemblées paroissiales de 1787. En effet, le chiffre des électeurs ruraux mentionnés aux procès-verbaux de formation des municipalités de 1787 est sensiblement inférieur à celui des citoyens actifs qui fut établi pour chaque commune en avril 1790, sur la demande des commissaires du roi 2. Mais ce dernier chiffre, à son tour, est notablement inférieur à l'ensemble des citoyens. Beaucoup de contribuables taxés à des cotes très modestes, que le Règlement du 24 janvier 1789 avait rangés parmi les électeurs des assemblées primaires de février-mars 1789, se virent retirer le droit de vote par la législation nouvelle. Au lendemain d'un suffrage presque universel, celle-ci organisait un suffrage restreint. De tous ces journaliers de9 campagnes, fileurs de coton ou manouvriers, pauvres masuriers », pêcheurs et matelots des paroisses mari- times, infimes artisans des villes, dont l'imposition s'échelonnait presque partout de 5 à 20 sols, elle forma une classe assez nom- breuse de prolétaires sans action légale sur la vie publique 3. i La journée de travail fut parfois évaluée à 18 sols, comme à Carentan et même à 15 s., comme à Mortain, ce qui abaissait le cens électoral à 54 et 45 s. d'impositions. 2 J'ai fait ce travail de comparaison pour l'élection de Caen. Voici quelques détails significatifs le premier chiffre indique le nombre des feux, le second le nombre d'électeurs présents à l'assemblée de 1787, le troisième le nombre de citoyens actifs en 1790. Amayé-sur-Orne 106, 16, 57 ; — Cagny 62, 9, 33 ; — Cambes, 60, 10, 41 ; - Carpiquet 180, 16, 96 ; — Cheux 220, 19, 121 ; — Cinq-Autels 19, 3, 12 ; — Collevillc 124, 15, 75 ; — Colombelles 52, 14, 31 ; — Courseulles 240, 14, 122 ; - Cuverville 32, 6, 25 ; — Emiéville 40, 12, 29; — Escoville 56, 12, 33 ; — Esquay 61, 9, 31 ; — Eterville 69, 10, 59 ; — Fontaine-Henry 89, 9, 47 ; — Frénouville 70, 12, 51 ; — Grainville-sur-Odon 95, 19, 44 ; — Lion 160, 23, 117 ; — Luc 280. 24, 227 ; — Mouen 70, 16, 48 ; — Ouistreham 150, 12, 102 ; — Ranville 120, 24, 77 ; etc. Arch. dép., Calvados, C 7680 à 7685 et série Lm non inventoriée. Même en admettant des abstentions aux assemblées de 1787, l'écart reste considérable. 3 Quelques exemples tirés de l'élection de Caen. A Beuville 110 cotes, 26 ci- toyens actifs, 47 journaliers taxés de 10 à 15 sols pour exploitation ; à Biéville 106 cotes, 52 citoyens actifs, une trentaine de journaliers à 5, 10 et 15 sols ; à Bures 73 cotes, 32 citoyens actifs, 19 journaliers sans propriété, dont 15 taxés à 10 sols et 4 portés à néant » ; à Cagny 63 cotes, 33 citoyens actifs, 20 contribuables au-des- sous de 15 sols ; à Canteloup 38 cotes, 28 journaliers sont taxés au-dessous d'une livre ; à Bcrnières, paroisse maritime 254 cotes, 138 citoyens actifs, 99 taxés au-des- sous de 3 livres charpentiers de marine, poissonniers, matelots, écaleurs, etc.. Etats d'impositions de ces diverses paroisses en 1788, Arch. dép., Calvados, C 7837, 7838, 7840, 7854, 7856, 7861 sqq., et Ibid., série Lm non inventoriée. Liste des citoyens actifs et êligibles, dressée par ces municipalités en 1790. LES ÉLECTIONS MUNICIPALES DANS LES CAMPAGNES 385 En rejetant hors de la cité, sous le titre humiliant de citoyens passifs » tous ces individus pour qui la Déclaration des droits restait une suprême ironie, elle enraya la marche de la Révo- lution. Considérée à ce point de vue, la loi d'organisation muni- cipale de 1789 a pu être prise pour une loi de réaction bourgeoise, et M. Aulard a pu écrire qu'elle avait été votée contre le peu- ple » i. Le 6 janvier 1790, des lettres patentes sanctionnant le décret du 29 décembre 1789 prescrivirent la convocation sous huit jours des assemblées électorales pour la composition des municipa- lités 2. Dans la généralité de Caen, ces élections eurent lieu fin janvier et pendant le mois de février 1790. Une consultation aussi vaste ne pouvait être à l'abri de surprises et d'incidents ; elle fut toutefois exempte de violences et de désordres graves. Une des causes les plus fréquentes d'erreurs fut l'ignorance des paysans. A Monts, vingt-six des votants ne savaient ni lire ni écrire et ne purent rédiger leur billet séance tenante les opéra- tions furent ajournées du 7 février au 14 et ce jour là, les électeurs apportèrent leurs bulletins de vote remplis à l'avance 3. A Ver- nix, l'élection se fit à haute voix dans l'église paroissiale, parce que la grande majorité des électeurs ne savait pas écrire 4. L'inexpérience des électeurs dans une matière assez neuve pour eux vicia plus d'une opération ; les formalités légales ne furent pointfpartout respectées ici, des parents à un degré prohibé étaient élus, l'un maire et l'autre officier municipal 5>, là, un citoyen actif, mais non éligible, fut nommé procureur de la com- mune ° ; ailleurs, comme à Giéville et à Mesnil-Raoult, l'assem- blée électorale n'avait pas élu son président, les électeurs n'a- vaient pas prêté le serment obligatoire, les officiers municipaux 1 Aulard, Histoire de la Révolution française, p. 59. — Jaurès, Histoire socialiste, t. I, p. 396-398, explique L'attitude de la Constituante à l'égard des prolétaires par les rois raisons suivantes 1° elle redoutait que le prolétariat anarchique ébranlât la propriété ; 2° elle redoutait que le prolétariat servile compromît la Révolution ; 3° elle refusait d'associer la partie ignorante du peuple à la Révolution, préparée par le progrès des lumières. 2 Arch. dép., Calvados, C 1019. 3 Arch. comm., Monts, RR 1. Registre des délibérations, 7 et 14 février 1790. 4 Ibid., Vernix. Registre des délibérations, 8 février 1790. — Chouains est si pauvre en gens lettrés, écrit le curé de cette paroisse, qu'elle ne peut môme trouver un gref- fier qui sache écrire passablemcut. » Lettre du 6 mars 1790. Arch. dép., C 7631. 5 Arch. comm., Cretteville. Registre des délibérations, 24 janvier et 14 février 1790. 6 Ibid., Hudimesnil. Registre des délibérations, 1er et 2 février 1790. 25 386 IRRÉGULARITÉS DES OPERATIONS ÉLECTORALES n'avaient pas été élus au scrutin ou n'avaient pas obtenu la majo- rité absolue W. Ces divers cas se produisirent à Bures 2, Che- vry,\\ y eut des protestations contre la formation du bureau le président et les scrutateurs déplaisaient à une fraction notable de ces deux assemblées. A Ducey, le président de l'assemblée électorale, le futur conventionnel Sauvé, se crut obligé de protester contre les attaques d'adversaires qui le représentaient comme un fauteur de troubles publics11. A Verson, la cabale et l'intrigue introdui- sirent dans la municipalité nouvelle plusieurs membres de l'an- cienne, accoutumés depuis longtemps à tyranniser les paroissiens en foulant aux pieds le règlement, et en ne travaillant que dans les ténèbres » 12. A Arromanches, on voit une femme se mêler aux opérations du scrutin, et rédiger des bulletins même pour ceux qui savent lire ». Des matelots qui ne paient pas d'impôt ont formé la municipalité, écrit avec indignation le syndic municipal, et ont mis à la tête de celle-ci un fermier non domicilié 13. Ailleurs, la fraude se pratique avec un audacieux cynisme à Couvers, par exemple, où un seul électeur donne dix fois son suffrage pour 1 Arch. dôp., Manche, C 629. Registre des délibérations du bureau intermédiaire de Saint-Lô, arrclé du 27 février 1790. Cf. une lettre des procureurs-syndics provin- ciaux aux procureurs-syndics du département de Saint-LO, 24 février 1790. Arch. dép., Calvados, Ç 7625. 2 Lettre des procureurs-syndics provinciaux aux procureurs-syndics du départe- ment de Moriain, 23 janvier 1790. Ibid., C 7625. 3 Lettre des procureurs-syndics provinciaux aux procureurs-syndics du départe- ment de Saint-Lô, 18 février 1790. Ibid., C 7625. 4 Lettre des procureurs-syndics provinciaux aux procureurs-syndics du départe- ment de Saint-Lô, 16 mais 1700. Ibid., C 7625 et 7702 Voir les plaintes des ofliciers municipaux nommés dans l'assemblée électorale du 2 février, contre Brohon, lieute- nant général du bailliage, qui a été élu maire dans une assemblée scissionnairc du 11 lévrier. Arch. Bat., D iv 11. 5 Arch. comm., Amfreville. Registre des délibérations. in Arch. dép., Calvados, G 7672. 7 Ibid., 17672. s, Aich. nal., I iv 41. 9 Arch. comm.. Bricqueville. Regislrc des délibérations. 3 et 4 février 1790. 10 Ibid.. Montchaton. Registre des délibérations, 11 février 1790. 11 Ibid., Ducey. Registre des délibérations, 17 janvier 1790. 12 Arch. dép., Calvados, série Lin non inventoriée. 13 Ibid., C 7881. ET CABALKS 387 l'élection du maire il. Il y eut quelque tumulte à Tourlaville '2 et à la Haye-Pesnel, où les citoyens actifs, en dépit des règlements, s'obstinèrent à déclarer inéligibles le curé, le vicaire et les rece- veurs des impositions 3. A Bricqueville, au contraire, le curé de la seconde portion fut élevé à la mairie par une fraude scanda- leuse, au dire des plus notables et des plus imposés de la com- mune ». Il s'était fait remarquer en mars 1789, à l'assemblée du clergé tenue à Coutances, par son antipatriotisme », par son refus de se solidariser avec la minorité libérale des curés qui de- mandaient la cessation des privilèges pécuniaires de leur ordre. Il fut élu cependant, grâce à la cabale affreuse d'un corps de sauniers qui n'ont pour toute fortune que le commerce de sel et qui sont le nombre dans toutes les assemblées ». Pour donner plus de poids à leur requête, les plaignants décrivent les menus incidents des opérations électorales et montrent le curé fumant sa pipe dans le cimetière au milieu des sauniers et allant boire en leur compagnie dans un cabaret voisin ». Ils allèguent surtout, comme argument décisif, que le curé a eu un tiers de voix de plus qu'il n'y a de votants {AK Tous ces cas d'irrégularité dans la for- mation des municipalités furent soumis, en l'absence d'instruc- tions précises, au jugement de la Commission intermédiaire provinciale de Caen, qui, après avis des bureaux intermédiaires intéressés, validait l'élection ou prescrivait la tenue d'assem- blées électorales nouvelles 5. Ces fonctions d'arbitre devaient passer, en avril 1790, aux commissaires désignés par le roi pour la formation des assemblées administratives des départements et des districts °. Ceux-ci n'eurent que très rarement l'occasion de les exercer, car dès le mois de mars presque toutes les municipa- lités étaient constituées dans le ressort de la généralité de Caen7. 1 Arch. dép., Calvados, C 7631. 2 Arch. comm., Tourlaville. Registre des délibérations, du 10 au 13 février 1790. Cf. Arch. nat., D iv 11. 3 Arch. comm., La Haye-Pcsnel. Registre des délibérations, 21 janvier 1790. 11 en fut de même à Condé-sur-Seulles, d'après une lettre du curé au procureur-syndic du déparlement de Bayeux. Arch. dép., Calvados, C 7631. 1 Lettre des habitants les plus notables et les plus imposés de Bricqueville à l'Assemblée nationale, 19 février 1790. Arch. nat., D vi 21. ' Lettre de la Commission intermédiaire provinciale de Caen au bureau intermé diaire de Caen, i mars 1790. Arch. dép., Calvados, C 7672. 6 Lettre du contrôleur général à la Commission intermédiaire provinciale de Caen. 13 avril 1790. Ibid., C 7733. 7 Lettre des procureurs-syndics provinciaux aux procureurs-syndics du départe- ment de Saint-Lù, 4 mars 1790. Ibid., C 7625. 388 LES OPÉRATIONS ÉLECTORALES DANS LES VILLES '^ Les élections municipales des villes, dont la police était assurée par les gardes nationales, furent aussi peu troublées que celles des campagnes ; mais les opérations électorales, plus compliquées, exigèrent une plus longue durée. D'après le décret du 14 décem- bre, il devait y avoir dans les villes une seule assemblée jusqu'à 4,000 habitants, deux de 4,000 à 8,000, trois de 8,000 à 12,000 et ainsi de suite. Caen se partagea en dix sections le Bon-Sauveur, Saint-Louis, les Carmes, le Saint-Sépulcre, l'Horloge, les Corde- liers, la Place Royale, l'Université, l'Académie et Saint-Benoît *. La constitution des dix bureaux de vote et les scrutins pour la nomination d'un maire, un procureur et un substitut, quatorze officiers municipaux et vingt-huit notables ne prirent pas moins de douze jours. Nommés successivement, du 1er au 12 février, les membres de la municipalité nouvelle ne furent installés que le 18 février 2. Bayeux forma trois arrondissements électoraux, ceux des Cordeliers, des Augustins et des Capucins. Le premier scrutin eut lieu le dimanche 27 janvier, l'installation de la muni- cipalité le 3 février 3>. A Vire, où la population dépassait 8,000 habitants, il y eut trois assemblées à l'hôpital général, aux Cordeliers et à l'église Saint-Thomas ; plusieurs scrutins de ballottage prolongèrent leur durée du 2 au 9 février 4. A Condé- sur-Noireau, qui comptait près de 3,800 âmes, tous les habitants qui acquittaient une contribution directe de 54 sols, soit 18 sols par journée de travail, furent invités à se réunir le vendredi 5 février à l'église Saint-Sauveur pour procéder à l'élection de la municipalité nouvelle 5. Carentan, ville peuplée de 3,200 habi- tants, n'eut qu'une seule assemblée, réunie le 24 janvier à l'église Notre-Dame, sous la présidence du premier échevin les citoyens actifs, qui payaient 3 livres d'impositions directes y élurent un maire, huit officiers municipaux et dix-huit notables 6. A Cher- bourg, forte de plus de 11,000 habitants, le Comité municipal et national fixa au mardi 9 février les assemblées qui devaient se tenir dans les trois sections de la Juridiction, de la rue Grande- Vallée et de la Poudrerie neuve. La valeur de la contribution 1 Arch. comm.. Caen, BB 97, f° 14-16. Registre du Comité général municipal et permanent. Coupe de la commune en 10 sections. 2 Ibid., BB 96. Délibérations du l" au 12 février 1790, et Dl, Délibération du 18 février 1790. 3 Ibid., Bayeux, Di12. Registre des délibérations, 27 janvier et 3 février 1790. 4 Ibid., Vire. Registre des délibérations, 2-9 février 1790. 5 Ibid., Condé, BB1. Registre des délibérations, 20 janvier 1790. Ibid,, Carentan. Registre des délibérations, 24 janvier 1790. LES OPÉRATIONS ÉLECTORALES DANS LES VILLES 389 directe avait été fixée à 3 livres pour les citoyens actifs et à 10 li- vres pour les éligibles. L'élection du maire, du procureur de la commune et de son substitut, de douze officiers municipaux et de vingt-quatre notables demanda onze jours, du 9 au 20 fé- vrier . Les électeurs Granvillais procé- dèrent le 1er février et les quatre jours suivants au choix d'un maire, d'un procureur, de huit officiers municipaux et de seize notables. Un seul incident vint troubler leurs opérations l'offi- cier du génie qui commandait à la caserne refusa les clefs de la salle du scrutin et l'intervention de la garde nationale fut néces- saire pour vaincre sa résistance 3. Avranches comptait plus de 4,000 habitants ; le Comité permanent, après avoir fixé à 20 sols la valeur de la journée de travail, avait décidé que les élections auraient lieu le 20 janvier dans les deux sections de Notre-Dame- des-Champs et de Saint-Gervais. Mais une lettre du député du bailliage, Burdelot, lui ayant annoncé que de nouvelles instruc- tions allaient paraître sur la formation des municipalités, il se ravisa pour ne point s'exposer à faire des opérations illégales » et en ajourna la date au 3 février. Du 3 au 11 février, furent nommés le maire et le procureur, huit officiers et seize notables W. Mortain, avait deux paroisses, Saint-Guillaume et le Rocher, et comptait une population de 2,554 habitants. La journée de tra- vail n'y fut évaluée qu'à 15 sols. L'assemblée électorale, qui se tint dans l'auditoire du bailliage, sous la présidence du lieutenant général Vaufleury de Saint-Cyr et qui dura trois jours, nomma un maire, un procureur, cinq officiers municipaux et douze notables 5. Pour élire les dix-huit membres du Conseil général et le procureur de la commune, les citoyens actifs de Tinchebrai se réunirent du 17 au 21 février 1790 6. 1 Arch. comm., Cherbourg, BB 5. Registre des délibérations, 9-20 février 1790. 2 Il en fut de même à Tailleville, hameau de Langrune qui, ayant une collecte propre, s'érigea en municipalité sous l'influence du prieur Bruzeau Arch. dép., CaJ- vados, série Lm non inventoriée, et à Isigny, dont les deux communautés, urbaine et rurale, perpétuellement en conflit, formèrent deux municipalités particulières Arch. nat., D ivbis 10, 231. — Un phénomène inverse se produisit pour les communautés d'Ifs et de son hameau Bras, qui se fondirent en une seule municipalité. Arch. dép., Calvados, C 7672. 3 Arch. comm., Granville. Registre des délibérations, 1-5 février 1790. 4 Ibid., Avranches. Registre des délibérations n° 2, 3-11 février 1790. 5 Ibid., Mortain. Registre des délibérations, 27-29 janvier 1790. 6 Ibid., Tinchebrai. Registre des délibérations, 17-21 février 1790. tX COMPARUTION DES KLECTKURS URBAINS En limitant au chiffre de 650 le maximum des électeurs que devait contenir chaque assemblée primaire, le décret du 14 dé- cembre avait voulu prévenir les désordres et la confusion insépa- rables des réunions trop nombreuses. Ce danger n'était pas à redouter en Basse-Normandie, où l'indifférence écarta plus d'un citoyen actif des salles du scrutin. Les dix sections de Caen ne réunirent jamais, à elles toutes, plus de 1,142 suffrages. Les trois sections de Bayeux comptèrent au plus 145, 132 et 110 votants, au total 387. Les électeurs de Granville, au nombre de 198, se partagèrent entre deux bureaux de vote ; les deux assemblées primaires d'Avranches ne recueillirent respectivement que 142 et 133 voix. 117 votants à Mortain, 56 à Carentan ne pouvaient former des groupes fort tumultueux. Une étude méthodique de la comparution individuelle aux assemblées primaires de février 1790 fournirait sans doute la preuve que d'assez nombreuses abstentions durent s'y produire. Ceux-là même qui avaient fait acte de présence le premier jour se lassèrent de voir traîner les opérations électorales, ou attribuèrent moins d'importance à la nomination des notables qu'à celle du maire et des officiers muni- cipaux et, dans certaines villes, les assemblées primaires allèrent se décimant chaque jour jusqu'à tomber à un chiffre insignifiant V. Le maire de Mortain avait obtenu 73 suffrages sur 117 le dernier des notables fut élu par vingt voix ! Le choix des électeurs, dans les villes, se porta sur des person- nages déjà fort en vue, que leur situation sociale, leurs bienfaits, leur popularité dès longtemps acquise désignaient à la plupart des suffrages. Les municipalités urbaines ne continrent pas beaucoup d'hommes nouveaux. A Vire, où l'éducation révolu- tionnaire semble avoir été plus avancée qu'ailleurs 2, par 246 voix sur 397, le chef du parti des novateurs, Richard Castel, fut élu maire au second tour de scrutin. A Bayeux, au contraire, 233 voix sur 387 votants confièrent l'administration de la ville à l'évêque, de Cheylus, malgré son attitude assez nettement antirévolu- tionnaire. Les autres villes choisirent, d'une façon générale, leurs 1 Le Comité de Caen avait dû reculer de; deux jours l'ouverture du scrutin, par suite de l'abstention presque complète des citoyens actifs. Arch. comm., Caen, BB97, f°21. — Le nombre des votants, qui était de 1,142 le 3 février, était déjà tombé à 1,000 le lendemain, lbhl, BB . Un des plus curieux témoignages de sympathie et d'admira- tion que l'Assemblée nationale ait alors reçus est celui d'une petite paroisse voisine de Cherbourg, celle de Gréville. Les paysans de ce village perdu à l'extrémité du Cotentin, au seuil des vastes et mélancoliques landes de la Hague, traduisirent leur enthou- siasme dans une langue agreste, d'une savoureuse naïveté. Appuyés sur nos bêches, nous avons juré, par nos charrues, de faire tous nos efforts corporels et intellectuels pour fertiliser nos champs et rendre nos moissons abondantes W, . . Voilà pour vous, s'écrient-ils, aristocrates à baïonnettes, . . . pour vous qui proj etez des pactes de famine ». Leur reconnaissance prend un tour original. Ils rêvent d'associer à leurs travaux rustiques, pour le rendre plus durable, le souvenir des grands hommes à qui ils 1 Voici la liste des adresses des villes et bourgs de la généralité de Caen ayant notifié à l'Assemblée nationale la formation de leurs municipalités Granville, 8 fé- vrier 1790; paroisses de l'élection de Mortain, 17 février ; Creully, 19 février ; Cher- bourg, 21 février ; Tourlaville, 21 février ; Saint-Lo, 15 février ; Caen, 28 février ; Montebourg, 22 février ; Gréville-Hague, 1er mars ; Isigny, 2 mars. — Arch. nat., C 104, 105, 108, 109 et 110. 2 Arch. comra, Cherbourg, BB 5, fol. 211-243. 3 Ibid., Granville. Registre de correspondance 1, 8 février 1790. Ce même jour, la municipalité envoie six lettres pour notifier sa formation, au comte de Saint- Priest, ministre de la province, à Couraye-Duparc, son député extraordinaire à Paris, à l'intendant de Caen, à Perrée-Duharnel, son député aux Etats généraux, à Necker et à l'Assemblée nationale. 4 Arch. nat., C 108. 5 Arch. comm., Caen. Registre de correspondance 1. Lettre de la municipalité de Caen à Cussy, 28 février 1790. 6 Adresse des citoyens de la commune de Gréville à la Hague, Basse-Normandie, à l'Assemblée nationale, lor mars 179'L Arch. nat., C 110, 211. 396 UNE ADRESSE RUSTIQUE A L-ASSEMBLÉE NATIONALE doivent cette Révolution qui leur a donné la liberté *. Leurs enfants apprennent à graver, sur les outils ruraux, bêches, râteaux, houlettes, à tracer le long des chemins les noms des présidents de l'Assemblée nationale ; celui du Roi sera gravé sur les charrues » 2. L'organisation municipale des communes de la généralité de Caen était à peine achevée, lorsqu'au début d'avril 1790, celle-ci vit commencer les opérations qui devaient aboutir à son démem- brement et à sa disparition. Dans la pensée de l'Assemblée natio- nale, la loi qui régularisait les institutions municipales était la préface d'une réforme générale, qui devait modifier profondé- ment la carte administrative du royaume. En condamnant les intendants et leurs suppôts, la Constituante voulut effacer jus- qu'au souvenir des circonscriptions que ceux-ci avaient régies ; elle abolit les divisions administratives existantes arrondisse- ment, élection ou département, intendance ou généralité ; elle les remplaça par d'autres divisions, plus nombreuses et mieux équilibrées cantons, districts et départements. La réalisation de cette réforme, qui demanda de longs mois, devait comprendre deux phases successives la phase législative qui, de novem- bre 1789 à mars 1790, fut consacrée à la délimitation et à la division des départements ; la phase executive, pendant laquelle s'élabora, d'avril à juillet 1790, sous la haute direc- tion de commissaires royaux, l'organisation du régime adminis- tratif nouveau. 1 Cette conquête leur paraît la plus précieuse de toutes. Ils jurent de vivre et mourir en hommes libres et d'étendre cette liberté jusqu'aux limites sacrées que prescrit la loi ». Cette adresse, d'un caractère nettement révolutionnaire, se termine par une formule que l'usage répandra La liberté ou la mort ! » 2 Au premier rang des nombreuses signatures qui terminent cette adresse, j'ai relevé le nom de N. Millet. C'est, ù n'en pas douter, l'aïeul du grand peintre de l'Angélus » et des Glaneuses ». François Millet, enfant de Gréville, ne devait-il pas, dans son œuvre pacifique, immortaliser les descendants de ces robustes et cou- rageux travailleurs, qui demandaient à leur bêche et à leur charrue la régénération du payi•>. LE PLAN DU COMITÉ DE CONSTITUTION £99 L'Assemblée nationale consacra près de cinq mois à cette œuvre. Ce ne fut qu'à partir de septembre 1789 qu'elle s'y employa avec méthode et esprit de suite W, Le 29 septembre, le Comité de constitution, par la voix de son rapporteur Thouret, lui présenta un projet de division qui partageait le royaume en quatre vingts départements de 324 lieues carrées chacun, 720 dis- tricts de trente-six lieues carrées et 5,780 cantons de quatre lieues carrées 2. Cette conception trop rigoureusement géomé- trique trouva un adversaire résolu dans Mirabeau. Rebelle à ce qu'il croyait une innovation téméraire, Mirabeau demandait qu'on composât avec les préjugés, que la division fût fondée sur des rapports déjà connus, qu'on ne tranchât point, en présence d'une opinion publique non préparée pour un tel démembrement, tous les liens qui resserraient depuis si longtemps les mœurs, les habitudes et les coutumes. Le projet qu'il déposa maintenait les provinces à la base du partage et taillait dans leur ressort cent vingt départements 3. Thouret sut faire à Mirabeau d'habiles concessions, tout en défendant le principe d'une division pure- ment géographique. La nouvelle division, dit-il, dont le Comité n'a jamais entendu que l'exécution serait rigoureusement géo- métrique, peut se faire presque partout en observant les conve- nances locales et surtout en respectant les limites des provinces. Aucune province n'est détruite ni véritablement démembrée, elle ne cesse pas d'être province, et la province du même nom qu'auparavant pour avoir des districts nouveaux ». Et Thouret, avocat de Rouen, pouvait citer l'exemple de la Normandie, qui, démembrée depuis deux siècles en trois intendances, avait con- servé si vivace la conscience de son individualité provinciale W. 1 La déclaration des Droits de l'homme et les grandes lignes de la Constitution avaient occupé les séances d'août et de septembre ; malgré l'intervention successive de plusieurs députés, Volney le 18 août, Bouche et Bureaux de Puzy le 28 août, Camus le 19 septembre, Babaud Saint-Etienne le 20, la réforme administrative avait dû être ajournée. 2 Arch. nat., AD xvin B10. Procès-verbal des séances de l'Assemblée nationale, n° 87. Séance du 29 septembre 1789. - Arch. dép., Orne, L 76. Bapport du nouveau Comité de constitution fait à l'Assemblée nationale le 29 septembre 1789, sur l'éta- blissement des bases de la représentation proportionnelle. Paris, Beaudoin, 1789, 24 p. 3 Procès-verbal des séances de l'Assemblée nationale, n° 115, séance du 3 novem- bre 1789. Arch. nat., AD xvin B11 . — Plan de division du royaume et rèylement pour son organisation, présenté par M. le comte de Mirabeau à l'Assemblée nationale. Arch. nat., ADi 60. 1 Discours de M. Thouret, membre du Comité de Constitution, ail à l'Assemblée nationale sur la nouvelle division territoriale du royaume, 3 novembre 1789. Paris, Beaii'loin, 1789, 20 p. Ibid.. ADi On. 400 LE DÉCRET DU 1. NOVEMBRE 1789 Le 19 novembre 1789, l'Assemblée décréta la division du royaume en départements dont le nombre pouvait varier entre 75 et 85, et chargea son Comité de constitution d'en établir le plan. Un Comité de division, sous-commission nommée par ce dernier, se mit aussitôt à l'œuvre. Une conception erronée semble avoir présidé à ses travaux, celle du respect dû aux droits des anciennes provinces. Ses membres crurent devoir adopter, comme base de la formation des nouvelles circonscriptions administra- tives, un ressort fictif, qui ne correspondait à rien de précis dans la réalité la province t%\ Leur procédé de travail consista à créer, pour les besoins du moment, des divisions au territoire assez nettement déterminé, capables de se prêter à un partage, et de faciliter ainsi le mode de constitution des départements 2. Par suite de cet artifice, deux opérations successives étaient nécessaires la délimitation des provinces entre elles, puis la division intérieure de chacune d'elle en départements. Les dépu- tés des provinces limitrophes devaient se concerter pour la pre- mière opération et ceux de chaque province particulière, pour la seconde. La Normandie fut donc délimitée avant d'être divisée. Les députés normands tinrent, avec ceux des pays voisins, une série de conférences ; ils eurent d'assez nombreuses difficultés à vaincre. Cette province, — pour employer l'expression imprécise dont ils se servaient, — n'avait ni une surface rigoureusement déterminée, ni des contours nettement arrêtés. Sans doute, les quatre-vingt-douze lieues de côte qui la bordaient au nord et à 1 L'opinion, si fortement ancrée dans l'esprit public, que la France était, avant 17slt, divisée en provinces ayant des limites exactes et précises, et que les départe- ments se sont comme encastrés dans ces anciennes provinces, a été battue en brèche par M. Brette. Elle est sortie, d'après lui, de l'ignorance où le roi, l'adminis- I ni lion et la plupart des Constituants se trouvaient du nombre, de l'étendue et des limites des divers ressorts du royaume. Les Constituants ont commis une erreur en parlant du respect dû aux anciennes limites des prétendues provinces. En réalité, la province n'avait pas d'existence réelle dans la France de 1789 la preuve en esl fournie par le Rapport du Comité de Constitution, du 29 septembre 1789, qui s'ex- prime ainsi Le royaume est divisé en autant de division- différentes qu'il y a de diverses espèces de régimes et de pouvoirs en diocèses sous le rapport ecclésias- tique; en gouvernements sous le rapport militaire en généralités sous le rapport administratif, et en bailliages sous le rapport judiciaire. » 11 n'y est pas l'ait mention de la province. A. Brette, La Réforme des déparlements Revue politique et parlemen- taire, 1909, t. LXII, p. 258-281. 2 On se préoccupa surtout dans cette œuvre hâtive, tout en faisant des conces- sions à l'opinion qui voulait conserver les anciennes provinces, de découper des cir- conscription- d'étendue à peu près comparable, destinées à servir de cadres à toute l'organisation administrative. » Gallois, Régions naturelles et Xoms de pai/s, p. 11. DÉLIMITATION DE LA NORMANDIE ET DES PAYS VOISINS 401 l'ouest lui formaient une frontière naturelle ; mais les limites de terre, qui, de l'embouchure du Couesnon à celle de la Bresle, la séparaient de la Bretagne, du Maine, du Perche, de l'Ile-de- France et de la Picardie, étaient conventionnelles et indécises. S'il y avait, en 1789, un gouvernement de Normandie, des dio- cèses, des généralités et des bailliages normands *, ces divisions militaires, ecclésiastiques, administratives et judiciaires, ne présentaient, vu leur diversité d'origine, aucune coïncidence entre leurs territoires respectifs. Il eut été impossible d'assigner un cadre déterminé au gouvernement militaire, dont le titulaire ne possédait qu'une fonction honorifique sans autorité réelle 2. Les ressorts des bailliages, essentiellement variables selon les circonstances, ne se prêtaient pas davantage à une exacte délimi- tation !3'K La province ecclésiastique de Rouen, avec ses sept diocèses, débordait sur l'Ile-de-France et confinait à l'Oise W. Des trois généralités normandes, deux empiétaient sur des pays qui n'étaient pas normands celle d'Alençon, sur le Thimerais et le Perche 5, celle de Rouen, sur le Vexin français 6. Un principe guida les députés dans leurs travaux ; ils déci- dèrent de conserver, autant que possible, sous la même adminis- tration les pays qui avaient pris la longue habitude de payer ensemble leurs impôts, de voter en commun la confection de leurs routes. Des procès-verbaux de démarcation, signés par les divers commissaires, tracèrent une nouvelle ligne de partage entre la Normandie d'une part, la Picardie, l'Ile-de-France, le Maine et la Bretagne d'autre part 7\ La superficie de la province, lj Sur ces circonscriptions diverses, voir A. Brette, Documents relatifs à la Convo- cation, etc., t. I. p. 39 les gouvernements ; p. 460-461 les généralités ; p. 510-511 les diocèses. — Cf. Brette, Les Limites et les Divisions territoriales de la France en 1789. A la fin de cet ouvrage, l'auteur a dressé des caries sommaires, non pour indiquer les bornes exactes de ces divisions territoriales, mais pour montrer les rapports que celles-ci avaient entre elles et leur ensemble à une date précise. 2 A. Brette, Les Limites et les Divisions, etc., p. 103. 3 Ibid., p. 117. Dans son Atlas des bailliages, l'auteur délimite ceux-ci en tant que circonscriptions électorales, à la date de 1789. 4 Diocèses de Bouen, Bayeux, Avrancbes, Evreux, Sées, Lisieux et Coutances. 5 Elections de Verneuil subdélégations de Verneuil et de Chàteauneuf-en-Thime- rais\ et de Mortagne subdélégations de Mortagne, Bellème et Nogent-le-Botrou. 6 Elections de Magny et de Chaumont-en-Vexin. 7 Procès-verbaux de démarcation, faits au Comité de Constitution et conservés aux Archives nationales limites entre le département de Beauvoisis et celui de Normandie », arrêtées le 1er février 1790 par les ducs de Liancourt et de Verdonne, commissaires du Beauvoisis ; le marquis de Mortemart, Cherfils et Bourdon, com- missaires du département de Normandie ». Arch. nat., D ivbisl, Cettedélimita- 26 4Q'l . LE PARTAGE DU VEXIN ET DU PEKCI1E telle qu'on la reconstitua provisoirement en vue de son démem- brement immédiat était inférieure au ressort des trois générâ- mes administratives réunies. La Normandie des intendants perdait, au profit de l'Ile-de-France, la partie du Vexin située sur la rive gauche de l'Epte fl, qui formait dans l'ancienne géné- ralité de Rouen les élections de Chaumont et Magny. Vers le sud-est, le Thimerais et le Perche, autrefois englobés dans la généralité d'Alençon, furent dépecés une ligne conventionnelle, traversant les élections de Verneuil et de Mortagne, rejoignit l'Avre à l'Huisne, laissant à la Normandie Mortagne et Bellême, lui enlevant Châteauneuf et Nogent-le-Rotrou ; en restreignant la province, elle arrondissait ses contours, lui arrachait ses bizarres protubérances 2. De l'Huisne au Couesnon, les anciennes limites qui séparaient les généralités d'Alençon et de Caen de celles de Tours et de Rennes furent respectées 3. La seule ques- tion souleva quelques difficultés à propos des communes de Bothois, Frettencourt et Lannoy-Cuillère, qui, malgré leur situation sur la rive gauche de la Bresle, en pays normand, furent rattachées au Beauvaisis ; celle de Boisgeloup, au contraire, située sur la rive gauche de l'Epte, dans le Vexin français, fut attrihuée définitivement à la Normandie. Baumont, La formation du déparlement de l'Oise, Bulletin de la Société d'Etudes historiques et scientifiques de l'Oise, t. Ier, 1905, p. 59-62. — Limites entre les départements d'Evreux et de Chartres, arrêtées le 2 janvier 1790, par Bouvet, corn missaire de Chàteauneuf-en-Thimerais, Buzot, d'Evreux, et Phélines, de Chartres Arch. nat, D iv 1, 1. 23. — Limites du Perche entre les départements d'Alençon et du Mans, fixées le 25 janvier 1790 par Belzais de Courmesnil, commissaire de la pro- vince de Normandie; Livré, du département du Mans Bailleul. du département d'Alençon pour le Perche. Ibid., D ivlm 2, 1. 45. — Mention des procès-verbaux de bornement signés le 2 janvier entre les départements d'Evreux et d'Alençon et, d'autre part, de Chartres. Ibid., D iv 2, 1. 25. — Mention de la démarcation faite par les députés de la généralité de Tours, entre cette généralité et la Normandie 1 Sauf la commune de Boisgeloup, aujourd'hui réunie à Gisors Eure. 2 Le territoire de Céton fut disputé entre la Normandie et le Maine. Le procès- verbal général de la province de Normandie arrête qu'il resterait au Perche du département d'Alençon », ce qui explique la protubérance actuelle. Arch. nat., Divbis2, 3j Du côté de la province du Maine, le district d'Alençon comprend tout le ter- ritoire normand sans exception, sans que, sous prétexte d'extension ou autrement, la province du Maine puisse prétendre au-delà des limites ordinaires du territoire qui eu a dépendu jusqu'à ce jour. » Ibid.; D ivbls 2, 1. 45. — Le département du Coten- tin a pour Limites au midi les anciennes frontières des provinces de Bretagne et du Maine, qui demeurent les mêmes ». Procès-verbal de démarcation et de division du département du Cotentin, 26 février 1790. Arch. nat., NN*12. — Pour établir la limite sud-ouest précise entre la Bretagne et la Normandie, consulter en outre les cartes de formation des départements de Cotentin et d'Ille-et-Vilaine en 1790 {Ibid., N99 et 112. Le département du Cotentin y a pour limite le Couesnon, qui coulait fort à l'ouest de son lit actuel rectifié, et qui côtoyait, jusqu'au village des Quatre-Sali- nes, le pied de la digue" des marais de Dol, baignant aussi le bourg de Bos-sur- Couesnon, aujourd'hui très distant de cette rivière. DIVISION DE LA iNOliMAMMK. PREMIER PROJET 403 tion difficile fut celle des paroisses mixtes disputées entre la Normandie et le Maine et qui, réunies sous le même clocher, formaient des collectes et des municipalités distinctes. En raison de la différence trop prononcée qui existait entre les coutumes des deux provinces, les commissaires arrêtèrent de respecter l'irrégularité actuelle de la démarcation et d'attendre, avant toute rectification prématurée, que le temps eût fait son œuvre et affaibli l'esprit de ces coutumes » *. Ce fut, on le voit, avec la plus grande prudence que les Constituants opérèrent la délimi- tation des provinces ils eurent au plus haut point la notion des convenances locales, le sens du pratique ; ils apportèrent les précautions les plus minutieuses à ne point troubler les habi- tudes acquises, ils mirent tout leur soin à ménager le passé pour ne point compromettre l'avenir. La même prudence présida à la division intérieure de la Nor- mandie en départements. Ce fut vers la fin de novembre que les députés des bailliages normands commencèrent à se concerter sur cet objet. Combien y aurait-il de divisions et de sous-divi- sions et quelles villes en seraient les chefs-lieux? » telles furent les premières questions à résoudre. Le 29 septembre 1789, lors- que fut déposé à la tribune de l'Assemblée le projet de division émanant du Comité de Constitution, un membre demanda la distribution à tous les députés d'une carte destinée à éclairer ce projet W. La carte dressée à cette époque est introuvable aux Archives nationales ; elle existe dans une collection privée, dont le possesseur m'est inconnu. Par un heureux hasard, j'ai pu en obtenir une reproduction, qui comprend la portion du territoire français correspondant à la Normandie 3. Cette province y apparaît avec les limites présumées de son gouvernement, Vexin français et Perche exclus ; elle est divisée en quatre départe- ments répartis de telle sorte que tous quatre ont vue sur la mer. 1 Procès-verbal de démarcation et de division du département de Laval, dressé au Comité de Constitution de l'Assemblée constituante, en présence des députés de Ce département, avec les départements limitrophes, 27 février 1710. Arch. dép. Orne, série N non inventoriée. 2 Procès-verbal des séances de l'Assemblée nationale, n° 87, 29 septembre 178'J. Arch. nat., ADxvm F. Le Point du Jour, n° 94, cite le nom de ce député de Ricûier, député de la noblesse de Saintes. 3 Le croquis ci-joint m'a été donné autrefois par feu l'abbé Lebel, professeur de géographie à l'Institut catholique de Paris, sous ce titre Extrait de la Carte de France divisée suivant le plan proposé à l'Assemblée nationale par le Comité de Constitution, le 29 septembre 1789. » Il avait eu à sa disposition cette carte qu'i avait entièrement copiée ; il ne m'a jamais révélé le nom de son possesseur. 404 LA NORMANDIE DIVISEE EN CINQ DEPARTEMENTS Les lignes d'eau y jouent un grand rôle. Le département oriental a pour limites la mer, la Seine, l'Andelle, l'Epte supérieure et la Bresle. Le département voisin est borné par la mer, la Seine et l'Andelle au nord ; à l'est par l'Epte inférieure et une ligne parallèle à l'Eure, menée du confluent de l'Epte à celui de l'Avre ; au sud par l'Avre ; à l'ouest par la Dives * c'est le département de l'Eure actuel un peu élargi. Pour former les deux derniers départements, une ligne à peu près horizontale partageait le reste de la Normandie, quittant la Dives au confluent de l'Ante, passant au sud de Falaise et de Condé, au nord de Vire et se confondant avec le cours inférieur de la Sienne jusqu'à son embouchure 2. Cette première division de la Normandie, qui n'exista qu'à l'état de projet, offre un intérêt purement historique. Dans le courant de novembre, un autre projet sembla prendre consis- tance. Il est vraisemblable, écrivait le 23 novembre un député du bailliage d'Evreux aux officiers municipaux de Bernay, qu'il y aura six départements » 3. Les intérêts particuliers de certaines villes semblaient exiger ce nombre 4 ; l'intérêt général l'emporta. Le 12 décembre, les députés de Normandie se réu- nirent à Paris au couvent des Capucins, sous la présidence du duc de Coigny. Après examen de divers projets, soumis par le comte de la Chapelle, Thomas Lindet et Lecouteulx de Canteleu, l'Assemblée se décida par trente-sept voix contre dix-sept à adopter le plan de ce dernier, qui divisait la Normandie en cinq départements 5. Les cinq jours qui suivirent furent employés 1 Il semblerait, d'après le tracé du croquis, que la Dives n'a pas été, jusqu'à son embouchure, une limite interdépartementale ; quelques communes du canton actuel de Dozulé Saint-Samson, Bassenevillc, Brueourt et Dives, auraient appartenu au département occidental bien que situées sur la rive orientale de la Dives. 2 La Normandie des trois généralités comprenait, au dire de Necker, 1635 lieues carrées. En retranchant les 240 lieues carrées que représentent le Vexin français, le Thimerais et le Perche, on obtient le chiffre de 1395 lieues carrées, c'est-à-dire la surface de quatre départements rigoureusement égaux, de 324 lieues carrées chacun. Ce calcul est un argument de plus en faveur de la véracité de ce document. 3 Thomas Lindet, Correspondance, p. 19. — Le 28 novembre, Lindet écrivait aux mêmes On n'est pas d'accord sur la division en cinq ou six ; l'intérêt général doit l'emporter sur l'intérêt particulier... S'il n'y a que cinq départements en Norman- die, on gagnera les frais d'administration d'un département et de ses districts, les frais d'une cour de justice, les frais d'un évêché et d'un chapitre. » Ibid., p. 23. 4 Lisieux notamment, qui fit de pressantes démarches dans ce but. Ibid., p. 23. b D'après une lettre de Thomas Lindet aux officiers municipaux de Bernay, la division en cinq départements était déjà décidée le 4 décembre 1789. Ibid., p. 27. — La présente division générale de la Normandie et partie du Perche en départe- ments a été adoptée et arrêtée par l'assemblée générale de la province, après la Limite des départements Echelle Vz PROJET DE DIVISION DE LA NORMANDIE en 4 Départements 29 Septembre 178p. MODE DE DÉLIMITATION DES DEPARTEMENTS 405 au tracé de ce plan ; les députés mirent à ce travail, plus de chaleur qu'au partage d'une succession » 0. Le 17 décembre, ils se rendirent au Comité de constitution pour l'examiner en détail. Par cinquante-neuf voix contre trois, ils l'adoptèrent en y faisant de légères retouches. On trouva trop rapprochée de Saint-Lô la ligne qui séparait les départements de Caen et de Cotentin et il fut résolu, avec l'assentiment des députés de Caen, qu'on la ramènerait à la Drôme. On proposa aussi de soustraire au département d'Alençon plusieurs communes voisines de Mortain qui par erreur y étaient comprises. Cette division de la Normandie n'eut rien d'arbitraire. On se préoccupa de satisfaire à la fois aux conditions imposées par la nature, par les intérêts locaux et par les exigences du plan général de division. La nature semblait avoir désigné les limites des départements de Rouen et de Cotentin on n'avait qu'à suivre ses indications. Celui de Caen était si heureusement placé qu'on lui assigna facilement ses bornes occidentale et orientale. Ces trois départements furent tranchés par des sections de longitude, du nord au midi, parce que les rivières coulant dans cette direction formaient entre eux des lignes naturelles de séparation. Le reste de la Normandie devant former deux départements, il ne s'agissait plus, écrit Lindet, que de prendre le compas ». On s'efforça d'ailleurs de conserver le plus possible les anciennes habitudes, les relations de commerce; on eut égard à la direction des routes». En divisant les départements de Caen et d'Alençon dans le sens de la latitude, on chercha à respecter l'étendue de surface » déterminée par l'Assemblée nationale dans son plan général de division du royaume. Il n'était pas possible, écrivaient les députés extraor- dinaires envoyés par Caen à l'Assemblée, de tracer une coupe intérieure qui satisfît mieux tous les intérêts et conciliât plus heureusement les considérations politiques avec les sections indiquées par la nature » 2. Le démembrement de la province morcelait les trois généra- discussion et l'examen des différents plans de division en un moindre, ou un plus grand, ou un égal nombre de départements qui lui ont été présentés. Procès-verbal de la division de la province de Normandie. Arch. nat, D ivbis 1, 1. 23. 1 Chacun, ajoute Lindet, a présenté ses plans. J'ai lavé une carte et tâché d'accor- der à chacun ses objets de prédilection. » Lettre du 17 décembre 1789. Thomas Lin- det, Correspondance, p. 31. 2 Observations sur la division territoriale de la Normandie et sur le département de Caen en particulier, par les députés extraordinaires de la commune de Caen, 5 décembre 1789. 106 LIMITES DES OÉP AHTKMENTs f>E CAEN, COTENTIN, ALENOON liU's normandes. Des cinq départements nouveaux, les deux extrêmes, ceux de Rouen et de Cotentin, étaient entièrement taillés dans le ressort d'une seule généralité. Deux autres emprun- taient leur territoire à deux généralités le département d'Evreux généralités de Rouen et d'Alençon et celui d'Alençon généra- lités d'Alençon et de Caen. Quant au département de Caen, situé au point de soudure des frontières intérieures des trois généralités, il n'avait pu se constituer qu'aux dépens de toutes trois. La généralité de Caen, en cessant d'exister» donna ainsi nais- sance à trois départements celui de Cotentin en totalité ; ceux de Caen et d'Alençon en partie, Son territoire fut partagé en trois zones inégales par les lignes frontières des circonscriptions nouvelles. Une ligne sinueuse, traversant les élections de Mortain, de Vire, de Saint-Lô et de Bayeux, sans respecter leurs limites, fut tracée du sud au nord, de la frontière du Maine à la baie des Veys. Depuis Heussé jusqu'à Gathemo, elle séparait les départe- ments de Cotentin et d'Alençon, laissant Mortain, Sourdeval et toute la forêt de Landepourrie au premier l\ Tinchebrai au second; de Gathemo à la mer, elle s'infléchissait en formant deux courbes irrégulières dont la concavité se tournait successivement vers Vire et vers Saint-Lô, comme pour arrondir leurs districts. Le fossé de la Vire, primitivement choisi comme limite, avait été abandonné sur un assez long parcours, pour la Drôme et pour F Elle !'2' ; Tessy, Torigni, Cerisy -l'Abbaye étaient au Cotentin, Saint-Sever, Pontfarcy, le bois l'Evêque, la forêt de Cerisy, celle de Neuilly au département de Caen. Du confluent de l'Elle aux Veys, la Vire redevenait barrière, fermant à l'est les marais de Carentan 3 . Ce travail s'opéra sans difficultés apparentes et sans incident notable. Une lutte assez vive s'engagea au contraire à propos de la délimitation des départements de Caen et d'Alençon 4l. La ligne de séparation adoptée par leurs députés longeait au sud Vassy 1 Prooès-rerb»! de délimitation des départements du Cotentin et d'Alençon Arch.. lnvl,ls 1, 1. 23, -2-2 décembre 1789, signé par Le Sacher de la Pallière, Le Bigot de Beauregard et Belzais-Courmesnil. 2 Procès-verbal de rassemblée de la province de Normandie, 17 décembre 1789. Ibid. 3 Procès-verbal de délimitation des départements de Caen el de Cotentin. 7 fan- vin- 1790. Ibid. I Procès-verbal dé délimitation des départements de Caen et d'Alençon, 22 dé- cembre 1789 [signé par le comte de Ypssv el Bélzais Courmesnil Ibid. LA MÊLÉE DES CONVOITISES RIVALES 407 et Condé-sur-Noireau, pour aboutir à l'Orne au pont d'Ouilly. Le procès-verbal particulier du 22 décembre 1789 indiquait formellement in fine que les deux Regards Saint-Martin et Saint-Pierre, faisant partie du bourg de Condé, appartiendraient au département de Caen. » On oublia de transcrire cette mention à la fin du procès-verbal général de division de la Normandie, arrêté le 7 janvier 1790 *. Saint-Pierre étant situé sur la rive droite du Noireau, le département d'Alençon en disputa la pos- session à son voisin. La querelle fut assez longue et ne fut tran- chée que le 3 février 1791, par un arrêté du Comité de constitu- tion attribuant Saint-Pierre au département de l'Orne 2. Au delà de l'Orne, la frontière quittait le territoire de la généralité de Caen et, de chaque côté de l'ancienne limite administrative à jamais effacée, de Pont-d'Ouilly à l'embouchure de la Dives, les paroisses autrefois séparées étaient réunies dans un ressort commun. Pendant que se poursuivait à Paris le travail de division inté- rieure de la province, la Normandie ne restait pas indifférente à ses futures destinées. Les projets de l'Assemblée nationale y furent à peine ébruités, que la mêlée des intérêts rivaux co- mença. Il n'y eut ville, ni bourg si peu important qui ne rêvât d'être chef-lieu de département, tout au moins de district. Une pluie de requêtes tomba sur le bureau du Comité de constitution, une nuée d'ambassadeurs locaux vint assaillir ses membres. Si quelques villes de Basse-Normandie, confiantes dans la sollicitude de leurs députés à l'Assemblée nationale, se contentèrent de correspondre très régulièrement avec eux sur le grand objet qui déchaînait alors toutes les convoitises 3, la plupart cherchèrent 1 Arch. nat., Divbisl, 1. 23. 2 Mémoire des propriétaires forains de Sainl-Pierre-du-Regard au département du Calvados au Comité de Constitution, 16 janvier 1791. Ibid., D ivhis 12, 1. 249. Sur cette question, voir Paul Le Brethon, La Formation du département du Calvados, p. 5. Paris, 1894, in-8\ 3 Bayeux entretient avec le baron de Wimpfen et Delauncy une correspondance presque quotidienne. Arch. comm., Bayeux, Registre de correspondance. — Mortain a laissé à Le Sacher de la Palliôre le soin de ses intérêts {Ibid., Mortain. Registre des délibérations, séance du 22 décembre 1789. — Saint-Lù est défendu par Vieillard Arch. nat., Divhls 10, 1. 231. — Périers fait appuyer ses prétentions par Pouret-Roquerie Ibid., D ivbis 10, 1. 230. — Le 18 septembre 1789, les officiers muni- cipaux de Caen écrivent à Lamy, député du bailliage Nous ne comptons point envoyer de députés aux Etats généraux. Nous nous reposons avec confiance sur vos lumières pour prendre en considération tout ce qui peut concerner l'intérêt de cette partie de la province, qui vous a si justement donné sa confiance. Aih comm., Caen, carton 56. 408 DÉPUTATIONS EXTRAORDINAIRES A L'ASSEMBLÉE NATIONALE d'autres appuis et ne reculèrent pas devant les frais de députa- tions extraordinaires pour augmenter leurs chances de succès. Caen délégua deux de ses bourgeois les plus en vue, Signard d'Ouffières et Bougon-Longrais, membres influents du Comité permanent, pour obtenir un chef -lieu de département et une cour souveraine U. Coutances envoya trois députés extraordinaires pour disputer à Saint-Lô le chef-lieu du Cotentin ~\ Avranches députa Brémesnil, maire et lieutenant général du bailliage, et Guérin pour s'assurer la possession d'un district a. Granville chargea d'une mission semblable son maire et ancien subdé- légué Couraye-Duparc W. Cherbourg fit appuyer les mêmes pré- tentions par Chantereyne, avocat au Parlement, qui résidait à Paris et lui adjoignit plus tard son maire, le chevalier de Gassé, et un échevin, Vastel 5. Désireuse d'empêcher le triomphe des projets de Cherbourg, inquiétants pour elle, Valognes envoya comme avocats le chevalier de Mesnildot et de Rozy 6l. Carentan, menacée par Périers et par la Haye-du-Puits, confia sa défense à Caillemer et Le Maignen et sollicita plus tard les bons offices d'un compatriote, Yver de la Bruchollerie, avocat à la Cour des aides 7. Torigni donna mission à deux membres de son Comité permanent, Plouin du Breuil et Lechartier de la Varignière 8, de solliciter un district avec un tribunal. Vire chargea un instant de ses intérêts le comte de Pontécoulant W. Des villes qui n'a- 1 Il s'agissait aussi de dissiper les préventions amassées contre cette ville à la suite de l'assassinat de Belzunce, de réfuter les dénonciations portées à la tribune ou insérées dans des libelles contre l'anarchie caennaise. La mission de Signard d'Ouffières et de Bougon-Longrais réussit pleinement. 2 Allusion faite à cette députation par le mémoire de Vieillard, député de Saint- Lô, du 19 décembre 1789. Arch. nat., D ivbis 10, 1. 231. 3 Arch. Avranches, Registre des délibérations, séance du 19 décembre 1789. Brémesnil et Guérin rendent compte de leur mission à Paris et assurent, leurs concitoyens de la possession d'un district. 4 Ibid., Granville. Registre des délibérations n° 2. Délibération du Conseil géné- ral et Comité national de Granville, 30 décembre 1789. 5 Lettre du Comité municipal à Chantereyne, 13 novembre 1789 {Ibid. Cherbourg. BB11 et délibération du 2 janvier 1790. Ibid., BB5 6 Mémoire présenté à MM. du Comité de constitution }> apportèrent à leurs revendications beau- coup d'ardeur et de ténacité. Lindet déplore, comme une faute grave, l'accueil que leur réserva le Comité de constitution. Leur long séjour à Paris 4J, leurs démarches réitérées, les intrigues qu'ils nouèrent firent, à l'en croire, perdre du temps aux députés et retardèrent la division du royaume. S'il y eut parmi ces solli- citeurs beaucoup de mécontents pour avoir mangé leur argent et n'avoir rien obtenu » 5, tous ne furent point éconduits et plus d'un put rentrer la tête haute dans sa ville, aux acclamations de ses concitoyens 6. L'assemblée générale des députés de Normandie avait, dès le 17 décembre, divisé la province en cinq départements ; cinq assemblées particulières, respectivement composées des députés 1 Arch. comm., Villedieu. Registre des délibérations, 30 décembre 1789. Cf. Arch. nat, D ivbis 10, 1. 230. 2 Arch. comm., Condé, D 1. Registre des délibérations, 19 août 1790. 3 Th. Lindet, Correspondance, p. 57. Lindet évalue leur nombre à plus de 3,000 pour la France. 4 Les deux envoyés de Caen restèrent à Paris du 21 novembre 1789 au 1er avril 1790 et dépensèrent 6,351 livres 5 sols. Mémoire de MM. les députés extraordinaires de la ville de Caen, sur le but de leur mission et les dépenses qu'elle leur a occasionnées. Arch. comm., Caen, carton 56. Ceux d'Avranches ont dépensé 1,000 livres et remet- tent dix louis au Comité général de la ville. Ibid., Avranches, Registre des délibéra- tions, séance du 19 décembre 1789. 5 Th. Lindet, Correspondance, p. 57. 6 Les députés extraordinaires de Caen se vantent d'avoir appuyé avec succès le projet de la division de la province en cinq départements au lieu de six qu'on voulait adopter et que l'intérêt de Caen rejetait ». — Parmi les frais consignés sur le mémoire de ces députés, figure un article ainsi conçu Nourriture tant de députés que domestiques, y compris huit repas donnés à des protecteurs, 2,173 livres 17 sols. » Arch. comm., Caen, cirton 56. — Les officiers municipaux de Caen leur écrivaient Nous savons que pendant votre séjour à Paris vous vous êtes fait de puissants protecteurs. Nous connaissons vos relations avec noire zélé concitoyen M. Bayeux, si bien accueilli de celui qui dirige encore les plus importantes opéra- lions du gouvernement Necker. Nous n'ignorons pas que vous avez mis dans vos intérêts le célèbre M. Thouret, etc. » Ibid., Caen. Registre de correspondance, lettre du 29 février 1790 — Couraye-Duparc accusa les députés du Cotentin de s'être laissé séduire par un certain genre d'éloquence des envoyés extraordinaires de Cher- bourg ». Arch. nat., D iv1,ls 10, 1. 231. — La Varignière, député extraordinaire de To- rigni, raconte qu'il offrit à l'Assemblée nationale, en don patriotique de sa ville, une superbe boîte en or enrichie de diamants, enveloppée dans un Précis imprimé en faveur de Carentan. » Lettre à mes commettants. Ibid., AD xvi 49. 410 CAEN CHEF-LIEU DE DÉPARTEMENT résidant sur le territoire des circonscriptions nouvelles, se réu- nirent aussitôt pour désigner les cinq chefs-lieux nouveaux. Des compétitions se produisirent entre les villes principales des trois départements occidentaux. Si, dans le département d'Alen- çon, cette ville vit s'élever en face d'elle les prétentions de Sées et d'Argentan, ni Tinchebrai, ni Fiers, ni aucune des localités détachées de l'ancienne généralité de Caen ne se posa en rivale leur médiocre importance et l'excentricité de leur situation ne leur permettaient point de telles ambitions. Dans le département de Caen, le choix ne semblait pas douteux. Siège de la généralité» puis en dernier lieu de l'Assemblée provinciale de Basse-Nor- mandie, située au centre du nouveau -département, Caen en était le chef-lieu tout indiqué. Son importance ancienne, le renom de son Université, sa population, sa facilité d'accès, la grandeur de ses édifices publics, la puissante sympathie des ducs d'Harcourt et de Coigny, tout la désigna pour cet honneur W. Elle se le vit toutefois disputer par deux villes, Lisieux et Vire. Lisieux, ville épiscopale, fit de pressantes démarches pour joindre à son évêché le siège de l'administration départementale ; elle ne put ni obte- nir l'un, ni garder l'autre 2. Vire, malgré sa chétive importance, aspirait aussi au rang de chef-lieu. N'était-elle pas la patrie du vaudeville et ne comptait-elle pas des enfants illustres comme Flaust, le dernier commentateur de la coutume de Normandie? Ne pouvait-elle devenir l'entrepôt du Maine, de la Bretagne et de la Normandie? Les connaissances de ses habitants, leurs lumières politiques, civiles et naturelles le cédaient-elles à celles des Caennais? Sans s'arrêter à ces considérations, l'assemblée des députés réunis le 18 décembre sous la présidence de Coigny fixa à Caen le chef -lieu du département 3. Vire protesta contre cette décision ; un avocat, Michel Le Besnerais, se fit l'interprète des ressentiments de ses concitoyens, indignés d'être traités de marchands de caudelée, de mangeurs de bouillie de sarrasin ». Il reprocha à Caen de mépriser et d'insulter, sous le nom de bourgades renforcées » des villes qui avaient fait sa fortune, creusé son canal, payé ses impôts et bâti ses édifices *. 1 Observations soumises à .Y .Y. .S'.S. de l'Assemblée nationale par la Commission inter- médiaire provinciale de Basse-Normandie en faveur de Caen. Arch. nat., D iv 21, 1. 230. 2 Le Brethon, La Formation du déparlement du Calvados, p. 89. 3 Lettre du duc de Coigny, 18 décembre 1789. Arch. nat., Divbisl, 1. 23. 1 Aux Observations sur lu division territoriale de la Normandie et sur le départe- rnenl île Caen eu particulier, présentées /»// les députés extraordinaires de lu commune de LA LUTTE POUK LE CHEF-LIEU EN COTENTltf 411 I ans le département de Côtëntin, la lutte fut plus vive encore. En novembre 1789, lorsqu'on croyait a la formation de six dépar- tements, la petite ville d'Avranches, située à l'extrémité de la province, avait adressé à l'Assemblée nationale un mémoire- représentant qu' elle était nécessairement le point central d'un des six départements décrétés par les députés de Normandie » et organisé une propagande assez active en faveur de son vœu 0. Mais SeS prétentions devaient vite céder devant les revendica- tions plus pressantes et plus motivées de deux villes rivales, Coutances et Saint-Lô. Le 17 décembre, trois députés extraordi- naires de Coutances produisirent un factum imprimé intitulé Observations sur le chef-lieu du Cotentin. Ils y proclamaient le droit absolu de leur ville à être ce chef-lieu. Faisant ressortir l'importance historique de Coutances, la possession de l'évêché et du siège présidial, l'existence du vaste couvent de Domini- cains prêt à contenir les divers services administratifs, ils rappe- laient que cette ville avait été le lieu de réunion des députés de dix bailliages à la ronde et le berceau de la députation du Coten- tin aux Etats généraux W. Le lendemain, 18 décembre, l'assem- blée des députés du département réunie aux Capucins, sous la présidence de l'évêque de Coutances, mit aux voix la question du chef-lieu. Un membre proposa de décider l'alternat entre les divers districts, comme le permettait le décret du 9 décembre 1789. Vieillard, député de Saint-Lô, s'éleva contre cette propo- sition, en exposant les inconvénients qu'entraînerait le déplace- ment perpétuel des administrateurs et des archives. Son obser- vation prévalut ; il fut arrêté que, laissant le choix de l'alternat ou d'un chef-lieu définitif à la première assemblée administra- tive du département, on se bornerait à désigner le siège provi- soire du Directoire. Sur quatorze votants 8, Coutances réunit sept suffrages et Saint-Lô autant. Les députés de Coutances s'opposèrent à une proposition de tirage au sort et l'on convint Caen à l'Assemblée nationale, 5 décembre 1789 pièce imprimée, 16 p., Le Besnerais opposa, le 20 décembre, une protestation intitulée Réponse que fournit aux Etats généraux un habitant de la ville de Vire aux observations de MM. de la commune de Caen sur la division, etc. Arch. nat., D ivbis 5, 1. 173. 1 Délégation d'Avranches à Granville sur cet objet, 23 novembre 1789. Ibid., Divbis10, 1. 231. 2 Lepingard, Une Paye île l'Histoire de Saint-Lô, Annuaire de la Manche, 1836. 3 L'assemblée aurait dû compter 17 suffrages, mais le baron de Juigné étail absent ; Ango, député de Saint-Sanveur-le-Vicomte, s'était retiré au début de la séance; Pouret-Roquerie, député de Saint-Snuyeur-Lendelin, présent, s'abstinl de yoter. 412 COUTAMES. CHEF-MEU PROVISOIRE DU COTENTIN de s'en remettre à la décision de la province » M. Dans l'inter- valle de ces réunions, Vieillard se fit l'avocat de Saint-Lô, et se hâta de réfuter les arguments invoqués par Coutances en faveur de sa prééminence. Il invoqua la situation plus centrale de Saint- Lô, la facilité plus grande des communications avec tous les points du département, due aux voies nouvellement tracées, la proximité plus grande de Paris, c'est-à-dire des ordres du pouvoir central, la population supérieure de cette ville, l'immensité de son abbaye de chanoines réguliers, au moins comparable pour son étendue à celle des Dominicains de Coutances. Il invoqua enfin deux arguments d'un grand poids l'Assemblée provinciale de Basse-Normandie avait projeté, dans son unique session, de transférer à Saint-Lô le siège de la Commission intermédiaire provinciale et, plus récemment, pour assurer l'exécution des décrets de l'Assemblée nationale sur la circulation des grains, c'est à Saint-Lô que venaient de se réunir les délégués des Comités permanents des villes du Cotentin, à l'exception de ceux du Comité de Coutances que ce choix avait blessé ?l. Ce plaidoyer habile, dont Vieillard avait dû précipiter la rédaction, n'eut pas tout le succès qu'en attendait son auteur. L'assemblée des députés normands, qui réunit le 23 décembre quarante et un membres, sous la présidence de Coigny, tra- vaillée sans doute par l'influence personnelle de l'évêque Talaru, accorda trente suffrages à Coutances, tandis que Saint-Lô n'en recueillit que dix 3;. Coutances fut ainsi déclaré chef -lieu provi- soire. En même temps que la division de la Normandie en départe- ments s'opéra la division des départements en districts. Les appétits s'y montrèrent aussi ardents et beaucoup plus nom- breux. Non seulement les chefs-lieux d'élection, et il y en avait neuf dans la généralité de Caen, mais encore ceux des subdélé- gations Granville et Cherbourg, mais les sièges des bailliages ou de juridictions moins importantes demandèrent un district et un tribunal, tout au moins l'un ou l'autre, surtout à partir du jour où le Comité de constitution fit luire à leurs yeux la 1 Procès-verbal de l'assemblée du Cotentin. 18 décembre 1789. Arch. nat., Div" 1, 1. 23. 2 Réfutation de l'imprimé ayaiil pour titre Observation* sur le chef-lieu du départe- ment de Cotentin ». pur Vieillard, député du Cotentin, habitant de Saini-Lô, imprimée, 15 p. Ibid., 1>ivMs 10. 1. 231. 3 Procès-verbal de l'assemblée de la province de Normandie, 23 décembre \789, Ibid.. Divbisl, LA LUTTE POUR LES DISTRICTS I DANS LE DÉPARTEMENT DE CAEN 413 promesse de dédommager, par la répartition des autres éta- blissements publics, les villes qui auraient vu leurs premières espérances trompées » -1. Dans la partie du département de Caen qui avait appartenu à l'ancienne généralité 2, en dehors de Caen, que sa situation de chef -lieu départemental plaçait tout naturellement à la tête d'un district, quatre villes ambitionnaient cet honneur Bayeux, Vire, Isigny et Condé-sur-Noireau. Bayeux, capitale du Bessin, ville épiscopale, siège d'une élection et d'un bailliage, pria ses députés de Wimpfen et Delauney de s'entremettre en sa faveur ; avec l'obtention d'un district, cette ville demandait le maintien de son évêché, menacé par les intrigues de Lisieux et l'érection d'un tribunal supérieur, en souvenir du Conseil supérieur dont Mau- peou l'avait dotée en 1771. Elle craignait que les relations de Thouret, si influent au Comité de constitution, avec ses amis de Caen, Le Telier de Vauville et Alexandre, ne fissent attribuer à cette ville la juridiction d'appel qu'elle souhaitait si ardemment^. Vire, après avoir rêvé d'être capitale du département, se rabat- tait sur un district auquel semblait lui donner droit son rang de chef-lieu de bailliage et d'élection et mettait sa confiance dans les talents de son député, Flaust, lieutenant général du bail- liage 'll Isigny, placée entre Bayeux et Carentan, désirait, sinon un district, au moins une juridiction spéciale elle vantait son port, son commerce important de beurre, de cidre, de bois ; son tribunal d'amirauté et sa haute justice domaniale. Prévoyant son échec probable, elle exprimait sa volonté d'être rattachée à Bayeux et d'être séparée de Carentan, dont l'accès était trop périlleux 5. Condé-sur-Noireau, située à six heures de Vire, se flattait de l'emporter sur sa voisine ou d'être traitée comme elle. A l'appui de ses prétentions, elle faisait valoir son ancienneté, sa population supérieure à 5,000 âmes ; elle exhalait sans retenue ses rancunes contre une rivale qui l'avait dépouillée de l'élection, 1 Rapport sommaire de la nouvelle division du royaume, par Bureaux de Puzy, 8 janvier 1790. Arch. nat., AD1 60. 2 C'est à dessein que j'omets les réclamations de Lisieux, Honfleur, Orbec et Saint-Pierre-sur-Dives pour l'obtention d'un district, ces villes étant étrangères à la généralité de Caen. 3 Lettres des officiers municipaux à Wimpfen et Delauney, 8 et 15 mai, 12 juin, 7 juillet 1790. Arch. comm., Bayeux. Registre de correspondance. 4 Lettres des officiers municipaux à Flaust, juin 1790. Ibid., Vire. Registre de correspondance. 5 Requêtes du Comité municipal d'Isigny, reçue au Comité de constitution le 2 janvier 1790. Arch. nat., Divbis 21, l. 328. 414 NOMBREUSES COMPETITIONS DANS LE COTENTIN ! TOIUONI de la subdélégation et du quart bouillon et qui n'était que trop accoutumée à s'enrichir de ses pertes ». Elle réclamait, par la voix de son pasteur protestant, Gédéon Gourjon, un arrondisse- ment de quatre-vingts paroisses. C'est, ajoutait-elle, dans la ville de Condé que se sont concentrés les sentiments patrio- tiques de ce territoire et que, dès le commencement de la Révo- lution, il fut arrêté solennellement un acte de confédération pour la protection et le maintien de la nouvelle Constitu- ée lion » "l. Elle espérait que l'heure était venue de la récom- penser d'avoir été, à l'aube des temps nouveaux, le foyer du patriotisme ». Dans le département du Cotentin, les convoitises étaient plus nombreuses encore. Indépendamment des six anciens chefs- lieux d'élection que ce ressort contenait Avranches, Carentan, Coutances, Mortain, Saint-Lô et Valognes, de nombreuses villes et bourgades prétendaient devenir le siège d'une administration. A les en croire, il eût fallu multiplier les districts et le départe- ment n'en eût pas contenu moins de treize. Torigni menaçait de démembrer Saint-Lô et Granville de démembrer Avranches ; Villedieu se taillait un ressort au détriment de Coutances et de Vire ; Périers et la Haye-du-Puits projetaient des empiétements sur Carentan et Coutances ; Cherbourg voulait s'affranchir de Valognes et former un district aux dépens de sa rivale. Et chacune de ces prétentions s'armait de longs considérants, s'étayait d'arguments en apparence irréfutables. Résidence princière, fière de son château splendide, Torigni rappelait son glorieux passé, le temps où elle possédait six juridictions ; elle vantait son bailliage, où ressortissaient quatre-vingts paroisses et 60,000 jus- ticiables, dont les titres de famille dormaient chez les notaires de la ville ; elle arguait de sa position centrale, qui l'avait dési- gnée comme le futur rendez -vous des députés du Cotentin, char- gés de la question des subsistances. A défaut d'un district, dont elle avait soigneusement délimité l'étendue, elle demandait au moins à conserver son bailliage et elle promettait que les juges maintenus à Torigni ne demanderaient pas d'appointements *2. 1 adresse de la municipalité de Condé-sur-Noireau à NN. SS. les députés à l'Assemblée nalionale, 23 décembre 1789. Arch. nat , Divbis5, 1. 172.— Kequête de la même municipalité, du 14 février 17!!. Ibid., Divb,s21, 1. 327. — Cf. Arch. comm., Condé-sur-Noireau, Dl. Registre des délibérations, 19 août 1790. 2 Représentations de la ville et arrondissement du bailliage de Torigni sur la 11011- Velle division territoriale, présentées par les députés extraordinaires de la commune de Torigni à NN. SS. les députés de l'Assemblée nationale, 2 janvier 1790, ms. Dix signa- tures, lleudeline rédacteur. Arch. nat., Divlm5, 1. 172. PRÉTENTIONS JE GRAN VILLE, YILLEDIEU, PÉRIERS 415 Granville mettait en avant sa qualité de ville franche, ses nom- breuses juridictions vicomte, amirauté, consulat et traites, sa population de 12,000 âmes, le produit de ses douanes 300,000 li- vres par an, de sa pêche à Terre-Neuve. N'était-elle pas le port principal de commerce du département, qu'elle approvisionnait en poisson, résine, huile, savon, vins et eaux-de-vie? N'était-elle pas une pépinière pour la marine militaire et n'avait-elle pas fourni dix mille matelots au roi dans la guerre d'Amérique? A tous ces titres, elle escomptait l'obtention d'un district. Dès la fin de novembre, la petite ville de Villedieu, désireuse d'obtenir une juridiction et un district, avait provoqué un pétitionnement à plusieurs lieues à la ronde, parmi les paroisses trop éloignées de Goutances ou de Vire, leurs centres administratifs et qui désiraient un chef-lieu d'accès plus facile. Dans le nord de la presqu'île, mêmes compétitions, avec plus d'acharnement peut-être de part et d'autre. Périers, siège du bailliage de Saint-Sauveur- Lendelin, inquiète des bruits qui courent sur la division du dépar- tement et l'insuffisance du nombre des districts projetés, jette un cri d'alarme et les soixante-dix paroisses de son ressort lui font écho. En décembre 1789 et janvier 1790, il n'est pas de jour où l'une d'entre elles ne demande par délibération spéciale le main- tien d'un tribunal et l'établissement d'un district à Périers. Toutes adressent leurs vœux au député du bailliage, Pouret- Roquerie, en sollicitant son intervention. Vaudrimesnil, le 6 dé- cembre, lui promet de chanter un Te Deum pour la santé des Constituants. S'il est impossible d'obtenir un arrondissement administratif, Périers demande avec insistance le maintien de son tribunal, dont l'établissement se perd dans la nuit des temps » ; elle invoque l'intérêt des justiciables et aussi celui des juges et hommes de loi ayant une situation acquise dans cette ville, y étant fixés en grand nombre avec leurs familles. Un déménagement brutalement imposé serait leur ruine et celle du pays &\ La Haye-du-Puits ne se crut pas moins autorisée que ses voisines à demander à la fois district et juridiction. Une carte du Haut-Cotentin, visiblement dressée dans cette intention, faisait ressortir la position avantageuse de cette ville, au centre d'un arrondissement de soixante paroisses, dont elle avait pris 1 1° Requête de Périers à l'Assemblée nationale, 25 décembre 1789. — 2° Adresse de Saint-Sauveur-Lendelin à Pourot-Pioquerie, 10 janvier 1790, et délibérations de nombreuses paroisses du bailliage, prises en décembre 17N9 et janvier 1790. Arcb* nat., Divbis10, 1. 230. 416 PRÉTENTIONS DE LA HAYE-DU-PUITS ET DE CHERBOURG l'agrément. Un des notables les plus en vue de l'endroit, Regnault de Bretel, futur président de l'administration départementale de la Manche, écrivit lettres sur lettres à l'Assemblée nationale pour lui décrire la misère de cette contrée, qui n'attendait sa régéné- ration que d'un trait de plume *. Pour écraser une rivale, tous les moyens semblaient bons ; la jalousie engendrait l'intrigue, les manœuvres perfides, les insinuations calomnieuses. Carentan fut obligée de se défendre contre les attaques de la Haye-du- Puits et de Périers. On lui reprochait son insécurité parce qu'elle avait été le théâtre d'une émeute à propos des grains ; grief de mauvaise foi et qu'on eût pu formuler contre mainte ville de Basse-Normandie. On dressait surtout comme un épouvantail l'insalubrité de ses marais, les miasmes pestilentiels qui avaient autrefois empêché d'y établir garnison ^K Carentan crut devoir adresser à l'Assemblée nationale, pour sa justification, l'état des naissances et des décès de 1784 à 1789 3. A son tour, elle usa de représailles ; elle fit procéder à une enquête par le receveur prin- cipal de la vente du sel blanc afin de connaître la population exacte de ses deux rivales, d'après les rôles de vente et de mettre au point leurs affirmations audacieuses 4. Elle signala l'insuffi- sance de leurs ressources, décrivit leur aspect chétif et en fit un portrait peu flatteur telle la Haye-du-Puits, misérable bour- gade, ensevelie dans un pays inaccessible, composée au plus de cent maisons, dont vingt à peine ont un étage au-dessus du rez- de-chaussée. » Le nord du Cotentin ne formait qu'une seule élection, celle de Valognes. Sans vouloir enlever à cette ville le rang de chef-lieu, Cherbourg demandait un district spécial. Sa population, écri- vait Chantereyne, son député extraordinaire, excède celle de 1 1° Mémoire de Regnault de Bretel en faveur de La Haye-du-Puits, 20 décem- bre 1789; 2° A ce mémoire est joint un Plan du'IIaut-Cotentin divisé [Kir cantons de frenle-six lieues carrées, avec la position de chaque chef-lieu et les routes . Celle du Cotentin exigea trois semaines de pourparlers et de discussions. Dès la première séance, le 18 décembre, la division éclata entre les députés. L'assem- blée comprenait seize membres, par suite de l'absence du baron de Juigné ; l'évêque de Coutances présidait. On mit en avant le chiffre de neuf districts ; dix voix contre six le rejetèrent. Ango, bailli et député de Saint-Sauveur-le-Vicomte, jugeant la partie perdue pour sa ville, quitta la salle des conférences. Après son départ, on proposa huit districts ; ce nombre fut encore écarté par neuf voix contre six. Au troisième scrutin, huit suf- frages se prononcèrent pour six districts, six suffrages pour sept et l'on trouva un bulletin blanc. La majorité absolue étant atteinte, le nombre des districts du Cotentin fut fixé à six. Sen- tant que le sort de leurs cités était compromis, les députés de Périers et de Granville, Pouret Roquerie et Perrée Duhamel firent entendre de vaines protestations. Ils s'abstinrent de voter dans le scrutin relatif à la désignation des chefs-lieux. Les treize suffrages de l'assemblée se réunirent en faveur de Valognes, Carentan, Saint-Lô, Coutances et Avranches. Mortain fut choisi par douze voix seulement, la treizième passa à Cherbourg. On arrêta que les districts seraient faits de manière à ce que chacun obtînt un territoire à peu près égal et que les avantages fussent équitablement balancés » 3. Guidés par la tradition, les députés du Cotentin attribuèrent la préférence aux anciens sièges d'élec- tion W ; pour ne pas faire de jalouses, ils avaient écarté les préten- 1 Th. Lindet, Correspondance, p. 12. 2 Une seule réclamation s'était élevée, pour que le bourg de Vassy fût joint au département où se trouvent Vire et Coudé ». 3 Procès-verbal de l'assemblée du département du Cotentin, 18 décembre 1789. Arch. nat, Divbis1, 1. 23. 4 Dans sa réclamation à l'Assemblée nationale, du 2 janvier 1790, Perréc-Duha- mel écrit On jeta sur le bureau un plan représentant le département divisé en *ix districts égaux ayant pour chefs-lieux les six viles d'élection. L'apparition FORMATION D'UN SEPTIEME DISTRICT A CHERBOURG 419 tions des autres villes. Granville, Périers, Saint-Sauveur-le- Vicomte, dont les députés avaient été en minorité ; Torigni, Villedieu, La Haye-du-Puits et Cherbourg, qui n'avaient pas de représentants directs à l'Assemblée, se voyaient déboutées de leurs demandes. Elles ne se tinrent pas pour battues. Ce fut Cherbourg qui revint la première à la charge. Le 24 décembre, son député extraordinaire, Chantereyne, introduit par Beaudrap de Sotteville dans l'assemblée des députés que présidait Achard de Bonvouloir, y plaida très habilement la cause de ses concitoyens. Il démontra la nécessité d'une juridiction pour Cherbourg trop éloignée de Valognes. Il rappela l'intention que plusieurs députés avaient manifestée d'accorder un tribunal à Cherbourg. D'après le nouveau plan du Comité de constitution, l'obtention d'un tribunal était inséparable de celle d'un district. S'ils avaient pu connaître Ce plan avant de prendre leur arrêté, leur décision eût été tout autre. Obtenue par surprise, celle-ci pouvait être rapportée. L'assemblée se rendit à ces raisons et, à une grande majorité, vota la formation d'un septième district avec Cherbourg comme chef-lieu ll Il fallut remanier les limites précédemment arrêtées entre les districts. La carte du département fut soumise à un examen nouveau. Les contours des six districts étaient indiqués par des couleurs à l'eau ; des lignes tracées à l'encre noire vinrent che- vaucher sur les anciennes frontières ; plusieurs d'entre elles, raturées, révèlent les hésitations, les tâtonnements, les luttes qui durent se produire entre les copartageants 2. Le district de Cherbourg fut taillé en entier dans celui de Valognes ; une ligne tirée du Rozel à la pointe de Gatteville attribua à son arrondisse- ment soixante-neuf paroisses. Chantereyne fit de vains efforts pour conquérir » Barfleur, qui resta au district de Valognes 3. Pour compenser les pertes de ce dernier, on recula ses frontières vers le sud, on l'élargit aux dépens de Carentan ; la limite nouvelle subite de ce tableau n'était pas propre à dissiper le soupçon d'une cabale préjudi- ciable au bien public ». Arch. nat., D ivbls 10, 1. 231. 1 Procès-verbal de l'assemblée du département de Cotentin, 24 décembre 1790* Ib'uL, Divblsl, 1. 23 et 10, 1. 231. — Lettre de Chantereyne aux officiers municipaux de Cherbourg, 25 décembre 1789. La journée d'hier, leur écrit-il, est la plus belle de ma vie. » Arch. eomm., Cherbourg, AA 65. 2 Cette nouvelle division en sept districts est signée Beaudrap, Achard de Bon- vouloir, Artur de la Villarmois et Le Sacher de la Pal li ère. Arch. nat., Divbis 1, 1. 23, 3 Lettre des officiers municipaux à Chantereyne, 29 janvier 1790. Arch. Cherbourg, BB 11. 4*20 REMANIEMENT DES DISTRICTS DU COTENTIN coupait la presqu'île d'une ligne oblique de Port-Bail à Saint- Marcouf ; le tracé en fut plus d'une fois remanié ; la Bonneville, Fréville et Saint-Marcouf, disputées entre Carentan et Valognes, restèrent à cette dernière l. Dépouillé de certains bourgs impor- tants comme Saint-Sauveur-le-Vicomte, Carteret, Port-Bail, le district de Carentan ne reçut que de médiocres dédommage- ments un très léger empiétement sur Coutances, à qui il enle- vait trois paroisses, Feugères, Saint-Ebremont-sur-Lozon et Saint-Christophe-d'Aubigny, compensé d'ailleurs par deux pertes au profit de Saint-Lô Ménil-Véneron et Ménil-Ango. Son député, Dumesnil-Desplanques, après avoir tremblé pour la possession du district, se contenta du sort fait à Carentan, qui englobait dans sa circonscription ses deux rivales, Périers et la Haye-du- Puits l2. Dans le sud du département, une seule modification à signaler. Le chemin neuf de Granville à Villedieu continua à for- mer la démarcation entre Coutances et Avranches ; les paroisses devaient appartenir au district sur le territoire duquel se trouvait leur clocher. Exception fut faite pour Donville, Yquelon, Cham- prepus, la Bloutière et Fleury qui, malgré leur situation au nord de la route, demeurèrent à Avranches. Granville et Villedieu furent aussi rattachées à ce district. Le succès de Cherbourg provoqua des plaintes et réveilla des convoitises. Valognes, amoindrie par la création du septième district, se posa en victime et fit demander par ses deux envoyés extraordinaires, le chevalier du Mesnildot et de Rozi, le retour à l'ancienne division en six districts \ A en croire les autres villes sacrifiées, il fallait augmenter le nombre de ceux-ci ; elles livrèrent dans ce but un nouvel assaut à la députation du Cotentin. Le 30 décembre, Villedieu, jugeant qu'elle avait un intérêt pressant à saisir l'Assemblée nationale de ses vœux, délégua vers elle l'abbé 1 Une délimitation ultérieure, tracée sur les représentations d'Ango, rendit au district de Valognes les deux paroisses de Neuville-en-Beauniont et de Catteville et, par compensation, lui enleva La Bonneville au profit de Carentan. Arch. nat.. Divblsl, 2 Liste des paroisses qui forment les frontières" arrêtées entre les districts de Valognes et de Carentan, présentée à MM. formant le Comité de constitution par Dumesnil-Desplanques. maire de Carentan, suivi de l'étal des frontières arrêtées ntre les districts de Coutances et de Carentan, de Saint-Lô et de Carentan, 15 jan- vier 1790. Ibid., Divbisl, 1. 23. 3 Procès-verbal de l'assemblée du Cotentin, 3, janvier 1790. Ibid. Après leur échec» les députés extraordinaires de Valognes présentèrent, le 7 janvier, un Mémoire à MM. du Comité de constitution contre l'établissement d'un district à Cherbourg, imprimé, 7 p>, suivi d'Observations et conclusions additionnelles manuscrites et annexées à l'im- primé. Ibid., Divbis10, 1. ?31. \ Cherbourg Leitesnil-a&Val Si-Jfartir -&fr>, te Grenrd . Ccudeloup Brdleuast 0 O ' °-LeVast Teurthevit SansscmjesnU. lequeboscq o ii/ l f^ ©ValognesX o °SlGermaiii-UCaUla*d. . Si quelques villes sacrifiées, cédant à leur impression première, exhalèrent leurs sentiments de jalousie contre des voisines mieux traitées, la plupart des mécontents s'apaisèrent bientôt, dans l'espoir des compensations prochaines. Toutes les cités qui avaient eu part à la curée furent naturelle- ment les premières à s'en réjouir. Fiers de posséder un district, les officiers municipaux d'Avranches décernèrent des titres hono- rifiques aux députés de leur région dont l'appui leur avait profité ; ils nommèrent Artur de la Villarmois notable honoraire. Burdelot et Bécherel, l'un habitant de Pontorson, l'autre curé de Saint- Loup, furent nommés citoyens d'Avranches 3. Mortain organise une fête en l'honneur de l'Assemblée nationale et de son député, Le Sacher de la Pallière. On célèbre une messe en musique avec Te Deum d'actions de grâce ; on allume des feux de joie sur la place publique ; une pyramide y est dressée, portant cette ins- cription Vive le Roi ! Vive l'Assemblée nationale ! Vive Le Sacher de la Pallière » 4. A Cherbourg, pour fêter l'acquisition du nouveau district, le Comité national fait tirer vingt et un coups de canon du fort Longlet ; il se confond en protestations de gratitude envers Chantereyne, le bienfaiteur de la cité et tous ceux qui l'ont si heureusement secondé l'évêque de Coutances, 1 M. Brette reproche cette hâte aux Constituants. Il les accuse d'une impré- voyance funeste dont la France porte, depuis cent vingt ans, le poids. Il reconnaît, d'ailleurs, que les circonstances les forcèrent à décréter promptement la nouvelle organisation administrative. Brette, La Réforme des Départements, art. cité, p. 265-267. 2 Voici, à lilre d'échantillon, un extrait rie l'adresse que la municipalité de Vire envoya, le 10 mars 1790, à l'Assemblée nationale Déjà [le paysj vous doit cette helle et sublime organisation qui ne le divise en 8? parties que pour le tenir à jamais uni avec plus d'ordre et plus de force. Il vous doit ces administrations paternelles qui font jouir chaque section du bonheur des petites républiques, en leur conservant la force d'une monarchie imposante. » Arch. nat., C 111, 1. 247. 9 Arch. coram., Avranrhes, Registre des délibérations, 20 février 1700. '- ii Ibid., Mortain, Registre des délibérations, 22 décembre 1789. 4*28 LE DÉPARTEMENT, CADRE ÉLECTORAL ET ADMINISTRATIF Juigné, Beaudrap et Pouret l\ La municipalité nouvelle est animée des mêmes sentiments et la flamme allumée au bûcher du 21 février symbolise l'attachement passionné des citoyens de Cherbourg pour le grand œuvre » de ses représentants 2>. Les Constituants méritaient de tels hommages. Assez habiles pour ne pas déranger les habitudes acquises et les rapports tradi- tionnels, tout en remaniant assez profondément la carte adminis- trative du pays, ils avaient su concilier les exigences de la nature avec les intérêts et les besoins des populations. Cette division nouvelle du royaume, comme l'indiquait expressément le décret du 16 février 1790, n'avait en vue que l'organisation des assem- blées administratives et des assemblées électorales. Le départe- ment de 1790 était une intendance de moindres dimensions; c'était aussi la pépinière électorale des législateurs, l'unité de mesure de la souveraineté nationale équitablement distribuée dans toutes les parties du royaume. Le décret du 16 février 1790 maintenait jusqu'à nouvel ordre les anciennes divisions relatives à la perception des impôts, à l'exercice de l'autorité judiciaire ; les circonscriptions ecclésiastiques n'avaient reçu encore aucune atteinte. Toutefois, en fixant les limites des départements, dis- tricts et cantons, l'Assemblée nationale avait tracé le cadre où allait se mouvoir, dans un avenir peu éloigné, non seulement l'activité du pouvoir administratif, mais encore celle des pouvoirs financiers, judiciaires, ecclésiastiques ; elle avait préparé le fonc- tionnement méthodique et régulier des grands services de la France moderne. Une telle œuvre était solide et durable ; elle a survécu à ses ouvriers ; après plus d'un siècle d'existence, en dépit des révolutions politiques et économiques qui lui ont livré assaut et, en attendant la destruction, peut-être fort prochaine, dont elle est menacée, elle est, aujourd'hui encore, debout. 1 Arch. comm., Cherbourg, BB11. de correspondance, 31 janvier 1700. •"> fbiti., BBo, Registre des délibérations, 21 février 1790. PERSISTANCE DES TROUBLES 429 CHAPITRE XVI LES TROUBLES PUBLICS DANS LA GENERALITE DE CAEN PENDANT LES DERNIERS MOIS DE SON EXISTENCE JANVIER -AOUT 1790 Persistance des troubles causés par la disette et le chômage. Improvisa- tion de secours par les municipalités. Demandes d'assistance à l'Etat. — Agitation populaire dans les villes l'émeute de Carcntan. Malaise des campagnes insécurité des propriétés privées et publiques. — Désarroi des finances ; retards dans l'assiette et la perception des impôts ordinaires et de la contribution patriotique ; refus de paiement des aides et octrois ; échec de la mission de Pomiés en Basse-Nor- mandie. — Insubordination des gardes nationales désertions et sou- lèvements dans plusieurs villes ; demandes d'organisation générale à l'Assemblée nationale. — Le fanatisme religieux. Attitude révolu- tionnaire des curés au début de la Révolution. Volte-face amenée par la nationalisation des biens ecclésiastiques et la politique de tolé- rance religieuse de l'Assemblée constituante. Le clergé agent de la contre-révolution. — Impuissance avouée des municipalités à rétablir l'ordre ; espoirs placés dans la prochaine activité des assemblées administratives. Il eut été prudent de hâter l'organisation des corps adminis- tratifs, car le désordre était à son comble. Pas plus que les auto- rités anciennes, les municipalités nouvelles ne parvenaient à l'enrayer. Après comme avant l'établissement de celles-ci, la généralité de Caen demeura le théâtre d'une agitation incessante et la proie de l'anarchie. De février à juillet 1790, c'est-à-dire pendant la période de gestation du régime administratif nouveau, les troubles publics y furent aussi fréquents et l'insécurité sociale aussi grande. La question des subsistances restait toujours aussi angoissante. Dès le 31 octobre 1789, jugeant la récolte de l'année fort mé- diocre, l'intendant avait prédit la disette des grains U. Ses prévi- sions se réalisèrent. Le peuple eut à souffrir de la rareté du pain 1 Lettre do l'intendant de Launay, 31 octobre 1789. Arch; Calvados. C264CU 430 DISETTE ET CHÔMAGE. SECOURS IMPROVISÉS et de son prix excessif. A Caen le blé valut 50 livres le sac à la halle du 12 mai 1790 ]. Bayeux t2, Vire3 se plaignaient de sa cherté qui épuisait les bourses. Le 30 mai, les greniers des cam- pagnes étaient déjà vides '4. Comme les anciens Comités perma- nents, les municipalités formèrent des bureaux de subsistances pour veiller à l'approvisionnement des villes ; leurs officiers fixèrent le prix du pain et de la viande ; en plus d'un endroit, ils eurent à lutter contre les boulangers, qui refusaient de cuire, contre les bouchers qui menaçaient de suspendre leur vente 5. La charité, publique et privée, se dépensa en efforts souvent insuffisants pour alléger les souffrances populaires. On vit les grenadiers du régiment d'Aunis, à Caen, abandonner au profit des pauvres la solde qu'ils recevaient pour leur service de garde au théâtre °>, le chevalier de Buffon, lieutenant-colonel du régi- ment de Lorraine et les officiers de ce régiment distribuer aux pauvres de Bayeux des aumônes assez considérables 7. Des collectes faites à l'occasion de cérémonies publiques reçurent la même destination 8. L'Université de Caen remit aux officiers municipaux, pour être employé en œuvres de bienfaisance, le crédit annuel affecté à sa distribution des prix f9. Le chômage aggravait la misère. Les mendiants pullulaient dans les villes et les campagnes 10. Les officiers municipaux de 1 Lettre des officiers municipaux à de Cussy, 12 mai 1790. Arch. comm., Caen, Registre de correspondance. 2 Lettre du procureur-syndic de Bayeux, Le Tellier, aux procureurs-syndics pro- vinciaux. Arch. dép., Calvados, C 7780. 3 Lettre des officiers municipaux à Flaust, 7 juin 1700. Arch. comm., Vire, Registre de correspondance. 4 Lettre des officiers municipaux à Necker, 30 mai 1790. Ibid., Caen, Registre de correspondance. 5 Les officiers municipaux de Caen sont obligés d'augmenter le prix du pain pour amener les boulangers à en cuire. Ibid., Caen. Registre de correspondance, lettre du 12 mai 1790. — A Avranches, un arrêté de police municipale taxant à 8 sols le prix de la livre de bœuf, est rapporté sur la réclamation des bouchers et la livre taxée 8 sols 6 deniers. Ibid., Avranches, Registre des délibérations, 17 juin 1790. — Nombreux exemples de taxations du pain à Tinchebrai. Ibid., Tinchebrai. Registre de délibérations, 12 mars, 25 avril, 20 mai, 20 mai, 2 juin, 20 juin, 27 juin 1790. 6 Lettre de remercîmenfs des officiers municipaux au lieutenant-colonel du régi- ment d'Aunis, 15 avril 1790. Ibid., Caen. Registre de correspondance. 7 Ibid., Baveux. Registre de correspondance, mai 1790. 8 A Caen, une quête faite à la messe de la foire, le 25 avril 1790, produisit 521 liv. Ibid., Caen, Dl. 9 Délibération de l'Université de Caen, du 21 juillet 1790. Ibid., ancien carton 25. Cf. Arch. dép., Calvados, D83. 10 Ibid., C 7780. Cf. Lettres des officiers municipaux de Caen à Le Cavelicr, négo- ciant au Havre, 9 mars 1790 ; à Cussy et Lamy, députés à l'Assemblée nationale.* DEMANDES D 'ASSISTANCE A L'ÉTAT 431 Caen redoutaient la fermeture prochaine des manufactures, qui eût livré à une dangereuse oisiveté vingt mille journaliers désœu- vrés et sans pain l. Les ateliers de charité, établis par la Com- mission intermédiaire provinciale, languissaient par la faute du trop modeste crédit destiné à leur usage "2. Sur la proposition de son maire, Vendœuvre, le Conseil général de Caen, vota le 20 mars, 4,000 livres pour occuper les ouvriers sans travail 3. Le 30 mai, un décret de l'Assemblée nationale accorda 30,000 livres à chacun des départements de la Manche, du Calvados et de l'Orne pour le même objet 4. Dans la situation critique où elles se trouvaient, les villes furent obligées de mendier les secours de l'Etat. Le 31 mars, Caen expose au contrôleur général la détresse de la caisse muni- cipale épuisée au profit des pauvres et lui demande la remise exceptionnelle de la taxe représentative de la corvée, qui s'élève à 6,000 livres », d'avoir injustement fixé la pro- portion de cote entre le maître de la terre et celui qui l'exploite, en faisant supporter à ce dernier les dix-neuf vingtièmes de la charge t'2. Si le fermier réclame contre son propriétaire, certaines municipalités se prétendent sacrifiées par la législation nouvelle et opposent à leur malheureux sort celui de leurs voisines mieux traitées par le fisc. Le nouveau mode de taxation, en frappant la terre au lieu de sa situation et non plus à celui du domicile de son possesseur, menace d'écraser, sous une cotisation trop lourde, plus d'une communauté qui ne pourra plus demander à ses principaux contribuables qu'une faible partie de leurs an- ciennes impositions. D'où des demandes en réduction qui viennent s'entasser dans les cartons du Comité des finances de l'Assemblée nationale 3. Dans l'attente d'une réponse, les rôles ne sont pas arrêtés et le paiement de l'impôt est ajourné 4. Et que de diffi- cultés lors du recouvrement ! L'élevage des chevaux a subi de grandes pertes dans le Cotentin ; la détresse y est extrême, les fermiers émigrent, le numéraire disparaît ; où le collecteur trou- verait-il de l'argent? les parages de l'île. Archi nat. Dxxix >s. 6 Lettre de Pomiès, commissaire du roi, aux officiers municipaux de Caen., 27 mars 1790. Arch. comm,, Caen, carton 43. RÉSISTANCE AU PAIEMENT DES DROITS D 'OCTROI ET TARIF 439 l'expulsion de Fleury, directeur de la Régie, les assemblées des paroisses ont autorisé la perception des droits d'aides, boucherie, tannerie et autres y réunis, mais à condition qu'elle soit confiée aux commis de la ville et que le produit en soit versé dans une caisse municipale l>. A Avranches, les employés des aides ont depuis longtemps abandonné leurs fonctions ; sans même attendre qu'on les menace, ils ont cessé l'exercice », négligé la marque des cuirs et de la viande 3. Les octrois des villes sont onéreux aux paysans, qui s'ima- ginent payer la taille des bourgeois ; les droits de tarif perçus sur les bestiaux amenés dans les marchés ne se lèvent plus qu'au prix des plus grandes difficultés ; à Mortain, à Vire, plusieurs marchands de bœufs résistent et font scandale ; ils veulent qu'on leur montre pourquoi ils doivent » . Bayeux, peuplé d'anciens privilégiés et qui vit de la consommation qu'ils y font, considère sa garde nationale comme une garantie indispensable contre les mécon- tents dont elle est environnée. Les officiers municipaux déplorent sa désorganisation et le relâchement des citoyens qui introduit le désordre dans un corps fait pour maintenir le bon ordre UK En maint endroit, le service est interrompu et les municipalités ont peine à le rétablir 5;. En attendant une réglementation générale, certaines d'entre elles rédigent leur code militaire, aux pres- criptions rigoureuses et le soumettent à l'approbation de l'Assem- blée nationale §, A de telles exigences, plus d'un récalcitrant répond par le refus de monter la garde et même de payer un 1 Lettre d'Aveline, maire de Caumont, aux commissaires du roi pour la formation du département du Calvados, 12 avril 1790. Arch. dép., Calvados, série L non inven- toriée. — Les municipalités, tant des villes que des campagoes, sont des corps sans âme, écrit Capron, curé de Mondeville près Caen. Loin de prêter la main aux décrets de l'Assemblée nationale, elles semblent craindre, de sorte que tout le monde est maître; » 4 juin 1790. Ibid. 2 Exemples de ces cérémonies à Vire, 21 février 1790 ; à Avranches, 2 mars ; à Caen, 11 avril ; à Granville. 13 mai ; à Cherbourg, etc. 3 Lettre des officiers municipaux au président de l'Assemblée nationale, 30 mai 1790. Arch. comm., Caen. Registre de correspondance. 4 Lettres des officiers municipaux au président du Comité des rapports de l'As- semblée nationale et au baron de Wimpfen, 13 avril 1790. Ibid., Bayeux. Registre de correspondance. 5 A TinchebraU à Vire, par exemple. G Projet d'un code militaire provisoire, 15 avril 1790. Ibid., Bayeux,, Di12. Registre de. A Condé- sur-Noireau, la milice nationale parle en maîtresse et fait la loi les soldats des quatre compagnies, réunies pour entendre la lec- ture d'un arrêté municipal relatif au rétablissement des aides, s'écrient qu'ils ne veulent plus de commis, et dictent à la muni- cipalité, par un arrêté en forme, les conditions dans lesquelles ils protégeront la perception des impôts W. A ces ferments de désordre s'en ajoute bientôt un autre, le fanatisme religieux. La Révolution allait voir se dresser contre elle un nouvel ennemi et non le moins redoutable le clergé. Quand l'évêque de Bayeux et son chapitre avaient protesté 1 Lettre des ofiiciors municipaux au baron de Wimpfcn, 30 mal 1790. Arch. Bômm., Caen. Registre de correspondance. — Réponse de Wimpfcn, 2 juin 1790. Ibid.. car- ton 50. 2 Lettre des officiers municipaux de Tinchebrai au Comité de constitution, 28 mars 1790. Arch. nat., Div21. 3 Lettre des officiers municipaux de Valognes au Comité des rapports, mars 1790. Ibid.. D xxix 81. 4 Arch. comm., Carentan. Registre des délibérations, 10 et 11 décembre 1789. 5 Lettre des officiers municipaux de Carentan au Comité des rapports, B juin 1790. Arch. nat., Dxxtx30. 0 Areh. comm., Comlé-snr-Noireau, D t. Registre des délibéralinns, -27 BÔû! À Saint-Georges-des-Groseillk'rs. le 9 juin 1700. la milice nationale Bé Lins M rend coupable de sévices à l'égard des habitants. Plaintes de la mithicijnUifcé de Saint- Georges à l'Assemblée nationale, lu juillet 1790. Arch. nat., lxxix'"s7, 103. 444 LA DÉCLARATION DE GUERRE DIT CLERGÉ contre l'illégalité des élections de leur ordre aux Etats généraux, quand un peu plus tard ils avaient contesté la validité des décrets de l'Assemblée nationale, la masse des curés bas normands ne les avait pas suivis dans leur résistance. Le souvenir des humi- liations passées, l'espoir de l'indépendance et du bien-être futurs avaient alors incliné ces derniers vers la cause révolutionnaire. Le mouvement électoral de 1789, à Coutances comme à Caen, avait révélé l'antagonisme profond qui séparait le haut et le bas clergé et au sein des Etats généraux, c'est l'appui des curés ruraux qui avait rendu possible la fusion des ordres et préparé le triomphe du Tiers état. Mais le haut clergé n'avait pas désarmé ; les événements lui fournirent l'occasion de ressaisir l'influence qu'il avait perdue. Le clergé du bailliage de Caen, dans son cahier de doléances, avait émis le vœu ferme que la religion catholique fut religion d'Etat et la seule reconnue en France ; le décret du 13 avril 1790, qui, rejetant une motion analogue de dom Gerle, acheminait le pays vers la liberté des cultes, vint troubler la conscience d'un grand nombre de prêtres. La tolérance religieuse de l'Assemblée nationale alarma un clergé intransigeant en matière de dogme et très jaloux de sa domination. L'évêque de Bayeux, alors maire de cette ville, laissa le 27 mai 1790 une députation de son chapitre déposer sur le bureau de l'hôtel de ville une protestation contre le décret du 13 avril, protestation qu'il avoua être en partie son ouvrage et qui constituait un véri- table appel à la révolte /]. Le Conseil général de Bayeux, malgré les sentiments catholiques de ses membres, déclara cette protes- tation attentatoire aux décrets de l'Assemblée », en ordonna la suppression, interdit d'en donner lecture publique. L'évêque de Bayeux eut de nombreux imitateurs. Plus d'un prêtre commença à tenir des propos incendiaires, à prêcher les maximes les plus séditieuses et les plus intolérantes '2; ; des libelles circulèrent clandestinement dans les villes et les villages criant haro sur les douze cents coquins des Tuileries qui s'enrichissaient des largesses des protestants et des juifs pour couper dans ses racines 1 Arch. comm., Baveux. Registre des délibérations, Di12, 27-29 mai 1790.— Cf. Pezet, Bayeux au XVIII* sii-cle, p. 138. 2 Le Courrier de Gorsas contenait, à la date du 28 mai 1790 Les nouvelles que nous recevons de Caen et d'autres villes de la Normandie, annoncent les tentatives les plus criminelles de la majeure partie des prêtres, pour soulever les peuples et allumer le feu de la guerre civile. » Le corps municipal de Caen ayant cru devoir protester Arch. comm., Caen, Dl, 28 mai 1790, Gorsas répondit par un article, Rétractons-nous, où il prouvait la vérité de ses allégations. LE CLERGÉ AGENT DE LA CONTRE-REVOLUTION 445 l'arbre de la religion » 1^. Une campagne de brochures travailla les fidèles et le clergé 2l. Effrayés par les affirmations menson- gères que celles-ci renfermaient, se croyant trahis par leurs députés », inquiétés dans leurs croyances et menacés dans leurs intérêts matériels par l'adoption des lois qu'on leur présentait comme des lois de spoliation 8, les curés firent volte-face, se rejetèrent dans le camp des évoques et des privilégiés. Après avoir été au début les auxiliaires de la Révolution, ils allaient devenir les agents les plus actifs de la contre-révolution. En présence de tant de périls, les municipalités se rendaient un compte exact de leur faiblesse. Elles en faisaient publiquement l'aveu. Tous les liens paraissent détruits, écrivaient les officiers municipaux de Caen à leurs collègues de Rennes. La force publi- que n'existe que dans l'opinion et chacun a la sienne. Chaque individu, définissant la liberté à sa manière, n'admet des décrets que ce qui convient à ses intérêts ou à ses passions et s'érige en despote pour gouverner tout ce qui l'environne; de sorte que, dans le chaos de l'anarchie qui règne depuis neuf mois, l'orage s'obscurcit de plus en plus, et nous n'apercevons point encore la terre qui nous est promise 4. » Tous les citoyens, cependant, n'étaient pas aussi pessimistes ; plus d'un partisan de la Révolution croyait alors, avec Aveline, que le terme de l'anarchie était proche et que l'établissement des assemblées administratives inaugurerait une ère d'ordre et de prospérité &h 1 Courrier de Gorsas, n° du 14 juin 1790. 2 Lettre de Gédéon Gourjon, pasteur de Condé-sur-Noireau, au curé Gouttes, vice -président de l'Assemblée nationale, 28 mai 1790. Arch. nat., Dxxiv 33. 11 se plaint des injures et des menaces que les catholiques, fanatisés par les prêtres, l'ont subir aux protestants, nombreux dans sa région. 3 Les décrets des 2 novembre 1789 et 14 mai 1790, en mettant à la disposition de la nation les biens ecclésiastiques, puis en ordonnant leur aliénation jusqu'à con- currence de 400 millions de livres, avaient jeté un certain trouble dans les habitudes et le train de vie des curés ruraux. Ils détachèrent un grand nombre de ceux-ci de la cause de la Révolution. Voir Sagnac, La Législation civile, etc., p. 168-169. 4 Lettre des officiers municipaux de Caen à ceux de Rennes, 2 avril 1790. Arch. comm., Caen, Registre de correspondance. 5 Lettre d'Aveline, maire de Caumont, aux commissaires du roi pour la formation du Calvados, 12 avril 1790. Arch. dép., Calvados, série L non inventoriée. 14 LE DÉCRET DU 22 DECEMBRE 1789 CHAPITRE XVII l'organisation administrative des départements et des districts AVRIL - JUILLET 1790 Le décret du 22 décembre 1789. — Comparaison de l'ancienne et de la nouvelle organisation administrative ressemblances superficielles, diversité des principes.— Les Commissaires du Roi pour la formation du Calvados, de la Manche et de l'Orne ; limitation de leurs attribu- tions par l'Assemblée nationale. — Les assemblées primaires des trois départements difficultés de leur réunion, longueur des opéra- tions électorales. Hostilité des campagnes contre les villes. Condi- tion sociale des électeurs du second degré minorité d'hommes de loi, majorité de paysans et laboureurs. La- ^emblée électorale du Calvados. Mode de répartition des trente-six administrateurs entre les six districts. Prédominance des élus ruraux. Protestations urbaines. Les assemblées électorales des districts incident à Vire. L'assemblée électorale de la Manche. Les deux modes de scrutin successifs. Règlement du débat sur le chef-lieu choix de Coutances. Condition sociale des trente-six élus, en majorité propriétaires ruraux. Les assemblées électorales des sept districts incident à Carentan. L'assemblée électorale de l'Orne et du district de Domfront faiblesse numérique du contingent fourni par l'ancienne généralité de Caen. — Election des Directoires des départements et des districts élimination de l'élément rural au profit de l'élément urbain. L'administration aux mains des hommes de loi. Cessation des pouvoirs de l'intendant et de la Commission intermédiaire provinciale. — Remise des archives des anciennes administrations. Liquidation des affaires communes aux trois départements com- missaires liquidateurs et vérificateurs. Compte rendu de la Commis- sion intermédiaire provinciale réponses évasives des trois derniers intendants. Cordier de Launay émigré, fonctionnaire en Russie, homme de lettres. Ce fut le décret du 22 décembre 1789, suivi de l'instruction du 8 janvier 1790, qui régla l'organisation administrative de la France l. La hiérarchie parallèle des circonscriptions adminis- tratives et électorales créées par l'Assemblée nationale n'était 1 Un décret du 10 décembre 178!» avait, au préalable, supprimé les commissaires départis et leurs taureaux. DIRECTOIRES ET CONSEILS DES DEPARTEMENTS ET DISTRICTS 447 pas, de la base au sommet, rigoureusement symétrique. Si les départements, et au-dessous d'eux les districts, étaient à la fois des ressorts administratifs et des cadres électoraux, il n'en était plus de même à l'échelon inférieur. Le territoire soumis à l'action des municipalités resta, sous le nom de commune, une division purement administrative et ce fut en principe un groupement de communes qui constitua, sous le nom de canton, le premier rouage du système électoral nouveau. Réunis en assemblées primaires dans chaque canton, tous les citoyens actifs devaient y nommer les électeurs chargés à leur tour d'élire, outre les députés à l'Assemblée nationale, les administrateurs de département et de district. Ces électeurs étaient choisis à raison de un par cent citoyens actifs, présents ou non à l'assemblée, mais ayant droit d'y voter, et parmi les contribuables qui acquittaient une impo- sition directe au moins égale à la valeur locale de dix journées de travail. Leur assemblée plénière, réunie au chef -lieu du dépar- tement, nommait les trente-six membres de l'administration départementale et le procureur général syndic ; elle se fraction- nait en assemblées partielles de districts, qui désignaient les douze membres de l'administration des districts et leur procureur syndic. Chaque administration de département et de district se divisait en deux sections le Conseil et le Directoire, ce dernier comprenant huit membres pour le département et quatre pour le district, élus par les membres du Conseil et dans son sein. La durée de leur mandat était de quatre années, avec renouvelle- ment par moitié tous les deux ans. Les administrations de dépar- tement étaient chargées, sous l'inspection du corps législatif, de répartir les contributions directes du département entre les districts, d'ordonner la confection des rôles des contribuables dans chaque municipalité, de régler et de surveiller la perception et la rentrée de l'impôt. Elles étaient, en outre, chargées, sous l'autorité du roi, de ce qui concernait l'administration générale, notamment le soulagement des pauvres et la police de la mendi- cité, le régime des hôpitaux, des ateliers de charité et des prisons, la surveillance de l'éducation publique, les encouragements à l'agriculture, à l'industrie et au commerce, la conservation des propriétés publiques, forêts, rivières, chemins, la direction des travaux publics, l'entretien, réparation et reconstruction des églises et presbytères, le maintien de la salubrité et de la sûreté publique, le service des gardes nationales. Les administrations de district devaient exercer ces diverses fonctions dans leur ressort plus restreint et sous le contrôle des administrations de 448 RESSEMBLANCES SUPERFICIELLES ENTRE ANCIEN ET NOUVEAU RÉGIME département ; elles avaient surtout à répartir les contributions directes entre les municipalités du district. C'est au Conseil de département qu'il appartenait de fixer les règles de chaque partie importante de l'administration du département et d'ordonner les travaux et les dépenses générales. Les Conseils de districts, sans pouvoir de décision propre, devaient seulement préparer les demandes à présenter, et les matières à soumettre à l'adminis- tration du département. Les Directoires étaient chargés de l'exé- cution des arrêtés pris par les Conseils et de l'expédition des affaires courantes ; ceux des districts étaient à cet égard dans la subordination absolue de l'administration départementale. Les Conseils étaient périodiques ; ceux de districts devaient tenir une session annuelle, de quinze jours au plus, avant la session des Conseils de département, qu'ils avaient mission d'éclairer ; ceux- ci devaient siéger un mois chaque année et six semaines pour la première fois. Les Directoires étaient permanents, en leur qualité de bureaux exécutifs ; ils s'absorbaient à chaque session dans le sein des Conseils. Quant au procureur général syndic du départe- ment et aux procureurs syndics des districts, élus pour quatre années, ils avaient séance au Conseil et au Directoire de leur ressort ; ils n'y avaient pas voix délibérative, mais simplement consultative. Toutefois, on ne pouvait faire aucun rapport sans leur en donner communication, ni prendre aucun arrêté sans les consulter et les entendre. Agents d'exécution de l'administration, ils étaient chargés de la suite de toutes les affaires, mais ne devaient agir que de concert avec leur Directoire. Pour les sup- pléer en cas de maladie ou d'absence, les Conseils devaient dési- gner un membre du Directoire. L'examen de la nouvelle organisation administrative du royaume révèle de grandes ressemblances entre le passé et le présent. Les Conseils généraux des départements, ce sont, dans un cadre plus restreint, les anciennes Assemblées provinciales la Normandie en compte cinq alors qu'elle avait trois assemblées. Les' Conseils de districts remplacent les anciennes assemblées d'élection ou de département la généralité de Caen comprenait neuf élections ; on a taillé environ dix districts dans son ressort. Les Directoires de département succèdent aux Commissions intermédiaires provinciales, ceux de district aux bureaux inter- médiaires de département ; ils n'ont fait que changer de nom. Les procureurs syndics existaient déjà sous ce titre on a gardé le nom et la chose. Il n'y en a plus qu'un par circonscription, car depuis la fusion des ordres la dualité des syndics nobles et rotu- DIVERGENCES PROFONDES ENTRE EUX 449 riens ne se justifie plus ; encore dans la généralité de Caen, la simplification est-elle déjà faite. Les cadres électoraux inférieurs, les cantons, existaient déjà en germe dans les arrondissements électoraux » chers à Necker ; le nombre en est seulement multiplié. La périodicité prévue pour les Conseils, la permanence imposée aux Directoires sont des pratiques déjà usitées depuis trois ans ; l'absorption momentanée des Directoires par les Conseils est un emprunt au fonctionnement du système administratif aboli. Il n'est pas jusqu'aux attributions des corps nouveaux qui ne rappellent celles des Assemblées provinciales celles-ci n'a- vaient-elles point comme tâche essentielle la répartition des impôts, la surveillance des routes, les encouragements à l'indus- trie et à l'agriculture ? Enfin, si les Conseils nouveaux avaient l'incontestable avantage d'être issus de libres élections, le roi n'avait-il pas expressément promis aux Assemblées provinciales ce mode de recrutement dans un assez court délai? Les corps administratifs de 1790 semblaient donc, au premier abord, pro- longer l'action des administrations créées par l'édit de 1787. Et pourtant le décret du 22 décembre 1789 avait opéré une réforme administrative profonde. Si les Assemblées provinciales et leurs subordonnées, avec leurs commissions, semblaient se survivre à elles-mêmes en changeant de forme et de nom, l'inten- dant et ses subdélégués disparaissaient sans laisser de trace. Il ne devait plus y avoir d'intermédiaire entre les administrations de département et le pouvoir exécutif suprême. Plus de commissaire départi, organe du gouvernement, recevant directement ses ordres et veillant à leur exécution ; la police elle-même, qui, à l'époque du condominium entre Commission intermédiaire et intendant, avait été réservée à celui-ci parce qu'elle devait être exercée d'une main ferme et sans défaillance, avec la rigueur d'une consigne reçue d'en haut, allait être désormais livrée à des collectivités indépendantes et en quelque sorte souveraines dans l'exercice de leurs fonctions », c'est-à-dire émiettée et éner- vée. Laissant une liberté sans contrepoids aux pouvoirs locaux, le nouveau système les coordonnait dans un concert présumé de bonnes volontés convergentes, au lieu de les subordonner à l'autorité d'un gouvernement obéi. Une extrême défiance envers le roi, une confiance sans bornes envers la nation avaient eu pour effet de substituer une décentralisation absolue à l'excessive centralisation de l'ancien régime. C'était au roi néanmoins que l'Assemblée nationale avait délégué, par son décret du 8 janvier 1790, le soin de surveiller et 29 450 LES COMMISSAIRES Dl KOI POUR LA FORMATION DES DÉPARTEMENTS de diriger au plus tôt, dans chaque département, l'exécution de la loi relative à la formation des assemblées administratives. Celui-ci mit deux mois à choisir ses collaborateurs. Par commission du 6 mars 1790, il désigna trois commissaires pour former chacun des départements de la Manche et de l'Orne et quatre pour former celui du Calvados. Frémin de Beaumont, maire de Coutances, Le Tuilier, procureur à l'élection de cette ville et Bernard, avocat du roi à Saint-Lô, furent les trois commissaires de la Manche W. Pour le Calvados, Louis XVI choisit le comte de Vendœuvre, maire de Caen ; Revel de la Brouaise, substitut du roi au Parle- ment de Rouen ; Signard d'Ouffières, riche négociant de Caen, et Bayeux, ancien avocat au Parlement de Rouen, ancien secré- taire provincial de la Haute-Normandie 2. La formation de l'Orne fut confiée aux soins de Marescot, doyen du présidial d'Alençon ; du vicomte de Chambray de la Bellière et de Lepelle- tier-Ducoudray, vicomte d'Argentan 3J. Ces choix étaient l'œuvre d'une prudente réflexion on avait tenu à ne désigner que des gens mis en vue par leur situation et éprouvés par les circons- tances, c'est-à-dire qui fussent à la fois en mesure de plaire à l'opinion publique et de servir les intérêts du roi. Vendœuvre, Beaumont, Chambray, Revel appartenaient à la noblesse, les autres à l'élite de la magistrature et du barreau. Le comte de Vendœuvre avait été membre de l'Assemblée des Notables de 1787 et de l'Assemblée provinciale de Caen et président de l'assemblée du département de Falaise-Domfront. Frémin de Beaumont avait été le collègue de Bernard à l'Assemblée provin- ciale de Caen et celui de Le Tuilier dans les fonctions de syndic au département de Coutances. Ducoudray avait fait partie de l'assemblée du département d'Argentan. Bayeux avait, dans une fonccion subalterne, joué un rôle considérable à l'Assemblée provinciale de Rouen. La capacité, le zèle et la sagesse » dont tous avaient fait preuve dans leurs fonctions administratives avaient sans aucun doute fixé l'attention du ministre. Signard d'Ouffières, ancien président du Comité permanent de Caen, Il tlegïslre de la commission royale copie de ces trois commissions à la date du 23 mars 1790, loi. 2, 3, 4. Arch. dép., Manche, série L non invenioriée ancienne M 7. Si Registre des procès-verbaux de la commission du roi pour le département du Calvados. Arch. dép., Calvados, série L non inventoriée. — Cf. Arch. comm., Caen, carton 56. Lettre des commissaires envoyant leurs commissions à la municipalité de Caen, 31 mars 1790. 3 Commission de Marescot et lettre d'envoi des commissaires aux diverses muni- cipalités, 7 avril 1790. Arch. dép., Orne, L 376. ACCUEIL QUE LEUR FONT LES DÉPARTEMENTS 451 ambassadeur extraordinaire de sa ville auprès de l'Assemblée nationale, s'était fait à Paris de puissantes protections, il y gagna son brevet de commissaire 1. Quant à Bayeux, appelé de Rouen à Paris par Necker, qui l'avait nommé commis au ministère des finances, puis en avait fait son secrétaire et son confident, il fut adjoint aux trois premiers commissaires du Calvados à la requête expresse de la municipalité de Caen, qui espérait profiter de ses relations et de sa grande influence 2. Des nominations faites avec un souci aussi évident de ménager les convenances locales ne pouvaient qu'être favorablement accueillies. Lorsque les commissaires du Calvados présentèrent leur commission à l'hôtel de ville de Caen, les officiers munici- paux se félicitèrent que le choix du roi se fut porté sur des citoyens de leur ville qui dans tous les temps avaient captivé l'estime et les suffrages de ses habitants » 3. La municipalité de Coutances écrivit aux commissaires de la Manche qu'elle étaii heureuse d'ordonner la transcription sur ses registres d'une commission inscrite dans tous les cœurs » 4. Le concert d'éloges ne fut pas sans notes discordantes. Les officiers municipaux de Bayeux regardaient comme un grand mal que les quatre com missaires du roi fussent de Caen » et leur prêtaient de mauvais desseins à l'égard des campagnes III, Calvados 12. Discours de MM. les commissaires du roi à la municipa- lité de Caen, 2 avril 1790 Caen, Le Roy, 8 p. avec lettre d'envoi des commissaires à Saint-Priest, du 3 avril. 2 Arch. dép., Calvados, série L non inventoriée. Registre de la commission du roi, 29 mars 1790. 3 Lettre des commissaires à Saint-Priest, 11 avril 1790. Arch. nat., FlcIII, Cal- vados 12. 4 Registre de la commission du roi, 17 avril 1790 accusé de réception à Saint- Priest de ce décret, qui a été adressé le 14 avril. Arch. dép., Calvados, série L non inventoriée, 454 LENTEUR DE LEUR FORMATION sion ' . Et les commissaires écrivirent lettres sur lettres aux municipalités *2. Les listes leur parvinrent peu à peu des divers cantons. Le 23 avril, neuf communes n'avaient pas encore donné signe de vie; une ordonnance pressante enjoignit aux habitants de dresser eux-mêmes la liste des citoyens, si les municipalités s'y refusaient, et menaça les récalcitrants de la perte des droits civiques '. Un autre moyen d'accélérer l'opération, fut la convo- cation des assemblées primaires pour le 28 avril. Elles devaient se réunir dans l'église paroissiale de chaque chef-lieu de canton ; quand le nombre des citoyens actifs du canton dépassait neuf cents, les commissaires décidaient la tenue de deux ou plusieurs assemblées W. Les apports tardifs de certaines listes les obligèrent à modifier leurs dispositions premières et à créer, par ordonnances postérieures, des assemblées supplémentaires "". Parfois aussi l'arrivée imprévue de nouveaux citoyens actifs les forçait à aug- menter le chiffre des électeurs 0. Enfin, en présence des récla- mations de certaines paroisses, les commissaires crurent sage de déroger provisoirement aux règles tracées par l'Assemblée natio- nale pour la circonscription des cantons. C'est ainsi qu'ils démem- brèrent sept communes du district de Pont-1'Evêque pour les rattacher au district de Caen, partie au canton de Troarn, partie à celui de Ranville 7. Ces modifications de la dernière heure ajournèrent la date de plusieurs assemblées ; commencées le 28 avril, les opérations électorales étaient terminées le 12 mai. Dans le département de la Manche, elles souffrirent de plus longs retards. Les trois commissaires du roi s'étaient cependant donné rendez-vous à Coutances dès le 22 mars, dans l'hôtel de 1 Réponse de Saint-Priest aux commissaires, 15 avril 1790. Arch. nat., F1 ' III, Calvados 12. 2 Lettres des 16 et 19 avril 1790. Arch. dép., Calvados, série L non inventoriée. 3 Ordonnance du 23 avril 1790. Arch. nat., F1'' III, Calvados 1. Ces neuf paroisses étaient La Caine, Goupillières. Ouf/Gères, Grimbosq. Boullon, Croisilles, Valcon- giain, Campandré, Bonnemaison. 4 Ce qui arriva pour les cantons de Caen, Bayeux. Vire, Le Bény, Vassy, Condé- sur-Noireau. r> Ordonnance du 20 avril, créant deux assemblées primaires dans le canton de La Fernère-au-Doven. 6 A Caen ils accordèrent un huitième électeur à la section de l'Université, qui compta 758 Citoyens actifs au lieu de 707 prévus, et un septième électeur à celle des Cordeliers, qui, avec 623 inscrits, comptait 653 citoyens. 'Ordonnances des 8 et 9 mai 1790. 7 Varaville, Petitville et Bobehomme furent rattachés au canton de Troarn ; Gonneville, Merville, Le Buisson et Cabourg à celui de Banville. Ordonnance du 27 avril 1790. LES ASSEMBLÉES PRIMAIRES DE LA MANCHE 455 l'un d'eux, Frémin de Beaumont et s'y étaient constitués en commission avec un avocat de la ville, Burnouf, pour secrétaire. Empressement inutile, car ils ne reçurent que le 31 mars le procès- verbal de division et la carte du département, pièces qui leur étaient indispensables pour commencer leurs opérations. Du 5 au 10 avril, ils adressèrent aux municipalités des circulaires et des instructions en vue de l'établissement des listes de citoyens actifs et éligibles. Le 27 avril, lettres de rappel provoquées par l'inertie générale. Le 6 mai, quatorze cantons seulement sur soixante-trois leur avaient répondu. Comme leurs collègues du Calvados, ils se plaignirent à Saint-Priest de la négligence et de l'insouciance des municipalités *>. Pour activer les opérations, ils résolurent de s'en partager la surveillance. Frémin de Beau- mont, qui resta à Coutances, eut dons son ressort les districts de Coutances et de Saint-Lô, les cantons de Périers, la Haye-du- Puits et Lessay dans le district de Carentan, le canton de Gran- ville dans le district d'Avranches. Bernard se chargea des districts de Valognes et de Cherbourg et des autres cantons du district de Carentan. Le Tuilier prit le reste, c'est-à-dire les districts de Mortain et d'Avranches, moins le canton de Granville 2>. Leurs efforts réitérés triomphèrent de l'inertie des autorités locales. Le 14 mai, trente-quatre cantons avaient envoyé leurs listes 3 ; le 19 mai, arrivèrent celles des districts d'Avranches et de Mor- tain ; le 20, parvint le dernier envoi, celui de la paroisse d'Enne- ville, au district de Carentan W. Les soixante-trois cantons du département comptaient cent trente-six assemblées primaires 5. Celles-ci avaient dû être dédoublées dans plus d'un canton, en raison du nombre des citoyens actifs ; c'est ainsi que l'arrivée d'un tableau supplémentaire des citoyens actifs de Créances força les commissaires à établir, par ordonnance du 21 mai, trois assemblées dans ce canton 8. La réunion de ces assemblées fut fixée au 31 mai pour six districts ; celles du district de Valognes 1 Lettre des commissaires de la Manche à Saint-Priest, 6 mai 1790. Arch. nat., Flf III, Manche 1. 2 Circulaire imprimée des commissaires indiquant ce partage. Ibid. 3 Lettre des commissaires à Saint-Priest, 14 mai 1790. 4 Registre de la commission royale, 20 mai 1790, fol. 9. Arch. dép., Manche, série L non inventoriée. 5 Lettre des commissaires à Sainl-Priest.. 22 mai 1790. Arch. nat., F1 ° III, Manche 1. 6 Registre de la commission royale, 21 mai 1790, fol. 9. Arch. dép.. Manche, série L non inventoriée. 456 LES ASSEMBLÉES PRIMAIRES DE LORNE furent ajournées au 2 juin, à cause des foires de Brix et de Cher- bourg. Dans les trois cantons du département de l'Orne dont les chefs-lieux appartenaient au ressort de la généralité de Caen, les élections eurent lieu à une date ultérieure. Les électeurs de Fiers se réunirent le 11 juin ; ceux de la Carneille, le 25 juin seule- ment !/. Là encore, il y eut plus d'assemblées que de cantons ceux de Fiers et d'Athis comprenaient deux sections électorales ; celui de Tinchebrai en comptait cinq. Deux communes étaient demeurées sourdes à l'appel des commissaires Caligny et Saint- Pierre-du-Regard ; elles envoyèrent leurs listes au Calvados et leurs citoyens actifs à l'assemblée de Pontécoulant. Les opérations électorales s'échelonnèrent ainsi, dans les trois départements, sur deux mois, de fin avril à fin juin 1790. Elles ne furent exemptes ni de confusion, ni de troubles. C'était la première fois qu'on groupait en si grand nombre et sur tant de points les citoyens des campagnes. Les assemblées primaires de 1789, avec leur cadre restreint, la paroisse, constituaient des groupements numériques assez modestes. Les députés ruraux issus de leur choix, qui s'acheminèrent le plus souvent deux par deux vers le chef-lieu du bailliage, y formèrent sans doute des réunions imposantes ; mais les garanties d'ordre pouvaient être facilement assurées dans des centres peu nombreux, qui étaient des sièges de juridiction et des résidences de maréchaussée, et la compétence des gens de loi y put guider sûrement le travail des assemblées. Aussi leurs séances furent-elles calmes et leurs opé- rations régulières. Pouvait-on attendre autant de tranquillité et de correction du vaste pétitionnement électoral qui, sur le territoire de la généralité de Caen, allait mettre en mouvement plus de cent mille citoyens dans 202 assemblées? N'était-il pas permis de supposer que dans ces réunions improvisées, où les électeurs devaient se compter par centaines '2; où les premiers 1 Arch. dép., Orne, L388. 2 11 serait intéressant de déterminer exactement la valeur de la comparution individuelle des citoyens actifs aux assemblées primaires de 1790. Un si long travail serait déplacé ici. Les documents que j'ai recueillis sur quelques points révèlent d'assez nombreuses abstentions. Dans les sections de Baveux, écrit le maire de Magny à l'Assemblée nationale, il n'y eut, le second jour de l'élection, presque per- sonne de la campagne. » Lettre de Comin à l'Assemblée nationale, 29 mai 1790. Arch. nat., D iv 21. — A l'assemblée des Capucins de Vire, on élut les six électeurs en petit comité, en profitant de l'absence d'un grand nombre de membres qui assistaient à une procession. Pétition des citoyens de Vire à l'Assemblée nationale, 25 mai 1790. Ibid. — Les procès-verbaux d'assemblées primaires des cantons d'Athis, Fiers et CONFUSION ET IRREGULARITES DES ASSEMBLEES PRIMAIRES 457 élans d'une liberté impatiente de la règle allaient se donner carrière, l'ordre subirait plus d'un fléchissement? Et faut-il s'étonner si cette consultation de la première heure d'un suffrage censitaire encore peu éclairé fut accompagnée d'incidents isolés qui la troublèrent superficiellement, sans altérer d'ailleurs la sincérité de ses résultats ? Il fallait compter d'abord avec l'inexpérience de citoyens débutant dans la vie publique. Les formalités électorales prescrites par le décret du 22 décembre 1789 étaient si longues et si com- pliquées que plus d'une assemblée s'y embrouilla. Dans la Man- che, à Quibou, à Marigny, à Saint-Denis-le-Gast, à Saint-Sau- veur-Lendelin, le président et les scrutateurs furent élus par acclamation, contrairement au décret et le serment civique ne fut pas prêté. A Lessay, l'appel nominal des votants avait été si précipité et si confus que la plupart d'entre eux n'avaient point eu le temps de prononcer la formule sacramentelle ; des discus- sions avaient surgi sur la régularité de la procédure et le curé de Saint-Germain-sur-l'E, président, avait levé brusquement la séance, emportant l'urne et laissant les opérations inachevées. Ailleurs, à Saussemesnil, trois électeurs sur huit n'avaient été nommés qu'à la pluralité relative ; à la Rondehaye, on avait procédé au vote par acclamation tt». Dans l'Orne, le curé d'Athis, Josset, avait été élu président par une majorité relative de 101 voix sur 234 votants et contraint, il avait dû s'incliner devant une assemblée qui ne voulait pas recommencer le scrutin ?. On ne voulait ni séjourner longtemps au chef-lieu, ni y revenir et l'on abrégeait les formalités. Un différend s'éleva, dans l'assem- blée de Ver, entre cette commune et Langronne d'une part et les cinq autres communes du ressort ; les deux premières vou- Tinchebrai Arch. dép.. Orne. L 388, permettent une détermina' ion précise. Dans le canton d'Athis, la section d'Athis 8 électeurs, 841 citoyens actifs compte 234 votants ; celle de Berjou 5 électeurs, 494 citoyens actifs, 185 votants. L'assemblée de Fiers 8 électeurs, 771 citoyens actifs, ne s'éleva qu'à 84 membres après le départ des électeurs d'Aubusson et de Saint-Georges-des-Groseillers. Il semble aussi que les défaillances, au cours des séances prolongées, furent nombreuses l'assemblée de la Carneille tombe rapidement de 130 votants à 50. A Saint-Pierre-de-Tinchebrai, 139 citoyens actifs se réunissent le matin du 15 juin pour nommer 8 électeurs ; le soir du même jour ils ne sont plus que 46. Le. premier des huit avait obtenu 114 suf- frages, le dernier n'en recueillit que 24. 1 Registre de la Commission royale. Rapport des commissaires du roi sur leurs diverses opérations, 12 juin 1790, fol. 11-12. Arch. dép,, Manche, série L non inven- toriée. 2 Jbid., Orne, L 388. 458 HOSTILITÉ DES GAMPAOffBS contre les villes laient soumettre le litige aux commissaires du roi, mais les élec- teurs des cinq communes qui formaient la majorité de l'assem- blée déclarèrent qu'ils ne pouvaient toujours être en route et continuèrent les opérations électorales ' . Parfois des rivalités entre communes voisines amenèrent des conflits regrettables au sein des assemblées ; les électeurs des villages jalousaient ceux du chef-lieu et le moindre prétexte était bon pour une rupture. Les électeurs de Saint-Georges-des- Groseillers et d'Aubusson quittèrent l'Assemblée de Fiers sans remettre leurs listes et sans donner le motif de leur retraite'2. Les gens de Bernières, maltraités à l'assemblée de Luc, refusèrent d'y retourner fl. Les campagnes étaient en général hostiles aux villes. C'était le Tiers état urbain qui l'avait emporté dans les assemblées préliminaires des bailliages aux élections des Etats généraux. Pour prévenir le retour d'un semblable échec, les ruraux ne vou- laient plus être confondus avec les citadins et réclamaient une circonscription électorale distincte. En formant les trois sections de Bayeux et les quatre sections de Vire, les commissaires y avaient fait entrer des villages de la banlieue. Leur décision souleva de vives protestations. A Bayeux, de graves dissenti- ments éclatèrent dans l'assemblée électorale des Capucins, entre les bourgeois et les députés des campagnes, qui se croyaient lésés. Le 29 mai, le maire de Magny, les officiers municipaux des communes de Guernon, Longues, Marigny, Saint-Germain-des- Entrées, Sommervieu et Saint-Germain-de-la-Lieue se plai- gnirent à l'Assemblée nationale de la part insuffisante que la campagne avait eue aux sections de la ville ». Ils accusaient les agents du pouvoir exécutif d'avoir frauduleusement dépouillé vingt paroisses de l'avantage d'avoir des électeurs de leur état. La ville de Bayeux, a joutaient -ils, est intéressée à la conservation d'un corps qui vient de manifester des sentiments réprouvés par le patriotisme de tous les bons citoyens du département » W. 1 Procès-verbal de l'assemblée primaire électorale de Ver canton de Cérences. Arch. nat., Div 27, 1. 394. — Cf. Arch. dép., Manche, série L non inventoriée, dos- sier identique. Le Comité de constitution ordonna aux commissaires de faire annu- ler les opérations; une nouvelle assemblée fut tenue à Ver le 11 juin. 2 Arch. dép., Orne, L 388. 3 IUid., Calvados, série L non inventoriée. 4 Plainte de Jean Comin, maire de Magny, 29 mai 1790. Extraits des procès-ver- baux des délibérations des paroisses sus-visées, avec mémoire; collectif du 31 mai 1790. Arch. nat., Div 21. — Cf. une lettre des commissaires du Calvados à l'Assemblée nationale, 3 juin 1790. Ibid., F1 c III, Calvados 1. CABALES ET VIOLENCES DANS LES ASSEMBLÉES PRIMAIBES 459 Une protestation en sens contraire, mais dirigée aussi contre les commissaires, avait été adressée quelques jours plus tôt par un groupe de bourgeois de Vire. Ils n'avaient pas vu sans déplaisir l'annexion de quatre paroisses rurales à la ville ; l'assemblée urbaine n'eut dû contenir que des citadins. Il semble, écrivait l'avocat Brouard, que tout ait concouru pour mettre l'aristo- cratie aux prises avec le patriotisme. Le choix a donné pour électeurs des citoyens qui, avec sept à huit mille livres de rente, n'ont pas rougi de faire une contribution patriotique de 150 li- vres » 0. Des inimitiés personnelles trouvèrent l'occasion d'éclater au milieu de ces réunions et y provoquèrent le tumulte. A l'assem- blée du canton de Bény, le notaire Fortin avait été élu président, malgré une vive opposition de son concurrent le prieur de Car- ville. Une table, apportée dans l'église, servait de bureau. Le curé du Reculey monta dessus et vociféra comme un furieux». Les gens de Monchamp, de Percy et du Désert le traitèrent de calotin impertinent » et ce jour-là le clergé fut un peu hous- pillé ». A Pontfarcy, un malavisé, profitant de la confusion générale, s'était enfui en emportant l'urne 2. A l'assemblée du canton de Juaye, la cabale avait présidé aux élections ; les billets n'étaient pas inscrits sur le bureau, des gens apostés les écrivaient dehors et les distribuaient publiquement, l'injure et la menace à la bouche » l3\ Des paroles violentes et des formules d'ostracisme furent entendues dans plus d'une assemblée ; dans celle de Mondeville, un membre demanda qu'on frappât d'une amende ceux qui voteraient pour un gentilhomme ou un ecclé- siastique ; le procureur de la commune, Cauvet, victime d'un zèle protocolaire excessif, fut lui-même violemment expulsé 4. Au moment où les opérations électorales de la Manche allaient être closes, on crut qu'il faudrait les recommencer. Dans aucune des assemblées primaires les citoyens actifs n'avaient représenté, conformément aux décrets, l'extrait de leur déclaration pour la contribution patriotique. Frémin de Beaumont trembla à l'idée 1 Pétition des citoyens île Vire à l'Assemblée nationale, 25 mai 1790. Arch. nat., Div21. 2 Arch. dép., Calvados, série L non inventoriée. 3 Lettre des commissaires à Saint-Priest, 22 mai 1790. Arch. nat., F1' 111, Calva- dos 1. 4 Registre des ordonnances de la Commission royale, 21 mai 1790. Arch. dép., CaNados, série L non inventoriée 460 CHOIX PRUDENT DES ASSEMBLÉES PRIMAIRES de faire procéder à un nouveau choix de près de huit cents élec- teurs et de mettre en mouvement, pour la seconde fois, une masse de 80,000 citoyens. Il en fut quitte pour la frayeur fl. L'œuvre des assemblées primaires était grosse de conséquences. Les électeurs qu'elles avaient désignés, appelés à leur tour à nommer les législateurs de la nation et les administrateurs des départements, tenaient entre leurs mains le sort de la future Révolution. Une fois de plus, la prudence normande se révéla dans leur choix. Les citoyens actifs n'écartèrent pas systéma- tiquement les membres de l'ancienne administration provinciale. Massieu et Tesnières de Brémesnil, lieutenant général du bailliage d'Avranches, qui avaient été députés à l'Assemblée provinciale de Caen, Daigremont, membre de la Commission intermédiaire provinciale, furent parmi les électeurs. Quarante-trois membres des administrations des neuf départements de la généralité, magistrats, avocats, médecins ou laboureurs, jouirent de la même popularité ; ils avaient fait leur apprentissage administratif soit aux séances annuelles des assemblées de 1787 et de 1788, soit aux fréquentes réunions des bureaux intermédiaires '2'. Un très 1 Lettre de Frémin de Beaumont aux commissaires du Calvados, juin 1790. Arch. dép., Calvados, série L non inventoriée. 2 Voici la liste de ces quarante-trois membres 1° Département pu Calvados. — District de Caen Bacon de Saint-Manvieu, con- seiller honoraire au bailliage; de Chappedelaine, conseiller au bailliage; Hébert. Nourry. Piéplu, Baisin, propriétaires à Fontenay-le-Marmion, Bretleville-sur-Odon, Bréville et Lanteuil, membres le l'assemblée du département de Caen. — District de lia yeux Le Bret, Bunouf-Bunouville, avocats ; Denise, de Septvents ; Lepeton, d'En- glesqueville ; Milon, de Crouay ; Bourdiaux, d'Asnières, propriétaires, membres de l'assemblée du département de Bayeux ; Renouard. propriétaire à Sermentot, membre de l'assemblée du département de Caen. — District de Vire Brouard de Clermont, lieutenant général honoraire du bailliage, président de l'assemblée du département de Vire ; Monlien de Perthou, président honoraire de l'élection, membre du bureau intermédiaire ; Roger Sorière, négociant, membre de l'assemblée du département de Vire. ^° Département de la Manche. — District d'Avranches Longrais de la Snunerie, Théault des Orgeries et Lechevalier, laboureurs au Grippon, à Saint-Auhin-de-Tor- regate et ;'i Servon, membres de l'assemblée du département d'Avranches. — Dis- trict de Çarentan Laurens et Caillemer, avocats, membres du bureau intermédiaire ; Lcmaignan, procureur-syndic du département ; Begnault, de La Haye-du-Puits, membre de l'assemblée du département de Çarentan. — District de Cherbourg Dulongprey-Couet, négociant, membre de l'assemblée du département de Valognes.— District de Coulances Bonté, conseiller au présidial, membre du bureau intermé- diaire ; Leforeslier de Mobccq, de Ver ; Desmarets de Monlchalon, lieutenant géné- ral du bailliage Alexandre, notable de Coutances ; Lel'ebvre Dubuisson, avocat à Gavray ; Baudry, notaire à Hambye ; Sadot, laboureur à Savigny, membres de l'as- semblée du département de Coutances. — District de Morlain Lerebours de la Pigeonnière, avocat à Saint-Iïilaire-du-Iiarcouét, membre du bureau intermédiaire ; Blanchet l'Aumône, propriétaire aux Biards ; Bonnesœur-Bourginière, avocat à CONDITION SOCIALE DES ÉLECTEURS DU SECOND DEGRE 461 grand nombre d'électeurs furent choisis parmi les anciens syndics municipaux de 1787, parmi les maires, procureurs de la commune ou officiers des municipalités nouvelles. On en élut un plus grand nombre encore parmi les citoyens qui avaient pris une part active à la convocation des Etats généraux, soit comme députés des assemblées préliminaires des bailliages secondaires aux assemblées définitives de Gaen et de Coutances iD, soit comme députés de leurs paroisses à ces assemblées préliminaires ,2. Tous avaient dit leur mot sur les affaires du temps, contribué à la rédaction des cahiers, émis des vœux de réformes ; tous étaient attachés à la Révolution et plus d'un désirait en voir accélérer la marche. Au point de vue social, les distinctions d'ordre avaient disparu ; les votes ne se répartirent plus entre clergé, noblesse et Tiers état selon une proportion mathématiquement établie ; tous les citoyens éligibles furent confondus dans une masse unique, abstraction faite de leur condition. Ce fut le Tiers état qui y gagna. Très peu d'anciens nobles furent élus, une douzaine au plus sur douze cents ; les ecclésiastiques, un peu moins rares, n'atteignirent pas la quarantaine ; les avocats, les magistrats et les hommes de loi formèrent un groupe un peu plus compact de cent quarante-six unités ; quant au commerce et à l'agriculture, on ne les voit représentés que par des chiffres insignifiants, vingt-trois négociants et marchands et trente-huit laboureurs. Pure apparence sur les 886 électeurs compris dans le ressort de l'ancienne généralité de Caen dont les listes officielles, dressées par les commissaires du roi, n'accompagnent les noms d'aucune Barenton ; Homo dos Vallées, papetier à Vengeons Leroux de Launey, propriétaire au Grand-Ccllant, membres de l'assemblée du département de Mortain. — District . Dans une instruction préalable envoyée à tous les électeurs, ceux-ci avaient cru prudent, en leur retraçant la procédure électorale, de leur donner de sages conseils. Les électeurs, disaient -ils, écarteront avec soin les vues intéressées, les suggestions perfides ; ils mépriseront et déconcerteront les cabales et les intrigues ; c'est l'homme propre à la chose qu'ils chercheront. . . Mais c'est surtout l'homme sage et vertueux, le citoyen honnête et modeste, qui, loin de sacrifier à l'ambition, fuit les places et dédaigne les honneurs qu'ils iront chercher dans sa retraite. Ils ne choisiront par préférence aucun citoyen, comme ils ne donneront l'exclusion à aucun, par la seule raison de la 1 Listes des électeurs de ces trois départements envoyées par les commissaires du roi à Saint-Pricst. Arch. nat., FlcUl, Calvados 1, Manche 1, Orne 1. Les états d'imposition des él-celeUrs de Caen et Vire Arch. dép., Calvados, C 7816-80X9. les procès-verhaux des assemblées préliminaires des bailliages, et surtout ceux des assemhlées paroissiales des bailliages de Caen Greffe de le Cour d'appel de Caen, Vire Arch. dép., Calvados, série B non inventoriée;, Coutances, Moi tain, Avranches Greffe du Tribunal de Coutances, de Torigni et de Valognes Arch. dép., Manche, série B non inventoriée, m'ont permis de restreindre assez notablement la liste des électeurs sans profession. 2 Procès-verbal de l'assemblée électorale du département du Calvados. Arch. dép., Calvados, série L non inventoriée. — Cf. Arch. nat., Ficlll, Calvados 1, trois exem- plaires de ce procès-verbal, adressés l'un par les commissaires du roi au Comité de constitution le 2 juillet, les deux autres par Bayeux, procureur général syndic, à Necker et Saint-Priest, le 16 juillet 1790. 3 Discours de MM. les Commissaires du rôipOOT l'ouverture de l'assemblée électorale du département du Calvados. Caen, Leroy, 21 p. Ibid., F ' 111, Calvados 1. ÉLECTION DES ADMINISTRATEURS DU CALVADOS 463 classe où il est placé, du rang qu'il occupe ou de l'état qu'il a embrassé. C'est le plus digne qu'ils choisiront » W. Le chiffre légal de l'assemblée était de 594 électeurs ; elle ne l'atteignit jamais. Forte de 499 membres au début, elle comprit 535 membres le 15 juin ; la lassitude des électeurs, que les travaux de la saison rappelaient pour la plupart à leurs champs, réduisit vite ce nombre il descendit à 440 le 19 juin, à 378 le 21, à 369 le 24. Les trois premiers jours furent absorbés par l'accomplisse- ment des formalités réglementaires vérification des pouvoirs, qui fut quelque peu orageuse, et nomination du bureau. L'assem- blée élut pour président le 13 juin, à la pluralité absolue des suffrages, par 251 voix sur 490 votants, Brouard de Clermont, ancien lieutenant général du bailliage de Vire. C'était un magis- trat généralement estimé et dont le choix parut de bon augure pour la suite des opérations » C2. Lacroix-Saint-Michel, maire de Honfleur, fut nommé secrétaire dans les mêmes formes. Tous deux prêtèrent le serment civique et reçurent le serment collectif de l'assemblée. L'élection des trois scrutateurs mit fin aux préli- minaires. Le 15 juin commença l'élection des trente-six administrateurs. D'après la loi, chacun des six districts devait compter au moins deux représentants ; on convint d'une répartition plus équitable, en leur attribuant à chacun six membres. La partie occidentale du Calvados, démembrée de l'ancienne généralité de Caen et composée des trois districts de Caen, Bayeux et Vire, fournit donc dix-huit administrateurs. Les six représentants du district de Caen furent élus, Lelièvre, laboureur, maire de Creully, par 438 voix ; Gosset de la Rousserie, conseiller au bailliage de Caen, par 353, le 15 juin ; Lebidois, laboureur d'Ardennes, maire de Saint-Germain-la -Blanche-Herbe, par 270, et Robert, laboureur d'Amfréville, par 131, les 18 et 19 juin ; Dobiche de Lamont, procureur du roi à la Monnaie de Caen, par 217, Hélie, laboureur de Mondeville, par 128 voix, les 21 et 22 juin. Pour le district de Bayeux, furent successivement élus le 16 juin, Renouard, laboureur, maire de Sermentot, par 502 voix, et Robert Milon, laboureur, maire de Crouay, par 299 ; le 19 juin, Maheust et Le Bret, tous deux avocats à Bayeux, recueillirent le premier 324 suf- frages, le second 311 ; le 23 juin, les deux derniers élus du district 1 Instruction sur lu formation de l'Assemblée du département , l'élément rural triompha avec éclat, au grand désespoir des officiers municipaux de la ville. Nous avons un district, écrivirent-ils à Wimpf en, mais bon Dieu, quel district ! Il faut que le ciel soit bien d'accord avec l'assemblée si la machine marche bien. Neuf personnes de la campagne, trois de la ville ; pour procureur syndic, notre procureur de la commune. M. Le Tellier, seul en état de faire marcher la machine, a été repoussé. La campagne a eu grande influence ; elle veut écraser les villes. Voilà son but elle en a tous les moyens ».3. Mêmes résultats du scrutin dans l'assemblée électorale de Vire, où dix membres sur douze sont choisis parmi les citoyens de la campagne. Seuls, l'ancien maire de Vire, Michel Mauduit et le maire nouveau, Richard Castel, élu procureur syndic, représentèrent les intérêts de cette ville au sein du conseil l*. L'assemblée de Vire fut trou- blée par un incident qui eut pu devenir tragique et qui dévoila les sentiments de haine amassés au cœur de certains partisans de l'ancien régime contre les adeptes de la Révolution. Le fils 1 Procès-verbal do l'assemblée électorale du district de Caen, Arch. dép., Cal- vados, série L non inventoriée; triple exemplaire, avec lettres d'envoi des commis- saires, Bayeux et Signard, à Saint-Priest, Neckeret au garde des sceaux, 6 août 1790. Arch. nat., FlcIIl, Calvados 1. 2 Procès-verbal de l'assemblée électorale du district de Bayeux, Arch. dép., Cal- vados, série L non inventoriée, en triple exemplaire- Arch. nat., F1 c 111, Calvados 1. 31 Lettre des officiers municipaux à Wimpfen, 13 juillet 1790. Arch. connu., Bayeux. Registre de correspondance. 4 Procès-verbal de l'assemblée électorale du district de Vire, Arch. dép., Calva- dos, série L non inventoriée; en double exemplaire adressés à Necker et au garde des sceaux. Arch. nat., Flc 111, Calvados 1. l'assemblée électorale de la manche 467 du marquis de Pontécoulant, Gustave Doulcet, le futur conven- tionnel dont le nom fut mêlé plus tard au procès de Charlotte Corday, était connu pour ses opinions libérales et sympathique au peuple. En 1789, le Tiers état de sa petite paroisse l'avait envoyé comme député à l'assemblée du bailliage de Vire, où il avait présenté des vœux démocratiques » ; le 7 juillet 1790, il était revenu à Vire comme électeur du canton de Condé. Le chevalier de Campagnolles ayant voulu faire mention de sa qualité au procès-verbal, Doulcet protesta avec énergie et rappela le décret du 19 juin qui avait aboli les titres de noblesse. Cette attitude lui attira de vives haines parmi les gens de son ordre. Le 10 juillet, deux nobles des environs, Achard, seigneur de Saint-Manvieu et le fils du seigneur de Percy l'insultèrent dans la rue ; Achard le provoqua en duel. Le peuple s'ameuta pour le protéger et faillit faire un mauvais parti à Achard ; il assiégea la maison du receveur des finances, Longueville, où celui-ci s'était réfugié et dont on ne le fit évader qu'à grand peine. La munici- palité apaisa l'affaire assez difficilement et l'insulteur fut obligé d'écrire à Doulcet une lettre d'excuses, où il mettait son agression sur le compte d'une ivresse passagère ]. L'assemblée électorale de la Manche dura un peu moins long- temps que celle du Calvados. Sa première séance eut lieu le 14 juin, sa dernière le 23 juin 3. D'abord réunie dans l'église du séminaire, elle trouva le local trop étroit pour ses 781 membres et se transporta à la cathédrale. La vérification des pouvoirs sou- leva quelques contestations. Les députés élus par les cinq pa- roisses scissionnaires de la section de Ver prétendaient être admis à l'assemblée. Les commissaires du roi, qui avaient annulé les opérations et ordonné de nouvelles élections, les prièrent d'en attendre le résultat 3. Les six nouveaux électeurs de Ver se présentèrent le 16 juin, porteurs du procès-verbal de leur dépu- tation et prirent place dans l'Assemblée. Dès la veille, celle-ci avait nommé comme président, à la pluralité » absolue de 393 voix, Tesnière de Brémesnil, lieutenant général du bailliage d'Avranches. Malgré sa grande jeunesse il n'avait pas encore 1 Arch. mit., D xxix 84. -2 Procès-verbal de l'assemblée électorale de la Manche en double exemplaire adressé au Comité de constitution et à Saint-Priest, avec lettres d'envoi de Frémin de Beaumont, procureur général syndic, du 19 juillet 1790. Ibid., F III, Manche 1. 3 Registre de la Commission royale, 15 juin 1790, fol. 13 14. Arch. dép., Manche, série L non inventoriée. 468 ÉLECTION DES ADMINISTRATEURS DE LA MANCHE trente ans, celui-ci l'avait emporté, au second tour de scrutin, sur son collègue de Coutances, Desmarets de Monchaton n. Tesson, avocat de Coutances, vit son titre de secrétaire provisoire confirmé à titre définitif par 420 suffrages ; le 17 juin, après l'élection des trois scrutateurs, 407 électeurs témoignèrent leur confiance à l'un des commissaires du roi, Frémin de Beaumont, en le désignant comme procureur général syndic du département. Les formalités préliminaires avaient pris trois jours entiers ; restait à élire les trente-six membres du Conseil de département. L'assemblée résolut de procéder d'abord à la nomination des sept premiers un pour chaque district au scrutin de liste double et à la pluralité absolue. Les sept administrateurs désignés par les suffrages des 740 électeurs réunis obtinrent un nombre de voix qui varia entre 712 et 691 voix, à savoir Tesson, avocat de Cou- tances, 712 voix ; Tesnière de Brémesnil, maire d'Avranches, 711 ; Le Rebours de la Pigeonnière, avocat du district de Mortain, 704 ; Vastel, avocat de Cherbourg, 702 ; Bernard, avocat du roi à Saint-Lô et un des trois commissaires du département, 700 ; Gilles le Chanoine, laboureur de Varenguebec, au district de Carentan, 692, et Deslongchamps-Després, lieutenant de la maîtrise des eaux et forêts de Valognes, 691. En raison de la lenteur du scrutin et du dépouillement il avait fallu deux jours pleins pour élire sept conseillers ; une procédure si compliquée ne pouvait que lasser les électeurs. Le 18 juin, l'assemblée électorale avait dû s'ajourner à cause de son insuffi- sance numérique. Forte de 723 votants au 15 juin, elle était descendue à 712 le 20, à 696 le 21, à 665 le 22 on la voyait fondre peu à peu. La majorité des électeurs fit valoir l'urgence des travaux de la campagne et menaça de se retirer si les choses traînaient en longueur. On convint d'adopter une méthode plus expéditive, qui permît de les libérer au plus vite. L'assemblée se divisa, le 20 juin, en sept bureaux, composés d'électeurs pris proportionnellement dans chaque district ; chacun d'eux devait former une assemblée partielle, avec son président, son secrétaire et ses scrutateurs et procéder séparément à la nomination de 1 Renseignements relatifs à Brémesnil, fournis à l'intendant par Meslé, su b délé- gué d'Avranches en 1787. Arch. dép.. Calvados, C 6343. Agé de 25 à 26 ans, beau- coup d'esprit, parle bien, annonce des vues de bonne administration, prend la qua- lité d'écuyer, fondée sur ce que son père a acheté, il y a environ trois ans, une charge de secrétaire du roi ; peut-être dédaignerait-il de figurer dans le Tiers état. » Brémesnil fit allusion à sa jeunesse dans les deux discours qu'il prononça, après son électron et pour la clôture de l'assemblée. RÈGLEMENT DU DEBAT SUR LE CHEF-LIEU 469 vingt-huit administrateurs par un scrutin de liste double. Qua- torze commissaires, élus à raison de deux par chaque bureau, se joindraient à leurs collègues pour opérer le dépouillement collectif des scrutins. Quant au trente-sixième administrateur, on procéderait à sa désignation isolément, mais dans les mêmes formes. Le premier scrutin, de 696 suffrages, donna la majorité absolue aux vingt-huit membres ; le premier élu recueillit 612 voix, le dernier 580. Ce furent, dans un ordre de popularité décroissante Langlois, vicomte de Barfleur, 612 voix ; Buhot, laboureur, maire des Pieux et Brostin-Desfontaines, de Montai- gu, 611 ; Jean-François Duval-Larivière, laboureur de Gréville, 609 ; Dulongprey-Cabart, du Vicel, 608 ; Euvremer, avocat de Périers, 607 ; La Houguette-Lemaître, laboureur de Clitourps, La Roque-Laloi, herbager de Saint-Marcouf et Dubost-Dulong- prey, laboureur de Saint-Martin-le-Hébert, 606 ; Bonnesœur- Bourginière, avocat à Barenton et Dubreuil, maire de Heugue- ville, 604 ; Michel Ernouf, maire de Saint-Germain-sur-E, et Joseph Lafosse, herbager de Saint-Côme, 600 ; Lemaignen, maire de Carentan et Pouret-Longueval, laboureur de Geffosses, 599 ; Duhamel, avocat et maire de Mortain et Regnault, avocat de Saint-Michel-la-Pierre, 598 ; Heudeline, avocat à Torigni, 597 ; de Brécey de la Vallée, avocat à Saint-Jores et Ernoul-Deslandes, avocat de Vengeons, 596 ; Poisson de Coudreville, avocat à Saint-Lô, ancien procureur du roi au bailliage d'Alençon, 595 ; Loquet, maire de la Lande d'Airou, 592 ; Hubert-Dumanoir, de Saint-Gilles, 589 ; Le_ Gorju, laboureur de Saint -Vigor-des- Monts, 588 ; Loisel, avocat à Saint- James, 587 ; Le Mengnonnet fils, négociant de Granville, 584, et Juhé, avocat de Mortain, 580. Ce fut également au premier scrutin que fut élu, par 435 suffrages, le trente-sixième administrateur du département, Regnault de Bretel, de la Haye-du-Puits. L'assemblée administrative de la Manche, avant de se séparer, avait à régler la question de son siège. C'était aux électeurs que le décret du 16 février 1789 avait laissé le soin de délibérer si l'assemblée de département devait alterner ou si Coutances devait définitivement en demeurer le chef-lieu ». Dans la matinée du 22 juin, plusieurs orateurs se succédèrent à la tribune pour y discuter les avantages et les inconvénients des deux solutions ; le vote qui suivit donna 440 voix aux partisans de Coutances contre 225 aux défenseurs de l'alternat. Coutances fut proclamé chef -lieu permanent du département. La composition du nouveau Conseil de département attestait 170 CONDITION SOCIALE DES ADMINISTRATEURS ÉLUS en même temps qu'une répartition équitable de ses membres entre les sept districts, une prépondérance assez marquée dé l'élément rural sur l'élément urbain. Onze avocats, six magistrats, neuf laboureurs, un négociant et neuf membres sans profession indiquée, mais domiciliés dans les bourgs et villages et probable- ment propriétaires ruraux, tels furent les trente-six administra- teurs chargés des intérêts du département. Douze d'entre eux représentaient la ville, où ils exerçaient pour la plupart des fonctions de l'ordre judiciaire ; vingt et un étaient domiciliés à la campagne ; trois enfin, citadins d'origine à coup sûr, étaient des électeurs issus des suffrages d'assemblées primaires rurales. L'assemblée électorale avait fait preuve dans ses choix du patriotisme le plus pur et de la sagesse la plus éclairée ». Ses membres avaient franchement répudié les principes de l'ancien régime. Lorsque le comte Leforestier de Mobecq et de Péronne, seigneur de Lengronne, vinrent exprimer à leurs collègues leur étonnement de se voir qualifiés de nobles sur le procès-verbal et leur ambition de n'être appelés que citoyens, ils furent vigou- reusement applaudis. Cette assemblée d'hommes libres qui, au dire des commissaires, avait montré les rapides progrès accom- plis en France par l'esprit public » eut à cœur de nommer des défenseurs d'une liberté sage et bien ordonnée », des amis d'une Constitution qui, marchant d'un pas majestueux et tranquille, parviendrait au terme désiré de son accomplissement ». Sans se montrer systématiquement hostile aux anciennes administra- tions provinciales, puisqu'elle leur emprunta neuf membres de l'administration nouvelle, elle entendit prouver par ses choix son attachement au nouveau régime ; sept de ses élus devaient figurer dans les futures assemblées révolutionnaires. A peine constituée, son premier acte avait été une adhésion unanime aux décrets de l'Assemblée nationale et dans une de ses dernières séances elle vota l'achat d'un portrait de Louis XVI, restaura- teur de la liberté » ; elle associait donc dans ses vœux le culte de la monarchie à l'amour de la Révolution. Les assemblées électorales de chacun des sept districts de la Manche suivirent de près celle du département l. Elles se réu- nirent successivement à Coutances, le 24 juin, dans l'église des Capucins ; à Saint-Lô, le 26 juin, dans l'abbaye Sainte-Croix ; à 1 Procès- verbaux des assemblées électorales des sept districts copies conformes rétaires; celui de Carentan en double expédition. F1'" IIT, Manche 1. LES ASSEMBLÉES ÉLECTORALES DES DISTRICTS DE LA MANCHE 471 Avranches, le 28 juin, dans l'église des Capucins ; à Mortain, le 1er juillet, dans l'auditoire du bailliage ; à Cherbourg, le 2 juil- let, dans la salle d'audience de la juridiction ; à Valognes, le 6 juillet, dans l'église des Capucins. La dernière de toutes, celle de Carentan, avait été ajournée au 7 juillet, pour permettre au Comité de constitution de statuer sur une demande dont l'avaient saisi, le 18 juin, les électeurs du canton de la Haye-du-Puits, qui désiraient voir fixer dans leur petite ville le chef-lieu du district *. Elle se tint, comme l'avaient ordonné les commissaires, dans l'abbaye de Carentan et ne fut point exempte de troubles. Les électeurs y agitèrent la question du chef-lieu et la résolurent, par 45 voix contre 44, en faveur de Carentan, au désespoir des gens de Périers, dont le représentant, l'avocat Vaultier, élu admi- nistrateur, menaça de donner sa démission 2, et des gens de la Haye-du-Puits qui envoyèrent aussitôt une députation extra- ordinaire pour protester contre la délibération illégale de l'assem- blée 3. Les six autres assemblées, très calmes, s'étaient bornées à nommer les membres des conseils. L'esprit qui guida les suf- frages des électeurs des districts était celui qui les avait inspirés à l'assemblée du département. Parmi les quatre-vingt-quatre administrateurs élus dans les sept districts ne figurent que peu de nobles 4, deux ecclésiastiques seulement 5, une quarantaine de magistrats, hommes de loi, avocats, notaires 6 ; le reste, t Registre de la Commission royale, fol. 16. Areh. dép., Manche, série L non inventoriée. 2 Registre de la Commission royale. Ibid. 3 Requête des citoyens de La Haye-du-Puits à l'Assemblée nationale, 18 juillet 17!M. Mémoire de Roger le Boiteux et Hotot, députés de cette commune, pour être présenté à l'Assemblée nationale quand ils pourront avoir l'avantage d'y être admis », 25 juillet 1790. Arch. nal., D iv 9. 4 Noble* Desmarets de Montcbaton, Dufouc de Maisoncelles district de Cou- tances ; Cassel de la Chaise d. de Mortain. 5 Ecclésiastiques Roulin, curé de Moidrey, et Lechevalier, vicaire de Saint-Lau- rent- de-Terregate d. d'Avranches. G Magistrats Tesnière de Brémesnil, lieutenant général du bailliage d. d'Avran- ches ; Quenault de la Grondière, président de l'élection, Yver de la Rruchollerie, avocat général à la Cour des comptes de Rouen d. de Carentan Duhamel, lieute- nant général de police, Boni/'-, conseiller au bailliage d. de Coutances ; Michel de Préfossé, lieutenant civil et criminel de la haute justice d. de Cherbourg ; de Lau- brière, conseiller au Parlement de Rouen, Vézard et Pallix-Deschamps, conseillers au bailliage d. de Mortain; Courtin de la Bréaudière, conseiller à l'élection, et Denier- Desfresnes, lieutenant criminel du bailliage d. de Saint-Lô ; Bauduin, con- seiller au Conseil supérieur de Corse. — Avocats Auvray. Giroult, Molel, Pinel d. d'Avranches ; Caillemer, Euvreraër, Vaultier d. de Carentan Avoyne, llirard, Vastel d. de Cherbourg ; Joly, Lecoq, Lefèvre, Pignard d. de Coutances ; Blon- del, Clouard, Gautier, Gesbert, James, des Yvets d. de Mortain ; Beaufils, Bour- 472 l'assemblée électorale de l'orne et du district de domfront c'est-à-dire la grande majorité, était formé de propriétaires ruraux et de laboureurs. A côté de personnages déjà mis en vue par leurs anciennes fonctions, comme Duhamel à Coutances, Courtin à Saint-Lô, Duméril, médecin à Valognes, etc . . . , beau- coup de noms encore inconnus. Là encore, la campagne était, pour les conseils, une pépinière d'hommes nouveaux. L'assemblée électorale du département de l'Orne se réunit à l'église Notre-Dame d'Alençon le 30 juin 1790 ; ses séances se prolongèrent jusqu'au 7 juillet. Sur les 607 électeurs dont elle se composait, cinquante-huit seulement représentaient la portion de territoire empruntée à l'ancienne généralité ; c'était ceux des cantons de Fiers, Athis et Tinchebrai. L'un d'entre eux, Lesueur, avocat de Tinchebrai, fut choisi comme administrateur du dépar- tement i1. Les mêmes électeurs se retrouvèrent à Domfront, le 16 juillet, pour former l'assemblée électorale , du district, chargée d'en nommer les douze administrateurs. Quatre de ceux-ci appartenaient au ressort des anciens districts de Mortain et de Vire ; ce furent Graindorge des Domaines, avocat de Fiers, Lefebvre-Dufau, d'Athis, Lasne de Beaulieu, docteur en médecine de Tinchebrai et Signard, maire de Notre-Dame-des- Moutiers 2. Les fonctions des commissaires du roi, d'après le décret du 29 mars, devaient cesser le jour de la clôture du dernier procès- verbal d'élection. L'assemblée du district de Carentan ayant terminé ses opérations le 9 juillet, les commissaires de la Manche arrêtèrent les leurs le 10 3. Dans le Calvados, ce fut l'assemblée du district de Caen qui fut la dernière close, le 13 juillet ; ce soir même, les commissaires du roi rédigèrent leur dernier procès- verbal et apposèrent pour la dernière fois leur signature sur le registre de la Commission, qu'ils avaient ouvert le 29 mars. Ils avaient cru devoir, précaution bien inutile, convoquer par don, Havin, Heudeline, Lescot de la Bigne, Letellier-Duhutrel d. de Saint-Lô ; Bitauzé-Daumesnil, Desiles-BoUin et Mauger d. de Valognes. — Notaires Boivin, Planchon d. de Coutances ; Vigot d. de Valognes. 1 Procès-verbal de l'assemblée électorale du département de l'Orne. Arch. dép., Orne, L391. 2 Procès-verbal de l'assemblée électorale du district de Domfront. Ibid., L 396. 3 Registre de la commission royale. Ce registre n'a été clos que le 2 octobre. Ibid., Mancbe, série L non inventoriée. Le dernier document qui y figure est l'état des dépenses de la commission, s'élevant à 3,087 livres 13 sols ; les trois commis- saires sollicitent, en outre, pour leurs frais personnels, une indemnité de 1,100 livres par tête, soit 3,300 livres, ÉLECTION DES DIRECTOIRES DES TROIS DEPARTEMENTS 473 ordonnances spéciales le Conseil de département pour le 13 juillet, celui du district de Caen pour le 15, ceux des autres districts pour le 19, en vue de la vérification de leurs pouvoirs et de l'élection de leurs Directoires 0 '. Le Directoire du Calvados fut en grande partie élu dans la journée du 13 juillet et complété le matin du 14 '2\ L'assemblée suivit les conseils de son procureur général syndic, qui lui recom- manda de choisir des hommes déjà doués de connaissances administratives et rompus aux affaires » elle nomma Dobiche de Lomont, Maheiist, Rivière, avocat d'Orbec, Vardon Saint- Lambert, notable de Falaise, Jouenne, avocat de Condé-sur- Noireau, Lacroix-Saint-Michel, maire de Honfleur, Renouard et Richer, laboureurs. Tous les districts du département étaient représentés, ceux de Bayeux et de Vire par un membre, celui de Caen par deux. Le Directoire de la Manche ne fut constitué que le 20 juillet 3. Il comprit des avocats en grande majorité, Euvremer, de Caren- tan ; Tesson, de Coutances ; Heudeline, de Torigni ; Loisel, de Saint-James ; Errioul Deslandes, de Vengeons ; Juhé du district de Mortain ; un magistrat, Després, du district de Valognes ; un laboureur du district de Cherbourg, Duval la Rivière. Quant au Directoire de l'Orne, formé le 23 juillet, il compta parmi ses huit membres Lesueur, avocat de Tinchebrai, qui fut élu au second rang, à la majorité absolue des suffrages >4. De l'étude de ce mouvement électoral de 1790, se dégage une conclusion éclatante l'accroissement graduel de l'influence acquise par les magistrats et hommes de loi à chaque étape d'un suffrage de plus en plus restreint et leur triomphe définitif. Ils n'étaient qu'une poignée d'individus dans l'immense armée des cent dix mille citoyens actifs de l'ancienne généralité de Caen ; ils ne formaient encore qu'une fraction peu importante, un hui- tième environ, dans l'ensemble des huit cent quatre-vingt-six électeurs réunis dans ce même cadre électoral. Ils avaient gagné du terrain dans les assemblées administratives de département 1 Registre des procès-verbaux des commissaires du roi, 7 et 11 juillet 1790. Arch. dèp., Calvados, série L non inventoriée. 2 Procès-verbal de la première session du Conseil général de l'administration du département du Calvados. Ibid., L 599. ^3 Procès-verbal de la première session du Conseil général de la Manche. Ibid., Manche, série L non inventoriée. 4 Procès-verbal d'élection du Directoire de l'Orne. Ibid., Orne, L 392. 474 PRÉPONDÉRANCE DES HOMMES DE LOI et de district dans le Calvados, ils constituaient le tiers du Conseil général ; dans la Manche ils en formaient la moitié. Ils entraient aussi pour la moitié, parfois pour les deux tiers, dans la composition de maint conseil de district. Ce fut surtout dans la formation des Directoires qu'ils l'emportèrent. Tandis que, sous le régime de l'édit de 1787, les magistrats et avocats, mêlés le plus souvent aux propriétaires ruraux dans la représentation du Tiers état, ne pouvaient jamais former qu'une minorité au sein de la commission et des bureaux intermédiaires, rigoureuse- ment composés par moitié d'ecclésiastiques et de nobles, ils figu- rèrent en très grande majorité dans les Directoires nouvellement élus. Six membres sur huit dans le Directoire du Calvados, sept sur huit dans celui de la Manche appartenaient au tribunal ou au barreau. Dans les Directoires de districts, la proportion n'était pas sensiblement différente th. Quant aux procureurs-syndics qui, placés auprès des Directoires comme agents d'initiative et d'exécution, allaient être la cheville ouvrière de l'administration nouvelle, eux aussi avaient été, presque tous, choisis dans l'élite du Tiers état judiciaire. Si l'on excepte Castel, le procureur- syndic de Vire, qui de directeur de la poste aux lettres devint inspecteur général de l'Université, tous les autres syndics, Costy à Caen, Delauney à Bayeux, Dufour de Maisoncelles à Coutances, du Hutrel à Saint-Lô, Caillemer à Carentan, Mauger à Valognes, Avoine à Cherbourg, Auvray à Avranches, étaient des avocats ; Pallix-Deschamps, à Mortain, était conseiller honoraire au bailliage. Des trois procureurs syndics généraux de la Manche, du Calvados et de l'Orne, deux, Bayeux et Lepelletier du Coudray, appartenaient à la robe ; Frémin de Beaumont lui-même, bien que de condition noble et secrétaire de son ordre à l'assemblée de Coutances, n'était-il pas avocat au Parlement, ancien prési- dent du Conseil supérieur de Bayeux et n'avait-il pas été rangé dans le Tiers état en 1787, lors de la formation de l'Assemblée provinciale? 1 Hommes de loi figurant parmi les membres des Directoires des districts Calvados A Caen, un avocat et un professeur de droit à l'Université ; — à Bayeux, un procureur du roi et un conseiller au bailliage, deux avocats; — à Vire, un con- seiller au bailliage, un avocat — Manche ; à Avrancbes, trois avocats; — à Caren- tan, un président d'élection, deux avocats ; — à Cherbourg, cinq avocats ; — à Cou- tances. un lieutenant général de police, un conseiller au bailliage et trois avocats ; — à Mortain, un conseiller au bailliage, deux avocats ; — à Saint-Lô, un lieutenant criminel et un conseiller au bailliage, quatre avocats ; — à Valognes, un conseiller honoraire du Conseil supérieur de Corse, et trois avocats. CESSATION DES POUVOIRS DE L INTENDANT 475 Ainsi, dans la Basse-Normandie, la fusion des ordres profita surtout au Tiers état éclairé, à la bourgeoisie des villes ; une série de sélections successives lui assurant la prépondérance définitive sur l'élément rural, fit de cet état-major bourgeois le personnel dirigeant des départements et de leurs districts pendant les pre- mières années" de la Révolution, L'erttrée en activité des Directoires de départements et de districts marquait le terme de l'existence légale de la généralité de Caen. Intendant et subdélégués, Commission et bureaux intermédiaires virent leurs fonctions cesser presque a la même date. Dès le 20 juin 1790, l'archevêque de Bordeaux écrivait à Cordier de Launay La mission que vous tenez du roi doit finir au moment où les assemblées de département seront en acti- vité » *. Ce fut les 14, 20 et 23 juillet que les trois Directoires du Calvados, de la Manche et de l'Orne commencèrent successive- ment leurs opérations. Les pouvoirs de l'intendant durèrent quel- ques jours de plus. Le 1er août, il recevait du contrôleur général de nouvelles instructions sur la remise au Directoire du Calvados des papiers de son administration. Lambert ajoutait A partir du moment où la présente lettre vous parviendra, toute la portion de territoire qui entre dans la composition du départe- ment du Calvados cessera de vous appartenir et vous n'aurez plus d'autorité et de pouvoirs que sur le surplus de l'ancienne consistance de la province. Il en sera ainsi, successivement, de tous les autres départements qui se partagent l'ancienne division d'administration qui était confiée à vos soins, à mesure que je vous ferai passer les ordres du roi à ce sujet » 2. Le même jour, Lambert adressait à Cordier de Launay des instructions analogues pour la Manche, et le 4 août pour l'Orne. Chacune de ces mesures diminuait les pouvoirs de l'intendant ; la troisième, exécutée le 6 août, les anéantit totalement. La dernière lettre officielle de Cordier de Launay, datée de ce jour, fut un acte de générosité elle recommandait au ministre les employés de ses bureaux, que la nouvelle organisation laissait sans emploi et sans ressources s. Sa suppression ne fut pas plus remarquée que ne 1 Arch. dép., Calvados, C 6334. 2 Ibid., C 6334. 3 Ibid. Le 31 décembre 1789, les employés de l'intendance de Caen, alarmés par le décret dn 10 décembre, qui réduisait à néant leurs moyens d'existence, avaient adressé, au nombre de sept, une requête à l'Assemblée nationale, en vue d'obtenir des places dans la nouvelle formation administrative ». Arch. nat., Dvi 24, 1. 317. 476 CESSATION DES POUVOIRS DE LA COMMISSION INTERMEDIAIRE l'avait été son départ de Caen un an plus tôt. Il vivait à Paris, sans influence et sans crédit, entretenant peu de relations avec les membres de l'Assemblée nationale et n'en ayant aucune avec ces messieurs qui tiennent le gouvernail ». Passif, il y avait attendu avec résignation qu'on lui signifiât l'état de nullité où il allait rentrer » !^\ A son exemple, ceux de ses subdélégués que le découragement ou la crainte 2> n'avaient pas encore enlevés à leurs fonctions durent en cesser l'exercice. La Commission intermédiaire provinciale reçut aussi du contrôleur général, à la date du 1er août, l'ordre de se séparer; mais les compliments dont cet ordre était accompagné étaient plus délicats que le témoignage de satisfaction » un peu bref décerné à l'intendant 3. Le 4 août fut le dernier jour de son administration ; elle en informa les neuf bureaux intermédiaires en les invitant à cesser aussitôt leurs fonctions ; le bureau de Caen tint sa dernière séance le 6 août *> ; celui de Bayeux, le 7 août 5 ; celui d'Avranches, le 14 août l6K Seuls dépositaires du pouvoir exécutif, les Directoires n'avaient point encore en mains tous les instruments indispensables à son exercice. Pour continuer l'œuvre des anciennes administrations, ils avaient besoin des nombreuses pièces conservées dans les bureaux de celles-ci. Tous ces documents, qui constituaient les deux fonds de l'Intendance et de la Commission intermédiaire provinciale, étaient déjà classés par les soins du premier secré- taire de l'intendant ou du secrétaire archiviste de l'Assemblée provinciale. Restait à en dresser l'inventaire et à en former trois lots, pour les remettre aux secrétariats des trois départements qu'ils concernaient. Le ministre de la province, Saint-Priest, et le contrôleur général avaient envoyé des instructions précises à ce sujet /;. Les subdélégués et les membres des bureaux inter- médiaires étaient invités à procéder de la même façon vis-à-vis des districts. La remise de ces papiers se fit avec lenteur le manque de concordance précise entre les anciennes et les nou- 1 Lettre de Cordier de Launay à Morin, subdélégué d'Avranches, 18 juin 1790. Arch. dép., Calvados. C 6331. 2 Tels Couraye Duparc et Garantot, subdélégués de Granville et de Cherbourg. 3 Arch. dép., Calvados. C 7627. 4 Ibid., C 7664bis. 5 Ibid., C 7655. 6 Ibid., Manche, s 'rie L non inventoriée. Registre du Conseil du district d'Avranches. 7; Ibid., Calvados, C6334. LIQUIDATION DES AFFAIRES COMMUNES AUX TROIS DEPARTEMENTS 477 velles circonscriptions, la nécessité d'un triage minutieux des multiples dossiers, et parfois aussi le peu d'empressement que certains administrateurs apportèrent à cette opération la contra- rièrent et en retardèrent l'achèvement l. Cet apport des fonds de l'Intendance et de la Commission intermédiaire provinciale, augmenté de l'envoi des pièces fournies par les commissaires du roi, forma le noyau primitif des Archives départementales ; de même, les archives des divers districts furent constituées, à l'origine, par la réunion des dossiers et des registres provenant des subdélégations et des bureaux intermédiaires *2. Un des premiers objets de l'activité des administrations nou- velles fut la liquidation des affaires communes aux trois départe- ments nés du démembrement de la généralité de Caen. Chacun d'eux était intéressé, au début de son existence, à connaître exactement les ressources et les dettes que le régime précédent lui léguait. Le décret du 22 décembre 1789 avait prévu ce travail de répartition et en confiait l'exécution à une commission inter- départementale, formée de deux commissaires élus par chaque assemblée administrative 3>. Ces commissaires liquidateurs devaient soumettre le procès-verbal de leurs opérations à d'autres commissaires vérificateurs, désignés par la même voie 4. Ce fut une besogne assez compliquée et qui leur demanda plus de deux ans 5. Pour répartir dans une juste proportion le passif 1 Arch. rtép., Manche, série L non inventoriée. Premier registre du Conseil de district de Mortain. Ce Conseil nomme un commissaire pour se transporter chez le subdélégué et son greffier et s'y faire remettre les papiers de la subdélégation. 2 Sur la formation des archives départementales du Calvados, voir Lebrethon, olw. cité, p. 115-122. 3 Les commissaires-liquidateurs furent Le Bret et Noël Durocher pour le Cal- vados, Bonnesœur et Le Maignan pour la Manche ; ceux de l'Orne ne se présen- tèrent pas, quoique convoqués » à l'assemblée tenue à Caen en mars 1791. Arch. dép., Calvados, série L non inventoriée. 4 Les commissaires vérificateurs furent Poisson, Euvremer et Vastel pour la Manche ; Lempérière, Lefèvre-Cramoisy et Dubois Dubais pour le Calvados. 5 Extrait du registre des actes ou arrêtés des commissaires des départements de Calvados, Orne et Manche, entre lesquels les paroisses de la généralité sont parta- gées, 3-5 octobre, 23 octobre et 13 novembre 1790 Arch. dép., Orne, L 1022. — Liqui- dation des affaires communes de l'ancienne généralité examen du compte de la Commission intermédiaire provinciale, 13 février 1791 ; examen du compte des inten- dants, 1er mars 1791; procès-verbal des commissaires vérificateurs, 1-6 juin 1793. Ibid., L 1023. — Tableau du partage entre ces trois départements des diverses espèces de fonds confiés à l'administration de l'assemblée provinciale de Basse-Normandie, 6 mars 1791. Ibid., L 1024. — Les séances de ces commissions se tinrent à l'abbaye Saint-Etienne de Caen. Le procès-verbal définitif ne fut envoyé par les administra- teurs du Calvados que le 10 janvier 1793 à Roland, ministre de l'intérieur. Ibid., Cal- vados, série L non inventoriée. 178 RÉPONSES éVASIVES DES TROIS DERNIERS INTENDANTS et l'actif de chaque département, ils devaient au préalable établir le bilan financier de l'ancienne généralité. La collabora- tion des anciens administrateurs leur était indispensable pour cette opération. De là vinrent les obstacles. Sans doute le pro- cureur-syndic provincial, Le Telier de Vauville, mit un louable empressement à publier le Compte rendu de l'administration de la Commission intermédiaire provinciale de Caen » l. Au prix d'un labeur énorme, il put mettre ce compte, dès le 24 octobre 1790, à la disposition des liquidateurs, avec les douze mille pièces qui en formaient la justification. Là se borna son rôle ; aux demandes postérieures des commissaires, avides de renseigne- ments plus détaillés, il répondit évasivement ?, puis fit la sourde oreille. Cette demi satisfaction était un succès si on la compare au refus poli, mais énergique que les commissaires éprouvèrent de la part des anciens intendants. Esmangart, Feydeau de Brou et Cordier de Launay, qui s'étaient succédé depuis dix ans dans l'administration de la généralité de Caen et qui, à ce titre, de- vaient rendre compte de l'emploi des fonds mis à leur disposition pendant cette période, opposèrent tous les trois une fin de non- recevoir aux injonctions qui leur étaient faites. Esmangart avait quitté Caen en 1783, pour l'intendance de Lille ; il soignait à ce moment, dans une ville d'eaux des Pyrénées, sa santé gravement compromise et avait eu le temps d'oublier le détail de son administration en Normandie. Aussi pria-t-il les commis- saires de consulter ses successeurs, dont les souvenirs devaient être plus précis 3. Feydeau de Brou, qui après avoir été Directeur général des économats, vivait dans la retraite à Viessoix, près de Gex, leur adressa des développements lumineux sur les diverses parties de son administration, mais ne leur rendit aucun compte ». Il les renvoya aux bureaux de l'intendance de Caen, où il avait fait déposer, en 1787, des papiers dont il était actuellement dessaisi 4. Quant à Cordier de Launay, auquel sa qualité de der- nier titulaire créait des obligations plus étroites, il le prit d'assez 1 Compte-rendu, par la Commission intermédiaire provinciale de Basse-Normandie, de son administration, du 7 décembre 1781 au 1 août 1790. Caen, Le Roy, 1790 avec tableaux annexes. 2 Lettre de Le Telier au Directoire du Calvados, 13 novembre 179U. Arcb. dép., Calvados, série L non inventoriée. 3 Deux lettres d'Esmangart à Baveux, procureur général syndic, 27 décembre 1790 et 24 février 1791. Ibid. 4 Lettre de Feydeau de Brou à Ba\eux. procureur général syndic, 12 janvier 1791. Ibid. VAINES SOMMATIONS A L INTENDANT CORDIER DE LAUNAY 479 haut avec les liquidateurs ; il chargea Lamy-Desvallées, secrétaire de l'intendance, de négocier avec eux. Le Tableau de son admi- nistration M n'était point pour les satisfaire il y déclarait for- mellement que les intendants étaient des ordonnateurs et non des comptables et que, n'ayant jamais été chargés d'aucune perception ni maniement de deniers, ils n'étaient passibles d'aucun compte 2. Les Directoires des départements eurent beau réitérer leurs sommations, il les envoya aux calendes. Les commissaires de liquidation et de vérification furent obligés de conclure en arrêtant le procès-verbal de leurs séances &, que le compte de l'intendant n'étant appuyé d'aucune pièce justifi- cative, n'était susceptible d'aucun contrôle complet et satisfai- sant » 4i. La loi du 3 septembre 1792, qui prescrivait des poursuites contre les ci-devant commissaires départis, ne pouvait plus atteindre Cordier de Launay. Le procureur général syndic du Calvados chercha vainement sa résidence^. Moins maltraité par le sort que ses collègues de Rouen et d'Alençon, de Maussion 6 et Jullien {1, qui périrent sur l'échafaud, et plus heureux que son prédécesseur Fontette, qui, arrêté comme suspect, mourut dans une prison de Rouen, le dernier intendant de Caen avait demandé son salut à l'émigration. Si l'idylle amoureuse dont il 1 Tableau de l'administration de Cordier de Launay. Arch. dép , Calvados, C 233. 2 Lettre de Brémesnil, président du conseil général de la Manche, au directoire du Calvados, 10 novembre 1790. Ibid., série L non inventoriée. M. de Launay, au lieu de rendre les comptes de son administration, comme son devoir lui en imposait l'obligation, n'a fait présenter par ses commis que des bordereauu informes et quel- ques élats vagues qui ne forment aucun ordre de comptabilité. » 3 Voir, à l'Appendice 1° La répartition des impositions directes de la généra- lité de Caen, opérée par ces commissaires entre les départements du Calvados, de la Manche et de l'Orne ; 2" le tableau de la reprise, au profit de ces trois départe- ments, des fonds disponibles laissés par la Commission intermédiaire provinciale de Basse-Normandie. 4 Procès-verbal de la commission de vérification. 0 juin 1791. Arch. dép., Calva- dos, série L non inventoriée. — Cf. Ibid., Orne, L 10?3. — Sur le mauvais vouloir » et le sans-gène » des trois derniers intendants de Caen, cf. Lebretbon, ouu. cité, p. 61. 5; Lettre de Bougon Longrais, procureur général syndic du Calvados, à son col- lègue de la Manche, 11 janvier 1793. Accusé de réception, par Louis Caille, procu- reur syndic du district de Caen, le 14 janvier 1793, de l'arrêté des commissaires liquidateurs du 8 décembre 1792, prescrivant des poursuites en vertu de la loi du 3 septembre 1792. Arch. dép., Calvados, série L non inventoriée. 6, Thomas de Maussion, ancien intendant de Rouen, fui condamné à mort par le Tribunal révolutionnaire le 6 ventôse an II. Arch. nat, W 332, d. 560. 7 Alexandre Jullien, ancien intendant d'Alençon, fut condamné à mort par le même Tribunal, le 20 messidor an IL II appartint à la première fournée de la cons- piration dile des prisons. 11 était âgé de 80 ans. ibid., W 409, d. 941. 480 GORDIER DE LAUNAY ÉMIGRÉ est le héros et qui constitue le fond de son roman intitulé la Veuve de Catane » n'était pas une ingénieuse fiction, si le décor n'en était pas imaginaire, nous pourrions refaire après lui l'iti- néraire de ses nombreuses pérégrinations. La Suisse, Turin, Venise, Florence, Rome et Naples l'auraient, semble-t-il, tour à tour arrêté quelques instants, mais la Sicile aurait attiré son humeur solitaire et c'est au pied de l'Etna, à Catane, sur les bords d'une mer agitée, qu'il serait venu guérir les blessures d'une âme ulcérée par l'infortune v. Ce roman pourrait bien n'être qu'un conte 2 ; ce fut dans le nord de l'Europe que Cordier de Launay émigra. Il dut passer en Allemagne et de là en Russie où il s'attacha à la puissante famille des Nicolaï. Henri-Louis Nicolaï, secrétaire privé de l'impératrice Marie Féo- dorovna, femme du tsar Paul Ier, lui confia l'éducation de son fils 3. Grâce à ses relations, il fut ensuite nommé secrétaire chargé de l'expédition française à la chancellerie du Ministère du com- merce, puis obtint le brevet honorifique de conseiller d'Etat. Devenu fonctionnaire russe, Cordier de Launay ne bénéficia point, on ne sait pourquoi, de l'autorisation de rentrer en France que le premier Consul avait accordée à de nombreux émigrés W. Il vécut à Saint-Pétersbourg jusqu'à l'âge de 75 ans ; frappé d'une attaque de paralysie, il mourut le 24 janvier 1820 et fut enterré dans le cimetière de Smolensk 5. Cordier de Launay avait consacré la dernière partie de sa vie à la production d'ouvrages de valeur très inégale compilation historique relative à la Russie Tables chronologiques et géné- 1 Cordier de Launay, La Veuve de Calcine. Berlin, Ch. Quien, 1803, in-8. Bibl. nat., Y2 24561. 2 Cordier de Launay s'endort en Sicile et se réveille en Russie ; la vue d'un domestique à longue barbe et habillé à la russe le rappelle à la réalité. Il a fait un rêve et sortant comme par un bond de son somnambulisme littéraire, il se trouve une plume dans la main, un conte dans l'autre, et les jette tous deux avec dépit ». Voir Appendice n° î. 3 Un des fils de son élève, Léonce de Nicolaï, après avoir été lieutenant général, aide-de-camp du tsar et vice-empereur du Caucase, mourut en 1891 sous l'habit reli- gieux, à la Grande-Chartreuse, où il était entré en 1868. La sœur de Léonce, Mme de Sutof, est morte assez récemment au couvent de Notre-Dame-de-la-Délivrande, près Caen, dont elle était supérieure. 4 Le nom de Cordier de Launay figure sur les listes envoyées en l'an X par Hédouville, ambassadeur de France à Saint-Pétersbourg, à Talleyrand, contenant les noms des émigrés qui demandaient l'autorisation de rentrer en France. Note de M. Tastevin, libraire à Moscou. 5 Arch. de l'église Sainte-Catherine de Saint-Pétersbourg. Communication de M. Loutreuil, industriel à Moscou. CORDIEH DE LAUNAY HOMME DE LETTRES 481 alogiques des Maisons princières de l'Empire de Russie ; études géographiques sur l'Asie et l'Amérique Tableau topographique et politique de la Sibérie, de la Chine, de la zone moyenne de l'Asie, et du Nord de l'Amérique ; traité d'esthétique dont le titre seul révèle un esprit fantasque Théorie circonsphérique des deux genres de Beau, avec application à toutes les Mythologies et aux cinq Beaux-Arts ; roman d'imbroglios, d'aventures galantes, œuvre littéraire médiocre, au style ampoulé et pré- tentieux, où la bizarrerie du fond le dispute au pédantisme guindé de la forme La Veuve de Catane *. Aussi, tandis qu'un historien russe a cru devoir le ranger, sans enthousiasme d'ail- leurs, dans la catégorie des intendants hommes de lettres 2, un autre écrivain du même pays n'a-t-il pas hésité à le classer, comme son beau-frère, le licencieux auteur de Justine, parmi les fous littéraires 3. 1 Voir Appendice I, Œuvres de l'intendant Cordier de Launay. 2 Ardascheff, Provintsialnaia administratsia, t. II, p. 230. Cordier de Launay, écrit Ardascheff, a essayé ses forces dans la carrière des belles-lettres, sans grand suc- cès, paraît-il. Avant d'être nommé intendant il avait traduit l'Iliade, et cette Ira luc- tion n'avait pas eu moins de cinq éditions. Voir ci-dessous, Appendice 1 Tcherpakoff, Les Fous littéraires, Moscou, 188!, p. 31-32. 31 482 PRÉLUDES DE LA FEDERATION EN BASSE-NORMANDIE CHAPITRE XVIII LA FÊTE DE LA FEDERATION ET L'UNITÉ NATIONALE JUILLET -AOUT 1790 La Fête nationale de la Fédération est contemporaine de l'avènement du nouveau régime administratif. Préludes de la Fédération en Basse- Normandie. L'idée de fraternité dans les Assemblées provinciales ; dans les cahiers de doléances du Tiers état. Les conférences frater- nelles des villes de la généralité de Caen, relatives aux subsistances. Les confédérations patriotiques des milices nationales au lendemain de la Grande Peur. Atteinte portée au particularisme régional par la réforme administrative. Les menaces de la contre-révolution. L'appel du roi. Décret du 5 juin 1789. L'invitation de Bailly aux municipalités. Projets antérieurs des villes normandes. Date de la fête fixée par Paris. Pré- paratifs et célébration de la fête de la Fédération dans les villages et les villes. Les fédérations départementales à Caen et à Coutances. Les députés de la Basse-Normandie à la fêle de la Fédération natio- nale à Paris. Les impressions d'un garde national caennais espé- rances fondées sur l'avenir. Grande portée morale de la journée du 14 juillet 1790. Le 13 juillet 1790, les commissaires du Calvados, réunis à l'abbaye Saint-Etienne de Caen, arrêtaient la clôture du registre de leurs procès-verbaux ; quelques instants plus tard la nouvelle assemblée administrative du département tenait sa première séance dans le même lieu et y nommait son Directoire. Dans son discours d'inauguration, le procureur général syndic Bayeux fit entendre des paroles d'espérance ; il se plut à évoquer les bienfaits que le pays pouvait attendre d'une administration désormais fraternelle et, rappelant les sentiments d'union qui rappro- chaient tous les Français, il fit allusion à la journée du lendemain, où allait apparaître, dans l'imposante solennité de sa première manifestation, l'unité nationale ]. C'était l'heure où les vieilles institutions s'écroulaient, où le 1 Arch. dtp., Calvados, L 599. l'idée de fraternité dans les assemblées provinciales 483 nouveau régime administratif naissait au chant des Te Deum, aux joyeux carillons des cloches, aux salves bruyantes des canons. Le 14 juillet 1790, au jour anniversaire de la prise de la Bastille, la Fédération de tous les soldats citoyens, confondant toutes les bannières avec la bannière nationale, tous les uniformes avec les uniformes des défenseurs de la liberté, toutes les affec- tions avec l'amour du bien public » C1, allait donner au monde, sur le Champ-de-Mars, devant l'autel de la patrie, le spectacle d'une nation d'hommes libres unis par les liens de la fraternité. Avant de se réaliser dans ce cadre grandiose et avec cet éclat inaccoutumé, l'idée de la Fédération s'était dégagée progressive- ment par une évolution dont il est possible de marquer les diver- ses étapes. Elle avait germé dans plus d'un esprit avant le mois de juillet 1790 et s'était traduite par des manifestations partielles, préludes de la cérémonie solennelle du Champ-de-Mars. La réforme de 1787, en rendant uniforme l'administration du royaume, tendait à faire cesser l'isolement dans lequel s'étaient jusque-là confinées les provinces. De l'une à l'autre on se commu- niqua les procès-verbaux d'assemblées ; il y eut des échanges de vues assez fréquents sur le meilleur système de régie, un rappro- chement des esprits appliqués à une œuvre commune et des volon- tés convergeant vers un but unique. Les procureurs-syndics provinciaux de la généralité d'Auch écrivaient à leurs collègues La France ne devrait plus former qu'une grande famille, dont tous les citoyens, se regardant comme des frères, contribue- raient par leur union et leurs découvertes à la prospérité de l'Empire » ?. Tentative prématurée à coup sûr, mais de quel- ques années seulement, et qui n'en révélait pas moins un ache- minement de l'opinion vers l'unité nationale. Cette correspondance, que trop d'obstacles empêchaient encore de s'établir avec régularité d'un bout de la France à l'autre, était au moins possible entre voisins. Elle exista entre les trois administrations provinciales de Normandie et elle aboutit à la campagne entreprise sur tous les points de cette province en faveur de la restauration de ses anciens Etats. Le désir de ces Etats se réveilla aussi impérieux qu'autrefois, mais rajeuni et élargi par un sentiment nouveau qui atténuait l'ancien égoïsme 1 Discours de Baveux, procureur général syndic du Calvados. Arch. dép., Calva- dos, L 599. 2 Lettre des procureurs-syndics provinciaux d'Auch à la Commission intermé- diaire de Caen, 31 mars 1788. Ibicl., C 7628. Voir ci-dessus, chap. VI, p. 122. 484 l'idée DE FRATERNITÉ DANS LES cahiers de doléances provincial, en subordonnant l'individualité de la Normandie au maintien de l'unité française. Les citoyens d'une même province allaient se sentir bientôt les citoyens d'une même nation. Bien plus, les citoyens de toutes les provinces, de tous les ordres, de toutes les classes allaient comprendre la valeur du titre de Français, qui les mettait en société d'intérêts, de devoirs et d'en- gagements ». C'était l'espérance exprimée, dès le 7 janvier 1789, par la commune de Rouen dans son mémoire au roi H. L'Avis des bons Normands à leurs frères tous les bons Français de toutes les provinces et de tous les ordres traduisait lumineusement ces aspirations généreuses. L'auteur y conjurait tous ses concitoyens de former une confraternité » générale contre le mal public. C'est afin d'y atteindre qu'il leur recommandait la concordance des vœux et l'uniformité des cahiers, qu'il souhaitait la forma- tion d'un esprit public, seul capable de sauver la France » M. Son appel fut entendu. Une sorte de plan général présida à la rédaction des cahiers de doléances normands, qui, avec plus ou moins d'ampleur et de précision, exprimèrent des sentiments unanimes. Sans doute leurs auteurs avaient soif tout d'abord de liberté et d'égalité et c'est la revendication de ces deux biens qui fut le premier thème de leurs doléances. Mais la communauté des souffrances avait engendré une généreuse solidarité. La fra- ternité inspira l'esprit général des cahiers ; elle fut inscrite en toutes lettres dans plus d'un d'entre eux. Les communes rurales du bailliage de Caen s'associèrent à la ville chef-lieu pour déclarer que les Français se considéraient comme une même famille » et pour régler les moyens pratiques de maintenir l'alliance et la bonne union qui devaient régner entre des citoyens et des frè- res » 3'. La crainte de la famine ne contribua point peu à resserrer les 1 Publié par Hippeau, Le Gouvernement de Normandie, t. VI, p. 217-222. 2 Avis des bons Normands à leurs frères, etc., dans Hippeau, ouu. cité, t. VI, p. 276-291. L'auteur était Thouret. 3 Arch. dép., Calvados, série B non inventoriée. Cahier du bailliage de Caen, 1" partie, art. 4, et Arch. coram., Caen, AA50. Cahier de la ville de Caen, lrc partie, art. 4. Les deux articles sont identiques.; — Le cahier des juges-consuls de Caen, demandant la libre circulation des marchandises dans l'intérieur du royaume, s'ex- prime ainsi Qu'il n'y ait plus de provinces réputés étrangères, puisqu'elles sont toutes annexées à la France, et que les habitants de la Bretagne et autres comme elles, sont nos frères.» Arch. comm., Caen, AA49. Lire, dans le même esprit, le cahier d'Anneville-en-Cères bailliage de Valognes La France ne fera plus qu'une seule famille dont tous les membres porteront à leur père commun le tribut respec- tif et proportionnel de leur reconnaissance. » Bridrey, Cahiers du Cotentin, t. II, p. 86. MESURES FRATERNELLES D'APPROVISIONNEMENT ET DE DEFENSE 485 liens de sympathie entre les villes. A l'égoïsme de plusieurs d'entre elles, qui gardaient jalousement le blé dans leurs halles et s'oppo- saient même par la violence à son enlèvement, avait succédé une entente fraternelle en vue de faciliter la régularité des appro- visionnements. Pour assurer l'exécution des décrets de l'Assem- blée nationale sur la libre circulation des grains, des conférences, dont Bayeux semble avoir pris l'initiative ll\ avaient été orga- nisées entre les villes du Bessin et du Cotentin. Deux délégués de chacun des Comités permanents de Bayeux, Isigny, Carentan, Périers, Torigni, Saint-Lô s'étaient donné rendez-vous dans cette dernière ville. Des délibérations de ce congrès bas-normand, réuni les 10 et 11 décembre 1789, était sorti un règlement qui protégeait la liberté du transit des grains à travers la province "2l On y avait décidé la tenue de conférences fraternelles » pério- diques, chargées de prendre les mesures relatives à la subsistance commune. Cette association de secours mutuels contre la faim n'ouvrait-elle pas les voies à la Fédération? La Grande peur de juillet-août 1789 ne fut point étrangère à cet élan général de sympathie. La nécessité de se grouper contre les émeutiers et les brigands, contre les dangers réels et les périls imaginaires provoqua, non seulement la création spontanée de Comités de défense locaux au sein de chaque ville, mais encore la formation de ligues défensives régionales entre villes et villages. En l'absence d'un pouvoir exécutif obéi, les campagnes deman- daient protection au centre urbain le plus proche. Caen était à la tête d'une association de paroisses auxquelles elle donnait le mot d'ordre *3. Tinchebrai avait formé avec les villages des alentours une alliance défensive envers et contre tous les malintentio- nés » *. Vire organisait une confédération patriotique, qui ralliait les adhésions des bourgs voisins au nom de la confra- ternité, bouclier commun contre les ennemis de la nation » 5. Les délégués de quarante-cinq paroisses du Bocage, réunis à 1 Arcli. coram., Cherbourg, AA 66 allusion à une tournée de propagande faite par les députés de Bayeux auprès des divers Comités de la région, pour la réunion d'une conférence à Saint-Lô, 30 novembre 1789. 2 Procès-verbal de la première conférence tenue à Saint-Lô, suivi d'un règle- ment en 22 articles. Arch. comra., Bayeux, D l13 bis. Registre du Comité national permanent, fus 95 à 99. — Cf. Ibidi. Carentan. Registre des délibérations, 7 décembre 1789. Voir ci-dessus, chap. XIII, p. 354. 3 Arch. comm., Caen, BB 93. Registre des délibérations, 7, 11, 12 septembre 1789. 4 Ibid., Tinchebrai. Registre des délibérations, 16 août 1789. 5; Ibid., Torigni. Registre des délibérations, 3 octobre 1789. 486 LES MENACES DE LA CONTRE-REVOLUTION Condé-sur-Noireau le 26 août 1789, y avaient signé un contrat d'association et d'union contre les perturbateurs de l'ordre public, se promettant secours réciproque en cas d'attaque impré- vue et de danger pressant il. Les villes rivalisaient entre elles d'égards et de bons offices. Cherbourg faisait des ouvertures amicales à sa rivale Valognes, en vue de leur défense réciproque et son appel était entendu 2. Granville permettait aux chasseurs auxiliaires d'Avranches de réunir sur leur drapeau les armes des deux cités et le Comité d'Avranches, dans sa lettre de remercîments, regardait l'assem- blage des deux écus » comme un symbole de concorde et d'étroite confraternité 3. Les démarches prévenantes de Mortain com- blaient Avranches de reconnaissance et de confusion et abou- tissaient à une agrégation civique » entre les citoyens des deux villes W. La division de la France en départements avait été aussi un auxiliaire efficace de l'unité nationale en brisant les cadres où le particularisme régional s'enfermait, elle avait, selon l'expression de Louis XVI, réuni davantage à un même esprit et à un même intérêt toutes les parties du royaume » 5. Et les paroles du roi trouvaient un écho dans le cœur de tous ses sujets. Le temps est venu, écrivaient les officiers municipaux de Rennes à leurs collègues de Caen de renverser les barrières qui nous séparent. Aujourd'hui que nous n'avons plus que les mêmes principes, les mêmes lois, une même patrie, nous ne devons plus nous considé- rer que comme une grande société de frères et d'amis » . A Vire, c'est aussi en plein air, au pied du donjon, sur le tertre dominant les vaux agrestes où serpente la Vire, que la fête devait se célébrer ; une bourrasque rendit les préparatifs inutiles et ce fut l'église Notre-Dame qui abrita l'assistance 3;. Partout la cérémonie eut lieu le matin et, à l'heure de midi, des forêts de bras se levaient et des milliers de bouches pronon- çaient le serment fédéra tif. Les citoyens juraient de rester à jamais fidèles à la nation, à la loi et au roi, de maintenir de tout leur pouvoir la constitution décrétée par l'Assemblée nationale et acceptée par le roi, de protéger en particulier la sûreté des personnes et des propriétés, la libre circulation des grains et des subsistances, la perception des contributions publiques et de demeurer unis à tous les Français, par les liens indissolubles de la fraternité » 4. Après le serment, les troupes se retiraient en bon ordre, les corps administratifs se séparaient, les simples citoyens rentraient chez eux ; dans quelques villes, pour rendre leur fraternité plus apparente, ils se réunissaient autour de la même table. Des ban- quets populaires furent ainsi organisés à Vire 5, à Avranches, où un repas frugal fut dressé sous les allées du bois des Capu- cins 6, à Torigni, où l'orangerie du château princier de Monaco servit de réfectoire 7. A Tinchebrai, il y eut plusieurs repas communs et, détail intéressant, l'un de ces banquets fut exclu- 1 Arch. comm., Cherbourg, BB 5. Begistre des délibérations, 14 juillet 1790 Cf. Procès-verbal imprimé, Cherbourg, imp. Clamorgan, 8 p. 2 Ibid., Granville Begistre des délibérations, 14 juillet 1790. 3 Ibid., Vire. Begistre des délibérations, 14 juillet 1790. 4 Voir le texte complet dans les procès-verbaux de Cherbourg et de Tinchebrai. 5 Le Gorgeu, La Fête de la Fédération à Vire en 1790. Le banquet fut fixé à trois livres par lète, dont la moitié devait être consacrée aux pauvres ». 6 Arch. comm., Avranches. Begistre des délibérations, 14 juillet 1790. 7 Journal de la Basse-Normandie, n° 83, 8 août 1790. RÉJOUISSANCES ET LIBERALITES PUBLIQUES 491 sivement féministe ; ses organisatrices n'admirent parmi elles qu'un seul convive masculin, un vieux tabellion octogénaire qu'elles allèrent chercher en triomphe *. Dans la soirée, des feux de joie furent allumés sur les place publiques r? ; les monuments publics furent illuminés et plus d'un particulier éclaira sa façade avec l'autorisation des municipalités 8 ; les danses terminèrent cette journée d'allégresse. Si la partie officielle de la cérémonie semble avoir été réservée aux seuls citoyens actifs, les réjouis- sances qui suivirent furent accessibles à tous les habitants ; la foule des prolétaires en prit sa part et se mêla à la joie générale. On avait même, dans certaines villes, pris des mesures excep- tionnelles pour faciliter le chômage des journaliers 4>. Les pau- vres n'avaient point été- oubliés dans cette journée fraternelle. A Granville, à Bayeux, à Vire, à Caen, les dons des officiers municipaux, le produit des souscriptions recueillies entre les gardes nationaux ou des quêtes faites par les dames pendant la cérémonie avaient permis des distributions de vivres et d'argent. Caen et Coutances durent à leur titre de chef-lieu de départe- ment d'être le théâtre de fêtes encore plus imposantes. Les délé- gations des gardes nationales du Calvados et de la Manche s'y étaient donné respectivement rendez-vous, les premières à Caen pour le 1er juillet, les secondes à Coutances pour le 5 août. A Caen 5, la solennité avait été annoncée dès le 30 juin par le canon du château ; le cortège officiel qui, le lendemain matin, 1 Arc h. comm., Tinchebrai. Registre des délibérations, 14 juillet 1790. Ce convive, choyé par les femmes, était Michel Pitot, fermier général de la châtellenie de Tin- chebrai et greffier du bailliage. Sa popularité a empêché l'incendie des registres de la châtellenie, qui nous ont été conservés. 2 ïbid., Mortain. Registre des délibérations, 13 septembre 1790. Paiement de dix livres pour un demi-cent de bourrées, pour les feux de joie le jour de la fédé- ration. 3 Un conflit éclata à cette occasion entre la municipalité de Cherbourg et la Société des amis de la Constitution, de création récente ; celle-ci avait eu le tort d'il- luminer la Chambre littéraire » sans demander l'autorisation de la municipalité, qui fit éteindre les chandelles. La Société s'inclina, mais adressa une réclamation ù l'Assemblée nationale. Arch. nat., D xxix 32. La municipalité, dans un mémoire d'observations relatif à cette plainte, appréciait ainsi l'attitude indocile de cette Société Une portion d'une Société naissante, échauflée du premier feu d'une doc- trine qu'elle a mal digérée, veut changer les limites posées par la loi. » Elle lui reproche d'être une institution dangereuse, formée par une exclusion arbitraire et injurieuse pour les citoyens d'une ville où il y a autant d'amis de la Constitution que d'habitants ». Ibid. 4 Arch. comm., Bayeux, Di12. Registre des délibérations, 11 juillet 1790. 5 Procès-verbal de la confédération des gardes nationales et troupes de ligne du département du Calvados. Ibid., Caen, carton 30. 192 LES FÉDÉRATIONS DU CALVADOS ET DE LA MANCHE se rendit vers la plaine d'Ifs, comprenait, outre le Conseil général de la commune, les commissaires du roi pour la formation du département, les électeurs du département, dont les séances n'étaient pas terminées, les membres du département nouvelle- ment élus et les divers corps de la ville. Il était encadré par la maréchaussée, les régiments d'Aunis et de Lorraine, un détache- ment du régiment de cavalerie Commissaire général, la garde nationale de Caen et les détachements des milices citoyennes de nombreuses villes et bourgades du département il. Quelques-uns avaient, pour la circonstance, fait les frais d'un équipement neuf 2. Aux côtés de l'autel de la patrie, élevé sur une éminence et auquel on accédait par des escaliers de gazon, deux colonnes portaient les bustes du roi et de Lafayette, Le drapeau fédératif, symbole de l'union réalisée en ce jour, fut présenté à l'autel et béni par l'aumônier de la garde nationale de Caen. Il était à fond blanc, orné de fleurs de lys à chaque angle ; un cercle aux cou- leurs tricolores le bordait ; au milieu, était un faisceau de six flèches, unies par un ruban, qui portait une inscription latine In fœdere virtus ; autour du faisceau on lisait les noms des six chefs-lieux de district. Précédée d'un sermon de l'aumônier, qui se réjouit de voir la religion à la place d'honneur dans cette fête, la messe fut suivie de deux discours le comte de Vendœuvre, maire de Caen, célébra l'avènement du régime nouveau ; le comte de Faudoas, colonel de la garde nationale, adressa un vibrant appel d'union aux légions citoyennes et militaires, ainsi qu'aux magistrats et fonctionnaires de tout ordre. Entre les deux haran- gues, le major de la place avait lu le pacte fédératif, acclamé par des milliers de voix et le lieutenant du roi l'avait signé sur l'autel, au nom de toute l'armée confédérée. Pour perpétuer le souvenir de cette sainte alliance », on donna à la plaine d'Ifs le nom de plaine des Six districts et on décida d'y élever une pyramide commémora tive, couverte d'une longue inscription. La fédération du département de la Manche fut célébrée le 5 août, dans la Lande-d'Orval, aux environs de Coutances l3K 1 Le procès-verbal mentionne celles de Baveux, Isigny. Balleroy, Lisieux, Orbec, Cambre mer, Falaise, Vire. Condé, Vassy, Pont-1'Evêque, Honfleur. Tilly- d'Orceau, Creully, Bavent. Villers-Bocage. 2 Arch. comm., Bayeux, Di12. Registre des délibérations, 18 juin 1790. On fait faire, à l'usage des députés, quatre habits de drap rouge, à revers et parements blancs, collet jaune et doublure bleue, vestes et culottes blanches, qui ne serviront que ce jour-là et qu'on déposera au retour à l'hôtel de ville. » 3 Procès-verba] de la fédération des gardes nationales, troupes de ligne et mare- LA DÉLÉGATION DES BAS-NORMANDS A LA FÉDÉRATION NATIONALE 493 Les gardes nationales, la maréchaussée et les troupes de ligne y resserrèrent le pacte d'association volontaire. De tous les points du département, les détachements des milices citoyennes s'y étaient donné rendez-vous. Entre la messe et le serment, des discours furent prononcés. Le chanoine de Beaudre, Lemonnier, procureur de la commune de Coutances, Pothier, garde national de Sainte-Mère-Eglise, et Tesnière de Brémesnil, président de l'assemblée administrative de la Manche, prirent tour à tour la parole. Les députés de la Manche qui avaient assisté à la fédé- ration parisienne, remirent en ce jour la bannière qu'ils avaient reçue comme gage de fraternité. La fédération du Calvados avait précédé de quatorze jours la grande fédération nationale ; celle de la Manche la suivit à trois semaines de distances. Ces deux départements avaient d'ailleurs envoyé leurs représentants à cette fête. La Basse-Normandie exécuta avec empressement le décret du 8 juin, par lequel l'Assem- blée constituante avait prudemment endigué l'enthousiasme révolutionnaire et réglementé la future manifestation parisienne. Elle n'envoya pas à Paris une foule indisciplinée et tumultueuse, où les prolétaires, confondus avec les citoyens actifs, auraient peut-être laissé échapper des plaintes importunes, mais des compagnies d'électeurs enrégimentés, porteurs de mandats régu- liers et attachés sans réserve à la Constitution nouvelle. Les gardes nationales des divers cantons réunies au chef-lieu des districts nommèrent un homme sur six cents ; ces élus dési- gnèrent, à leur tour, un délégué pour deux cents hommes. Ces délégations devant occasionner des frais de voyage et de séjour assez élevés, ce furent les municipalités qui s'en chargèrent provisoirement, en attendant la formation des districts. Une somme de 1430 livres fut répartie entre les onze députés du district de Bayeux, ce qui leur donnait 130 livres à chacun x. Les vingt et un délégués de Caen, nommés à l'assemblée des Jacobins, dans la journée du 2 juillet *, devaient recevoir cha- cun 100 sols par jour pendant vingt jours 3. chaussées du département de la Manche, à Coutances, le jeudi 5 août 1789. Arch. Bat., AD xvi 49. 1 Arch. comm., Bayeux. Registre des délibérations, Di12, 1er juillet 1790. 2 Noms des électeurs de la garde nationale de Caen par paroisses, etc., 8 p., et Procès-verbal de la noini nation des députés de la garde nationale de Caen, etc., 2 juillet 1790. Ibid.. Caen, carton 36. 13 Ibid., Caen, D 1. Registre des délibérations, 3 juillet 1790. 494 IMPRESSIONS DIX CAENNAIS SFU LA FÊTE PARISIENNE Ces députés avaient mission de représenter à la cérémonie du pacte fédératif, non seulement la garde nationale qui les avait élus, mais toute la cité et tout leur district ». Le cœur de tous les habitants leur sera uni, disait l'un des procès-verbaux d'élection, lorsqu'ils renouvelleront leur serment solennel en face de toute la France, pour le succès de la Révolution » W. Le pays légal révolutionnaire, bien que seul invité à la fête, enten- dait s'y porter caution pour l'ensemble des citoyens, même des citoyens passifs, que l'Assemblée nationale avait exclus des honneurs, comme elle les avait éloignés des urnes. La journée du 14 juillet 1790, qui, pour les Parisiens, était une sorte de revue des gardes nationales de France, passée par Lafayette, eut, aux yeux des fédérés normands, comme à ceux de leurs frères des provinces, une tout autre portée. Le chef de la délégation caennaise, Bonnet de Meautry, capitaine de la lre compagnie de Saint-Sauveur, qui fut plus tard maire de Caen, législateur et conventionnel, fit part de ses impressions sur cette journée dans une lettre qu'il adressa le lendemain aux officiers municipaux de Caen *. Ce qui le frappe, ce n'est point le triomphe de Lafayette, dont il ne prononce pas le nom, c'est le cadre grandiose de la cérémonie, c'est l'imposant spectacle du cortège qui se déroule à travers les rues de la capitale, aux applaudissements chaleureux des Parisiens, pressés à leurs fenêtres ; c'est la vue de l'amphithéâtre du Champ-de-Mars, garni d'un peuple immense et où évoluent des milliers d'hommes en armes, des quatre-vingt-trois bannières dont les plis flottent au vent, du magnifique autel, assez vaste pour contenir six cents prêtres et musiciens ; c'est le spectacle éblouissant » de l'Assem- blée nationale, du trône royal, placé pour être vu de tous, de la tribune où est assise la reine tenant le dauphin sur ses genoux ; c'est le bruit des salves d'artillerie qui frappent l'âme et l'oreille également » ; c'est le concert de quatre cent mille voix, capable d'attendrir l'âme la plus endurcie ». Si le beau temps n'est pas de la partie, si une pluie persistante mouille les fédérés jusqu'à la peau, leur gaîté n'en est pas moins extraordinaire ». Le soleil, qui apparaît vers midi, a vite fait de sécher les vêtements et d'épanouir les cœurs. Bonnet a conscience qu'il jouit du plus 1 Arcli. comrn.. Baveux, Di ".Registre des délibérations, 1er juillet 1790. 3 /hiil., Caen. Pièces sur la Révolution, carton 36. — Voir F. Mourlot, Impressions d'un darde national normand sur la Fête de la Fédération, dans La Réuol. française, t. LIV, p. 23-29. ESPÉRANCES FONDEES SUR L'AVENIR 495 beau spectacle qu'il y a sûrement jamais eu dans l'univers » et que cette fête sera, sans contredit, une époque mémorable dans les fastes de notre histoire . Cette impression fut celle de tous ses compagnons d'armes. En rapportant aux chefs-lieux de leurs départements la bannière fédérative qu'ils avaient reçue au Champ-de-Mars, les députés de Basse-Normandie rentraient ivres d'illusions. L'avenir leur semblait plein d'heureuses promesses. Leur horizon politique s'était subitement élargi. Désormais, plus de généralité humiliée et passive sous la tutelle arbitraire d'un intrus indifférent ou despote ; plus de province jalouse de ses franchises, isolée de ses voisines par une barrière matérielle et morale ; plus de castes politiques et sociales se superposant dans une injuste hiérarchie ; gouverneurs, intendants, subdélégués, ordres privilégiés, toutes ces formes du passé s'évanouissant dans le lointain, comme les ombres d'un mauvais rêve. Au lieu de l'obscur chaos, l'ordre et la lumineuse unité. Au bas, des milliers de municipalités, urbaines et rurales, cellules vivantes de la grande cité ; au-dessus, des conseils administratifs de districts et de départements, judicieuse- ment recrutés dans leurs milieux immédiats et parmi les citoyens les plus dignes ; au sommet, une Assemblée de législateurs, issue du libre choix de la nation et gardienne vigilante de ses libertés 0. Et, dans tous ces organismes, harmonieusement hiérarchisés, municipalités, districts, départements, nation, une même vo- lonté, une seule âme, celle de la France. Jamais, depuis le com- mencement de son histoire, l'unité morale du pays n'avait été aussi complètement atteinte ; en la réalisant de façon tangible et si éclatante, la fête de la Fédération l'avait cimentée d'un ciment indestructible. Célébrée au moment précis où sombraient 1 Il y avait toutefois des ombres a ce srduisant tableau. Les partisans de l'ancien régime n'avaient pas désarmé. Un pamphlet anonyme contemporain, au ton inju- rieux, allait exhaler leurs rancunes contre l'œuvre de l'Assemblée constituante, en ces termes Depuis que votre roi est le premier salarié de l'Etat, que son pouvoir est réduit à proclamer les décrets de l'éternelle Assemblée, qne vous avez 1,200 rois qui commandent en tyrans, qui détruisent sans justice et sans pitié, qui créent sous la direction de l'ignorance et de la folie, et que les départements et districts sont implantés au milieu de vous, en êtes-vous plus libres et plus heureux ? » Cette véhé- mente protestation, qui n'épargnait aucun des trois anciens ordres de l'Assemblée nationale, curés sans doctrine et avides, que l'appât des richesses a corrompus, — nobles, aimables roués, — avocats qui ont déshonoré ce beau titre », et qui accu- sait le régime nouveau de voler le temps du peuple qui se passait en élections de toutes sortes », indiquait assez nettement que si la Révolution comptait en Norman- die d'ardents défenseurs, elle devait s'y heurter aussi à des adversaires irréduc- tibles. Adresse aux Normands par un Normand. 496 PORTÉE DE LA FÊTE DU 14 JUILLET 1790 des institutions séculaires, où naissait un régime administratif universellement acclamé, elle semblait briller comme une aurore au seuil d'une ère nouvelle ; grâce à cette heureuse coïncidence de circonstances, le serment que les citoyens avaient prêté, sur tous les points du pays, avait une double portée il confondait dans un commun enthousiasme le triomphe de deux causes indissolublement liées, celle de la patrie unifiée et indivisible, et celle de la Révolution. CORDIER DE LA UN A Y TRADUCTEUR ET ROMANCIER 497 APPENDICE I ŒUVRES DE L'INTENDANT CORDIER DE LAUNAY 1° Nouvelle Traduction de l'Iliade en prose par Gordier de Lau- nay de Valeri. Paris, Théophile Barrois, Nyon le jeune, 1782,2 vol. in-12, dédié à Monsieur, frère du roi Bibl. nat., Yb 1063-1064. Cette traduction eut cinq éditions, ce qui n'en implique nulle- ment le succès. La deuxième édition, en deux volumes in-8°, comprend le tome I, anonyme, publié en 1785, le tome II, portant le millé- sime 1784 et intitulé Traduction de V Iliade par M. de Launay, Valéry, M. D. R. maître des requêtes, nouvelle édition revue, corrigée, augmentée de plusieurs notes par l'auteur et précédée de Recherches historiques et philosophiques sur Homère ». Paris, de l'imp. de Valade, chez Laurent. Troisième édition, sans date Traduction de Ylliade, par M. de Launay, Valéry, M. D. R., nouvelle édition, etc. . . A Paris, de l'imp. de Quiber Palissaux, rue et faubourg Poissonnière, n° 2. Quatrième édition Traduction de ï Iliade, par M. de Launay, Valéry, M. D. R., nouvelle édition, etc.. Paris, Michel, 1795, 2 vol. in-4°. Cinquième édition. Paris, 1800, 2 vol. in-8°, tirés sur papier vélin, in-4°. 2° Discours prononcé par l'intendant Cordier de Launay à la séance d'ou- verture de l'Assemblée provinciale de Basse-Normandie, 25 août 1787- Imprimé dans le Procès-verbal de l'Assemblée. Bibl. nat., Lk 15/42, in-4°. Analysé ci-dessus, chap. IV, p. 59-60. 3° Panégyrique de la Pitié opuscule non mis dans le commerce. 4° La Veuve de Catane, roman. Berlin, Ch. Ouien, 1803, in-8°. Bibl. nat. Y-2 24561. Ce roman est divisé en trois parties l'Entrevue, p. 1-32 ; la Déclaration, p. 33-66 ; le Triomphe, p. 67-87. Le début en est 32 198 OORDIER bE vu chitique littéraire assez étrange Les hommes de la plaine, écrit l'auteur, ont l'âme rase comme leurs demeures. Ceux des montagnes, au contraire, ont de l'élévation dans la pensée, de la profondeur dans le sentiment ». La fin n'en est pas moins bizarre Enfin, achevant de sortir comme par un bond de mon somnambulisme littéraire, je me trouvai une plume dans une main, ce conte dans l'autre. Je les jetai tous deux avec dépit. Ah ! m'écriai-je, fan- tomes de la nuit, pourquoi vous évanouissez -vous? Plume, instru- ment de mes illusions, je te dépose. Puissè-je n'être jamais conduit à te reprendre que dans mes songes ! » 5° Théorie circonsphérique des deux genres de Beau, avec application à toutes les Mythologies et aux cinq Beaux-Arts. Berlin, 1806, in-4°, VIII-282 p. et une carte. Paris, imp. Baudoin, 1812, in-8° Bibl. R 283?. Ce livre, dédié à S. M. I. Alexandre premier, empereur et autocrateur de toutes les Russies », porte comme épigraphe un verset de la Bible In anliquis est sapientia, el in multo lempure prudentia. Job, chap. XII, vers. 12. La sagesse est dans les vieillards, et le discernement est le fruit des longs jours. » Voici le thème de cet ouvrage, bizarre d'inspiration et de titre, que Cordier de Launay fit imprimer à 500 exemplaires celui de la Bibl. nat. porte le n° 402. L'auteur déclare qu'il n'y a pas de beau unique, mais deux genres de beau, le beau d'imitation exacte et le beau composite. Pour le prouver, il en appelle à toutes les mythologies, à toutes les poésies, à toutes les peintures, à toutes les sculptures, à toutes les architectures, à toutes les musiques, enfin à toutes les langues et à toutes les bibliothèques de l'Univers». Cordier de Launay, dans un passage de ce livre, fait allusion à ses anciennes fonctions et à sa déchéance ; sa haine contre la Révolution française s'y donne libre carrière. J'ose le dire, spolié de toute ma fortune par des compatriotes égarés et con- duits par des sacrilèges, des régicides, des brigands, errant sur une terre étrangère, ignorant s'il me reste un seul parent et une épouse *, j'écarte un opprobre passager du nom de ma patrie, je ne suis point honteux d'avoir reçu le jour en France.» 1 J'ai, depuis, appris que je ne l'avais plus » Note de l'auteur. — Pétronille de la Lande était décédée, le 26 prairial an III, après l'émigration de son mari ; elle avait demandé le divorce pour faciliter la liquidation de ses droits et l'avait obtenu le 12 frimaire an II. Arch. dép., Orne, série O. g&quefitçe SON JUGEMENT SUR VOLTAIRE 199 La Théorie circonsphérique » consacre un long commentaire à l'Apocalypse que l'auteur appelle le plus intelligent de tous les poèmes épiques » et aussi un saint paravent composite ». Dans sa revue des littérateurs modernes, Cordier de Launay a formulé sur Voltaire un jugement qu'il me paraît intéressant de reproduire. Il y a été amené par la comparaison d'une tragédie chinoise, intitulée Le petit Orphelin de la Maison de Tchao, à laquelle il consacre une très minutieuse analyse, avec la tragé- die que Voltaire a tirée du même sujet et qu'il a intitulée L'Or- phelin de la Chine. Qui croirait, ajoute-t-il, que ce délicieux drame composite est le tableau original d'après lequel Voltaire a fait son Gengis Khan, ou son Orphelin de la Chine ! Il laissa son original, en prit le nom et, brochant rapidement, grâce à son étonnante facilité, une série de maximes politiques, de fadeurs amoureuses, divisées en actes, en scènes, débitées par des hommes en casques, en cuirasses grecques et par des dames en grand panier, il a donné ce que nous avons vu, son prétendu Orphelin de la Chine. Cette tragédie ressemble à la Tartarie et à la Chine comme son Alzire au Pérou, son Mahomet à l'Arabie. Quand on lit Athalie de Racine, on reconnaît qu'avant de l'entreprendre Racine s'était, pendant dix ans, pénétré de la Bible et du costume judaïque. Voltaire n'y mettait pas tant de façons. Epique à 18 ans, tragique jusqu'à 84, tous les six mois accouchant de quelque chef-d'œuvre, il a estampé le clinquant au lieu de ciseler lentement l'or. Cela est incomparablement plus tôt fait et brille étonnamment les premiers jours. Le fâcheux est que l'éclat n'en est pas de longue durée. Dans le prodigieux nombre de volumes dont Voltaire a surchargé les bibliothèques et gangrené son siècle, un seul petit poème, riche d'imagination et semé d'agréa- blés détails, peut subir l'examen rigoureux du connaisseur, et ce poème burlesque, ordurier, travestit l'héroïne de notre histoire en personnage de l'Arétin ou d'Apulée. Poète lauréat d'une capi- taie superficielle et corrompue, plus favorisé de la nature en esprit qu'en cœur et en raison, Voltaire se laissa ensoufrer de l'adulation publique et mit ses talents très réels, comme sa for- tune, en rentes viagères. Au reste, je lui dois cette justice qu'il a ouvert, à cet égard, les yeux quelques jours avant sa mort. Tout le peuple de Paris s'était assemblé à la porte de la Comédie où il fut couronné, comme chacun sait. Le spectacle de cette multitude enthousiaste et ameutée par des intrigues, dont à peine la moitié savait lire, dont peut-être pas un centième ne l'avait lu, lui apprit ce qu'aucune parole n'aurait pu lui faire 500 BIZARRERIE DE SES CONCEPTIONS LITTERAIRES entendre. Il sentit, en ce moment, le néant futur de sa réputation. Je me trouvai quelques jours après seul avec lui. On venait de a l'étourdir encore de félicitations et de flagorneries sur ce triom- a phe. Je ne disais mot, Il me prit la main et me dit Hélas ! j'ai lâché la proie pour l'ombre ! » Je fis semblant de ne l'avoir pas compris. Grand exemple de l'orgueil philosophique et litté- raire ! » W. Si l'imagination de Cordier de Launay n'a pas fait tous les frais de cette anecdote, nous possédons là un curieux document sur les derniers jours du patriarche de Ferney. La fin de cet ouvrage contient des fautes de goût, dont voici un échantillon J'ignore comment on accueillera toutes ces nouveautés. Tromper mes chagrins, tel a été mon objet en les rédigeant. Je suis lettré, point homme de lettres. J'ai traversé les arts et les sciences pour arriver à la sphère de profession où je devais me reposer, mais je ne m'y suis point arrêté. Si, chemin faisant, j'ai jeté des coups d'œil autour de moi, si j'ai saisi dans une région de passage quelques rapports jusqu'à présent inaper- çus, si, par une théorie complète, j'ai reculé la borne métaphy- sique des connaissances humaines et présenté sous son vrai jour le dernier, le moins compris de nos livres saints, honneur à Celui sous la main duquel nous ne sommes que des claviers, des tuyaux d'orgue! Quoi qu'on en dise ou qu'on en juge, voilà des œufs de ma pensée. Comme l'autruche, je les dépose dans le sable, et je les abandonne à la fortune. » *2 6° Tableau topographique et politique de la Sibérie, de la Chine, de la zone moyenne de l'Asie et du Nord de l'Amérique, par M. Cordier de Launay, intendant de justice, police et finances, de S. M. Très Chré- tienne en la province de Normandie, à présent conseiller d'Etat de S. M. Imp., empereur et autocrate de toutes les Russies. Louis Ouien, Berlin, 1806 tiré à 400 exemplaires, aux frais de l'auteur. Bibl. Impér. Saint-Pétersbourg, 29 X, n° 1138, armoire IX. Communi- cation de M. Jules Goujon, à Moscou. Cette plaquette, de 129 pages, porte en épigraphe Corona senum multa perïlia et gloria illorum limor Dei. Ecclésiaste, c. XXV, vers. 25. Elle traite de questions ethnographiques, économiques, politi- ques et sociales relatives à l'Empire russe d'Asie, à la Chine, à la 1 Cordier de Launay, Théorie circonsphérique des deux genres de Beau, avec appli- cation à toutes les Mythologies et aux cinq Beaux-Arts, p. 231-232. 2 Cordier de Launay, Ibid., p. 282. SA PLACE PARMI LES FOUS LITTERAIRES 501 Mongolie, à la Tatarie » et au Canada. Chemin faisant, l'ou- vrage fourmille d'allusions à la Révolution française ; en voici trois caractéristiques. — 1° p. 15. Cordier de Launay parle de la dissolution dont la France nous offre en ce moment le plus hideux tableau ». — 2° p. 75. Nouvelle apostrophe à la dissolution politique Non, ce n'est pas de la mort d'une épouse que je t'accuse; non, ce n'est pas le sang d'un frère que je te redemande. Je te pardonne et le pillage de nos fortunes et l'incendie de nos demeures ». Suit une violente diatribe contre la Révolution, l'exécution du roi, la déchristianisation de la France et le culte de la Raison, accompagnée de menaces à l'adresse de Paris, qui périra comme Sodome et Gomorrhe ». — 3° A la fin du livre, p. 129 Le siècle s'est terminé, en France, par une dissolution vomitoire de brigands, de sacrilèges, de régicides, de charlatans... Nuit orageuse, dans laquelle on n'aperçoit que le rapide trajet de quelques mouches phosphoriques... Triomphe de mort, où tout se couvre de ces insectes, qui, nés de la putréfaction, ne savent rien que pulluler, ronger et mourir sur un cadavre ». 7° Tables historiques, chronologiques el généalogiques de toutes les IVIaisons princières de l'Empire de Russie, rédigées en allemand sur les Archives Impériales de Moscou, par MM. Millier, conseiller d'Etat, et baron de Nicolaï, conseiller privé ; traduites en français et augmentées par M. Cordier de Launay, conseiller de S. M. Impé- riale, et ci-devant intendant de S. M. Très Chrétienne en Norman- die. Saint-Pétersbourg, 1805, ms. in-f°. Bibl. Impér. Saint-Péters- bourg, IV F 169. Communication de M. Ardascheff, professeur à l'Université de Kiev. Ces divers spécimens de la prose de Cordier de Launay sem- bleraient faire douter, non seulement du bon goût, mais du bon sens de l'auteur ; ils suffisent, en tout cas, à expliquer pourquoi un écrivain russe, M. Tcherpakoff, a offert l'hospitalité à l'ancien intendant de Caen dans un ouvrage consacré aux Fous litté- raires » U. 1 Tcherpakoff, Les Fous littéraires, Moscou, 1883, 1 vol. in-12, p. 31-32. 502 1 \ PROPRIÉTÉ FONCIÈRE AUX PRIVILÉGIÉ APPENDICE II EXTRAITS DES CAHIERS PAROISSIAUX DES BAILLIAGES DE COUTANCES, VALOGNES, TORIGNI ET VIRE RELATIFS AUX DOLÉANCES AGRICOLES Nota. — Aux renseignements tirés des cahiers ruraux de doléances, qui forment le contenu des trente-deux alinéas de cet Appendice, j'ai cru bon d'ajouter, en note, des indications bibliographiques ayant trait à d'autres documents contemporains. Il s'agit des Observations géné- rales » annexées aux états d'imposition dressés par les municipalités des départements de Caen et de Vire, de juillet à septembre 1788. Arch. dép., Calvados, C 7817-8088. Ces documents fort intéressants, que M. Bénet a appelés les cahiers de 1788 », complètent le tableau de la situation éco- nomique de la généralité de Caen pour une région assez vaste dont les cahiers de 1789 ont presque tous disparu départements de Caen et de Vire. Sur la possession des propriétés foncières par les privilégiés. La communauté d'Acqueville, malgré son peu de revenu et d'étendue, est affaiblie sic de deux seigneurs, d'où elle relève, avec plusieurs nobles ou exempts qui en emportent tant en fonds qu'en rentes au moins le tiers de son revenu. » Acqueville. — Les deux tiers des biens-fonds de notre paroisse sont possédés en propre par deux seigneurs possédant fief, par plusieurs autres personnes nobles, prêtres, moines, privilégiés et exempts. » Gatte- ville. — Le seigneur possède presque la moitié de la paroisse, ce qui fait que les habitants sont très pauvres. » Herqueville. — Les deux tiers du revenu de cette misérable paroisse sont possé- dés par les seigneurs nobles et ecclésiastiques tant en fonds qu'en rentes et dîmes.» Montfarville. — La communauté est affaiblie par trois seigneurs dont elle relève, avec les nobles et exempts, qui emportent tant en fonds qu'en rentes presque les trois quarts RENTES GREVANT LA PETITE PROPRIÉTÉ FONCIÈRE 503 du revenu d'icelle. » Vasteville. — La paroisse est composée de 90 feux, fournissant environ 460 personnes, d'où il suit que chaque propriétaire qui l'habite n'a que de très faibles propriétés ; et pour le prouver en peu de mots, il suffit de dire qu'il n'y a dans toute la paroisse que deux habitants qui aient chacun un harnais complet. » Chantelou. — La communauté, composée de 60 feux, ne possède que la moitié des fonds ; le reste apparte- nant au seigneur du lieu. » Heranguerville. — Le seigneur possède plus du tiers de la paroisse.» Montagu. — L'abbaye du Mont- Saint-Michel possède au moins les deux tiers de la paroisse... » Saint- Jean-des-Champs. — La paroisse n'est habitée que par 14 particuliers possédant fonds ; chacun d'eux n'y est propriétaire que de très peu de terrain. » Saint-Martin-le-Vieux. — Cette paroisse contient à peu près 1100 acres, dont environ 700 acres dans les cantons les plus fertiles, appartenant à des seigneurs gentilshommes, ecclésiastiques et autres privilégiés. » Landelles- et-Coupigny. — La paroisse est presque à moitié possédée par Mme la marquise de Longaunay, et il n'en revient pas un sixième aux propriétaires... » Septvents. ' Sur les rentes qui grevaient la petite propriété foncière. Notre malheureuse communauté est accablée d'un grand nom- bre de rentes dues à différents seigneurs, tant ecclésiastiques que laïques... » Picauville. — Nous comptons 14 privilégiés gen- tilshommes dans la paroisse, possédant les grandes terres, et en outre, nous payons au seigneur seul 1,800 boisseaux de blé et autres redevances, sans aucune diminution de dixième. » Surtain- ville. — La paroisse doit un nombre considérable de rentes en blé et en argent, tant au domaine de Valognes qu'à l'abbé et aux religieux de Lessay et aux différents seigneurs...» Saint-Lô- d'Ourville.— La paroisse est chargée de plus de 3,400 livres de rentes seigneuriales, dues au seigneur prince de Monaco, et de 250 dues à l'abbaye de Hambye. » Bréhal. — La paroisse de 1 Voir les mêmes observations pour les paroisses d'Argences, Bellengreville Bonnemaisons, Canteloup, Carcagny, Courseulles, Frénouville, Maisoncelles-sur- Ajon. Tailleville, Verson, etc. département de Caen, Arch. dép., Calvados, C 7823. 7833, 7844, 7861. 7862, 7877, 7898, 7932, 7991, 8008 ; — de Saint- Martindon, Saint- Vigor-des-Mézerets département de Vire, Ib'ul, C 8072, 8075, 8079. 5Ô4 RENTES GREVANT LA PETITE PROPRIÉTÉ FONCIERE Hugueville énumère ainsi les charges dont elle est maculée Elle paie au domaine de S. A. S. Mgr le duc d'Orléans 80 bois- seaux de froment ; aux dames religieuses hospitalières de Cou- tances, 522 boisseaux de froment et de menues rentes ; à la sieurie d'Hugueville, 160 boisseaux de froment et 25 boisseaux d'orge et avoine et de menues rentes ; à la sieurie de Montfort, 110 bois- seaux de froment et de menues rentes ; à ia sieurie de Condé, 20 boisseaux de froment ; à l'église cathédrale de Coutances, aux religieux dominicains de la dite ville et autres particuliers privi- légiés, 150 boisseaux de fromenl, ce qui donne en total 1042 bois- seaux de froment et 25 boisseaux d'orge et avoine sans compter les menues rentes, et 4,000 livres de rentes foncières en argent aux églises et à différents particuliers privilégiés...» Hugueville, 122 feux. — La paroisse est considérablement chargée en rentes seigneuriales,., et autres charges, tant en froment, qu'avoine, brebis, porcs, chapons, poules, gélines, œufs et argent, toutes ces rentes valent année commune 3,000 livres.» Montaigu-les-Bois. — Le peu de terrain possédé par les habitants de cette paroisse est encore grevé de beaucoup de rentes seigneuriales et foncières, au point que les propriétaires en plus grand nombre ne sont guère que fermiers du terrain qu'ils ont dans les mains.» Saint -Martin- le-Vieux. — Il y a dans la paroisse de Tourville 7 fiefs, dont relèvent les fonds des habitants ; ils doivent aux différents sei- gneurs de ces fiefs payer tous les ans les rentes qu'ils doivent en argent ; ils sont également obligés de payer les rentes qu'ils leur doivent tant en froment, avoine, qu'eeufs, volailles, pain et autre- ment. En appréciant le tout à raison de l'apprécis des 5 dernières années, ils se trouvent qu'ils doivent annuellement la somme de 2,569 livres 1 sol... Il est dû tous les ans à MM. du chapitre, aux Révérends frères prêcheurs, à l'hôtel Dieu de Coutances, et à autres différents particuliers étrangers, la somme de 3,783 1. 19 s. 9 d. pour rentes foncières, tant en argent que froment, sans comprendre les rentes hypothèques dont ils sont grevés. » Tour- ville, 178 feux. — Nos terres ne sont pour ainsi dire que des fiefs que nous tenons de M. l'abbé de Saint-Lô, auquel nous faisons des rentes seigneuriales considérables. Nous n'avons pas, dans la paroisse, dix vergées de terre qui n'en soient maculées.» Saint- Evremond-de-la-Barre. — La paroisse paie au moins 6,000 liv. de rentes seigneuriales...» Landelles-et-Coupigny. W 1 Voir les mêmes observations faites en 178S par lc 8 Sur la pénurie de la main-d'œuvre agricole, occasionnée par les travaux de Cherbourg. L'agriculture de nos cantons est négligée pour les ouvrages de Cherbourg, par faute d'ouvriers.» Theurteville-en-Bocage. — Les travaux de Cherbourg dépeuplent les ouvriers de cette paroisse, de sorte que le cultivateur manque des secours pour ses opérations.» Valcanville. — Que Sa Majesté fasse descendre des troupes pour la perfection des ouvrages qu'elle entreprend à sa ville de Cherbourg, sans pouvoir prendre aucun des naturels du pays, attendu que l'agriculture a singulièrement souffert de la désertion des laboureurs et domestiques du canton.» Saint- Martin-d'Andouville. — Le cultivateur [est] chargé d'impôts qui chaque jour deviennent plus insupportables, surtout cinq ou six lieues autour de Cherbourg. Les travaux de cette ville occupent presque tous les bras de cette malheureuse contrée, de telle manière que les domestiques manquent et deviennent d'un prix si grand que la culture est presque totalement négligée par l'impuissance où se trouvent les cultivateurs de les payer à leur taux. » Carneville. 2 9 Sur la pénurie de la main-d'œuvre agricole, occasionnée par la milice. Cette communauté ne peut trop marquer son amertume du genre de violence qui tous les ans y ôte aux infortunés vieillards 1 Les plaintes abondaient déjà en 1788. Voir états d'imposition d'Hermanville Mathieu, Rocquencourt département de Caen, Arch. dép., Calvados, C 7913, 7935 7963, et surtout des paroisses du Rocage virois, fort éloignées des pays producteurs de tangue et de chaux états d'Annebecq, Rény-Rocage, Coulonces, Courson, Perri gny, Presles, Rully, Saint-Denis-Maisoncelles, Saint-Manvieux, Sainte-Marie-Lau- mont, Sainte-Marie-Outreleau, Le Theil, Le Tourneur, Truttemer département de Vire, Arch. dép., Calvados, C 8014, 8020, 8030, 8032, 8051, 8060, 8066, 8069, 8073, 8080, 8081, 8082, 8083,8084. 2 Sur la pénurie et la cherté de la main-d'œuvre, voir les états d'imposition de 1788 pour Raron,Colleville, Hermanville, Champ-du-Roult. Ibid., C 7830,7871,7913, 8026. 510 ' LES MÉFAITS DE LA MILICE leur unique soutien, et des bras à l'agriculture, dans les jeunes gens qu'on lève par la voie du sort, ou pour servir en qualité de canonniers garde-côtes, ou pour être embarqués sur les vaisseaux de Sa Majesté. » Saint-Martin-le-Vieux. - — On sait que pour cultiver la terre il faut des bras ; souvent dans cet endroit et en temps de guerre on en manque, presque la plupart des hommes sont employés sur mer soit au service du Roi ou à celui du mar- chand.» Tourville. — L'agriculture souffre et a beaucoup souffert depuis qu'on a enlevé un grand nombre d'hommes sur nos côtes pour canonniers-matelots, parmi lesquels il s'en trouve qui sont obligés d'abandonner leur terre et la laisser sans culture. » Helle- ville. — On fait tirer au sort ensemble pour les deux sortes de services levée des canonniers garde-côtes et matelots auxiliaires, les propriétaires, les fermiers, avec les artisans et ouvriers, sans distinction ; ...le propriétaire et le fermier, si le sort les force de partir pour des embarquements éloignés, sont obligés d'aban- donner des exploitations qu'ils ne trouvent pas même toujours à confier à des mains sûres. » Réville. 10 Sur l'exemption de milice accordée aux domestiques. Que les milices, au moins en temps de paix, soient supprimées. Il est désolant pour les campagnes que le danger du sort force les jeunes gens bien constitués à les fuir, pour prendre le parti d'être laquais ou domestiques chez des ecclésiastiques, nobles ou privi- légiés à un médiocre prix, et que les. cultivateurs soient obligés de payer un domestique frois ou quatre fois le prix qu'ils le paie- raient sans cette considération. » Le Ham. — La noblesse et le clergé nourrissent pendant cinq ou six mois, avant et après les tirages de la milice, un grand nombre de domestiques inutiles, parce qu'ils sont exempts de tirage et de tout service dû au roi. » Pierreville. — La crainte de la milice fait qu'un jeune homme qui se donnerait à la culture de la terre... quitte son champ, et va chercher chez un maître riche une exemption que sa petite for- tune ne lui donne point, et offre parfois ses sueurs aux condi- tions seulement d'être exempt. On accorde à un seigneur dix, vingt laquais, qui ne travaillent à rien d'utile, et on refuse un ou deux domestiques à un laboureur qui ne peut s'en passer on lui refuse même souvent son enfant. Sauxemesnil. — La milice fait déserter les campagnes, la capitale est remplie de beaux TAILLE INIQUEMENT ttEPARTÏË, DUREMENT PERÇUE .Ml hommes inutiles, qui ne servent qu'à soutenir et relever le faste des petits maîtres dont ils décorent les antichambres. L'habit de livrée, contre lequel son valet de harnais n'aurait pas voulu changer sa souquenille, est devenu un habit respectable en ce qu'il exempte de la milice. » Surtainville. Sur l'injustice de la répartition de la taille. La taille, tant qu'elle a été soumise aux collecteurs, n'a pu être répartie avec équité ; les uns, c'était vengeance, les autres craignaient le retour, les autres, c'étaient des amis. »Digosville. — L'exemption des tailles... exercée jusqu'ici parles ecclésiastiques, les nobles, les officiers de justice et autres qui se disent privilé- giés, a tellement grevé et surchargé les laboureurs et autres sujets du roi, qu'ils peuvent à peine fournir à l'acquit des impositions et à leur subsistance. »Biville. — La paroisse se plaint de l'énor- me surcharge de sa contribution à la taille, contre laquelle elle a ré- clamé sans fruit depuis bien des années.» Carantilly.— La paroisse est chargée d'impositions plus qu'aucune paroisse de l'élection ; si quelquefois il y a eu modération dans l'élection, les paroisses protégées par ceux qui ont accès auprès de M. l'Intendant lors du département des tailles en ont profité. » Quettreville. — La taille est devenue un impôt effrayant pour les malheureux cultivateurs... Si le fardeau était partagé également entre tous les habitants et propriétaires de fonds, il en deviendrait plus facile à supporter ; mais il n'est pas un impôt qui ne tombe sur le roturier, il en est une grande partie dont le clergé et la noblesse sont exempts. » Surtainville. — Le cahier de Landelles-et-Cou- pigny donne d'intéressants détails sur l'énormité de la proportion delà taille...!l 12 Sur la dureté de la perception de la taille. Que le cultivateur ne soit plus désormais contraint au paiement des deniers royaux par le dépôt d'un invalide chez lui ; c'est une 1 Les plaintes étaient déjà très nombreuses en 1788 sur cette matière. J'en trouve dans 47 paroisses du département de Caen et dans ->tj paroisse- du département de Vire. Arch. dép., Calvados, C 7817-8088 passim. 512 ASSIETTE ARBITRAIRE DES VINGTIÈMES vexation horrible. »Fres ville.— On trouve une surcharge dans... les courses des huissiers des tailles qui n'ont d'autre fin que multiplier les frais à la charge du collecteur et du préposé, dans renvoi des invalides dont la vacation est excessive pour des gens d'ailleurs soldés par l'Etat. »La Pernelle. — La paroisse demande qu'à l'égard des garnisonniers, qui viennent ordinairement dans les paroisses pour les contraindre au paiement des impositions des tailles, que leur honoraire soit réduit aux 10 sols et leur nour- riture, ou 20 sols pour tout. Ces sortes de personnes, qui restent le plus souvent à la charge des collecteurs, aggravent considérable- ment leur sort. » Saint-Christophe-du-Foc. — Qu'on diminue les frais immenses de la perception des impôts, et qu'on adou- cisse les rigueurs de la contrainte contre les pauvres qui ne peuvent payer. » Bricqueville près la mer. 13 Sur l'assiette arbitraire des vingtièmes. La grande disproportion qui a toujours régné dans les vingtiè- mes est venue de ce que ceux qui faisaient cette répartition ne connaissaient pas les paroisses.» Digosville. — Que les commis- saires ou vérificateurs des vingtièmes devront à jamais abolir leur ignorance, leur arbitraire, leur manière d'opérer n'ayant que multiplié les abus, l'inégalité des cotes, avec une multiplicité de vexations qu'il serait trop long de détailler. » Yvetot. — Saint- Martin-du-Mesnil se plaint d'être la seule paroisse avec celle de Pierreville qui ont été vérifiées au pied la perche, et d'être par là considérablement augmentée, quoiqu'elle soit peut-être celle de toute la province la moins susceptible d'augmentation. — Pierre- ville consacre la plus grande partie de son cahier à la reproduction de plaintes déjà anciennes sur la surcharge exorbitante de ses vingtièmes, qui, en l'espace de dix ans, avaient subi une crue de 3,262 livres. U 1 En 1788, plusieurs paroisses des départements de Caen et de Vire, récemment vérifiées, se plaignent aussi de l'augmentation de leurs vingtièmes. Ce sont Saint' Contest, Beaumesnil, Sainl-Marlindon, Saint-Sever et Vaudry. Arch. dép., Calva dos, C 7970, 8019, 8075, 8078 et 8086. l'injustice de la corvée 513 14 Sur l'iniquité et le mauvais emploi de la prestation de la corvée. L'impôt représentatif de la corvée pour la confection et entre- tien des routes ne doit point, comme il a été pratiqué jusqu'ici, être porté sur le Tiers état seul. Ce sont les grands propriétaires qui profitent le plus en toutes manières des routes ; les seules lumières de la raison et de l'équité naturelle dictent assez qu'ils doivent donc contribuer à leur entretien, à raison de leurs pro- priétés.» Breuville. Il se commet de grands abus dans la percep- tion des impôts qu'on paie pour l'entretien des grandes routes; on payait la moitié moins pour les faire toutes neuves qu'on ne paie maintenant pour les entretenir. » Hémevez. — Que le clergé et la noblesse soient dans le cas de concourir à la confection, réparation et entretien des chemins. » Urville près Valognes. — Que les deniers levés pour la confection et entretien des chemins ne soient employés que pour les chemins les plus voisins des lieux où lesdits deniers auront été levés. » Belval.— Depuis l'imposition des cor- vées pour la confection des grandes routes, lebourg de Gavray etles paroisses du canton ont toujours payé des sommes très considé- rables,, sans qu'ils aient eu l'avantage des grandes routes, quelques réclamations qu'ils aient faites.» Gavray -bourg. — L'on voit cer- tains abus dans l'application des deniers publics destinés à la confection des grandes routes et autres ouvrages utiles au public, et l'on distrait journellement partie de ces deniers pour les em- ployer à des ouvrages qui ne sont absolument que pour la com- modité de quelques particuliers.» Montchaton.— Depuis l'époque où on a commencé à ouvrir des routes nouvelles, cette paroisse a toujours eu la douleur de contribuer à la prestation des impôts levés pour leur confection, sans avoir eu l'avantage de pouvoir s'en servir. » Percy. — Nous voyons avec douleur que depuis plus de 38 ans que nous payons des sommes considérables pour les grandes routes, il y en a cependant très peu de faites dans notre élection.» Rampan. — On a attenté à la propriété... en étendant d'abord la corvée et ensuite la prestation en argent représenta- tive de la corvée à des chemins peu utiles au public ou de pur agrément pour de simples particuliers, pendant qu'on néglige les plus nécessaires à l'agriculture et au commerce.» La Bloutière.^ 1 Voir les plaintes des municipalités de 1788 dans les états d'imposition d'Am- blie, Bavent, Colombelles. Colomby, Préaux, Saint-Sylvain, Troismonts départe- ment de Caen ; Courson, Lassy et Mesnil-Robert département de Vire Arch. dép., Calvados, C7820, 7832, 7872, 7873, 7958, 7983, 8001, 8032, 8042 et 8048. 33 514 ARBITRAIRE DES IMPOSITIONS SPÉCIALES A LA GENERALITE 15 Sur l'impôt territorial et sur l'impôt des bâtiments de justice. On a attenté à la propriété en... assujettissant le général d'une province à une charge locale qui ne devrait regarder que les habitants de la ville, du port ou du canton qu'elle peut seule- ment intéresser, comme entre autres les juridictions de Gaen auxquelles la paroisse ne ressortit pas et pour la reconstruction desquelles elle est néanmoins imposée. » La Bloutière. — La paroisse paie encore pour la réfection des ports de Granville et des prisons de Caen dont elle est éloignée de vingt lieues au moins. » Flottemanville près Valognes. — Nous payons un impôt pour l'entretien des bâtiments de justice et prisons, et nous voyons, tant à Torigni qu'à Saint-Lô, qu'on n'y fait aucune réparation ; que les criminels s'évadent des prisons de ces deux endroits qui sont dans le plus mauvais état. » Rampan. 16 Sur les abus dans la perception des aides et gabelles. 1° Gabelles et quart-bouillon. — Les entraves qu'on donne [à l'habitant] pour se procurer le sel dont il a besoin pour sa consommation sont innombrables il faut déclarer de combien de personnes son ménage est composé, qu'il n'y comprenne pas les enfants en dessous de 8 ans, en eût-il six à sept, qu'il signe sa déclaration, ou fasse attester par deux témoins ; que le curé et les collecteurs s'y joignent, qu'il paie trois feuilles de papier timbré pour la moindre provision, qu'il ne la transporte que depuis le lever jusqu'au coucher du soleil ; s'il en cède une légère portion à un malheureux voisin qui n'a pu lever la sienne, il sera ruiné ou condamné aux galères. » Carantilly. — Pour montrer les affreuses vexations que les pauvres habitants des paroisses situées sur le bord de la mer éprouvent de la part des tyranniques suppôts de la gabelle, on citera l'exemple de plusieurs nécessi- teux de cette paroisse qui, rencontrés avec quelques bouteilles d'eau de mer, ont été maltraités par ces employés et rançonnés, les uns à six francs, les autres à douze. » Le Rozel. — Parlerons- nous des vexations de la ferme générale ? Hélas, sous un roi bien- faisant, bon, père de son peuple, un malheureux habitant du bord Les \iujk des aides et gabelles 515 de la mer, qui n'a pas moyen d'acheter du pain, encore moins du sel, s'en va puiser une seule bouteille pour saler sa soupe il est arrêté, rançonné, quelquefois battu par les gardes de la ferme. Oui, il faut être sur les lieux, pour pouvoir se représenter la dureté de ces sangsues un malheureux père de famille, dont le fils était attaqué d'écrouelles, fut arrêté avec une pinte d'eau de mer qu'il devait faire boire à son enfant. » Surtainville. D 2° Aides et droits y réunis. — Qu'il soit apporté un adoucisse- ment aux lois dures qui ne permettent pas que de pauvres familles de campagne, souvent sans pain, aillent, quoique éloi- gnées quelquefois d'une auberge ou d'un cabaret d'une lieue, chercher chez un habitant du lieu un pot de cidre soit à prix d'argent, soit à titre d'aumône, pour cause de maladie ou pour d'autres besoins, sans être exposées, soit à une amende pécu- niaire, soit à une punition corporelle. » Clitourp. — Les perqui- sitions journalières des employés aux aides dans nos habitations, à visiter les endroits les plus cachés sous différents prétextes, nous glacent le cœur et l'âme... Nous sommes prêts à faire le sacrifice du quart de nos biens pour bannir à jamais les traitants... de nos foyers. Cela conserverait bien la vie à beaucoup d'hom- mes ; et combien de femmes enceintes qui se blessent à l'aspect de ces satellites toujours grondants et menaçants. »Hainneville. — Les importations de toutes espèces de productions, denrées, ouvrages, marchandises, vins, bières, cidres, poirés, grains, grenailles, fourrages doivent être permises dans tous les lieux du royaume et dégagées des déclarations, congés, visites et droits généralement quelconques. » Bricqueville-la-Blouette. J7 Sur les frais occasionnés par l'entretien des presbytères. La communauté représente qu'à joindre à toutes ses charges la plus onéreuse, quoi qu'accidentelle, est l'entretien ou recons- truction des presbytères. » Bréhal. — On voit avec douleur que 1 On trouve de nombreuses plaintes contre les vexations de L'impôt du sel dans les états d imposition de 1788 paroisses d'Ainayé-sur-Sculles, Bénmiville. Biéville- sur-Orne, Blainville, Bourguébus Maisoneelles-Pelvey, Saint-Georges-d'Aunay. Saint-Louet-sur-Seulles, Toufl'réville, Tracy-Bocage, Valcongrain, Villers- Bocage département de Caen et Saint-Pierre-la-Vieille département de Vire. Arch. dép.. Calvados, C 7819, 7835, 7839, 7843, 7847, 7891, 7931, 7973, 797G, 79%, 7999,8103, 9010 et 8076. 516 frais d'entretien des presbytères MM. les curés exigent que leurs paroissiens leur fassent des pres- bytères quelquefois plus beaux que des châteaux, qui coûtent des sommes immenses,, ce qui met fort souvent de pauvres paroissiens dans la dernière misère, pendant que MM. les curés et bénéficiers sont dans l'opulence. » Mesnil-Bonnant. — Nos députés représenteront combien il est onéreux pour les paroisses d'être obligées de bâtir les presbytères à leurs frais, et combien il résulte d'abus à cet égard. On est presque obligé de les recons- truire à chaque mutation ; les architectes nommés par les paroisses pour faire les visites sont intéressés à ce qu'il se fasse des recons- tructions ; à ce moyen, le plus petit défaut les fait déclarer mau- vais un ouvrage qui pourrait subsister cent ans...»Saint-Nicolas- de-Granville. — Que les possédant -fonds soient déchargés de la reconstruction et de l'entretien des presbytères, en considération de ce que les curés, ordinairement les plus riches de leurs pa- roisses, sont plus en état d'en faire la dépense que les proprié- taires chargés d'impôts et souvent de famille ; d'ailleurs les curés veilleront mieux à leur entretien. La communauté en éprouve aujourd'hui toute la rigueur et la charbe, ayant à payer pour la reconstruction de son presbytère une somme de 3,000 livres. » Acqueville. — Après la mort d'un curé, son successeur ruine quelquefois une paroisse, pour réparer et mettre à neuf un pres- bytère. » Herqueville. — La paroisse se trouve maintenant désolée par une surcharge qui lui tombe pour réparation de son presbytère qui se monte à une somme de 2,000 livres et plus. » La Ghapelle-au-Moine. l 18 Sur les dîmes. Nous demandons la suppression des dîmes en accordant à MM. les curés du royaume une pension honnête et suffisante... Si les Etats généraux conviennent à continuer les dîmes, qu'elles soient réglées d'une manière certaine, particulièrement les inso- lites, et qu'elles soient payées conformément à l'arrêt du Parle- ment de 1784. » Baudreville. — L'impôt des dîmes, qui, bien 1 Voir ces mêmes plaintes dans les états d'imposition des municipalités d'Authie, Bourguébus, Canteloup, Mouen, Saint-Laurent-de-Condel département de Caen ; Ardais, Courson, La Rocque, Saint-Jean-le-Blanc, Sainte-Marie-Outreleau et Le Theil département de Vire. Arch. dép., Calvados, C 7826, 7817, 7861, 7944, 7975, 8015, 8032, 8063, 8072, 8081 et 8082. LES DÎMES 517 apprécié, comprend le cinquième, même le quart des productions de chaque paroisse, demande qu'il soit modifié, de manière qu'il soit moins onéreux au peuple, déjà beaucoup surchargé d'im- pôts. » Breuville. — Les gros décimateurs, dans la majeure partie de nos paroisses du Bocage, ont à peu près un sixième du revenu, et ne nous donnent que peu de secours. » Theurteville- au-Bocage. — Les dîmes emportent le produit effectif du cin- quième au moins des fonds en culture...» Annoville-Tourneville. — On paie dans cette paroisse les dîmes à l'onzième. »Tourville. — Le sieur abbé de Cherbourg, ainsi que MM. les chanoines de Coutances, possèdent également toutes les grosses dîmes sans payer aucun impôt et sans faire aucun secours. » Gatteville. — [La communauté] ne voit pas avec moins de peine un gros déci- mateur enlever annuellement la moitié des dîmes de sa paroisse, sans y faire aucune aumône, ni contribuer à ses charges.» Saint- Maurice. — Les mercredis de chaque semaine, à l'issue du caté- chisme, il y a plus de 60 ou 70 enfants à l'aumône du curé, qui ne jouit que d'un sixième des grosses et partie des menues dîmes de la paroisse ; le surplus appartient aux religieux de Savigny, ordre de Citeaux, diocèse d'Avranches, et à l'abbaye des cha- noines réguliers de Saint-Lô, qui n'ont jamais donné la moindre chose aux pauvres de cette paroisse, ni fait aucun bien.» Quettre- ville.— Les sieurs religieux de l'abbaye de Belle-Etoile, éloignée de ladite paroisse de quinze lieues, étant propriétaires des deux tiers [des dîmes], ne font aucune espèce de charité aux pauvres, et ne chargent pas les fermiers de les faire.» Mesnil-Villeman. — Que toutes dîmes insolites, telles qu'elles puissent être, à l'excep- tion uniquement des dîmes de froment, seigle, orge, avoine soient supprimées. » Saint-Martin-de-Bonfossé. — Que les dîmes... soient restreintes, surtout relativement aux insolites, qui pour la majeure partie sont de pure usurpation. » Fresville. — Que l'on fasse cesser la diversité de jurisprudence sur la perception de l'impôt décimal, et que les fruits récoltés en vert et en sec, desti- nés à nourrir les bestiaux employés à la culture des terres, en soient partout exempts. » Le Rozel. 19 Sun l'aggravation des exigences en matière de redevances seigneuriales. Les taillables sont chargés en des sommes considérables pour le paiement des rentes seigneuriales dues à M. le prince de Monaco, f>18 AGGRAVATION DES EXIGENCES SEIGNEURIALES sur lesquelles ledit seigneur n'en fait aucunes déductions, depuis plusieurs années, au contraire exige qu'ils lui soient payés en la nouvelle mesure, ce qui est une aggravation considérable, et qui oblige le laboureur et paysan à vendre leur propre substance. » Moyon. — Qu'il soit fait un assurant général et invariable pour les rentes seigneuriales des engrais, volailles, pains et œufs. Les gélines étant jadis payées à 6 sols, ensuite à 8 sols, les chapons à 18 sols, aujourd'hui les receveurs les font payer 20 sols la géline et 25 sols les chapons gras, ce qui augmente quatre fois le prix. On demande la réduction à un prix fixe, afin d'ôter aux rece- veurs toute occasion d'usurpation. Fourneaux. — Le receveur général du prince de Monaco depuis 1769 augmente les rentes seigneuriales de moitié en chapons et guélines. Cet objet de sur- charge cause beaucoup de peine aux vassaux dudit seigneur. » Montbertrand. D Les plaintes contre les exactions fiscales des agents du prince de Monaco se reproduisirent en 1790 auprès de l'Assemblée nationale on les trouve consignées dans les cartons du Comité des droits féodaux. Voir la requête des paroisses de Moyon, Tessy, Villebaudon, Mesnil-Opac, Beaucoudrey, du 17 février 1790. Arch. nat., Dxiv5. — Les habitants, y est-il dit, payaient [en vertu d'inféodations anciennes] des rentes en froment et avoine à raison de 8 mettants le quartier, chaque mettant com- posé de 12 pots une chopine. Les agents du prince ont tout à coup doublé la mesure ». — Le futur général Dagobert, alors major du bataillon des chevaliers royaux du Dauphiné, envoyait de Romans au président de l'Assemblée nationale, le 27 février 1790, des plaintes contre les vexations féodales d'un M, de Beaugendre, possesseur de deux fiefs dans la paroisse de La Chapelle-Enjuger, qui ne cessait de tourmenter ses vassaux et de les cumuler de frais pour faire renouveler les aveux pour faire revivre des redevances éteintes ou amorties ». Ibid., D xiv 5, lj Les rentes seigneuriales consistaient parfois en redevances d'espèces assez bizarres. Le Senécal, contrôleur des vingtièmes, signale parmi les rentes que la paroisse de Bellengreville, près Caen, devait à son seigneur en 1781, outre les bois seaux de froment ou d'orge, les chapons et les œufs, un quartier de veau, une culotte d'agneau, deux livres de sucre, une demi-livre de poivre, un quarteron de cannelle, Arch. dép., Calvados, C 5187- AUGMENTATION DES RENTES SEIGNEURIALES 519 20 Sur les réclamations des arrérages des rentes seigneuriales. Le seigneur, pour le bien de ses sujets, qui ne pouvaient payer annuellement leurs rentes, a laissé quantité d'arrérages der- rière sic. Si les héritiers, lorsque les affaires seront finies, exi- gent les arrérages..., la plus grande partie seront obligés d'aban- donner leurs propriétés. » La Beslière. — Ce qui a réduit la pa- roisse à la misère, ce sont des arrêts [de paiement de rentes qui ont duré pendant seize années. Au levé d'iceux, les vassaux en grande partie ont été forcés de les payer, avec des frais considé- rables, frais faits par des sergents, et qu'ils ont payés aux dépens de leur plus nécessaire et en vendant la majeure partie de leurs fonds par de nouveaux arrêts. Ces infortunés habitants vont encore se trouver en arrière de cinq années qui vont échoir au jour Saint-Michel 1789 c'est là le coup fatal qui va forcer la majeure partie desdits habitants d'abandonner ce qui leur reste de fonds et d'aller chercher un autre asile. » Montaigu-les-Bois. Voir Bridrey, ouu. cité, tome I, p. 158, note 3. 21 Sur la non-déduction des vingtièmes des rentes seigneuriales. Qu'on ne perde pas de vue que depuis l'année 1769 les seigneurs des paroisses se sont dits en droit de ne point diminuer à leurs vassaux les dixièmes sur les rentes seigneuriales. » Dangy. — Nous nous plaignons que les seigneurs, depuis au moins vingt- cinq années, ne nous ont point diminué les dixièmes des rentes seigneuriales, ce qui nous a été à grand charge et nous a emporté notre substance. » Carantilly. — Il est surprenant que depuis douze ou quinze ans que les dixièmes ont été haussés sur tous les possédant-fonds des paroisses, que les seigneursdes paroisses se soient fait une loi de ne rabattre aucun dixième à leurs vas- saux sur les rentes qu'ils leur payent annuellement, comme étant presque tous fieffataires des seigneurs, ce qui fait que le peuple paye annuellement deux dixièmes sur le revenu de leurs biens. » Hémevez. — D'après les anciennes et nouvelles décla- rations concernant les vingtièmes, l'on a vu se lever des contes- tations dispendieuses et funestes entre les seigneurs d'une part, et leurs vassaux de l'autre, les seigneurs refusant de diminuer à leurs vassaux les vingtièmes des rentes, que ceux-ci leur doivent 5*20 ' TREIZIÈMES ET SERVICE DE PREVOTE pour des terres qu'ils tiennent d'eux en vassalité ; et les vassaux prétendant de leur côté que les seigneurs doivent leur en faire déduction, puis qu'ils payent les vingtièmes comme si leurs biens n'avaient pas été grevés de rentes seigneuriales. Ces contesta- tions ont imposé aux pauvres la loi de payer et de se taire ; les riches ont plaidé et ont irrité leur seigneur contre leurs parois- siens ; et de là le mal qui en est résulté, injustice envers le pauvre, animosité et ressentiment envers le reste des habitants. » Biville. — Que les propriétaires de rentes seigneuriales qui n'ont point déclaré leurs gages-pièges et qui, par conséquent, n'en paient pas de dixièmes, en doivent faire la déduction aux débiteurs qui, dans la confiance qu'elle leur serait faite, n'en ont point demandé la défalcation dans leurs déclarations. » Saint-Nicolas- de-Coutances. — Voir Bridrey, tome I, p. 300, note 1. l 22 Sur les treizièmes ou droits de lods et ventes. Seront tenus les propriétaires des fiefs de passer leur déclara- tion de la valeur de leurs gages exigés pour une année commune sur les cinq dernières années, des treizièmes et droits de lots et ventes par eux perçus ou dûs percevoir.» Gavray. — Le Tiers état observe que, si quelqu'un de ses membres, après beaucoup de peines et d'épargnes, peut acquérir un champ de terre, ou il est clamé par le seigneur féodal, ou on lui fait payer le treizième, et même le treizième du treizième, sans aucune remise. »Crasville. — Les droits de treizième sur les échanges gênent considérable- ment les propriétaires et empêchent quantité de mutations. » Montebourg. — Les treizièmes sont souvent considérables par les mutations fréquentes qui se font dans cette paroisse. » Tour- ville. 2 23 Sur le service de prévôté. Les habitants sont sujets à rendre aveux et déclaration aux plaids des seigneurs et à la comparance ; ils doivent aussi le 1 En 1788, Neuville, paroisse voisine de Vire, se plaint déjà d'avoir à payer à son seigneur, année commune, 1,000 livres, sans aucune déduction de deniers royaux. Arch. dép., Calvados, C8052. 2 Presque partout ce droit de lods et ventes est fixé au douzième du prix princi- pal ; mais les seigneurs sont dans l'usage de faire la remise du quart. Ex. à Rures, Venoix, Saint-Contest, etc. Ibid., C5512, 5721, 5681. LES CORVÉES SEIGNEURIALES 521 service de prévôté. » Tourville. — [Que les seigneurs ne puissent] exiger de service de prévôté, qui est une chose ruineuse à leurs vassaux, auxquels ils tirent des sommes considérables dont ils paient leurs gens d'affaires. » Picauville. — Le receveur du prince de Monaco fait élire des prévôts chaque année pour faire le ser- vice de prévôté, s'accommode avec le vassal sur qui tombe la prévôté, et fait payer jusqu'à 50 et 60 livres par an.» Montber- trand. — Les seigneurs se font payer par leurs vassaux un dixième de leurs rentes, pour le service de prévôté, ce qui est une aggravation considérable. » Saussey. — Voir Bridrey, ouv. cité, tome I, p. 530, note 2. n 24 Sur les corvées seigneuriales. [La paroisse] doit charroyer tous les matériaux nécessaires pour la construction et entretien de la maison et basse-cour du seigneur qui a été brûlée il y a deux ans en intégrité, doit faire et charroyer ses foins, les fournitures de sa maison, des journées de charrue et les matériaux de son moulin. » La Beslière. — Les habitants doivent tous les ans curer les biefs et écluses du moulin, aller chercher les pièces de ce moulin même où le seigneur les achète, et les porter audit moulin. » Tourville. — Si les cahiers donnent peu de renseignements précis sur les droits de cette nature voir Bridrey, ouv. cité, tome I, p. 158, note 2, les vérifi- cations générales effectuées pour les vingtièmes dans certaines paroisses de la généralité de 1778 à 1782 attestent la survivance des corvées dans plus d'une d'entre elles à la veille de la Révo- lution... A Clécy, dont le comte de Vassy est seigneur patron, les habitants sont encore assujettis en 1781 et aux charrois des meules du moulin banal, curage des bieux, prise à eaux et répa- rations d'écluses, qui s'acquittent en nature et à réquisition. Arch. dép., Calvados, C 5803. — A Saint-Clair-de-Halouze, en 1782, on doit encore le charroi des meules et le curage des bieux ces charges sont parfois estimées en argent. Ibid., C 5861. 1 Le service de prévôté était dû par les masuriers, c'est-à-dire par les vassaux habitant une maison manable de la seigneurie. Ils étaient tenus d'élire, chaque année, l'un d'entre eux, nommé prévôt, chargé de percevoir les rentes dues au sei- gneur. En fait, celui-ci mettait la prévôté en adjudication ou en chargeait un homme à ses gages, et il exigeait de ses débiteurs, pour acquitter ce service, un dixième en sus de leurs rentes. 522 LES BANALITÉS DE MOULIN, FOLR ET PRESSOIR — Ces corvées ont toutefois disparu dans beaucoup de paroisses exemples à Authie, Venoix, Aignerville, Engran ville, etc. — Arch. dép., Calvados, C 5479, 5721, 5297 et 5351. 25 Sur les banalités de moulin, four et pressoir. Les banalités tant de moutures, fours que pressoirs favorisent les vexations et concussions que trop ordinaires de ceux qui les font valoir. »Bricqueville-la-Blouette. — Que les vassaux auront la liberté de moudre tout grain où bon leur semblera, sans être tenus de suivre la banalité. ..»Ouville.— Les paroissiens supplient d'abolir la banalité des moulins ou d'astreindre les meuniers à des lois strictes et tranquilles pour les banoniers sic, qui se trouvent déjà trop lésés du seizième qu'ils sont obligés de payer.» Saint-Malo-de-la-Lande. — Il est un droit banal dans cette pa- roisse, lequel est extrêmement à charge aux habitants. Il est relatif au moulin nommé de la Chevalerie ; soit que l'eau y manque dans l'été par la sécheresse, ou dans l'hiver à cause des glaces, ou qu'il se trouve noyé par des crues d'eau, on n'est pas moins obligé d'y porter et laisser séjourner en dépôt pendant 24 heures les grains destinés à faire farine, avant de les trans- porter dans une autre usine pour pouvoir s'en procurer ; on court à ce moyen le danger de les retirer dénaturés, ou, si les besoins sont urgents et qu'on manque aux formalités pour procurer du pain assez tôt à sa famille, on s'expose à une amende perçue et exercée avec la dernière dureté. » Saint-Romphaire. — Comme nous avons trop peu de moulins à faire farine, et que l'on en souffre beaucoup, surtout dans les années que les eaux sont bien des fois faibles, et surtout cette année, nous avons vu des familles nombreuses être huit jours sans pain, ne pouvant pas faire moudre leur blé. » Helleville. — On fera connaître [au roi] qu'il est bien dur à un malheureux d'être obligé de faire moudre son blé chez un meunier qui le vole, et cela parce que le seigneur l'assujettit à cette redevance. » Surtainville. — Le droit de bana- lité, auquel toute notre paroisse est sujette, est la plus singulière et la plus criante vexation des seigneurs envers leurs vassaux. Un malheureux laboureur, épuisé, pour ainsi dire, par toutes les charges auxquelles son petit territoire est assujetti, est encore obligé et contraint de faire moudre le peu qui lui reste pour sa LES MÉFAITS DES COLOMBIERS 523 subsistance à un moulin banal, d'où il ne rapporte souvent qu'un huitième et quelque fois même moins. Saint-Marcouf- de-1'Isle. — La banalité du moulin Lévêque auquel le fermier fieffataire dudit moulin vient d'assujettir la paroisse par le gain d'un procès qui a ruiné celle-ci, devient de jour en jour plus dure par la sévérité et la malhonnêteté des procédés du meunier. La Ferrière-Harang. — Lesmuniers sic tiennent en captivité les vassaux. » Montbertrand. l 26 Sur les ravages dûs à la multiplicité des colombiers. Que les ordonnances concernant les colombiers soient remises en vigueur ; tout le monde s'avise dans la paroisse de construire des fuies ou volières sans droit ni qualité, ce qui fait un grand tort aux laboureurs. » Brainville. — Qu'il soit discuté à l'Assem- blée sur le droit de colombier et que ceux où il se trouvera établi, il soit ordonné qu'ils soient bouchés ou grillés pendant la semence ec récolte, afin que leurs terres ne soient point dessumensées sic ni leurs récoltes battues sur leurs terres. »Longueville. — Les sei- gneurs ont chacun leur colombier et volière, en sorte que la communauté de cette paroisse est au centre de six tours..., qui fournissent une quantité prodigieuse de pigeons qui ne sont enfermés en aucune saison de l'année, ce qui fait tort au labou- reur.» Saint-Planchers.— Douze ou quinze colombiers et volières, sont si garnis de pigeons qu'ils sont obligés d'avoir toujours des gardes pour conserver leurs récoltes et d'en placer plusieurs dans chaque champ. » Pierreville. - — Cette paroisse est encore affligée et pillée par les pigeons voraces de trois colombiers qui semblent être de concert pour absorber les grains de toutes espèces, il faut les garder constamment et encore trop souvent on ne peut réussir à les chasser. » Le Rozel. — Des seigneurs humains avaient autrefois fait raser les colombiers de dessus leurs terres ; nous nous rappelons avec respect le souvenir de la l Les vérificateurs des vingtièmes, dans quelques-unes des paroisses vérifiées de 1778 à 1782, constatent la disparition des banalités. Ex. à Authie, Venoix, Giber- ville, Bellengreville, Saint-Contest, Aignerville, Engranville ; à Bures et à Monde ville, on ne trouve que la banalité du four ; à Beaumesnil, à Cléry el à Saint-CIair- de-Halouze, la banalité du moulin les vassaux doivent aller y moudre au seizième boisseau ». Arch. dép., Calvados, C 5479, 5721, 5396, 5487, 5681, 5297, 5351 - 5512. 5641 - 5777, 5803, 5861. 524 LES DROITS DE garenne et de chasse maison de Longueville, à laquelle nous devons le bienfait d'avoir fait détruire ceux qui étaient sur ses terres et renoncé à ce pri- vilège ; comment se fait-il que de simples gentilshommes, sur des terres roturières, aient des pigeons dans des colombiers ou autres retraites, qui dévastent nos moissons? Faire des procès pour les détruire, il faut du moyen, des ressources on est pillé, on souffre, on se plaint, enfin, on se tait. » Surtainville. ^ 27 Sur les droits de garenne et de chasse. Que les garennes des seigneurs, et principalement ceux qui ne sont point sur le bord de la mer soient closes et fermées par des murs qui auront six pieds de fondement et six pieds d'élévation au-dessus des terres, afin de pouvoir contenir leurs lapins. Que le particulier qui aura le malheur d'avoir de ce gibier dans sa terre ait la liberté de le détruire. » Martinvast. — Les lapins dé- pouillent les blés en vert dans tout l'arrondissement qui avoisine la garenne ; ils le coupent quand le blé est monté en tuyaux, ou ils le mangent quand il est coupé, jusqu'à ce que la gerbe soit enlevée, si le propriétaire ne fait pas garder ses récoltes nuit et j our. » Biville. — Il est une autre espèce de droit non moins révol- tant, non moins à charge à l'agriculture, le droit de garennes. Par quelle fatalité la satisfaction et les plaisirs des possédant -fiefs sont-ils toujours inhérents à la spoliation du cultivateur? Pour- quoi ces peuplades de lapins autour du royaume, dont les fuyards vont exercer leurs dégâts dans les campagnes? Pourquoi ne sont-elles pas murées, au vœu des ordonnances? » Saint- Waast- la-Hougue.— Les seigneurs permettent ou ordonnent à leurs do- mestiques de chasser avec nombre de chiens en toutes saisons, ce qui cause [aux habitants] une douleur extrême et un tort considérable, dont ils ne peuvent que gémir en secret.» Sain t- 1 Voir des plaintes analogues formulées en 1788 par les municipalités de Ber- nières-sur-Mer et de Villers- Bocage département de Caen. Arch. dép., Calvados, C 7837 et 8010. — Une sentence de la Maîtrise des eaux et forêts de Caen, du 28 juillet 1787, avait prononcé condamnation contre le seigneur d'Airan, Baudre de Saint- Enoux, qui avait fait afficher aux églises d'Airan, Moult. Canteloup, Croissanville, et au marché d'Argences^ un placard intitulé Secours à l'humanité », où il invitait ses vassaux à venir concourir à la destruction pleine et entière des pigeons que ren- fermaient ses quatre colombiers, dont il leur donnerait les clefs». Lamare, Mémoires, p. 208-209. l'existence d'un prolétariat rural 525 Jean-des-Champs. — Que des lois sévères et des précautions actives empêchent l'abus de la chasse et que les malheureux cultivateurs ne voient plus leurs champs ravagés et leurs récoltes détruites par ces oisifs dangereux qui osent même menacer les laboureurs qui les surprennent et se plaignent de leurs excès. » LeVretot. M 28 Sur l'existence d'un prolétariat rural. A Carpiquet, les trois quarts des habitants sont journaliers sans aucune propriété et à charge à la paroisse. Arch. dép. Cal- vados, C 7863. — A Maisoncelles-sur-Ajon, presque tous les habitants sont journaliers et même souvent manquent d'ou- vrage ou sont obligés de se réduire à filer du coton pour subvenir à leurs besoins et à la subsistance de leur famille» Ibid., C 7932.— A Mal tôt, il n'y a guère que des journaliers qui, selon les circons- tances et les saisons, sont dans un temps maçons, couvreurs, charpentiers, dans d'autres batteurs en grange, valets de har- nais, etc.» Ibid., C 7934. — A Monts, les habitants sont pour la plupart de pauvres journaliers chargés d'enfants qui mendient leur pain». Ibid.,C 7943. — A Neuilly-le-Malherbe, ils sont tous journaliers n'ayant pour la plupart qu'une salle et un petit jardin, encore tous n'en ont pas ». Ibid., C 7949. — A Saint - Vaast, le plus grand nombre des habitants n'a d'autres occu- pations que de travailler à leurs journées ». Ibid., C 7984. — A Courson et à la Lande- Vaumont, une partie des habitants sont obligés d'aller gagner leur vie au dehors comme rémouleurs et chaudronniers. Ibid., C 8032 et 8041. — Neuville renferme une quarantaine de malheureux manœuvres, qui n'ont d'autre fortune que leur pelle et leur pioche ». Ibid., C 8052. — A Rully, plusieurs de ceux qui sont imposés de 6 à 10 sols au rôle de la taille, sont obligés d'aller mendier leur pain. Ibid., C 8066. — A Saint-Pierre-la-Vieille, la plus grande partie des 1 Sur les ravages causés par les lapins, renards, biches, sangliers, etc., dans les paroisses des départements de Caen et de Vire en 1788, voir les états d'impositions d'Amayé-sur-Orne, Barbery, La Bigne, Espins, Fresnay-le-Puceux, Grimbosq, Jurques, Maizet, Les Moutiers, Mutrécy, Saint-Georges-d'Aunay, Saint-Laurent-de- Condel, Danvou, Ondefontaine, Saint-Denis-Maisoncelles et Saint-Sever. Arch. dép., Calvados, C 7818, 7829, 7840, 7887, 7900, 7908, 7918, 7933, 7947, 7948, 7973, 7975, 8033, 8053, 8069 et 8078. 526 l'avarice des dégimateurs et l'abus des déports habitants sont journaliers ou fileurs de coton ; les journaliers gagnent 3 ou 4 sols par jour et les fileurs de coton depuis 5 à 8, sur quoi il faut se nourrir eux et leurs enfants. Il y a au moins 50 familles dans la dernière misère sur 234 taillables et à la charge de ceux qui ont un peu de bien ». Arch. dép., Calvados, C 8076. 29 Sur l'avarice des décimateurs et l'abus des déports. Remontrent les habitants que dans la plupart des paroisses de la campagne, ce sont les seigneurs-évêques, les abbés, les cha- pitres qui possèdent les dîmes que l'on a appelées de tout temps le patrimoine des pauvres, et que cependant il ne s'y fait en leur faveur aucunes distributions de la part de ces gros décimateurs sur un revenu si considérable qu'ils tirent de ces paroisses, et qu'ainsi les pauvres, qui sont partout en grand nombre, restent à la charge des curés et des habitants. » Biville. — Ce sont des déci- mateurs étrangers, qui perçoivent toutes les dîmes ; ils ne font aucun bien dans la paroisse, laissant au sieur curé pour sa part le soin et la charge des pauvres et des misérables. » Le Rozel. — Vous, codécimateur, où placez -vous vos aumônes, et pourquoi l'indigent dont vous dépouillez le pasteur, n'y participe-t-il pas? Vous, Bénédictins de Fécamp, décimateurs de cette paroisse, y avez-vous jamais fait l'aumône? » Saint-Waast-la-Hougue. — Que l'on anéantisse et supprime entièrement les déports en Normandie il est affreux et contre toutes les lois qu'un évêque, à chaque mutation, prenne le revenu d'une année de cure et se dispense de faire l'aumône, par une clause générale que ses agents ne manquent pas d'insérer dans les adjudications publi- ques qu'ils font faire desdits déports..., de manière que les curés... ne peuvent soulager à leur gré la misère des pauvres, dont ils sont journellement les témoins oculaires. » Emondeville. — Le déport n'a pour titre que l'usurpation surannée. L'année de vacance, on loue les dîmes à l'encan, on y attache la desserte de la paroisse, l'on reçoit pour ce les enchères au rabais. Quelle part, évêque de Coutances, avez-vous faite aux pauvres de ces paroisses dont vous avez récolté les dîmes? Ils y auraient parti- cipé si leurs curés n'eussent permuté et ne fussent décédés. Vous avez tout enlevé, tout consumé ; les communautés ont été contraintes de suppléer à votre défaut de charité. Quelle injustice LA MENDICITE 527 dans le titre, quelle indécence dans la desserte, quelle inhuma- nité dans l'administration ! » Saint- Waast-la-Hougue. 30 Sur la terreur causée par la mendicité. Obligation à chaque paroisse de nourrir ses pauvres, ce qui peut empêcher de beaucoup le coquinisme, et diminuer le nom- bre des vagabonds.» Annoville-Tourneville. — On voit tous les jours dans nos campagnes des pauvres de huit à dix lieues. Qu'est-ce qui peut faire écarter ces gens si loin ? Y a-t-il paroisse qui ne soit capable de nourrir ses pauvres? Il y en a parmi eux qui ne sortent que pour voler ; si on les voit, on ne sait d'où ils sont et ils ne vont pas revenir dans le hameau où ils ont volé. » Hocquigny. — Nombre de mendiants répandus dans le pays, comme incendiés ou grêlés, forcent l'aumône et sont dangereux. » Saint-Pierre-du-Fresne. — Comme il arrive très souvent que des voleurs se couvrent de l'habit d'un pauvre mendiant, il paraît qu'il serait bien avantageux pour l'Etat qu'on n'en souffrît aucun. » Notre-Dame-des-Bois-d'Elle. — L'abus de la mendicité est un fléau dans les campagnes. » Montchaton. * 31 Sur les mesures proposées pour l'extinction de la mendicité. Aucun pauvre ne pourra mendier, et celui qui sera trouvé mendiant sera arrêté et constitué prisonnier comme vagabond et sans aveu. » Gavray. — Qu'il ne soit permis à aucun pauvre de sortir de sa paroisse pour mendier, sous peine d'être arrêté. » Hocquigny. — Le coquinisme ne fait de progrès de jour en jour que parce que les auteurs des délits ne sont pas punis, ils le se- raient infailliblement, si on parvenait à les arrêter. » Rideau- ville. 1 Voir les plaintes formulées à ce sujet, à la suiie de son état d'imposition, en 1788, par la municipalité de Neuville, près Vire Cette paroisse, si voisine de la Ville, est continuellement fatiguée par l'importunité d'une multitude de pauvres qui descendent de la ville, à qui elle est forcée de donner tantôt par les sentiments dhu- manité, tantôt par ceux de la crainte ». Arch. dép., Calvados, C 8052. 528 • LE PARTAGE DES BIENS COMMUNAUX 32 Sun le partage des biens communaux au profit des possédant-fonds. Que tous les biens communaux soient partagés par tête entre les usagers, afin de mettre cette portion considérable de terres en valeur et la rendre profitable à ses propriétaires. » La Haye- Bellefond. — Ce marais serait d'un grand avantage aux habi- tants de ces paroisses y ayant droit, si à leur désir et selon leurs vœux, il se trouvait partagé entre eux en proportion des proprié- tés de chacun. » Saint-Martin-le-Vieux. — Que les biens com- munaux soient partagés, et que chacun soit forcé de clore sa part. » Gonneville. SOURCES DU CAHIER DU BAILLIAGE DE CAEN 529 APPENDICE III SOURCES DES DEUX CAHIERS GENERAUX DU TIERS ÉTAT DES BAILLIAGES DE CAEN ET DE COUTANCES Cahier des doléances réunies du Tiers état du bailliage de Caen et de ses quatre bailliages secondaires, Bayeux, Falaise, Torigni et Vire. Introduction inspirée par Torigni apO, Introduction. Constitution Bayeux a p, i, art. 1 initio et art. 2 fondus. Bayeux a p, i, art. 20. Caen a p, i, art. 3. Vire a p, art. 4 alinéa 2 abrégé. Caen a p, i, art. 14. Peut-être inspiré par Vire a p, art. 3 al. 2. Caen a p, i, art. 1. Caen a p, i, art. 8. Bayeux a p, i, art. 17, pour la première partie ; Vire a p, art. 13 al. 2 pour la seconde partie. Art. 10. Bayeux a p, i, art. 16 un peu modifié, pour la première partie ; la seconde partie inspirée par Falaise a p, iv-, art. 16 et Torigni a p, art. 42. Art. 1 1 . Inspiré par Falaise a p, iv1, art. 3, Bayeux a p, xviii, art. 2, Torigni a p, art. 24 in fine, Bayeux a p, xviii, art. 1 in fine, ces divers articles amalgamés. Art. 12. Caen a p, ii, art. 78, pour les deux premiers tiers ; Bayeux a p, xiï, art. 1, pour le dernier. 1 AP désigne, par abréviation, le cahier de Y Assemblée préliminaire de chacun des cinq bailliages principal de Caen, et secondaires de Bayeux, Falaise, Torigni et Vire, qui ont formé le ressort électoral du badliage de Caen pour la convocation des Etats généraux de 1789. Art. 1 . Art. 2. Art. 3. Art. 4. Art. 5. Art. 6. Art. 7 . Art. 8. Art. 9. 530 CONSTITUTION, SUBSIDES ET PERCEPTION Art. 13. Caen a p, ii, art. 79 abrégé. Art. 14. Vire a p, art. 15, légèrement modifié, pour la première partie ; Bayeux a p, i, art. 23, pour la seconde. Art. 1 ù . Bayeux a p, i, art. 18. Art. 16. Caen a p, ii, art. 91. Art. 17. Nulle trace dans aucun des cinq cahiers d'assemblées préliminaires. Source probable Instructions en- voyées par M. le duc d'Orléans, etc., art. 3. M Art. 1 8 . Falaise a p, iv2, art. 8 modifié. Art. 19. Nulle trace de cet article dans aucun des cinq cahiers des assemblées préliminaires. Art. 20. Falaise a p, iv2, art. 4 modifié. Art. 21 . Bayeux a p, i, art. 22. Art. 22 . Caen a p, ii, art. 92 ; Falaise a p, iv2, art. 12 ; Torigni a p, art. 32 ; Bayeux a p, vu, art. 1. Art. 23 . Bayeux a p, i, art. 6 modifié. Art. 24. Vire a p, art. 4, alinéa 4 abrégé et al. 1 in fine. Art. 25 . Vire a p, art. 7 al. 3. Art. 26 . Falaise a p, ii, art. 1 ; Vire a p, art. 7 ; Caen a p, i, art. 9. Art. 27 . Bayeux a p, ii, art. 3 et 4 fondus. Subsides et perception. Art. 2 H . Falaise a p, iii, art. 1 initio, pour la première partie ; Bayeux a p, ii, art. 6 pour la seconde. Art. 29. Bayeux a p, ii, art. 7. Art. 30. Inspiré par Bayeux a p, i, art. 14. Art. 3 1 . Caen a p, ii, art. 19 modifié. Art. 32. Caen a p, n, art. 20. Art. 33. Caen a p, n, art. 21. ; 1 Les Instructions envoyées par M. le duc d'Orléans pour les personnes chargées de sa procuration aux assemblées des bailliages relatives aux Etats généraux, s. I. n. d. Bibl. liât., LI 39/1379, ainsi que la Circulaire adressée aux curés, au nom du duc d'Or- léans, par M. de Limon, contrôleur général du prince, 7 mars 1789 Ibid., Lb 39/1378, ont du inspirer surtout les cahiers des paroisses des bailliages de Mortain et de Tinchebrai, apanage du duc d'Orléans. C'est tout au moins une hypothèse qu'il est impossible de vérifier, vu la disparition de ces cahiers. — C'est aux Instructions qu'est très probablement emprunté le vœu de l'articie 17 du cahier général du bail- liage de Caen, relatif à l'interdction de la violation du secret des lettres. L'article 3 de ct-s Instructions était ainsi conçu Le respect le plus absolu pour toute lettre confiée à la poste, sera pareillement ordonné. On prendra les moyens les plu- sûrs d'empêcher qu'il n'y soit porté atteinte. » Art. 35. Art. 3 6 . Art. 37. Art. 3 S . Art. 39. DOMAINES, DROITS FÉODAUX, COMMENCE 531 Domaines. Art. 34. Caen a p, ii, art. 24. Vire a p, art. 8, et Torigni a p, art. 40 fondus. Caen a p, ii, art. 22. Torigni a p, art. 27, pour la première partie ; Caen a p, ii, art. 9 abrégé, pour la seconde. Bayeux a p, xiv, art. 1. Inspiré par Falaise, a p, ni, art. 1. Droits féodaux et polices de chasse. Art. 40 . Caen a p, ii, art. 31 et 32, très abrégés et fondus. Art. 41 . Caen a p, ii, art. 33, très abrégé. Art. 42. Bayeux a p, ni, art. 1 initio et xv, art. 1, pour la pre- mière partie ; Caen a p, ii, art. 25, pour la fin. Art. 43 . Bayeux a p, xv, art. 2, modifié. Art. 44. Caen a p, ii, art. 23. Art. 45 . Caen a p, ii, art. 58 modifié. Commerce. Art. 46 . Caen a p, ii, art. 63. Art. 47 . Caen a p, ii, art. 65 pour la première partie et 64 pour la fin. Art. 48 . Caen a p, ii, art. 12. Art. 49 . Caen a p, ii, art. 66 abrégé. Art. 50 . Caen a p, ii, art. 61. Art. 5 1 . Caen a p, ii, art. 62. Art. 52. Caen a p, ii, art. 72. Art. 53 . Caen a p, ii, art. 76 modifié. Art. 54 . Falaise a p, v, art. 24. Art. 55. Falaise a p, v, art. 15. Art. 56 . Caen a p, m, art. 7 abrégé. Affaires bénéficiales Art. 5 7 . Vire a p, art. 12 initio, et Bayeux a p, iv, art. 1. Art. 5 8 . Caen a p, ii, art. 36 modifié. Art. 59. Torigni a p, art. 16. Art. 60 . Vire a p, art. 12 in fine. Art. 6 1 . Bayeux a p, iv, art. 11 et 12 fondus. Art. 62. Bayeux a p, iv, art. 13 initio ; Falaise a p, v, art. 14 initio. Art. 64. Art. 65. Art. 66. Art. 67. Art. 68. Art. 69. Art. 70. 532 AFFAIRES BÉNÉFICIAIRES, JUSTICE, TRAVAUX PUBLICS Art. 63. Caen a p, h, art. 44 modifié ; Bayeux a p, iv, art. 13 in fine ; Falaise a p, v, art. 14 in fine. Caen a p, ii, art. 46 modifié. Caen a p, ii, art. 40 abrégé. Caen a p, ii, art. 41 abrégé. Caen a p, ii, art. 42. Caen a p, ii, art. 43 modifié. Inspiré par Falaise a p, iv2, art. 14. Caen a p, ii, art. 75 ; Bayeux a p, xvii, art. 3 et 4. Justice. Art. 71 . Vire a p, art. 17, alinéa 1 initio. Art. 72 . Caen a p, i, art. 6 initio. Art. 73. Caen a p, i, art. 6 in fine. Art. 74 . Bayeux a p, v, art. 1 initio, pour la première partie ; Caen a p, i, art. 51 initio pour la seconde. Art. 75 . Bayeux a p, v, in fine abrégé ; Caen a p ii, art. 51 in fine. Art. 76 . Bayeux a p, v, art. 18. Art. 77 . Bayeux a p, v, art. 2 abrégé. Art. 78. Caen a p, ii, art. 54 légèrement modifié. Art. 79 . Caen a p, ii, art. 3. Art. 80. Caen a p, ii, art. 71. Art. 8 1 . Falaise a p, iv1, art. 15 initio; Bayeux a p, v, art. 17. Art. 82 . Bayeux a p, v, art. 11 initio. Art. 83. Falaise a p, v, art. 22. Art. 84. Caen a p, ii, art. 39. Ouvrages publics. Bayeux a p, xxi, art. 1 initio. Bayeux a p, xxi, art. 3. Bayeux a p, xxi, art. 2 initio. Caen a p, iii, art. 4 abrégé. Caen a p, ii, art. 94 abrégé. Décision de l'assemblée générale. Art. 85 Art. 86 Art. 87 Art. 88 Art. 89 Art.
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120rue Saint Martin 14110 Condé-sur-Noireau Écrire un avis. 11.2km de Flers. 5. Pompes Funèbres Gauquelin Voir la fiche détaillée. Afficher le numéro. Recherche du numéro, patientez SVP. La Béhuetterie 61800 Tinchebray Écrire un avis. 12.4km de Flers. 6. Marbrerie Sauvage Voir la fiche détaillée. Afficher le numéro. Recherche du numéro, patientez SVP. 51 place du Canada Dans le cadre des championnats régionaux de boxe amateur Elites, samedi 12 novembre, au sein du gymnase Robert Gossart de Condé-sur-Noireau Calvados, lors du gala de boxe organisé par le club pugilistique de Condé, présidé par Christian Gauquelin, Thomas Lacroix, jeune boxeur originaire de Condé-sur-Noireau, a une nouvelle fois prouvé son envie de gagner. Après plusieurs mois d'absence en raison d'une blessure grave survenue au début de l'année 2016, son retour sur le ring était très attendu par ses supporters, venus nombreux pour l'encourager. Prochaine étape Carentan Thomas Lacroix, catégorie senior -69 kg, double champion de Normandie en titre, s'est distingué en remportant son combat aux points, à la 3e reprise, sous un tonnerre de cri et d'applaudissements, devant son adversaire, Guillaume Becquin du BC Le Tréport Seine-Maritime. C'est dans une ambiance de folie que Thomas Lacroix, porté par son public, a décroché sa place en demi-finale qui se déroulera ce samedi 19 novembre à Carentan Manche. Christian Gauquelin et Alain Robbe, entraîneurs de Thomas, sont satisfaits de retrouver leur champion. "Pour son premier combat de la saison, Thomas a tenu ses promesses devant un adversaire qui boxait très bien. Thomas est bien parti pour garder son titre", ont-ils souligné. Cette soirée exceptionnelle a de nouveau été un véritable succès avec plus de 400 entrées. Papa dans la foulée Et comme un bonheur n'arrive jamais seul, Amélie Foucher, la femme de Thomas, a été transportée cette nuit à la maternité de Flers pour donner naissance à leur premier enfant, un petit garçon. A LIRE AUSSI.

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Lanouvelle municipalité tient à rappeler son soutien aux commerçants du marché hebdomadaire, qui a lieu chaque jeudi matin en centre-ville. Elle a Ellea lieu le mercredi et le samedi après-midi, de 14h à 17h et le jeudi de 18h30 à 20h ; des cours d'esquimautage complètent l'apprentissage technique le mercredi soir de 20h30 à 21h30 au centre aquatique de Condé-sur-Noireau. A ce propos, l'accueil réservé par la municipalité condéenne a toujours été exceptionnel (mise à disposition du plan d'eau, du centre aquatique TIRARD(Jules), propriétaire à Condé-sur-Noireau (Calvados), rue du Chêne. TOMERET, chef de division à la préfecture de l'Orne, à Alençon, rue de Lancrel, 18. TOURANGIN, ancien trésorier général, maire à Vingt-Hanaps, aux Mezières. TRIGER (Robert), docteur en droit, au Mans (Sarthe). TURENNE (Vte DE), conseiller-général, à Courtomer, au château de Courtomer. VANNIER

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Acceptation, par la Préfecture du Calvados, de la DÉMISSION DE M. BOISNE, comme maire de Condé-sur-Noireau, JUIN. la et 9 Juin. — SAINT-PIERRE-DU-FRESNE. — Le 1" juin, M. ROMAIN LEMAITRE donne sa démission de maire de la commune pour raison de santé. Le 9 du même mois, M. LÉON LEROY, adjoint, est élu maire de S'-Pierre-du-Fresne et M. Romain Lemaître, son

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Laredécouverte de la pensée sauvage, de l'arkhé, en est le premier facteur, elle s'inscrivait, pour Claude Levi-Strauss, dans la perspective d'une quadruple rupture : • avec l'Humanisme et l'idéologie du sujet, battu en brèche par les problématiques de l'inconscient, • avec la pensée évolutionniste et historiciste, il s’agira désormais plutôt que sur des procès linéaires,
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